Le parquet a communiqué samedi 28 octobre aux familles et aux victimes de l’accident d’Eckwersheim les conclusions définitives de l’enquête judiciaire sur la catastrophe ferroviaire. Le déraillement du TGV d’essais sur le deuxième tronçon de la ligne nouvelle TGV Est avait fait 11 morts le 14 novembre 2015. Maître Gérard Chemla, avocat de familles des victimes de l’accident, a demandé la mise en examen de la SNCF et de Systra. « Nous avons enfin les conclusions qui devraient permettre au juge d’instruction de continuer son information et de mettre en examen des personnes morales », a-t-il dit au micro de France Bleu Alsace. Jusqu’à présent, deux salariés de la SNCF et un salarié de Systra, la filiale chargée des essais, ont été mis en examen le 12 octobre 2016 pour homicides et blessures involontaires. On ne serait pas surpris que la SNCF soit mise en examen d’ici la fin de l’année.
Selon la presse régionale, l’enquête judiciaire pointe l’inexpérience des personnels chargés de faire les essais en survitesse, le manque de formation de ces personnels, le manque de coordination avec la SNCF et de briefings pour préparer les essais, le manque de rigueur dans l’organisations des essais. L’équipage de conduite ne disposait ni des informations suffisantes ni des compétences requises pour conduire ces essais. Les conclusions sont accablantes mais ne surprennent pas. Elles confirment le rapport d’étape déjà publié. La SNCF de son côté avait, juste après l’accident, déjà pointé une « vitesse trop importante » provenant d’une « séquence de freinage tardif ». Le 8 février 2016, le rapport d’étape du BEA TT, jugeant que « la vitesse très excessive de la rame était la cause unique du déraillement » allait dans le même sens, ainsi que l’audit indépendant confié à des personnalités extérieures, dit rapport Lacoste. La SNCF a mis en œuvre les recommandations issues des rapports du BEA-TT et du rapport Lacoste, et modifié les procédures des essais. Notamment en interdisant la présence à bord de personnes étrangères aux essais et en installant dans les rames d’essai une boucle de rattrapage spécifique qui déclenche le freinage d’urgence en cas d’accident. En mai denier, le BEA TT publiait son rapport définitif et la SNCF s’engageait a mettre en œuvre l’ensemble des recommandations formulées.
Si la survitesse est sans aucun doute la cause de l’accident, reste à comprendre comment la survitesse est possible. Un rapport confidentiel interne, commandé par le CHSCT de Systra au cabinet Technologia, avait par exemple, le 26 août 2016, relevé quatre points particulièrement inquiétants. Le premier, l’inactivation des systèmes de contrôle de vitesse. Le second, l’organisation des essais ; avec des documents trop approximatifs, le troisième, le manque de rigueur sur les relations entre les salariés de Systra et les agents SNCF ; et, le quatrième : la présence de sept personnes en cabine. Remarquons toutefois, sur le premier point que les essais en survitesse étaient jusqu’alors la règle avant la mise en service des LGV, survitesse qui nécessitait précisément que les systèmes de contrôle soient désactivés. Mais ce qui ne fait qu’ajouter à l’extrême rigueur requise par les essais. Rigueur que les essais de ce 14 novembre n’ont pas observée.
FD