Saint-Lazare : une nouvelle idée de la gare
Avec l’inauguration de la « nouvelle » gare Saint-Lazare, prévue ce 21 mars, c’est le plus grand projet de rénovation de gare lancé par la SNCF depuis quinze ans qui s’achève. Une opération hors normes, menée dans une gare en exploitation. La seconde d’Europe, en termes de flux de voyageurs, et qui n’avait pas connu de rénovation importante depuis 1970. Et depuis une dizaine d’années, Saint-Lazare, c’était toujours des quais, des trains, quelque 450 000 voyageurs chaque jour… mais aussi, et surtout, des palissades et des panneaux métalliques cachant le cœur de gare. Un chantier mené, ce fut l’une des difficultés majeures, sans interrompre les circulations, en garantissant la continuité de service pour les voyageurs, gérés au quotidien dans un dédale de travaux.
Sur cette scène phénoménale, le rideau vient donc de se lever. On assiste à la véritable renaissance d’une gare, en bonne partie démolie, puis reconstruite. Une gare de nouvelle génération, fruit d’un projet ambitieux, puisqu’il s’agit, résume Sophie Boissard, directrice générale de Gares & Connexions, d’adapter « un patrimoine exceptionnel, souvent classé, aux attentes et besoins des voyageurs mobiles du XXIe siècle ». Un projet précurseur aussi puisque ce « tour de force » a été rendu possible grâce à un partenariat public-privé mis en place dès 1996, un PPP avant la lettre en quelque sorte. Il regroupe la SNCF et Klépierre, exploitant des commerces pour quarante ans, maître d’ouvrage et financeur des aménagements de ces nouveaux espaces, qui a confié à Spie Batignolles la réalisation des travaux. Pour Sophie Boissard, c’est clair : ce partenariat a permis de financer ce que Gares & Connexions n’aurait pu faire seule.
De quoi mettre les très grands moyens nécessaires pour répondre à la complexité particulière du projet, comme l’explique Jean-Marie Duthilleul, architecte de la gare : « L’histoire de Saint-Lazare, c’est celle d’une pelote de branchements de stations de métro sur le bâtiment historique, avec des couloirs. C’était devenu, au fil des temps, assez inextricable. » L’agrandissement s’est donc « vraiment fait par en dessous, en allant chercher les gens là où ils sont, c’est-à-dire aux sorties des bouches de métro. Nous avons eu l’idée de faire une grande ouverture au centre même de la salle des pas perdus, afin de faire descendre la lumière » par la verrière du XIXe siècle remise, elle aussi, en valeur. Ainsi, à une vingtaine de mètres de profondeur, un nouvel espace est né dans la gare avec la création de trois niveaux supplémentaires : l’un pour le métro, deux pour deux niveaux de parkings souterrains. Ces trois niveaux s’ajoutent aux deux existants, ceux du quai et de la rue.
Pour ses promoteurs, après cette cure de jouvence, Saint-Lazare comprend « tout ce que nous pouvons attendre d’une grande gare parisienne » : espace, modernité, luminosité, circulation facilitée, information renforcée… et 80 commerces sur 10 000 m2. Des services, des commerces, pour simplifier la vie quotidienne dans ces « années Internet » où il est essentiel de satisfaire un maximum de besoins en un minimum de temps.
Saint-Lazare doit donc devenir, au fil des jours, une gare où le voyageur organise mieux son temps, dans un lieu plus ouvert, plus fluide, plus accueillant. Simple lieu de transit pour les uns, espace de vie pour les autres, dans un quartier particulièrement commerçant et attractif. « Au XXe siècle, les commerces innovants se sont construits autour de la voiture et de ses parkings. Au XXIe siècle, ce sera autour des trains et des gares, devenues lieux où convergent tous les modes de transport », affirme Guillaume Pepy. Et Saint-Lazare a déjà ses disciples. Parmi lesquels Austerlitz, dont les travaux s’achèveront en 2020. Un autre chantier colossal, avec six fois plus de surfaces disponibles qu’à Saint-Lazare. C’est déjà toute une autre histoire.
