A l’occasion des Journées Agir qui doivent se tenir les 7 et 8 novembre à Chartres, Jean-Luc Rigaut, son président, également maire d’Annecy et président de l’ADCF, explique quels sont les grands axes de travail de l’association. Et quels sont les grands enjeux actuels pour ses membres, collectivités et réseaux de transport.
Ville, Rail & Transports. Comment abordez-vous les Journées Agir ?
Jean-Luc Rigaut. De nombreuses questions tourneront autour de la future loi d’orientation des mobilités, la LOM, qui va édicter un principe de couverture du territoire par des autorités organisatrices de la mobilité. Les collectivités et les réseaux vont devoir s’organiser en conséquence. Cela pourrait simplifier les relations territoriales.
Dans les territoires peu denses, on peut imaginer un fort recours à la mobilité partagée, au transport à la demande et aux technologies digitales pour coordonner les transports privés. Nous faisons bien la différence entre les réseaux structurés et ceux qui vont devoir s’organiser avec de nouveaux types de mobilités. La question sera alors de savoir comment on met le transport privé, notamment les voitures individuelles, au service de la mobilité collective.
VR&T. Quelle est la position d’Agir sur les futures orientations de la LOM ?
J.-L. R. Agir n’est pas le Gart dont les membres partagent leurs réflexions stratégiques et en font part au gouvernement.
Agir est un regroupement de réseaux indépendants qui bénéficient de son expertise (par exemple des formations, beaucoup de partages de données…). L’avantage d’Agir est de pouvoir travailler avec tout le monde.
Nous avons toutefois une crainte à propos de la LOM et de l’ouverture des données, notamment à propos de la billettique, qui conduirait à laisser les Gafa s’emparer de la vente des titres. Google dispose déjà de la cartographie. Si on lui laisse la possibilité de vendre des titres de transport, nous pensons que les opérateurs publics et privés risquent de ne plus avoir qu’un rôle limité : celui de simple prestataire. Nous encourageons chaque territoire à s’organiser de telle façon que les données restent sous leur maîtrise.
VR&T. Vous soutenez aussi le développement des régies…
J.-L. R. Nous ne soutenons pas les régies mais affirmons que la régie peut être une alternative aux délégations de service public (DSP) et qu’il n’y a pas un mode de gestion idéal.
Aujourd’hui, il y a un élan vers la gestion directe. On le constate dans le secteur de l’eau, de la restauration collective et du transport. Agir compte désormais 250 adhérents. Depuis sept ans, nous accueillons 30 adhésions supplémentaires chaque année. Récemment, sont arrivées Ajaccio, Chartres… et bien sûr Annecy.
Nous observons une tendance de passer d’une DSP à la gestion directe mais jamais le sens inverse ! Le retour d’expérience est positif. La possibilité depuis 2010 de créer une SPL (Société publique locale) donne aux élus un nouvel outil de gestion directe de leurs services publics. La SPL permet de maîtriser les coûts en garantissant notamment la prise en compte immédiate des décisions politiques. Elle permet aussi aux autorités organisatrices de travailler ensemble sur des projets à l’échelle d’un bassin de vie, de créer de nouveaux services de mobilité entre les territoires et de construire des politiques de mobilité cohérente. C’est le cas par exemple des communautés d’Angoulême et de Cognac qui ont récemment créé une SPL pour mutualiser leurs services de transport public. Depuis le 1er janvier, la Société des transports du Grand Angoulême exploite aussi le réseau urbain de Cognac, qui bénéficie ainsi de son expertise.
VR&T. Les débats sur la gratuité reviennent en force. Quelle est votre position sur ce thème ?
J.-L.. R. Au sein d’Agir, nous estimons que les élus sont le mieux placés pour décider. Nous devons respecter leur décision. La gratuité peut être un levier dans leur politique des transports.
A titre personnel, j’y suis opposé. C’est aussi la position du Gart. Si on veut continuer à développer les transports, il faut des ressources financières. Ce qui n’empêche pas de proposer une tarification solidaire pour assurer l’équité sociale. Le principe du consommateur-payeur est une règle générale qui a le mérite de responsabiliser.
VR&T. Quels sont les sujets importants sur lesquels travaille Agir actuellement ?
J.-L. R. Nous voulons optimiser notre centrale d’achat qui permet de massifier les commandes de matériel et donc de bénéficier d’un meilleur rapport qualité-prix.
Nous cherchons aussi à rationaliser les outils qui touchent à la billettique pour aller vers une harmonisation et une baisse progressive des prix. Nous avons ainsi développé une
application Tixipass qui permet d’acheter un titre de
transport dans n’importe quel réseau l’ayant adopté. C’est le cas d’une vingtaine de réseaux depuis le démarrage de Tixipass en juin.
Propos recueillis par M.-H. P.