«Pour la première fois, sur les dix premiers chantiers programmés au cours de l’année 2014, nous en sommes à dix terminés ». Didier Dubus, directeur des suites rapides à SNCF Infra, peut se réjouir. Sous réserve qu’il n’y ait pas eu d’intempéries, notamment de la neige ou du gel fort en décembre, le programme de régénération des voies principales classiques a été tenu à 100 %. Au total, 540 km de voies ont été renouvelés par les moyens lourds mécanisés dits « de suites rapides ». En 2015, il devrait y en avoir 522 km.
« Jusqu’en 2012, entre 92 et 94 % du programme prévu était réalisé. En 2013, on a fait 501 km de linéaire, soit 95,6 % du programme. Cela faisait plus de vingt ans que la barre des 500 km n’avait pas été franchie ». Il existe une explication simple à cela. Les trains de suites rapides n’étaient que deux. Ils sont trois depuis 2013, année de démarrage du marché 2013-2015.
Théoriquement ce marché s’achève donc à la fin de cette année, mais il comporte une tranche optionnelle pour un prolongement du contrat sur 2016 et 2017. La décision devait être prise en décembre par RFF conjointement avec la SNCF. Les deux entités s’accordent à vouloir confirmer cette option et souhaitent de façon unanime continuer avec les trois suites. Mais tout dépend maintenant des budgets que l’Etat, en l’occurrence le ministère des Finances à Bercy, va débloquer… « Le problème est purement budgétaire. Le réseau en a besoin. Les entreprises donnent entière satisfaction, les suites n’ont même jamais aussi bien fonctionné. Il faut que la trajectoire de régénération continue à augmenter dans les prochaines années », insiste Didier Dubus. Les suites rapides représentent un sujet sur lequel l’ensemble des intervenants, RFF, SNCF et entreprises, ont intérêt à la réussite. On travaille tous dans le même sens, tout le monde a bien joué le jeu. Ce sont des travaux stratégiques, et il est impossible de remplacer une entreprise par une autre du jour au lendemain ».
Les pourcentages de linéaires réalisés le prouvent, les démarches d’amélioration menées depuis 2008 et amplifiées à partir de 2011 avec les entreprises portent leurs fruits. Dans le marché en cours celles-ci sont quatre, Colas Rail et TSO (avec TSO Caténaires) étant toutefois en groupement sur le lot n° 1 pour exploiter leur TSV21 Framafer. Après un arrêt volontaire de six mois en 2013 au cours duquel de grosses modifications ont été menées, en particulier le changement des automates de dépose et de pose, ce train, de nouveau opérationnel depuis décembre 2013, offre de meilleurs rendements. Pendant cette immobilisation forcée, le groupement a assuré malgré tout son programme de régénération avec le train P95 loué à la société ETF qui n’avait pas été retenue dans le marché actuel. A partir de juin 2015, le groupement Colas Rail-TSO va s’engager pour sept mois sur un chantier complexe, sans doute « phare » de l’année : un peu plus de 85 km à renouveler sur la ligne Narbonne – Sète – Montpellier, de nuit, avec la voie contiguë circulée. Les 8h30 d’interception devraient lui permettre un avancement de 780 m par amplitude de travail.
Meccoli qui assure le lot n° 3 (VFLI à la traction) avec son train TCM60 construit par la société suisse Matisa, travaille différemment. Sur chacun de ses chantiers, elle bénéficie systématiquement de la simultanée, c’est-à-dire de l’interruption totale des deux voies, celle à renouveler et celle contiguë pour amener un train chargé d’évacuer les rails, les traverses et le ballast déposé. Un avantage qui lui permet de travailler avec du matériel plus simple que les autres. Le TCM60 est un train de pose, mais pas de substitution. Le marché 2013-2015 et ses deux années optionnelles ont été bâtis ainsi. Mais comme il s’avère de plus en plus difficile d’obtenir des simultanées, la question se pose pour l’appel d’offres du futur marché qui démarrera en 2018. Faudra-t-il ou non garder ce principe ?
