La Deutsche Bahn fait du constructeur allemand son candidat privilégié pour un contrat portant sur 300 trains. Mais l?affaire ne sera pas conclue avant l?été et les deux parties sont déjà en profond désaccord sur le prix Siemens a-t-il décroché la timbale ? Ou remporté une victoire à la Pyrrhus ? La question est posée après la récente annonce de la DB qui fait du constructeur bavarois son « candidat favori » pour une commande record, présentée comme la plus grosse de son histoire : pas moins de 300 trains sont en jeu. A première vue, donc, l’affaire est mirifique : le contrat se chiffre « en milliards d’euros ». Jamais, la compagnie allemande n’avait lancé opération d’une telle envergure : d’ici 2030, elle entend offrir un profond lifting à sa flotte. Ses trains interrégionaux de type IC et internationaux « Eurocity » vont prendre le chemin de la casse. Puis ce sera au tour des deux premières générations des trains à grande vitesse ICE.
« Même en cette période de difficultés économiques, nous accordons à la modernisation de notre parc la plus haute priorité », explique Rüdiger Grube. Pourtant, l’appel d’offres lancé il y a plus d’un an n’a pas affolé l’industrie ferroviaire. Seuls Siemens et Alstom ont répondu présents. Et encore : le dossier français s’est retrouvé rapidement hors jeu : beaucoup trop cher, affirme-t-on à Berlin. Car la Bahn a formulé des critères de prix très stricts : en confiant cette mégacommande à un seul constructeur, elle espère obtenir un tarif « de gros » et alléger ainsi le montant de sa facture. Le cahier des charges fixé par la compagnie prévoit ainsi que tous les trains soient construits à partir d’une plateforme identique. Seuls les motorisations ou les aménagements intérieurs différencieront alors un ICE d’un IC ou d’un EC. Cette formule, qui existe déjà dans l’industrie auto, devrait aussi permettre de réduire les coûts de maintenance, grâce aux nombreuses pièces de rechange communes. Mais si Siemens donne satisfaction sur ce point, la question du prix reste toujours en suspens. L’offre de la firme de Munich est évaluée à 6 milliards d’euros. Deux de plus que ce que la Bahn serait prête à mettre sur la table. Conséquence, ces derniers mois, le ton est monté : pour faire baisser les enchères, la compagnie a même menacé d’annuler l’appel d’offres et de confier une partie de la commande à Hitachi. A demi-mot, la Bahn accuse les industriels occidentaux de refuser le combat et de s’entendre sur son dos : Bombardier n’a ainsi pas pris part à la compétition, mais s’est associé à Siemens en tant que sous-traitant. Pour ne rien arranger, les deux parties sont à couteaux tirés depuis de très long mois à cause des fragilités anormales apparues sur les essieux des ICE. Résultat : si la DB négocie désormais exclusivement avec le constructeur bavarois, le contrat final, lui, ne sera pas signé avant l’été. D’ici là, le plus dur reste à faire et d’âpres discussions sont à prévoir. Du coup, Siemens accueille aujourd’hui son statut de « favori » avec une satisfaction toute modérée et se garde bien de crier victoire. « Cette décision est une étape importante mais nous ne sommes pas encore arrivés au but », commente prudemment le directeur de la branche transports, Hans-Jörg Grundmann.
Antoine HEULARD
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