Antoine Picon : « Il faut faire converger la ville intelligente vers la ville durable »

A la fois ingénieur, historien et architecte, Antoine Picon est directeur de recherche à l’Ecole nationale des ponts et chaussées et professeur à l’université d’Harvard, où il enseigne l’histoire de l’architecture et des techniques Il est l’auteur d’un ouvrage sur les smart cities. Entretien.

Ville, Rail & Transports. Comment peut-on imaginer la ville demain ? Antoine Picon. Les évolutions seront sans doute très contrastées : il y aura des villes utilisant de plus en plus les nouvelles technologies et favorisant le développement durable, et en même temps, un peu partout dans le monde, on assistera au développement de l’informel, c’est-à-dire à des entassements de personnes dans des bidonvilles ou à leur localisation dans des faubourgs un peu tentaculaires comme on peut le voir dans de grandes villes africaines. C’est aussi cela, la réalité de demain. Il ne faut pas seulement prendre en compte les modèles de Paris, Londres ou Singapour.

VR&T. Certains économistes et urbanistes s’alarment de l’étalement urbain. Pensez-vous qu’il faut lutter contre ce phénomène ? A. P. Il y a beaucoup de discours idéologiques. De mon côté, je fais le constat que les Français plébiscitent la maison individuelle. C’est bien beau de dire : il faut densifier ! Mais si les Français n’en veulent pas… de là dépendra leurs choix politiques. On nous dit qu’il faut densifier mais personne n’est capable de dire si les tours sont des constructions durables. La question de leur bilan énergétique n’est pas tranchée. Lutter contre l’étalement urbain revient à renchérir les prix du m² des centres-villes. Or, de nombreux employés travaillent dans les centres mais habitent loin car ils n’ont pas les moyens d’y habiter. Sous certaines conditions, l’étalement urbain peut être acceptable. Même