Les départements ne veulent pas acquitter un surcoût de 500 millions de la ligne 14 Sud
Le conseil de surveillance de la Société du Grand Paris a adopté le 28 novembre son budget 2019 : 3,9 milliards d’euros en dépenses, correspondant à un recours à l’emprunt d’un montant de 3,3 milliards. Soit une augmentation de 41 % par rapport à 2018. Ce qui, selon la SGP, « traduit la forte montée en puissance des chantiers du nouveau métro et le lancement de nouvelles phases du projet avec, notamment, les travaux relatifs aux systèmes. »
Mais les présidents des départements d’Ile-de-France refusent d’acquitter le surcoût de la ligne 14 Sud, dont la RATP est maître d’ouvrage délégué. Dans un communiqué, intitulé « La RATP creuse le déficit de la société du Grand Paris », les sept départements franciliens protestent : « En 2015, le gouvernement a confié à la RATP, présidée alors par Elisabeth Borne, la maîtrise d’œuvre de la ligne 14 Sud du Grand Paris Express (Olympiades – Orly). Or, les élus ont découvert [lors de la réunion du conseil de surveillance, NDLR], sans information préalable, que le coût des travaux a augmenté de 500 millions d’euros par rapport au budget initial, soit une augmentation de 22 %. »
Et de conclure : « Elisabeth Borne, aujourd’hui ministre des Transports, demande aux départements franciliens de payer la note pour sa gestion. »
A la RATP, on précise que la convention de transfert de maîtrise d’ouvrage a été signée en 2015, pour un coût de 2,3 milliards d’euros, et sur la base d’études menées en 2013. Depuis, une forte inflation a affecté à la fois la main-d’œuvre et les matières premières, du fait de l’ampleur des travaux menés sur les réseaux franciliens (RATP, SNCF, SGP). La convention prévoyait une actualisation des coûts en fonction des appels d’offres. Fin 2017, les résultats des appels d’offres ont fait apparaître une hausse d’environ 500 millions par rapport aux coûts estimés, et la RATP en a informé l’Etat et la SGP début 2018. Avec leur accord, elle a pu signer les premiers marchés dans l’objectif de respecter la mise en service en 2024, avant les JO. Aussi, résume un porte-parole de la RATP, « le coût technique n’a pas varié, et la hausse n’est pas due à une dérive mais à une évolution des conditions de marché ».
Argument qui ne convainc pas complètement François Durovray, le président du conseil départemental de l’Essonne. Quoi qu’il en soit les départements, arguant du fait qu’ils n’ont pas la compétence transport, refusent d’acquitter le surcoût. Ce qui pose en creux la question du financement de l’actualisation des coûts du Grand Paris Express. Le député du Val-de-Marne Gilles Carrez avait proposé des solutions (hausse de la taxe sur les bureaux, hausse de la taxe de séjour, etc.) dans son rapport remis à Edouard Philippe en septembre dernier. Elles ont fait bondir le Medef. La loi de finances 2019 n’a suivi que partiellement les recommandations du rapport. L’affaire des 500 millions de la RATP a bien l’air d’une mauvaise querelle, mais elle repose une vraie question : qui va payer ? A moins, comme le pense un observateur, que le gouvernement, en rognant sur les ressources et en tentant de faire porter la charge sur les départements, ne prépare ainsi un renoncement à certains tronçons du Grand Paris Express.
F. D.
Publié le 10/12/2024 - Marie-hélène Poingt