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lock Le covoiturage dynamique... sort de l’impasse

… sa voiture individuelle. Avec l’essor des nouvelles technologies, les acteurs du domaine sont techniquement prêts à passer la seconde et développent des solutions dites de covoiturage dynamique. Les entreprises et les collectivités, plus dubitatives, expérimentent ce nouveau service avec des résultats parfois mitigés.Et aujourd’hui, faute de masse critique, aucune solution pérenne n’a été trouvée. Navigation dans les arcanes du covoiturage dynamique.

 

 

Cinq cents milliards de dollars. Cette somme vertigineuse correspond à la valeur des sièges vides des quelque 500 millions de voitures individuelles qui arpentent les routes de la planète chaque année. L’étude « Empty seats travelling », menée par le centre de recherche de Nokia en 2009, révèle le potentiel immense du covoiturage dynamique basé sur l’utilisation d’outils connectés. L’objectif de ce grand frère du covoiturage statique ? Offrir en temps réel aux usagers la possibilité de covoiturer au pied levé. Contrairement au covoiturage classique, il offre plus de souplesse, de flexibilité, de fiabilité, d’instantanéité, et moins d’interdépendance entre les covoitureurs. Sur le principe, l’abonné contacte le service quelques minutes seulement avant son départ pour chercher le conducteur pouvant offrir un covoiturage sur l’itinéraire demandé. Le concept repose sur un échange de données en temps réel entre les conducteurs et passagers potentiels, via au minimum un téléphone, au mieux, un smartphone équipé d’un GPS. Mais la définition reste extrêmement large, comme le souligne Léa Marzloff, consultante associée chez Chronos : « Quand on regarde le positionnement des différents opérateurs, certains parlent de covoiturage dynamique, temps réel, immédiat ou anticipé, ou encore d’auto-stop sécurisé. Cette batterie de termes montre que c’est un champ encore en construction. »

Cible principale : les trajets pendulaires

Dans ce domaine, les opérateurs de plateformes de covoiturage sont donc aux aguets. Car, en termes de covoiturage, les efforts les plus importants ne portent plus sur les trajets longue distance mais bien sur les trajets pendulaires, par nature plus nombreux. « Le public type du covoiturage dynamique, ce sont des travailleurs effectuant des trajets réguliers », note d’emblée Frédéric Bisson, vice-président en charge des relations parlementaires à la Feduco (Fédération nationale du covoiturage). L’entreprise apparaît en effet comme un lieu privilégié pour ce type d’expérimentation : la masse d’usagers y est plus importante et les taux d’occupation des véhicules sont les plus faibles, l’impact peut donc être colossal. Viser l’effet tribu : c’est l’avis de Léa Marzloff pour qui « le covoiturage dynamique se pense au sein d’une communauté, pour qu’il puisse y avoir une animation, un suivi et suffisamment d’offres ». « Le pendulaire reste le chantier le plus gigantesque », certifie Sébastien Touchais, directeur général de Green Monkeys, qui développe des solutions idoines pour les entreprises et collectivités. Le premier gros chantier français de cette start-up, forte d’une première expérimentation sur le territoire de Genève, vise depuis septembre les agents de la ville de Marseille via un site Web et une application iPhone. Avant de sauter le pas, avertissait déjà en 2009 le Certu (Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques) dans un rapport sur le sujet, il est essentiel de tester le service sur un échantillon d’utilisateurs : « L’expérimentation sur des territoires divers constitue un aspect fondamental pour pouvoir tester et évaluer ce type de service, qui peut constituer une véritable offre de transport alternative. » Dont acte : en septembre 2010, le conseil général de l’Isère, épaulé par l’entreprise Covivo, a ainsi pris l’initiative d’ouvrir une plateforme en ligne pour inciter les quelque 8 000 habitants du Vercors se déplaçant en voiture à tester le covoiturage en temps réel. Certains territoires, à l’image du Pays de la Haute-Gironde, s’y attellent depuis plus récemment, avec pour exigence que celui puisse également favoriser, outre les trajets quotidiens domicile – travail, les déplacements internes et transversaux sur le territoire. Globalement, « si on regarde comment se structure le marché actuellement, on est plutôt dans l’expérimentation que dans le lancement grand public », confirme Léa Marzloff.

