Ouverture à la concurrence des TER : ce que propose le rapport Grignon
Pas facile d’assumer politiquement le projet de libéralisation des TER. Le report de la présentation – prévue initialement au printemps – du rapport du « comité des parties prenantes sur les conditions de l’ouverture à la concurrence des transports régionaux ferroviaires de voyageurs » prétextait le « manque de concertation avec les régions », selon le ministère de l’Ecologie, cité par l’AFP. Cela ressemblait surtout à une excuse bien commode pour décaler la mise au jour d’un sujet explosif, après plusieurs semaines de grève SNCF.
Depuis longtemps, le sénateur Francis Grignon avait demandé à rencontrer les régions, ce qui n’était pas prévu dans sa lettre de mission initiale. D’après nos sources, le sénateur a d’ailleurs été très déçu que le report de son scrupuleux travail de consultation et d’analyse ait été présenté de cette manière alambiquée.
Sans attendre que le sénateur Grignon reçoive sa nouvelle lettre de mission et qu’il se mette en chemin pour soumettre son rapport aux vingt-deux régions, Ville, Rail & Transport s’est procuré le document de travail de la commission Grignon, daté du 14 avril 2010. Ce document de 89 pages dévoile les conclusions du comité de parties prenantes et les propositions du sénateur sur les conditions de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs. Alors que le rapport sur les gares s’en était tenu à une approche très « cheminote » de son sujet, omettant même de demander aux concurrents leur avis sur la question, le rapport Grignon, dans sa version du 14 avril, reflète une large consultation du secteur. La SNCF a donné son avis, mais les autres parties prenantes également. Pour la première fois en France, un projet de rapport, réalisé à la demande du secrétaire d’Etat aux Transports, propose une stratégie nationale pour une ouverture progressive et maîtrisée du marché ferroviaire régional à la concurrence, dont nous résumons les grands traits dans les pages qui suivent. Francis Grignon regarde sans tabou ce qu’implique cette libéralisation en termes de légalité, de contractualisation, de gouvernance des gares, de propriété et de maintenance des trains, et de transfert de personnel. Un sujet évidemment explosif pour le corps social de la SNCF, qu’il convenait de faire assumer politiquement aux régions avant de le divulguer.
ORGANISATION : comment faire place aux concurrents de la SNCF
Objectif affiché : un gain de productivité dans la délégation du service public ferroviaire
Le but affiché par ce rapport est de donner aux régions qui le souhaitent la possibilité d’opter pour la mise en concurrence des services régionaux de voyageurs, dans un objectif assumé d’obtenir « des gains de productivité et de diminution des coûts pour les régions, à qualité de service inchangée, voire supérieure ». Francis Grignon se place dans les pas du rapport de la Cour des comptes sur ce sujet : le ferroviaire régional a coûté 2,7 milliards d’euros en 2007, et l’accroissement des dépenses a pesé principalement sur les contribuables. « La maîtrise par les régions de leurs dépenses dans le TER constitue un enjeu fort », considère le projet de rapport.
La fin du monopole de la SNCF
Francis Grignon ne se prononce pas sur le débat juridique sur la compatibilité de la Loti avec le règlement OSP, mais il l’affirme : « L’ouverture des services régionaux supposera […] d’adapter la législation française en modifiant la Loti. » En d’autres termes, si l’on veut expérimenter la concurrence, il y a un préalable : le monopole de la SNCF (article 18 de la Loti) sur les services ferroviaires de transport voyageurs doit tomber, tout du moins pour le régional. Les trains Transilien seraient concernés par la mise en concurrence, mais les RER seraient exclus du champ. Dès lors que la nouvelle loi serait votée, les régions auraient la possibilité d’attribuer une partie des services, après appel d’offres, sans attendre la fin de la convention en cours à la SNCF, par voie d’avenant. Dans l’hypothèse où les régions mettaient en concurrence 15 % de leur service TER d’ici à 2018 et que la SNCF gagne la moitié des appels d’offres, seulement « 7,5 % des services TER seraient opérés par des nouveaux entrants à l’horizon 2018 ». Francis Grignon se place visiblement dans une perspective d’expérimentation à partir de 2012 (c’est-à-dire après l’élection présidentielle) et dans une hypothèse où les régions iraient en général au bout de leur convention. On remarque (voir carte) que les conventions arriveront à échéance de manière échelonnée entre 2011 et 2018, l’année de plus forte échéance &eacu
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Publié le 18/12/2024 - François Enver
Publié le 11/12/2024