Le rapport « particulier » qui épingle la RATP
Un rapport « particulier » de la Cour des comptes épingle sérieusement la gestion de la RATP. L?exploitation des bus de la Régie serait 50 % plus chère qu?à Lyon Dévoilé le 25 novembre par Bakchich Hebdo, un rapport « particulier » de la Cour des comptes épingle sérieusement la gestion de la RATP. Délibéré le 7 mai dernier, il vient donc de sortir – opportunément ? – alors que débutait, à l’Assemblée nationale, le débat sur le Grand Paris avec, projet majeur, la « double boucle » de métro. Ce rapport porte sur les exercices 2001-2007. Selon ce texte, la RATP « estime que ses investissements sont déficitaires mais soutient qu’aucun objectif de rentabilité ne lui serait demandé ». D’où cette remarque : « L’absence de calcul de rentabilité financière ne relève pas d’une approche d’entreprise. » Les magistrats émettent donc une réserve sur les comptes de tous ces exercices. Ils constatent que « les procédures d’achat ne sont pas encore conduites avec toute la rigueur nécessaire ». Le conseil d’administration n’aurait ainsi pas pris en compte l’avis défavorable de la Commission des marchés concernant le marché relatif à la rénovation du matériel ferroviaire MS 61 de la ligne A du RER. A la RATP, on s’étonne de la divulgation de ce « document de travail intermédiaire strictement confidentiel ». Et on souligne que les éléments rapportés donnent « une version volontairement tronquée, sortie de son contexte et polémique, d’un rapport d’étape qui ne saurait refléter la vision d’ensemble qui sera exprimée par la Cour des comptes dans ses conclusions définitives ». Cependant, Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, interrogé le 25 novembre, assure que ce rapport, même si la Cour n’en assure pas la publicité, n’est pas confidentiel.?Et la Cour, dans un communiqué du 26 novembre, précise que ce rapport est « définitif »… Sur le plan social, la Cour souligne par ailleurs que « le salaire moyen annuel brut a augmenté de 18,65 %, soit une augmentation moyenne de 3,1 % par an, un niveau sensiblement supérieur à l’inflation moyenne annuelle sur cette période », évaluée à 1,77 %. D’où cette remarque d’Hervé Mariton, député UMP, rapporteur du budget des Transports à l’Assemblée : « La première chose qu’on demandait au directeur de la RATP, c’était “pas de mouvement social, achetez la paix sociale”. Il faut que cela change. » Serait-ce la conséquence de tout cela ? Comparée aux autres entreprises de transport urbain, la RATP serait plus chère de 20 % sur l’exploitation du métro et 24 % sur celle du RER « par rapport à une moyenne hors Paris ». Et, pour le bus, plus chère de 50 % que Lyon ou encore davantage que le bus des grandes villes européennes. Réponse de la RATP : « En matière de transport urbain, tout exercice de comparaison des coûts est indispensable, mais doit être mis en perspective en tenant compte des différences des réseaux et de la géographie des territoires. » En ce qui concerne les trams, les coûts seraient comparables, « compte tenu de l’insertion urbaine plus complexe et plus dense en Ile-de-France et d’un nombre de voyageurs largement plus élevé sur les lignes gérées par la RATP ». Dans un contexte marqué par l’évaluation des projets sur le Grand Paris, une autre critique prend une résonance particulière. Elle porte sur « la surestimation de la rentabilité économique des projets de tramways ». Pour le T3 sur les Maréchaux, « la vitesse commerciale réelle, limitée à 16,5 km/h, est très inférieure à l’objectif inaccessible de 20 km/h, et donc peu supérieur à celle qu’assurait le bus PC1 en site propre (14,5 km/h) ». Un doute est aussi émis sur le devis présenté pour Métrophérique : 91 millions d’euros du kilomètre, quand Météor a coûté 140 millions. Soit 35 % de moins. « La RATP minimise vraisemblablement le coût du nouveau projet comme elle avait sous-estimé celui de Météor. » D’où cette recommandation : « Une telle étude préalable devrait être confiée à des experts extérieurs à la RATP, d’autant que la dévolution d’une nouvelle ligne appellera une mise en concurrence. » A la RATP, on se veut « confiant dans la teneur des conclusions que la Cour des comptes pourrait décider de publier dans son rapport public annuel ».
Pascal GRASSART