Cela faisait plus de deux ans que l’on n’avait pas de nouvelles du matériel roulant destiné à la future ligne à grande vitesse britannique HS2, entre Londres et le nord-ouest de l’Angleterre. Il est vrai que ces deux dernières années ont été riches en rebondissements liés au Covid ou à la mise en œuvre du Brexit, mais aussi au projet HS2 lui-même, avec le tout récent abandon du projet de branche vers Leeds de la phase 2b, qui aurait connecté le nord-est de l’Angleterre à la LGV.
Toujours est-il que le 9 décembre, trois semaines pile après cet abandon, l’entreprise High Speed Two (HS2), responsable du projet de LGV, a confirmé avoir attribué à la coentreprise à 50/50 Hitachi-Alstom High Speed (HAH-S) les contrats pour la conception, la fabrication et l’entretien du matériel roulant destiné à la phase 1 de cette ligne. Le contrat s’élève à 1,97 milliard de livres sterling (2,3 milliards d’euros), montant qui comprend la maintenance initiale des 54 trains pendant 12 ans. La durée de vie prévue pour ces trains est de 35 ans, ce qui est plus proche des habitudes européennes que japonaises (les rames de Shinkansen sont réformées après une petite vingtaine d’années de service). En outre, une analyse réalisée par Oxford Economics a conclu que HAH-S « apportera 1,1 milliard de valeurs ajoutées brutes à l’économie britannique chaque année pendant la seule phase de fabrication ».
Notons que le matériel roulant qui a remporté le marché face aux candidatures de CAF, Siemens et Talgo, est celui proposé par la coentreprise Hitachi-Bombardier, et non l’offre initiale d’Alstom. Il est vrai que la reprise de Bombardier par ce dernier est intervenue entre-temps, et que même si cette reprise a pour conséquence le transfert à Hitachi de la part d’Alstom dans la production du train à grande vitesse italien Zefiro V300, le train destiné à HS2 n’est pas concerné par ce changement de portage. En effet, destiné à circuler aussi bien sur ligne nouvelle que sur le réseau classique britannique, le futur train pour HS2 sera donc au gabarit d’outre-Manche, ce qui en fait un matériel roulant très différent du Zefiro.
Principalement conçus en Grande-Bretagne, les trains seront aussi fabriqués, testés et entretenus dans les sites britanniques de Hitachi (production des chaudrons à Newton Aycliffe, dans le comté de Durham) et d’Alstom (montage à Derby et nouvelle installation de production des bogies à Crewe), « grâce à une main-d’œuvre locale de 9 000 personnes et à de vastes chaînes d’approvisionnement ». Selon les deux industriels, « le contrat pour le matériel roulant de HS2 devrait créer et pérenniser plus de 2 500 emplois : 505 personnes travailleront directement pour les deux entreprises dans les Midlands et le Nord pendant la phase de conception et de fabrication de ce programme prestigieux, notamment 49 apprentis et nouveaux diplômés ». Les acteurs du projet estiment que 2 000 emplois indirects supplémentaires seront créés « ailleurs dans l’économie britannique en raison d’une forte implantation de la chaîne d’approvisionnement dans le pays ». En outre, la phase de maintenance des trains devrait créer plus de 100 emplois sur le site de Washwood Heath, à Birmingham. « Le contrat servira de tremplin pour de nouveaux investissements dans l’éducation et la formation, venant s’ajouter aux partenariats existants avec les écoles locales et aux 200 apprentis et nouveaux diplômés travaillant déjà pour Hitachi et Alstom. Les deux entreprises se sont engagées à financer les dépenses de recherche et développement d’universités britanniques à hauteur de 5 millions de livres. »
Lorsqu’ils entreront en service, « entre 2029 et 2033 » selon HS2, les trains produits par HAH-S devraient être les plus rapides d’Europe, avec une vitesse de pointe de 360 km/h, et figurer « parmi les plus énergétiquement efficaces au monde », grâce à une masse plus faible par voyageur (15 % plus léger qu’un train européen comparable), à son aérodynamisme, à la récupération d’énergie et aux progrès les plus récents dans le domaine de la traction électrique. Si leur longueur prévue est de 200 m, avec possibilité de circuler en unités multiples, comme pour la plupart des TGV en service en France depuis 1981, les trains pour HS2 en seront très différents, avec 8 voitures et une motorisation répartie. Environ 500 personnes devraient trouver place dans ces rames à un seul niveau, et y avoir accès à une connexion Internet sans fil « simple et à haut débit », avec possibilité de réserver leur siège en ligne et de « profiter d’informations enrichies sur leur voyage à travers plusieurs canaux », les trains étant « prévus pour accueillir les prochaines évolutions technologiques ».
La coentreprise HAH-S indique qu’elle va désormais travailler avec HS2 et l’opérateur de la franchise West Coast Partnership pour « finaliser le design du train avant le démarrage de la fabrication en 2025 ».
P. L.