Le lot n° 2 est assuré par Transalp Renouvellement, association de l’italien Rossi, spécialiste des grands renouvellements dans ce pays, de DFC (Delcourt Ferroviaire), de ESAF qui intervient pour des opérations hors suite sur le réseau français et ETMF pour la traction. En 2013, année du démarrage de leur train P95 flambant neuf (construit par Matisa) et en fait de la toute nouvelle société peut-on ajouter, le nouveau venu dans le paysage ferroviaire français n’avait pas renouvelé une douzaine de kilomètres de voie sur son premier grand chantier entre Pau et Dax. Ce retard, dû à certains péchés de jeunesse sur le plan organisation et à quelques mises au point sur le train, a été vite rattrapé début 2014. La société a aussi apporté une nouvelle méthodologie issue de l’expérience italienne. Le train de substitution des rails et des traverses est placé devant la dégarnisseuse chargée, elle, d’extraire le ballast sur la plateforme. Un tel positionnement des deux principaux trains-travaux ne se faisait jusqu’alors qu’exceptionnellement sur le réseau français. La raison ? La voie est systématiquement remontée puisqu’il n’y a pas retrait de ballast avant substitution et qu’il y a même un ajout nécessaire pour les opérations de bourrage. Le problème n’a plus lieu d’être avec le P95 de Transalp. Il est en effet équipé d’une charrue qui écarte le ballast et permet ainsi à l’arrière de rendre la voie pratiquement à son niveau d’origine. Avantage de substituer avant de dégarnir, principe désormais appliqué sur plus de la moitié des chantiers menés par les trois entreprises, le matin, après la première journée de travail principal, la voie est neuve. Un critère indispensable pour améliorer les limitations temporaires de vitesse au droit des travaux.
Autre nouveauté, alors qu’en général deux journées séparent le passage du train de substitution et celui de la dégarnisseuse, Transalp a proposé de « coller » les deux engins. La méthode a bien fonctionné sur le premier chantier d’essai en 2013 en Lorraine mais nécessite cependant la voie contiguë pendant quelques heures pour qu’un train puisse récupérer et évacuer le ballast usagé. La méthode, qui a été améliorée en laissant quelques centaines de mètres entre substitution et dégarnissage, permet de diminuer la longueur des zones de ralentissement d’un bon kilomètre. Pas négligeable, sachant qu’en général 6 km de limitation temporaire de vitesse (LTV) à 40 km/h sont nécessaires sur la voie qui vient tout juste d’être renouvelée, auxquels s’ajoutent 7 km avec une LTV à 100 km/h. « Notre objectif vise à rendre les travaux le plus transparent possible vis-à-vis de l’exploitation commerciale et au final réduire l’irrégularité. Cela conduit à produire plus pour demander moins d’interceptions, à diminuer les longueurs de LTV et à augmenter leur taux de ralentissement qui peut désormais passer de 40 à 60 km/h », conclut Didier Dubus.
Michel BARBERON
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136 millions d’euros en 2015 pour régénérer les LGV
Renouvellement de ballast, remplacement de rails, d’appareils de voie et de dilatation… Les lignes à grande vitesse font désormais l’objet de vastes opérations. Les marchés viennent d’être renouvelés. 136 millions d’euros vont leur être consacrés en 2015.
Maintenir les lignes à grande vitesse à leur top-niveau, ce sont les objectifs des schémas directeurs de grands travaux. Un premier a déjà été mené sur les années 2009-2014. Les prochains marchés de régénération LGV viennent tout juste d’être validés par RFF. Comme au cours de l’exercice précédent, ETF groupée avec Colas Rail, est chargée du renouvellement de ballast pour la période 2016-2021 (quatre ans fermes + deux optionnels), au cours de laquelle 344 km de linéaire vont être concernés. La société Meccoli adjudicatrice, groupée avec TSO, hérite sur la période 2015-2021 (sept années fermes) du marché de remplacement de 65 appareils de dilatation sur la LGV Méditerranée et de 28 appareils de voie sur la LGV Atlantique. TSO adjudicatrice d’un marché pour les années 2015 à 2021 (six ans fermes + un optionnel) va, pour sa part, poursuivre ses missions de remplacements de rails avec son train BOA développé avec le suisse Scheuchzer. 64 km de voies dès 2015 et au total 423 km sont prévus sur les LGV Sud-Est, Atlantique, Nord et Méditerranée. Mais la