Seul en lice, Keolis s’est vu attribuer le 18 octobre le nouveau contrat de délégation de service public des transports de la métropole de Lille. Le contrat, qui prévoit 383,7 millions d’euros payés annuellement à l’exploitant, court du 1er avril 2025 au 31 décembre 2031. Il vise une amélioration de l’offre, avec la création de nouvelles lignes de bus (trois lignes express notamment), des horaires étendus ou encore une nouvelle billettique, pour aboutir à une hausse de 25 % du trafic d’ici la fin 2031.
Mais il suscite une vive opposition de la part de l’Union des Voyageurs du Nord (UVN), qui se présente comme la première association d’usagers du Nord-Pas-de-Calais, et demande aux élus de la Métropole européenne de Lille (MEL) « l’annulation pure et simple du marché« , compte tenu « des nombreux problèmes actuels sur le réseau urbain et transfrontalier« . L’association estime aussi que « la MEL n’a pas respecté les recommandations de la Cour Régionale des Comptes il y a cinq ans » qui demandait « plus de transparence et plus « d’ouvertures » dans le cahier des charges pour améliorer la concurrence« .
Un nouveau contrat renouvelé pour Keolis : Orléans Métropole a retenu la filiale de la SNCF pour exploiter et maintenir le réseau TAO pendant encore six ans à partir de 2025. « Le contrat, d’une valeur cumulée de 493 millions d’euros, couvre l’ensemble des modes de transport de la métropole, incluant le tramway, les bus, les vélos, le transport à la demande (TAD), ainsi que les parcs relais et les VéloPark« , indique l’opérateur en rappelant qu’il permettra de desservir 22 communes et 300 000 habitants.
Le ministre des Transports a confirmé le 17 octobre, lors du congrès de la FNTV, l’organisation d’une conférence de financement des infrastructures début 2025. Il faut « définitivement« , a dit François Durovray, « sortir des discussions infantilisantes, aberrantes que nous avons chaque année » sur les modalités de financement du secteur.
Selon lui, cette conférence doit permettre d’avoir de la visibilité et des financements « sur « 10 à 15 ans » pour assurer la maintenance des infrastructures ferroviaires et routières mais aussi pour avancer sur les « sujets de décarbonation et de digitalisation« .
Face aux professionnels du transport routier de voyageurs, le ministre a également abordé la question des gares routières. Il a affirmé avoir reçu l’engagement, de la maire de Paris, de ne pas fermer brutalement la gare de Bercy sans avoir de solutions pour continuer à recevoir les cars et les voyageurs dans de bonnes conditions. « Une hypothèse se développe au nord de Paris, à Saint-Denis, elle est intéressante« , a rappelé François Durovray. « J’ai demandé à la maire d’avoir aussi une gare dans Paris intra-muros car 50 % des utilisateurs de Bercy sont des Parisiens. Elle va y travailler avec les services de l’Etat et de la Ville« , a-t-il ajouté.
Ces travaux ont pour but de moderniser le réseau et d’augmenter les capacités de circulations, en prévision notamment de la future liaison CDG Express qui doit relier la gare de Paris Est à l’aéroport de Roissy.
La priorité des priorités reste la régénération et la modernisation des infrastructures ferroviaires, sinon on risque d’entrer dans un cycle de « paupérisation » du réseau, a averti Thierry Guimbaud, le président de l’Autorité de régulation des transports, qui intervenait hier lors du Club VRT.
Aujourd’hui, c’est SNCF Voyageurs qui assure la péréquation entre lignes rentables et non rentables, a-t-il poursuivi. Et permet, grâce à l’abondement d’un fonds, de participer au financement des infrastructures. « Cette compensation est nécessaire. Mais dans un monde de plus en plus concurrentiel, est-ce à elle de le faire? Si ces concurrents n’ont pas à contribuer à cette compensation, SNCF Voyageurs va être considérablement pénalisée. SNCF Voyageurs le crie de plus en plus fort et elle a raison! »
Si le gendarme des transports terrestres n’a pas à répondre à cette question, il peut la poser, « c’est son rôle« , a conclut Thierry Guimbaud.
Retrouvez l’intervention complète de Thierry Guimbaud en novembre, dans le prochain numéro de Ville, Rail & Transports
La mise en cause est sévère : dans son rapport, dévoilé le 10 octobre, sur « le code de bonne conduite et l’indépendance » de SNCF Réseau, l’Autorité de régulation des transports (ART) estime que l’organisation mise en place par le gestionnaire des infrastructures ferroviaires ne permet pas « de garantir le respect de son code de bonne conduite ».
Pour preuve, explique le gendarme des transports terrestres, « SNCF Réseau n’a mis en place aucun dispositif interne de conformité » pour assurer le respect de ses engagements de bonne conduite adoptés en 2020. Par exemple, le gestionnaire des infrastructures n’a pas mené d’audit de contrôle.
« Suspicions légitimes »
Par ailleurs, il n’a pas non plus mis en place « d’organisation opérationnelle permettant d’assurer le respect du code de bonne conduite par les agents exerçant des fonctions essentielles« . Il n’existe ainsi ni procédure ni critère permettant l’identification des agents exerçant ces fonctions « essentielles », celles qui touchent à l’attribution des sillons et à la tarification de l’utilisation de l’infrastructure.
