Compromis trouvé pour les corridors fret
Seuls les opérateurs pourront demander un sillon, alors que Bruxelles étendait cette possibilité à d’autres candidats Les 27 ont réussi à se mettre d’accord sur le règlement européen controversé qui doit rendre le fret ferroviaire plus compétitif. Contre toute attente, les ministres des Transports ont trouvé un compromis lors de leur dernière réunion à Luxembourg, mi-juin. Un compromis obtenu par la présidence tchèque, qui réduit la portée et l’aspect contraignant du texte. Premier changement important, les Etats membres ont adjoint une liste de corridors au projet de règlement. Une décision politique, alors que le texte de la Commission estimait que c’était au marché, et donc aux opérateurs économiques, de se mettre d’accord sur les itinéraires prioritaires. Les gouvernements ont voulu reprendre la main sur ce point, étant donné qu’à la fin ce sont eux qui règlent la facture. Le compromis prévoit une base minimale : les Etats auront entre trois et cinq ans selon les corridors pour réaliser les objectifs déclinés par la liste. La gouvernance sera confiée à un comité exécutif composé des gestionnaires d’infrastructures et, le cas échéant, des autorités de régulation nationales. Ce comité exécutif définira les objectifs généraux du corridor (capacité, qualité du service, investissement) et nommera un conseil d’administration composé, lui, uniquement de représentants des gestionnaires d’infrastructures nationaux. Ce conseil sera assisté d’un groupe consultatif formé par les gestionnaires et les propriétaires des terminaux fret. Un revers pour les opérateurs ferroviaires, qui avaient obtenu lors de la première lecture au Parlement européen d’être directement associés à la gouvernance. Pour chaque corridor, il sera possible de demander à un endroit et en une seule opération les capacités pour un train de marchandise sur tout l’itinéraire, même s’il traverse une frontière. C’est le principe du guichet unique : soit les gestionnaires d’infrastructures créent un organe commun, soit ils créent un système d’information commun. Mais seuls les opérateurs ferroviaires pourront demander un sillon, alors que la Commission espérait renforcer la concurrence en étendant cette possibilité à d’autres types de candidats. Revers aussi pour les services du commissaire Tajani, leur idée d’établir une hiérarchie de priorités entre certains convois de fret et les trains de passagers à travers tout le réseau tissé par les corridors n’a pas été retenue. Le texte adopté par les Etats membres prévoit seulement que les gestionnaires du corridor international attribuent les sillons de fret, en prenant en compte les besoins de capacité d’autres types de transports, notamment passagers. Créer une réserve de capacité pour le fret ne sera d’ailleurs obligatoire que « s’il existe un réel besoin du marché », ce qui laisse une certaine latitude au gestionnaire… La notion de « fret prioritaire » est purement et simplement abandonnée, même s’il est mentionné que le fret international a priorité sur le fret national. Sauf cas de force majeure, un sillon international ne pourra être annulé moins d’un mois avant son horaire prévu. Le conseil d’administration encourage la coordination des règles de priorité d’un pays à l’autre mais ne les impose pas. En cas de perturbation du trafic, le convoi de fret qui respectera son horaire ne devra pas le voir modifié, dans la mesure du possible. Un compromis entre les pays, comme la France, qui souhaitaient une version plus favorable au transport de marchandises et ceux qui s’inquiétaient pour le trafic passagers, qui reste malgré tout le plus rentable pour le moment. Cette version profondément remaniée du règlement doit encore être adoptée formellement par les 27, avant d’être envoyée au Parlement européen pour une deuxième lecture, vraisemblablement à l’automne prochain.
Isabelle ORY
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