Tram?Tiss veut encore croire au tram-train
Le consortium Tram?Tiss s?est fendu d?un courrier à l?autorité organisatrice le 13 avril lui rappelant le caractère « exécutoire » du contrat et demandant un rendez-vous Le nouveau président du conseil régional de la Réunion, l’UMP Denis Robert, n’a jamais dit explicitement qu’il abandonnait le projet de tram-train. Mais comme il s’est prononcé précisément contre ce projet, cela ne laisse aucune place au doute. Au point d’ailleurs que Tram’Tiss, le consortium (Bouygues TP, Veolia Transports, Colas, Axa, Bombardier) qui avait signé le 2 décembre un contrat de PPP de 45 ans pour ce projet de 1,6 milliard d’euros, s’est fendu d’un courrier à l’autorité organisatrice le 13 avril lui rappelant le caractère « exécutoire » du contrat et demandant un rendez-vous. Dix jours plus tard, pas de nouvelles. « Nous restons dans une position de dialogue et de recherche de solution, assure Inouk Moncorgé, le président de Tram’Tiss. Nous sommes peut-être naïfs, mais nous gardons espoir. » Le consortium peine à croire qu’en un trait de plume l’exécutif régional efface un projet aussi avancé. Les travaux pour cette ligne de 41 km au nord-est de l’île, entre Sainte-Marie et Saint-Paul (via Saint-Denis et l’aéroport, La Possession et Le Port), devaient en effet débuter à la fin de l’année.
S’il était l’un des projets phare du président sortant, le communiste Paul Vergès, ce projet de tram-train n’est pas sorti de nulle part. Il a derrière lui dix-sept années d’études, une inscription au schéma régional d’aménagement en 1995, les accords de Matignon (19 janvier 2007) lui accordant 435 millions d’euros de subventions d’Etat, la concrétisation d’un PPP, une inscription au plan de relance de l’économie, une garantie d’Etat à hauteur de 800 millions d’euros… Mais durant la campagne des régionales, le candidat UMP, qui n’a pas caché sa préférence pour la route, prônait lui son « Trans Eco Express », un projet de 2 000 bus estimé à 650 millions d’euros. Si bien qu’aujourd’hui il donne la priorité à la route du littoral, quitte à préciser qu’elle fera deux fois trois voies, au lieu des deux fois deux prévues, afin d’y insérer un TCSP. Peu de temps après son élection, il s’envole vers Paris dans le but de renégocier les accords de Matignon et de financer les 13 km de ce ruban de bitume entre Saint-Denis et La Possession avec les subventions du tram-train.
La situation juridique est malgré tout complexe, le contrat de PPP ayant été signé avec une clause suspensive de six mois, prévue pour « la transmission de documents financiers, notamment liés à un complément de fonds potentiellement en provenance de l’Etat », rappelle Inouk Moncorgé. Si bien qu’au 31 mai les parties doivent se revoir et peuvent soit démarrer le contrat, soit proroger la suspension par période de trois mois… Une possibilité ouverte en théorie indéfiniment ! Tram’Tiss attend donc le 31 mai pour agir, mais il a déjà réduit la voilure car les études environnementales avaient débuté en janvier, comme prévu. Une rupture entraînerait une demande d’indemnisation que le consortium n’a pas encore évaluée. Quant à la possibilité de faire rouler, plus tard, un tramway sur la route du littoral évoquée par Denis Robert, elle n’est sans doute pas techniquement impossible. Mais à quel prix ?
Cécile NANGERONI
Publié le 10/12/2024 - Marie-hélène Poingt