Les politiques RSE (responsabilité sociétale et environnementale) montent en puissance et représentent un enjeu majeur pour les entreprises. C’est le cas à la SNCF qui cherche à développer les initiatives dans ses différentes filiales. Voici quelques exemples concrets qui permettent d’appliquer au quotidien de meilleures pratiques environnementales.
Vigilance sur le stationnement des trains
La SNCF est le premier consommateur d’énergie électrique en France. « Nous consommons 1 % de l’électricité en France et 90 % de cette énergie est destinée la traction des trains », rappelle Cécile Lière, directrice Sobriété et efficacité énergétique à SNCF Voyageurs. « Le stationnement des trains pèse 20 % de nos consommations d’énergie de traction », poursuit-elle.
Les trains restent ainsi sous tension lorsqu’ils sont à quai en attendant leurs missions. Ce qui permet de maintenir les équipements en fonction, comme la lumière dans la rame, le chauffage ou la climatisation. Dans les technicentres, le maintien sous tension permet d’avoir des rames immédiatement disponibles, prêtes être déplacées. SNCF Voyageurs a décidé d’arrêter de laisser les rames sous tension au-delà d’une heure sans mouvement.
Des progrès ont déjà été réalisés : l’énergie de traction consommée à l’arrêt est passée de 14,7 % du total de l’énergie de traction consommée en 2022 à 12 % en 2023. Soit une économie de 7000 tonnes de CO2e. « L’objectif en 2025, c’est que l’énergie de traction consommée à l’arrêt ne représente que 10 % de l’énergie de traction totale consommée », annonce Cécile Lière.
Ecoconduite
« Le respect des sillons pour les conducteurs, a toujours été une priorité. Les anciens conducteurs s’appuyaient sur une fiche train, en papier, qui indiquait les vitesses à suivre. Ces fiches fonctionnaient selon les vitesses de référence pour chaque portion de ligne. Charge à nous, conducteurs, de les respecter », explique Didier Stewart, de la direction de la Traction. Qui a participé au développement du Drive assistant system (DAS).
Désormais, les fiches trains sont disponibles sur les tablettes numériques des conducteurs. L’outil Sirius, développé par SNCF Connect & Tech, sur l’ensemble des lignes, a généralisé l’Opti Conduite de Didier Stewart. Il est ainsi possible d’adapter plus finement les vitesses de conduite au profil exact de la voie. Les conducteurs savent utiliser les rampes en respectant les marches et les horaires et peuvent adapter leur vitesse grâce aux données en temps réel qui intègrent les ralentissements liés à des travaux ou à des incidents comme un éboulement ou un glissement de terrain.
L’écoconduite a permis « une économie d’énergie de 7 % à 20 %, selon les lignes », assure Didier Stewart. Le DAS est en cours de déploiement sur Eurostar.
Tests pour décarboner les trains
« 20 % de nos trains sont responsables de 46 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de la Traction », indique SNCF Voyageurs.
Pour ces quelque 1000 rames TER qui circulent sur des lignes peu ou pas électrifiées, l’entreprise teste plusieurs solutions de décarbonation.
Depuis 2021 déjà, quinze Regiolis fonctionnent, sur la ligne Paris-Granville, au B100, un carburant composé à 100 % d’esters méthyliques d’acides gras. L’avantage de cette solution est de ne pas nécessiter de modification du matériel. Après « 6,2 millions de kilomètres parcourus à fin 2023, on a évité près de 22 000 tCO2», assure SNCF Voyageurs.
Une autre solution a été testée avec un AGC qui a été équipé, en 2021, de batteries rechargeables à la place des moteurs thermiques. Elle offre une autonomie de 80 kilomètres. Cinq régions (Auvergne Rhône-Alpes, Hauts-de-France, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, et Sud) ont financé chacune une rame, qui devrait entrer en service en septembre 2025.
Une autre rame AGC a été hybridée. Deux de ses quatre moteurs thermiques, ont été déposés pour laisser la place à des batteries. Elles sont rechargées par un système de récupération d’énergie au freinage. Elles permettent une économie de 20 % d’énergie et d’émissions de gaz à effet de serre.
La rame a été testée en ligne, dans les quatre régions partenaires du projet, à tour de rôle : Centre-Val de Loire, Grand Est, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie. Un premier bilan devait être dressée en fin d’année dernière.
Enfin, douze rames TER à hydrogène ont été commandées à Alstom en 2021. Elles sont équipées de piles à hydrogène à la place des moteurs thermiques. La rame de présérie, équipée en 2023, a été homologuée en 2024.
Les premières devraient circuler en service commercial fin 2025 en région Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne Franche-Comté, Grand Est et Occitanie.
La seconde vie des matériels roulants
Prolonger la vie des AGC et des TER 2 N est vertueux. Au lieu de mettre au rebut ce matériel âgé d’une vingtaine d’années, SNCF Voyageurs a lancé en 2018, le programme de rénovation OPTER. L’objectif est faire durer ces matériels de 15 à 20 ans de plus.
Cette opération dite de mi-vie, consiste à mettre à nu le chaudron et à changer les pièces qui doivent l’être. C’est aussi l’occasion d’améliorer l’efficacité énergétique du matériel, en optant par exemple pour de l’éclairage Led, moins consommateur d’énergie. Ou pour installer des filtres à particules sur les moteurs des engins thermiques. En 2023, douze régions ont signé pour ce programme, ce qui correspond à 40 % du parc TER français.
Dans le même esprit, un programme de rénovation a été engagé pour les TGV. Baptisé O2D, pour Opération d’obsolescence déprogrammée, il vise à prolonger de quatre à dix ans la durée d’usage des rames TGV, en réutilisant notamment les pièces des rames radiées. En 2025, 19 rames serviront de “magasins“, offrant plus de 3000 pièces (sièges, accoudoirs, pièces mécaniques et électroniques) pour rénover d’autres rames.