Un covoiturage communicant

Le meilleur moyen d’explorer les pistes du covoiturage dynamique serait à rechercher du côté des technologies actuelles. GPS, smartphones, téléphones mobiles, sites Internet… le couteau suisse au service du covoiturage dynamique existe, reste à savoir comment l’utiliser. La majorité des smartphones, notamment, sont aujourd’hui équipés de puces GPS permettant la géolocalisation des passagers et des conducteurs, facilitant leur mise en relation directe. On peut même imaginer à l’avenir ne plus avoir à déclarer ses demandes et offres de trajets, le smartphone suffisant à localiser les usagers sur la voie publique. Seul frein ? Cette possibilité devra être optionnelle pour les usagers, afin de ne pas froisser les garants de la protection des données privées à la Cnil. Autre atout de la géolocalisation : l’opérateur peut suivre en direct le nombre de kilomètres effectués par les utilisateurs et statuer en cas de litige sur les paiements. Mais attention, relève Frédéric Bisson, les propositions ne doivent pas devancer les usages réels : « Aujourd’hui, les solutions basées sur l’utilisation des smartphones sont prématurées, même si elles permettent de faire des expérimentations. A court terme, il faudra examiner le taux de pénétration de ces outils et les usages réels qui en sont faits, car la population qui maîtrise le mieux les smartphones n’est pas forcément celle qui fera le choix du covoiturage dynamique. » Un avertissement partagé par Benoît Reynaud-Lacroze, expert en mobilité chez Ville fluide : « Le problème du covoiturage repose avant tout dans la capacité de comprendre les comportements de base auxquels sont confrontés les individus avant d’intégrer des solutions technologiques. »
Aujourd’hui, les expérimentations en la matière se basent encore essentiellement sur des outils plus classiques, ne serait-ce que pour une question d’accès au plus grand nombre. C’est le cas de Covivo, qui a prêté des « Covibox », sortes de GPS perfectionnés, aux conducteurs des véhicules dans le cadre de l’expérimentation iséroise. Le Pays de la Haute-Gironde va quant à lui lancer fin novembre « Hirondo », en proposant aux 82 000 habitants du territoire de pratiquer le covoiturage dynamique en utilisant simplement la fonction SMS de leur téléphone ou en faisant appel à un service vocal pour prendre connaissance des offres. Quant aux conducteurs, ils devront déposer leurs propositions de trajets via la plateforme Web. En Inde, enfin, la société MegaCarPool propose d’équiper les véhicules de tablettes équipées de GPS, les véhicules proposant des places étant par la suite géolocalisés en temps réel. Les passagers doivent effectuer là encore leur demande par SMS ou via un serveur vocal. Les puristes du covoiturage dynamique seront dubitatifs. Aujourd’hui, seule la start-up irlandaise Avego déploie son application éponyme à grande échelle et expérimente sur des territoires extrêmement variés une solution exclusivement basée sur l’utilisation de smartphones (voir ci-contre). Il ressort de ces expériences que la géolocalisation a plutôt tendance à rassurer les utilisateurs qu’à les inquiéter : « Il est vrai que chaque usager est enregistré dans notre système et son trajet est suivi en continu grâce au GPS. Mais nous constatons que cette fonctionnalité est plutôt un facteur de sécurisation pour des personnes peu enclines à partager un trajet avec des personnes qu’elles ne connaissent pas », assure Taras Kennedy, la responsable communication de cette filiale de Mapflow créée en 2009.

La masse critique n’est pas au rendez-vous

« Les opérateurs et collectivités qui l’expérimentent rencontrent un obstacle récurrent : pour que l’activité devienne économiquement pérenne, elle doit recueillir un flux vraiment important d’automobilistes, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Sans cette masse critique, le covoiturage dynamique ne peut tout simplement pas exister », le mot est lâché par Frédéric Bisson, décidément peu à même de miser sur la viabilité du covoiturage dynamique dans l’immédiat. Sur ce point, opérateurs et experts s’accordent : « Pour tout ce qui est covoiturage dynamique pur, j’y crois très fortement, mais dans dix ans. Aujourd’hui, il n’y a pas de masse critique », remarque Edouard Duboille directeur général de Green Cove. Partenaire de la SNCF sur les solutions de covoiturage, son entreprise a mis en place pour le Transilien des bornes d’affichage en gare de Houdan et de Montbéliard permettant, via le principe du flashcode, accessible par tous les téléphones mobiles, d’accéder aux offres de covoiturage locales en temps réel (voir VR&T n° 529 du 19 octobre 2011).
Modestement, donc, les premières expérimentations visent à peine quelques centaines d’usagers. Le Pays de la Haute-Gironde se verrait bien mobiliser 300 personnes sur 82 000 habitants, soit moins de 0,5 % de la population. Le conseil général de l’Isère, qui a bouclé son expérimentation en novembre 2010, a réuni quelque 400 personnes sur les 8 000 visés, avec une moyenne de douze covoiturages effectués chaque jour. Seule Avego, qui a frappé aux portes de 65 pays différents, pourrait rivaliser. La start-up reste vague sur le nombre exact d’usagers réels – « des milliers », selon Taras Kennedy –, et localement. La plus grande expérimentation, à Seattle, a réuni à peine 900 participants. D’où l’intérêt de choisir des lieux de vie propices comme les grands bassins d’emploi, générateurs de déplacements de masse. Le covoiturage dynamique peut en outre être intégré aux plans de déplacements d’entreprise ou de collectivités pour favoriser son usage et son déploiement. Ville fluide a développé sa solution GéoCar, particulièrement adaptée à une entreprise de plus de 2 000 personnes du plateau de Vélizy, en usant du concept de « grappes » d’utilisateurs, offrant la possibilité aux passagers de se retourner en cas de désistement de leurs conducteurs. Les salariés sont reliés entre eux par des smartphones prêtés pour l’occasion et peuvent effectuer des trajets en covoiturage quand bon leur semble et surtout au pied levé.

Garantir le trajet de retour

Comme l’indique Benoît Reynaud-Lacroze de Ville fluide, « tant que l’on est pas capables de garantir le retour et de convaincre les salariés que c’est une réalité, on aura toujours un ratio de quatre conducteurs pour un passager ». C’est là que réside toute la complexité

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