La taxe sur les billets d’avion et la réduction de l’avantage fiscal sur le gazole des transporteurs routiers n’auront pas suffi à apaiser les sénateurs qui exigeaient des moyens sonnants et trébuchants pour financer la loi d’orientation des mobilités (LOM). Pire, ces mesures annoncées le 9 juillet par la ministre des Transports Elisabeth Borne pour abonder la LOM, la veille de la commission mixte paritaire (CMP), dans l’espoir de sceller un accord entre députés et sénateurs, ont mis de l’huile sur le feu.
La CMP a échoué. « Face au refus clair de l’Assemblée nationale de soutenir ou même d’étudier la solution élaborée en première lecture au Sénat, à savoir l’attribution d’une part de la TICPE et un versement mobilité avec un taux minoré à 0,3 % pour aider les intercommunalités à faire face à leur nouvelle compétence mobilité [l’une des dispositions majeures de la loi LOM ], nous n’avons pas signé », commente Didier Mandelli, rapporteur (LR) de la loi au Sénat. La promesse de dernière minute du Premier ministre Edouard Philippe d’attribuer à ces collectivités locales une part de la TVA, à hauteur de 40 millions d’euros, pour remplacer la taxe d’habitation et financer des services de mobilité « n’était pas très engageante », juge le sénateur de Vendée.
Après trois heures de discussions avec les députés en CMP, la majorité sénatoriale menée par le Républicain vendéen Bruno Retailleau a mis son veto. Le texte est renvoyé en deuxième lecture à l’Assemblée nationale dès la première semaine de septembre, en vue d’une adoption en plénière dans la foulée. Puis retour Sénat. Et cette fois, si les deux chambres ne se mettent toujours pas d’accord, les députés auront le dernier mot.
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« Le choix de la majorité sénatoriale retarde la mise en œuvre de mesures importantes pour nos concitoyens […] le gouvernement et la majorité sont déterminés à aboutir à une adoption rapide du texte« , a réagi Elisabeth Borne dans un communiqué le 10 juillet au soir.
Que s’est-il passé ?
Officiellement, le désaccord se serait donc cristallisé autour de la question des moyens financiers donnés aux intercommunalités pour mettre en place des services de transport public adaptés aux zones peu denses et rurales. Et sortir de la dépendance totale à la voiture dans ces zones blanches de mobilité. Un sujet qui avait trouvé son illustration avec le mouvement des gilets jaunes.
Autre point de crispation : l’absence de financement des 13,7 milliards d’euros de programmation des infrastructures de transport inscrit dans la LOM. Pendant toute la discussion parlementaire, Elisabeth Borne a renvoyé en loi de Finances ces questions d’argent pour alimenter le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), auquel il manque 500 millions d’euros. Pour le combler en partie, le gouvernement a arbitré brutalement, le 9 juillet, pour une taxe supplémentaire sur les billets d’avion et la réduction de l’avantage fiscal sur le gazole pour les poids lourds. Mesures qui rapporteraient environ 320 millions à l’Afitf. Une autre mesure votée par les députés, l’affectation de la ‘taxe Chirac » sur les billets d’avion devrait en rapporter 32 de plus.
Nouvelles taxes
La ministre espérait sauver ainsi le vote de sa loi qu’elle porte à bras-le-corps depuis plus d’un an. Erreur politique ? « Il suffisait d’attendre le lendemain de la CMP pour annoncer ces nouvelles taxes et ne pas donner du grain à moudre à l’opposition qui va s’emparer du sujet en septembre, au moment du projet de loi de Finances, pour faire monter la pression », commente, dépité, un parlementaire de la majorité.
Une dimension politique dont se serait bien passée une loi attendue par les Français, avec des mesures comme la création d’un forfait mobilité durable de 400 euros pour les salariés venant travailler en covoiturage ou à vélo, la régulation des trottinettes en ville, l’assouplissement du 80km/ou le déploiement des zones à faibles émissions dans les villes souffrant de la pollution. La boîte à outils d’Elisabeth Borne a décidément du mal à trouver son mode d’emploi.
N. A.