Les 104 rames éligibles du programme O2D seront remises en circulation entre 2026 et 2033.
Moins d’eau
Un technicentre consomme en moyenne 100 000 m2 d’eau par an. Principalement pour le lavage des rames, mais aussi pour le lavage des pièces. S’y ajoutent les sanitaires (douches, toilettes). SNCF Voyageurs cherche à réduire de 20 % l’eau prélevée d’ici à 2030.
« Le premier objectif c’est le zéro prélèvement d’eau », explique Mathilde Daquin, responsable de l’environnement au Technicentre industriel de Vénissieux. Dans un établissement dont la première implantation date de 1880, doté d’un réseau d’adduction potentiellement vieillissant, les risques de fuites peuvent être importants.
L’installation de robot de lavage, de machines à laver le matériel dont l’eau est recyclée, a permis de réduire de 30 % les besoins en eau de Vénissieux qui consomme 3000 m2 par an.
« 90 % de notre eau est recyclée », assure par ailleurs Mathilde Daquin. « L’apport d’eau pluviale nous conduit à ne prélever que 3 % d’eau sur le réseau public. Cela représente 60 m3, soit l’équivalent de la consommation annuelle d’un Français », ajoute-t-elle.
Insertion par les chantiers
En Île-de-France, Transilien travaille avec 11 associations d’insertions. Cela représente 300 emplois, répartis dans 95 gares de la région. Ces salariés, dont 180 en insertion, sont employés à l’entretien d’espaces verts, la rénovation légère de bâtiments ou dans des services comme l’entretien de vélos dans les ateliers installés dans certaines gares d’Île-de-France.
Féminisation des métiers industriels
« Tous nos postes peuvent être occupés par des femmes », rappelle Katia Nowaczyk, directrice des ressources humaines du Matériel. Pour convaincre les femmes d’entrer dans les métiers techniques, il faut les mettre en avant dans les campagnes de recrutement, estime l’entreprise. Ce qui passe par la cooptation par des femmes déjà embauchées et par la lutte contre le sexisme ordinaire, avec tolérance zéro face au harcèlement pouvant aller jusqu’à des mesures disciplinaires, voire le licenciement. Le bien-être passe aussi par les vêtements de travail qui doivent être féminisés pour s’adapter à la morphologie des femmes.
Au cours des cinq dernières années, les postes de direction occupés par des femmes dans les établissements et les lignes ont doublé, passant de 12 à 24 %. Et à la conduite, on compte désormais 12 % de femmes conductrices contre 5 % auparavant.
L’objectif de la SNCF est de recruter 30 % de femmes en 2030, et de féminiser l’encadrement à hauteur de 40 % à la même échéance.
Déploiement d’îlots de fraicheur
Créer un îlot de fraîcheur planté d’arbres et d’arbustes dans le technicentre de maintenance des TER de Rennes, c’est ce qu’a voulu faire son directeur Nicolas Poisson. Un défi dans ce lieu ferroviaire qui a longtemps banni jusqu’à la moindre pousse d’herbe par crainte d’être envahi. Mais le changement climatique oblige à voir le monde autrement. « À l’été 2022, il a fait jusqu’à 42° C sur le site », note Nicolas Poisson. « Organiser un espace de 1000 m2 est une aubaine pour les agents qui peuvent y prendre leur pause à l’ombre des arbres ».
Sa création est néanmoins une gageure car le sol n’est pas très riche. Le directeur a fait appel, pour analyser le sol de la parcelle, à I’Institut Agro Rennes-Angers où sont formés des ingénieurs agronomes. Sans surprise, ils ont trouvé beaucoup de houille sur ce site qui a connu la vapeur. Avec l’association Plante & Cité, le technicentre a sélectionné les essences les plus susceptibles de se plaire dans le terrain. « Nous voulions planter dans le sol existant et ne pas apporter de terre végétale », raconte Nicolas Poisson. Autre souhait, il fallait rendre le projet « inclusif« . Le technicentre s’est alors tourné vers l’Alaph, une association locale d’insertion de personnes handicapées qui ont participé aux plantations, aidées par les agents bénévoles de la SNCF.
Les plantations ont eu lieu en mars. Il faudra attendre le printemps prochain pour voir quels arbres et arbustes (une vingtaine d’arbres et 180 arbustes, chêne, prunellier, sorbier, charme, merisier) ont le mieux apprécié ce terrain.
Sécuriser les achats d’électricité
« SNCF Voyageurs consomme 5,5 térawatts/heures par an pour faire rouler ses trains », rappelle Khadidja Bouaddou, directrice des opérations à SNCF Énergie, une filiale de SNCF Voyageurs. Le transporteur souhaite acheter 40 à 50 % d’énergies renouvelables pour la traction des ses trains à horizon 2027-2028. Pour diminuer son empreinte carbone mais aussi pour répondre aux exigences de ses clients, les régions, qui souhaitent plus d’énergies « vertes ».
Pour atteindre cet objectif, SNCF Énergie a opté pour des contrats d’électricité PPA (Power Purchase Agreement). Ce type de contrat, passé avec un fournisseur d’énergie renouvelable, permet d’acheter l’électricité à un prix garanti à l’année, sans subir les fluctuations du marché. L’entreprise s’engage avec son fournisseur sur une période de 20 à 25 ans. En 2026, ces contrats PPA devront représenter 20 % de l’électricité renouvelable achetée par SNCF Voyageurs.
Au printemps 2024, SNCF Énergie avait conclu 18 contrats PPA avec des fournisseurs : un tiers dans l’éolien et deux tiers dans le photovoltaïque.