Valérie Pécresse : « Le Stif tel qu'il est conçu ne fonctionne pas »
Ville, Rail & Transports. Achats massifs de nouveaux RER, important renforts de l'offre bus, création d’une écotaxe régionale poids lourd, utilisation du passe Navigo unique comme support de nouveaux services… On a le sentiment, en ce qui concerne les transports, qu’il n’y a pas énormément de différences entre votre programme et celui de Claude Bartolone. Qu'est-ce qui vous sépare vraiment ?
Valérie Pécresse. Il y a quand même deux énormes différences : la première, c’est le bilan de la gauche qui a géré la région pendant 17 ans. C’est aussi celui de Claude Bartolone, il se dit fier de l’assumer. Qui peut dire aujourd’hui que les transports fonctionnent mieux qu’il y a cinq ans par exemple ? Moi, je suis cohérente. Je dis qu'il faut tout changer et j'estime que le bilan n’est pas bon…
« Moi, je suis cohérente. Je dis qu'il faut tout changer et j'estime que le bilan n’est pas bon… »
Il faut en tirer les enseignements pour la suite. La deuxième différence, c’est la question du financement : mon projet est intégralement financé, sans augmentation d’impôts grâce à un grand plan antigaspillage et de meilleure gestion, que je suis la seule à proposer.
VR&T. En quoi le bilan n’est-il pas bon selon vous ?
V. P. Peut-être parce que le Stif tel qu’il est conçu ne fonctionne pas. Le Stif doit devenir une autorité responsable de toutes les mobilités, ce qu'il n'est pas. Il faut qu’il gère le vélo, les taxis et le stationnement. Le stationnement, c’est un sujet majeur. Les gens ne « lâcheront » pas leur voiture en grande couronne s'ils n'ont pas de parkings, soit aux entrées de Paris, soit dans les gares. A celui-ci s'en ajoute un autre : nous avons un vrai problème de suivi des marchés publics. Voilà pourquoi, pendant 17 ans, cela n’est pas allé assez vite et nous avons eu beaucoup de mal à dépenser nos crédits.
« Les gens ne "lâcheront" pas leur voiture en grande couronne s'ils n'ont pas de parkings, soit aux entrées de Paris, soit dans les gares »
De même, je trouve que les bonus-malus des opérateurs doivent être correctement calculés : il faut instaurer beaucoup plus de malus pour non-respect de la ponctualité et des engagements. Les usagers sont au bord de la crise de nerf. La SNCF et la RATP les appellent des clients mais, si ce sont vraiment des clients, il faut faire des gestes commerciaux. Ce qui m’a le plus choquée c’est le RER A : on ne peut pas avoir une ligne qui dysfonctionne toute l’année et qui est coupée l’été sans faire un geste commercial. Si les lignes sont coupées l’été, et je pense qu’il va falloir malheureusement le faire souvent pour réorganiser les RER, il faut des baisses tarifaires.
« On ne peut pas avoir une ligne qui dysfonctionne toute l’année et qui est coupée l’été sans faire un geste commercial »
Donc globalement, il y a un bilan à tirer du fonctionnement du Stif. Il est trop administratif, ne délègue pas assez, n’est pas assez proche des usagers, de leur ressenti, de leurs besoins.
VR&T. La réforme du Stif serait donc prioritaire ?
V. P. Oui. Je suis pour un Stif qui délègue aux intercommunalités tous les assouplissements du plan bus, à budget constant. C'est toute la question des autorités organisatrices de rang 2. L'idée consiste à dire aux collectivités : « Vous avez une ligne de bus, vous avez besoin de changer un arrêt, vous êtes tous d'accord, vous n'avez pas besoin de demander au Stif. » Ensuite, j'estime que le Stif manque de réflexion intermodale. Cela m'inquiète pour la jonction entre les réseaux existants et le Grand Paris Express, puisque la région est responsable des interconnexions. Cela n'a pas du tout été pensé et je pense que c'est sous-budgeté.
VR&T. C'est votre seule grosse divergence ?
V. P. Non, comme je le disais, il y a un deuxième gros sujet, c'est le financement. Je n'ai toujours pas compris comment le candidat socialiste finance son programme. Quel est l'échéancier ? Où sont les recettes. Quand il dit récupérer 400 millions d'euros de la taxe poids lourds, c'est impossible, sauf à taxer même les trottinettes !
VR&T. Il nous dit 100 millions !
V. P. Il a donc corrigé ses chiffres ! Le bon chiffre c'est effectivement 100 millions. L'écotaxe poids lourds, j'ai signé le contrat pour la mettre en œuvre quand j'étais ministre du Budget, alors que les socialistes et leurs alliés l'ont abrogée. Si Claude Bartolone et Emmanuelle Cosse veulent la taxe pourquoi n'écrivent-ils pas à M. Valls pour lui demander de stopper l'appel d'offres en cours pour le démontage des portiques en Ile-de-France ? Combien va coûter ce démontage ? Il faut être cohérent.
« Si Claude Bartolone et Emmanuelle Cosse veulent la taxe pourquoi n'écrivent-ils pas à M. Valls pour lui demander de stopper l'appel d'offres en cours pour le démontage des portiques en Ile-de-France ? »
Sur le financement, je relève plusieurs problèmes : comment financent-ils le passe Navigo à tarif unique qui coûte 300 millions d’euros en année pleine ? Moi, je dis comment je le finance sans augmentation d’impôts. D'abord je supprime la réduction de 75 % sur la tarification pour les étrangers en situation irrégulière. Il y a 115 000 bénéficiaires de la réduction (sur 165 000 bénéficiaires de l’AME) en Ile-de-France. Cela fait 70 millions d'euros d'économies.
VR&T. Mais le FN vous attaque sur ce point en disant que vous avez voté cette mesure !
V. P. Cela fait deux ans que je vote contre à la région et que je réclame sa suppression. Je
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