Wagon isolé : Fret SNCF mise tout sur son Swing
23 Sep 2008
SNCF , Fret , Exploitant , SNCF , Wagon
Mis à jour le 23 mai 2017
Le nouvel acronyme lancé par Fret SNCF constitue la dernière chance de l’opérateur historique d’équilibrer ses comptes et de gagner des nouveaux clients « Monsieur Armstrong, qu’est-ce que le swing ? », a un jour demandé une imprudente au grand génie de la trompette. Lapidaire, sa réponse est restée : « Madame, si vous avez à le demander, vous ne le saurez jamais ! ». Lorsqu’un de ses clients lui pose la même question, le patron du Fret, Luc Nadal, se garde bien d’être aussi cinglant, mais sur le fond la réponse pourrait rester la même. Swing, le « Service de wagon isolé nouvelle génération », vaste opération de séduction auprès des clients, constitue, après plusieurs années de restructuration, l’ultime chance d’équilibrer les comptes et de sauver le lotissement. Cette offre « nouvelle génération » – sorte de prolongement commercial du « haut débit ferroviaire » – repose en fait sur trois volets. Primo, plus de fiabilité, à savoir une diminution des délais d’acheminement et une possibilité de suivi des wagons à travers un portail informatisé et des (futurs) outils de géolocalisation. Secundo, plus de flexibilité. Pour les flux non prévisibles, Fret SNCF proposera un système de réservation unitaire sur Internet, jusqu’à J –2. Tertio, pour les autres clients, ceux dont les flux sont prévisibles, la SNCF propose la mise en place d’un « véritable partenariat » : « En cas d’engorgement de nos installations, nous donnerons priorité à leurs envois », précise le dossier de presse. Enfin, Swing prévoit un quatrième volet pour les expéditions à l’étranger. Le projet d’alliance paneuropéenne X-Rail, union de sept chemins de fer historiques, offrira un engagement de fiabilité de plus de 90 %, mais sa mise en place n’est pas encore programmée : « Les grandes régions économiques à desservir ont été définies. Nous visons le lancement de quelques relations européennes en 2009 », explique Luc Nadal. Les trois autres volets Swing devraient, quant à eux, être en place dès décembre 2008. Car il y a urgence. Bien que le lotissement constitue le principal atout de Fret SNCF, il représente également son plus gros point faible. Face à des concurrents centrés sur les trains complets – les activités de triage sont très lourdes en termes d’organisation –, l’opérateur historique se trouve de fait dans une situation de quasi-monopole sur un service dont les clients sont extrêmement friands pour la souplesse, le débit et les facilités de stockage qu’il propose. Sans le wagon isolé, Fret SNCF perd un avantage concurrentiel imparable. Mais c’est bien là le paradoxe. Avec 35 % des tonnages et 40 % de son chiffre d’affaires, le wagon isolé n’en est pas moins responsable de 70 % des pertes de la branche. Fret SNCF se retrouve donc prisonnier d’un service qui lui coûte beaucoup d’argent. D’où le programme de haut débit ferroviaire, annoncé en juin 2007 par Olivier Marembaud, qui se propose de rationaliser le mode de production à l’extrême autour de trois « hubs ». A partir de décembre, des flux à haut débit circuleront entre chacun de ses pôles, soit six ou sept liaisons inter-hubs par jour, qui permettront de massifier les lots et de réduire les coûts. « Il y a un véritable combat à mener auprès de RFF pour qu’ils incluent les plages travaux dans leur programmation des sillons. Mes sept relations inter-hubs ne peuvent fonctionner que si j’ai des bons sillons, fiables, étalés dans la journée », précise cependant Luc Nadal. En entrant dans l’ère du « wagon isolé nouvelle génération », Fret SNCF disposera en décembre d’un mode de production se voulant fiable, flexible et pérenne. Autrement dit : plus de droit à l’erreur. « L’approche commerciale constitue la deuxième étape de Swing. Très clairement, en 2009, il nous faudra aller chercher des nouveaux clients », souligne Luc Nadal, qui prévoit de cibler en priorité les alentours des plateformes de tri. Optimiste, le patron du Fret n’exclut toujours pas un retour à l’équilibre d’ici 2011. Mais tout cela est désormais entre les mains des clients. Si le Swing de la SNCF les laisse de marbre, il ne restera alors pas grand monde pour danser.
Guillaume KEMPF