L’ART demande d’y remédier. Et recommande un « renforcement des mesures de garantie au niveau législatif contribuant à dissiper les suspicions légitimes des entreprises ferroviaires quant à l’indépendance de SNCF Réseau« . Renforcement de mesures qui devrait aussi s’appliquer à sa filiale, Gares & Connexions, a minima pour la tarification de l’accès aux gares et pour la programmation des travaux en gare. L’Autorité en profite aussi pour réclamer des pouvoirs élargis pour mieux superviser l’ensemble. Avec un droit de véto sur le code de bonne conduite et la possibilité de sanctionner les manquements.
Message reçu…
Message bien reçu par SNCF Réseau qui annonce, par la voix de son PDG, Matthieu Chabanel, avoir élaboré un « plan d’action immédiat« . Plusieurs chantiers ont déjà été engagés comme la cartographie des emplois chargés des fonctions essentielles et une communication accrue en interne et en externe sur la « culture de l’indépendance ».
Dans sa réponse écrite à l’ART, Matthieu Chabanel propose également de créer un comité composé de salariés et de personnes extérieures à l’entreprise, présidé par une personnalité extérieure. « Ses missions s’inscriraient dans un cadre plus large d’éthique des affaires, intégrant notamment des sujets comme l’anticorruption ou la prévention des conflits d’intérêt« , indique le PDG.
… mais pas d’accord sur tout
En revanche, le dirigeant rejette plusieurs propositions de l’ART qui vont au-delà des textes, notamment européens. S’il accepte son pouvoir de véto sur le code de bonne conduite, il n’est pas favorable à un pouvoir de sanction spécifique puisque l’ART peut déjà sanctionner SNCF Réseau si elle estime que ses agissements remettent en cause son indépendance.
Il ne souhaite pas non plus l’intégration, dans le périmètre des fonctions essentielles, des agents chargés de la gestion des circulations et de la programmation des travaux. « Une telle démarche compromettrait la mobilité des salariés chargés de ces fonctions, et réduirait de ce fait l’attractivité l’embauche de SNCF Réseau, dont les salariés sont désormais recrutés sous un statut de droit privé« . Selon lui, l’organisation actuelle « intègre la nécessaire impartialité des agents face à toute entreprise ferroviaire« .
Quant à l’instauration d’un système de contrôle déontologique des agents de SNCF Réseau semblable à celui instauré pour les agents publics, elle lui semble « excessive et inadaptée« . « La responsabilité des mobilités doit rester celle d’un choix personnel des collaborateurs et non celle de l’entreprise« , estime encore Matthieu Chabanel qui réaffirme l’engagement de ses équipes dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire.
Marie-Hélène Poingt
Deux mois avant le lancement de la nouvelle liaison à grande vitesse Paris-Berlin, les billets sont mis en vente à partir d’aujourd’hui. Les prix démarrent à partir de 59 euros en seconde classe, 69 euros en première.
A compter du 16 décembre, les deux capitales seront reliées en 8 heures environ en train à grande vitesse (un ICE proposant 444 places) dans le cadre d’une coopération entre la SNCF et la Deutsche Bahn. « Le nombre de liaisons quotidiennes entre l’Allemagne et la France passe de 24 à 26, représentant plus de 320 000 places supplémentaires par an proposées aux clients« , indiquent dans un communiqué les deux compagnies.
Eurostar et SkyTeam, une alliance de compagnies aériennes qui comprend notamment Air France, ont signé fin septembre un partenariat pour développer les voyages intermodaux air-fer.
Ainsi, les passagers aériens pourront se déplacer avec une seule réservation sur des itinéraires combinant des vols long et moyen courriers et des trajets en train. Grâce au réseau élargi d’Eurostar qui a récemment fusionné avec Thalys, les passagers, arrivés par exemple en avion en Europe, auront de nombreuses possibilités de voyages entre des villes belges, anglaises, françaises, néerlandaises et allemandes. Environ 13% des voyageurs Eurostar sont aujourd’hui des voyageurs aériens long-courriers arrivant aux principaux hubs de SkyTeam à Amsterdam Schiphol, Paris-CDG et Londres Heathrow, et effectuant une correspondance ferroviaire, indique la compagnie, filiale de la SNCF. |
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Encore des retards de livraisons en Allemagne
Alstom subit aussi les foudres de la société de transport régional de Basse-Saxe LNVG après le nouveau retard de livraison de ses rames destinées à l’Expresskreuz en Basse Saxe, l’un des réseaux les plus importants d’Allemagne avec 6,4 millions de trains-kilomètres : non seulement le constructeur ne sera pas en mesure de livrer les trains cette année mais il devra échelonner la livraison des 34 exemplaires jusqu’à l’été 2026 (20 trains livrés au « dernier trimestre 2025 », le reste « courant 2026 »). « Nous sommes consternés de voir qu’un des plus grands constructeurs de trains au monde ne soit pas capable de respecter ses délais… pour la troisième fois de suite », a déploré Dirk Altwig, porte-parole de LNVG.
La mise en service de ces nouveaux trains était prévue en décembre 2024 sur les lignes régionales RE1 (Hanovre-Nordreich), RE8 (Hanovre-Brême port) et RE9 (Brême port – Brême – Osnabrück). La nouvelle liaison directe prévue entre Wilhelshaven et Hanovre (grâce à un découplage) a dû être repoussée à 2026. La raison invoquée par Alstom est la lenteur des procédures d’homologation qui prendrait « plus de temps » que prévu pour le nouveau train Coradia Max.
C. B.