Covoiturage : l'Ouest accélère
Le covoiturage est en vogue dans l’ouest de la France. Les aires dédiées fleurissent un peu partout et les entreprises attrapent le virus Le prix de l’essence a beau baisser, peu importe, l’Ouest en pince pour le covoiturage. Déjà amateurs avant la flambée du pétrole de l’an dernier, les Bretons s’y sont depuis franchement convertis. Le « covoitureur » devient même la coqueluche des services transport des grandes villes et des départements. Il présente l’avantage de vouloir se multiplier dans des proportions assez considérables, à frais réduits ! Le département de Loire-Atlantique fait partie des nouveaux adeptes du covoiturage. Il se lance cette année et va dépenser 300 000 euros. Au programme, la construction d’un site internet commun avec Nantes qui possède déjà le sien. Une opération proposée ensuite à Saint-Nazaire, déjà équipée, elle aussi. L’heure est à l’intervention publique. « Sur le sujet, nous nous voulons rassembleurs parce que l’utilisateur en a besoin. La multitude des sites existants, notamment privés comme 1,2,3envoiture.com, morcelle le public et diminue l’efficacité », indique Jacques Laissus, le directeur des transports au département de Loire-Atlantique. Le site du département voudra aussi s’intégrer à Destineo, le calculateur régional d’itinéraires de transports publics.
Le covoiturage, la Loire-Atlantique a moins l’idée de l’« organiser » que de le « faciliter ». Parmi les moyens mis en œuvre, il y aura surtout, outre le site internet, une cinquantaine d’aires de covoiturage labellisées. Dans une optique de connexion aux transports publics, elles seront positionnées « le long des lignes de cars du département, à des points d’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, de rabattement des transports à la demande et passage de circulations douces comme le vélo et la marche ». S’y ajouteront des emplacements simplement signalés d’un panneau, ceux déjà utilisés par des « covoitureurs » aux abords de bretelles d’autoroutes ou des ronds-points. Une officialisation en quelque sorte. Ainsi que des places de covoiturage choisies par les maires de petites communes et par les directeurs de grandes surfaces, surtout à l’abord de Nantes ou de Saint-Nazaire. « Le covoiturage est un vrai levier pour réduire notre circulation automobile. Nous remarquons que les salariés le pratiquent beaucoup tôt le matin ou tard le soir. Pour l’encourager, nous avons besoin de parkings réservés à l’échelle de l’aire urbaine : dans les entreprises, dans les communes autour de nous et dans les départements environnants », confirme Jean-François Retière, vice-président de Nantes-Métropole.
En matière de covoiturage, la Loire-Atlantique prend modèle sur le département voisin, le Morbihan. Lui aussi s’est en premier lieu appuyé sur un site « fédérateur », ouvert à tous et gratuit. Il l’offre aux entreprises. Lui aussi a beaucoup « officialisé » – et sécurisé – à coup de panneaux des emplacements de covoiturage « naturels », grappes de voitures immobilisées aux embranchements de grands axes routiers. Lui aussi a sollicité les directeurs de supermarchés. « 6 000 inscrits en juin dernier, 8 500 aujourd’hui alors que nous n’avons démarré qu’en 2006, raconte Michel L’huiguiner, directeur du service transport. Budget ? 140 000 euros cette année pour l’aménagement de trois ou quatre nouvelles aires bitumées, étiquetées, sécurisées. Nous en sommes à une trentaine et nous n’irons guère au-delà. Nous préférons simplement planter des panneaux là où il faut. »
La Loire-Atlantique, le Morbihan, sont des enfants de la dernière flambée du pétrole. Comme le Maine-et-Loire qui commence à mobiliser les covoitureurs potentiels autour d’Angers, Cholet, Saumur. 150 000 euros cette année pour construire ses aires officielles de covoiturage. La première est bientôt inaugurée près de Cholet. « Surtout 30 000 euros pour la communication ! », insiste Chantal Crezé, la « Madame covoiturage » du département. « Nous avons ouvert notre site en septembre 2007, juste avant l’envolée des prix à la pompe. Nous totalisons 2 555 inscrits. Le nombre a doublé en septembre quand nous avons communiqué pour le premier anniversaire. » Son objectif est de sensibiliser toutes les entreprises de plus de 50 salariés. Partout la visibilité du covoiturage, sa promotion, l’incitation à s’y adonner restent importantes. « Nous interpellons l’automobiliste. Nous affichons : le covoiturage, c’est pratique, économique, écologique », explique Sandrine Di Dio à Saint-Brieuc dans les Côtes d’Armor. Avec le Finistère et l’Ille-et-Vilaine, les Côtes d’Armor font partie des plus anciens du covoiturage. Après les sites internet, ils mettent aujourd’hui l’accent sur leurs aires de covoiturage. Les nouveaux panneaux fleurissent partout. « 120 000 euros par an pour cinq ans, selon notre schéma voté début 2007 et pour ouvrir trois à quatre aires par an », précise Sandrine Di Dio. Le département des Côtes d’Armor en est à une quinzaine. Il vient de lancer un appel aux communes pour cofinancer un programme supplémentaire. Le Finistère en est à 30. Il y consacre 550 000 euros par an.
Pour ces départements, le défi du covoiturage ne se limite pas aux grands axes de circulation. Ce n’est pas seulement une façon de prévenir les embouteillages dans leur villes-phares : Saint-Brieuc, Brest, Quimper. C’est aussi une façon de répondre aux besoins de mobilité, dans les campagnes, d’une population de plus en plus âgée. En complément des transports à la demande et des lignes de cars. A Rennes, en Ille-et-Vilaine, l’association Covoiturage Plus, qui a du recul puisqu’elle a ouvert son site en 1997, insiste sur un autre aspect : les contacts humains nécessaires pour garantir le succès du covoiturage, au-delà de la seule mise à disposition d’un site. Covoiturage Plus est beaucoup intervenu en entreprises. D’abord centrée sur le bassin d’emploi de Rennes, l’association a étendu son activité aux autres villes (Saint-Malo, Redon). Le nombre des inscrits sur son site augmente de 1 000 par an. Il en est à 8 000 dont 1 500 covoitureurs réguliers. L’association salue la nouvelle visibilité donnée, en Ille-et-Vilaine aussi, par le programme départemental d’installation d’une trentaine d’aires de covoiturage. « Aujourd’hui, les entreprises nous sollicitent. Elles se bousculent même au portillon. C’est bon pour leur image, cela leur fait construire moins de parkings. Mais le covoiturage ne les concerne pas autant que leurs salariés et l’on n’est jamais aussi persuasif et sécurisant qu’en leur proposant en personne le covoiturage sur leur lieu de travail. Et en leur trouvant une solution », raconte Brigitte Meunier, fondatrice de l’association. Covoiturage Plus a formé ainsi, puis installé dans la durée quantités d’« équipages » en Ille-et-Vilaine. Une efficacité commerciale sur laquelle s’appuie Rennes Métropole quand elle fait signer des plans de déplacement d’entreprises. Et à laquelle devront sans doute penser aussi un jour les services de covoiturage novices.
Hubert HEULOT
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