Les nouveaux défis des commissionnaires de transport
Mutation de la cartographie des flux, digitalisation, montée du e-commerce : les commissionnaires de transport font face à une transformation radicale du marché, à laquelle s’ajoutent la nécessaire prise en compte d’exigences environnementales renforcées et un fort enjeu sur l’attractivité des métiers. Comment s’adaptent-ils ? Ville, Rail & Transports a choisi de donner la parole à des acteurs traditionnels gros et moyens, mais aussi à de nouveaux entrants.
On s’attendait à trouver la digitalisation sur la première marche du podium. Mais lorsque l’on interroge les commissionnaires de transport internationaux sur les défis auxquels ils sont confrontés, c’est finalement la transformation géographique des flux qui arrive en tête, parmi d’autres enjeux comme l’adaptation au développement du e-commerce, les contraintes environnementales ou les problématiques RH. « La bonne nouvelle, c’est que nous sommes sur un marché en croissance, qui nécessite une véritable expertise », synthétise Marie-Christine Lombard, la présidente du directoire de Geodis.
Un bouleversement géographique des flux
« Nous évaluons la valeur du marché des produits manufacturés à 32 000 milliards de dollars, dont 11 000 milliards qui s’exportent et concernent donc nos activités de commission de transport international. Aujourd’hui, les flux intercontinentaux entre les trois grandes zones que sont l’Asie, l’Europe et les Etats-Unis restent importants. Mais avec une croissance de 5 % par an, ils progressent moins vite que les flux intrarégionaux, c’est-à-dire intra-Asie, intra-Amériques et intra-Europe, qui augmentent 7 % par an et représentent aujourd’hui environ 6 000 milliards de dollars. Nous sommes évidemment dans un monde globalisé, mais certains éléments nous font dire qu’il le sera demain un peu moins », analyse Marie-Christine Lombard.
Le phénomène est notamment encouragé par les nouvelles stratégies des deux grandes puissances mondiales que sont la Chine et les Etats-Unis. Exemple : le plan « Made in China 2025 », adopté par le gouvernement chinois en 2015, vise à soutenir une montée en gamme de l’industrie chinoise, qui ne sera plus l’usine du monde pour des produits de piètre qualité, mais un fournisseur de produits de qualité pour la population chinoise et notamment la nouvelle classe moyenne. Ce plan produit déjà ses effets. Peu à peu, les usines qui travaillaient pour les Américains ou les Européens se déplacent vers l’Inde, le Bangladesh, le Vietnam, les Philippines ou encore la Thaïlande.
« Globalement, la géographie des flux a énormément changé ces cinq dernières années au profit d’un rapprochement des lieux de production et de consommation », constate par ailleurs Hugues Morin, directeur général de Clasquin. Le marché américain en apporte une autre illustration et comme en Chine, l’action politique n’y est pas étrangère. Le président Trump a clairement affiché sa volonté de rapatrier un certain nombre de productions aux Etats-Unis, et la panoplie de mesures incitatives pourrait avoir un réel impact. Des entreprises commencent également à favoriser la proximité avec le marché américain en implantant notamment des outils de production au Mexique, et le mouvement pourrait s’élargir à l’Amérique du Sud.
En Europe aussi, les lignes bougent. L’élargissement de l’Union a d’abord fait émerger au nord une sorte de pôle économique associant autour de la puissante et industrielle Allemagne, le Bénélux et les pays de l’Est. Désormais, les flux évoluent aussi au sud. Certes, la Chine reste pour les économies européennes une source d’importations essentielle, mais l’on constate des relocalisations dans les pays du Maghreb, « notamment pour les petites productions qui demandent de la réactivité », relève Hugues Morin. Ces pays présentent, pour certains, un autre attrait : constituer une porte d’entrée vers l’Afrique. « C’est en particulier le cas du Maroc qui en fait une véritable stratégie », signale Joël Glusman, président de Crystal Group, maison mère du commissionnaire de transport Qualitair & Sea.
Souvent présenté comme l’eldorado du XIXe siècle, ce continent pèse encore
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