Comment attirer les papy-boomers vers les transports publics
Les seniors sont souvent considérés comme captifs des transports publics. Erreur. Ils en sont même très peu friands, leur préférant, comme les plus jeunes, l’automobile. Et le phénomène risque de s’accentuer dans les vingt prochaines années, si l’on en croit l’étude menée dans le Bas-Rhin par l’agence de l’urbanisme de Strasbourg et extrapolable à la population française… Les baby-boomers, baignés dans le culte de l’automobile reine du bitume, deviennent des papy-boomers pour qui abandonner la conduite est interprété comme une « mort sociale ». En fait, nos aînés sont peut-être proportionnellement plus nombreux que le reste de la population à utiliser les transports en commun, mais ils le font beaucoup moins fréquemment que les autres clientèles. Des seniors de plus en plus nombreux, de plus en plus mobiles, de plus en plus motorisés, voici en gros ce que nous réserve l’avenir. Il est grand temps de commencer à penser aux transports des seniors, non plus en les englobant éventuellement dans les services PMR, mais en réfléchissant à des offres dédiées. A Orvault, par exemple, dans la banlieue nantaise, on expérimente depuis le 1er mai un TAD façon taxi réservé aux plus de 70 ans. Aux Pays-Bas, ce type de prestation a été initié au milieu des années 90 et couvre actuellement les trois quarts du territoire. La massification y est jugée comme l’une des clés de son succès.
Puisque 25 % de la population aura plus de 65 ans en 2030, c’est une clientèle à conquérir pour les transports collectifs. Un défi aussi. « Le senior est ambivalent, moins pressé que le salarié, il n’entend pas qu’on anticipe sur sa gestion de temps et se montre pointilleux sur le respect des horaires. Même s’il n’est pas à un euro près, il est réticent à payer un abonnement », décrypte Marie-Catherine Beaudoux, directrice Innovation & Stratégies Métiers/Produits chez Veolia Transdev, qui organisait en mars une journée de travail du Mobility Lab, le laboratoire de recherche du groupe, précisément sur la mobilité des seniors. Enfin, les seniors placent la sécurité au premier rang de leurs priorités. Ce sont au final des clients très exigeants, donc de bons baromètres de la qualité de service d’un réseau. « Leurs besoins et leur état d’esprit préfigurent probablement la demande de transport des prochaines décennies », poursuit-elle.
« Il y a en France plus de 60-74 ans (9,3 millions) que de collégiens et lycéens. Si nous consacrions, avec les AOT, le même temps à ces populations, on réglerait certains problèmes dans les réseaux de transports », notait en février le directeur Stratégie, Marketing, Offres et Services de Keolis, Eric Chareyron, lors des 3es Keoscopies.
Pour les groupes de transport, cette catégorie constitue donc un magnifique vivier ouvert à l’innovation. Pistes explorées chez Veolia Transdev : des tarifications plus souples, personnalisées et sans engagement ; des transports dédiés flexibles et massifs (condition de la rentabilité), innovations sur l’information en particulier en cas de situation perturbée… On retrouve les mêmes réflexions chez Keolis. Depuis l’invention des Keoscopies en 2007, destinées à décrypter les évolutions de la mobilité liées aux modes de vie, à tordre le cou aux idées reçues et à mieux comprendre les besoins pour mieux réaliser le service attendu, on sait qu’il faut « conquérir la génération voiture ». Constatant l’inadaptation aux besoins des seniors de transports publics perçus comme trop contraignants, Keolis, sous la houlette d’Eric Chareyron, son directeur Stratégie, Marketing, Offres et Services, a d’abord testé, avec succès, la carte “liberté” à Tours. Un système de post-paiement très simple d’utilisation. Car « la simplicité et la lisibilité des offres » est la première des préconisations listées par Eric Chareyron. « Il s’agit d’axer nos efforts sur cette valeur “tranquillité” qui leur est chère », expliquait-il déjà en 2008. Mais Keolis travaille aussi à une nouvelle génération de lignes de proximité, au confort des cheminements piétons et de l’espace d’attente – avec notamment la présence de banc – et à la sensibilisation des conducteurs, dont le rôle de « réassurance » de cette clientèle est important.
Lors de son Mobility Lab, Veolia Transdev a mobilisé ses participants sur cinq cas d’espèce. Il y avait par exemple Germaine, 73 ans, habitant un pavillon dans la périphérie de Colmar, dont le mari ne conduit plus car il commence à développer des troubles cognitifs ; ou Robert, divorcé de 68 ans, localisé à 25 minutes à pied du centre de Strasbourg ; ou encore Alfred, 81 ans, dépendant et en zone rurale, sans enfants et ayant un jeune frère à Paris. Questions : comment rendre leur vie meilleure en 2012 ? Et en 2027 ? A l’issue d’un brainstorming de plusieurs heures, chaque groupe avait élaboré des réponses plus ou moins précises et concrètes. Absolument tous sont arrivés à une conclusion commune : le besoin de conseils et de coordination des offres. Qu’on l’appelle coach, conseiller senior de quartier ou conseiller coordinateur, qu’il soit bénévole, associatif ou municipal, il pourrait être un acteur clé pour aider les seniors à sortir de l’isolement si nécessaire et à mieux gérer leur mobilité. Reste, comme toujours, à t
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Publié le 27/02/2025 - Sylvie Andreau
Publié le 05/02/2025 - Nathalie Arensonas