François Durovray : "La concurrence risque de rendre le système ferroviaire plus complexe pour les usagers"
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« Je ne suis pas archi-partisan de la concurrence à tous crins dans tous les secteurs », a expliqué le 12 février François Durovray lors d’un Club VRT. « La concurrence pour les bus qui circulent sur des routes empruntées par tout le monde me semble logique. Pour l’aérien aussi. Mais je trouve que la question mérite d’être posée pour le ferroviaire, avec le système français et les 40 % du prix du billet liés aux péages », a ajouté le président de l’Essonne, éphémère ministre des Transports de septembre à décembre 2024.
Selon lui, « en caricaturant à peine« , « la gauche a été conservatrice face aux syndicats, en ne voulant rien bouger » et la droite a considéré que le ferroviaire »était impossible à gérer » et qu’il était plus simple d’ouvrir le tout à la concurrence. « Ces choix ont été faits et cela ne sert à rien de revenir dessus », a -t-il poursuivi, reconnaissant quelques mérites la concurrence qui peut stimuler les entreprises. « Mais cette concurrence risque de rendre le système plus complexe pour les usagers ».
Et de raconter : « Je dis à la SNCF : vous ne pouvez pas continuer à présenter SNCF Connect comme une agence de voyages et fermer la possibilité d’y acheter des billets d’autres opérateurs comme Trenitalia par exemple ». Il s’inquiète pour l’usager qui, demain avec l’accélération de la concurrence, se trouvera face à une multitude d’opérateurs et de multiples guichets. « Or, il faut donner de la visibilité et de la fluidité aux usagers », résume-t-il.
Et que se passera-t-il demain si un TGV de la SNCF bloque un TER de Transdev? Quid des correspondances et des indemnités de compensation?, s’interroge-t-il. « Si on ne fixe pas les règles du jeu, on va faire le miel des cabinets d’avocats! »
Autre sujet selon lui, la nécessité de revoir les règles de péréquation qui permettent à la SNCF de continuer à desservir en TGV des lignes déficitaires grâce à ses liaisons bénéficiaires. « La SNCF dessert de très nombreuses gares, va très loin dans le territoire, peut-être trop loin. Ce n’est pas légitime dans un système concurrentiel. Et d’un point de vue économique et écologique, ce n’est pas pertinent ».
Mais, en tant qu’élu local, il est aussi »très attentif » aux enjeux d’aménagement du territoire. Si vous habitez au bout d’une ligne et que vous ne pouvez plus prendre de liaisons directes lors de vos déplacements, « vous avez l’impression d’être coupé » du monde, souligne l’élu essonnien.
Selon lui, ce débat « très compliqué » sera « incontournable ». C’est pourquoi « c’est à l’Etat de fixer les règles du jeu et d’inciter les opérateurs à desservir des territoires, ce qu’ils ne feraient pas naturellement ».
D’où les propositions qu’il avait esquissées lorsqu’il était au ministère des Transports. Avec deux solutions possibles : soit l’attribution aux opérateurs de lots combinant lignes rentables et liaisons d’aménagement du territoire, comme le font les Espagnols. Mais cela changerait les règles du jeu pour les nouveaux opérateurs qui voudraient se lancer sur le marché, estime François Durovray. Soit la modulation tarifaire, moins élevée lorsqu’il s’agit de dessertes d’aménagement du teritoire. Dans ce cas, il faudrait trouver un système de compensation pour SNCF Réseau qui subirait un manque à gagner. L’ancien ministre des Transports ne cache pas sa préférence pour cette solution.
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