Pascal GRASSART
Jalons historiques
– 26 août 1837 : rue de Londres, la reine Amélie, épouse de Louis-Philippe, inaugure la ligne Paris – Saint-Germain, première ligne de chemin de fer partant de Paris.
– 1842 : la gare s’avance jusqu’à la place Saint-Lazare et prend son nom définitif.
– 1885 : création de la façade principale.
– 1889 : à l’occasion de l’Exposition universelle, construction de l’hôtel Terminus et édification de la salle des pas perdus.
– 1930 : réalisation de la galerie des Marchands.
– 1971 : dernière rénovation de la gare, avec l’installation de six escaliers mécaniques et du téléaffichage dans la galerie des Marchands.
Une rénovation en quatre temps
– 2003-2007, la rénovation du quai transversal
La réhabilitation de l’espace quai transversal, au plus près des voyageurs et des trains, était une priorité. Les travaux ont permis la création d’une dalle homogène sur toute la surface, avec un sol en granit plus clair et plus facile d’entretien. Parallèlement, le patrimoine a été revalorisé : restauration des verres peints, ravalement de la façade. Et le retrait de la poutre bleue qui masquait les halles et les trains a permis de libérer le volume sous la verrière et la vue sur la structure métallique.
– 2006-2008, l’ouverture côté Amsterdam
Amorcés en 2006 et achevés en 2008, les travaux « passage et cour d’Amsterdam » métamorphosent cet espace pour le rendre plus moderne dans son architecture, plus accessible aux voyageurs, plus sécurisé. Le passage de la gare vers la rue d’Amsterdam est élargi, ce qui permet de créer une véritable entrée secondaire. Quant à la cour d’Amsterdam, son amélioration architecturale vise à lui donner plus de clarté et de luminosité. Et puis, un nouvel espace de vente grandes lignes moderne et lumineux prend place côté Amsterdam, face à la voie 27 du quai transversal, avec 16 guichets et des bornes Internet.
– 2009-2012, la transformation de la gare
Dans l’ancienne salle des pas perdus, un hall est créé, reliant les niveaux du métro, de la rue et des quais. Parallèlement apparaissent les 10 000 m2 de l’Espace commercial Saint-Lazare Paris.
– 2013, la rénovation des parvis
Ce doit être le point final du projet. La gare verra ses parvis Rome et Havre et la rue intérieure rénovés. Cela permettra d’améliorer les circulations autour de la gare et de la rendre plus accessible aux piétons. Ainsi, libéré du trafic automobile, le nouveau parvis Havre facilitera le cheminement des voyageurs. Ceux-ci pourront aussi bénéficier de plus d’espace et de transparence, de grandes baies vitrées dévoilant le cœur de la gare depuis l’extérieur. Sur le parvis Rome, les déplacements seront facilités grâce à la création d’un nouveau terminal bus desservant quatre lignes majeures et les dessertes taxis seront optimisées.
Exploitation : l’envers du décor
450 000 voyageurs par jour, 1 600 trains au quotidien, soit un train qui sort ou entre en gare toutes les 28 secondes aux heures de pointe, ce sont des chiffres clés pour appréhender ce qu’est cette gare dont l’exploitation est particulièrement délicate. Et l’inauguration de ses nouveaux lieux ne va pas, d’un coup de baguette magique, rendre fluides chaque jour les circulations sur un réseau souvent ancien, particulièrement mis à l’épreuve. Toutefois, le mouvement de modernisation est engagé. Depuis 2009, le rythme des investissements pour les infrastructures s’est fortement accru, passant de 35 millions d’euros en 2009 à 120 millions en 2012.
L’effort se concentre en grande partie sur la régénération des installations, voies et ballast, appareils de voie, postes de circula
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Publié le 03/06/2024
Publié le 25/04/2024