SGP : feu vert à Thierry Dallard malgré la bronca des élus
Le conseil de surveillance de la Société du Grand Paris a donné lundi 9 avril un avis favorable aux propositions du gouvernement de mettre fin aux fonctions de Philippe Yvin, président du directoire, et de le remplacer par Thierry Dallard. Celui-ci a été auditionné ce mardi matin par la commission de l’Aménagement du territoire et du Développement durable du Sénat, et le sera demain par la commission du Développement durable et de l’Aménagement du territoire de l’Assemblée nationale. Sa nomination fera ensuite l’objet d’un décret du président de la République.
Les sept présidents des départements franciliens (Seine-et-Marne, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Val-d’Oise, Essonne), ont voté contre le remplacement de Philippe Yvin et contre la nomination de Thierry Dallard. Sans effet sur les décisions, les représentants de l’Etat étant plus nombreux au conseil de surveillance. Ce n’est pas la personne de Thierry Dallard qui est en cause, et François Durovray, président du conseil départemental de l’Essonne, nous dit au contraire apprécier son profil. Mais les élus ne décolèrent pas contre l’attitude de l’Etat. Dans un communiqué publié ce matin et signé aussi par Valérie Pécresse, présidente du conseil régionale, ils font part de leur « désapprobation quant au fait qu’ils n’aient pas été associés au choix de ce nouveau président ».
Les élus demandent une fois de plus « un débat sur les nouvelles orientations du Grand Paris Express, en termes de calendrier, de programme, de budget et de mesures de substitution ». Mais, disent-ils, « en complète contradiction avec un engagement écrit pris par la ministre des Transports, le droit réglementaire des élus à un tel débat leur a en effet été refusé lors de deux séances successives du dernier conseil de surveillance. Lors de la séance du 9 avril, c’est même le directeur de l’administration de l’Etat en charge des Transports [François Poupard, directeur général des Infrastructures, des Transports et de la Mer, NDLR], pourtant responsable de l’application des décisions de la ministre, qui a refusé de fournir aux élus les informations qui auraient permis d’éclairer les choix du gouvernement ». En guise d’information s’indigne François Durovray, « on nous a donné le dossier de presse remis aux journalistes le 22 février… »
Considérant qu’ils n’ont pas été en mesure « de jouer le rôle de contrôle et de codécision qui leur est pourtant reconnu par les statuts de la Société du Grand Paris », ils demandent qu’une séance exceptionnelle du conseil de surveillance confie à un expert indépendant « un audit technique et financier du Grand Paris Express et de l’Etablissement public d’Etat qui en assure le pilotage ». Afin de faire « toute la lumière sur les raisons qui ont poussé l’Etat à revoir le calendrier du Grand Paris Express ».
Car le principal motif de colère des élus est le nouveau calendrier présenté le 22 février par Edouard Philippe et Elisabeth Borne, que le nouveau président du directoire va devoir appliquer. De même qu’il devra réaliser des économies de l’ordre de 10 % sur un projet aujourd’hui estimé à 35 milliards d’euros.
Quant au conseil de surveillance de la SGP, il va lui aussi changer de président : Jean-Yves Le Bouillonnec, désireux de passer la main, vient de quitter ses fonctions de maire de Cachan. Or, c’est en tant qu’élu qu’il présidait le conseil. Et les élus comptent bien être associés au choix de son remplaçant…
F. D.
L’arrivée attendue d’un ingénieur
Thierry Dallard n’a pas du tout le même profil que ses prédécesseurs. Philippe Yvin avait notamment dirigé les services des départements de la Seine-Saint-Denis et de l’Oise et été conseiller chargé des collectivités locales auprès de Jean-Marc Ayrault Premier ministre. Avant lui, Etienne Guyot, préfet, avait dirigé le cabinet de Michel Mercier, ministre de l’Aménagement du territoire en charge du Grand Paris. L’arrivée d’un ingénieur, grand connaisseur de la maîtrise d’ouvrage, répond aux besoins d’une SGP chargée de réaliser le projet qu’elle a longtemps porté auprès des élus.
Né en 1966, Thierry Dallard est normalien (1987) et diplômé de l’Ecole nationale des Ponts et Chaussées (1994). Il commence sa carrière (1992-1993) comme consultant sur les projets de lignes ferroviaires à grande vitesse en Italie avant d’intégrer en 1994 le ministère des Transports en tant que directeur du département Infrastructures et Transports du Centre d’études techniques de l’équipement d’Aix-en-Provence. En 1999, il devient chef du service Déplacements et Infrastructures de transport au sein de la direction départementale de l’équipement des Bouches-du-Rhône. En 2003, il est nommé directeur du Développement au sein des Autoroutes du sud de la France (ASF), puis est chargé de la mise en œuvre de la décentralisation et de la réforme des DDE, puis de la création des nouveaux services de maîtrise d’ouvrage, au sein de la direction générale des Routes. En 2007, il rejoint Meridiam, un fonds d’investissement français spécialisé dans le développement et le financement privé d’infrastructures publiques. Depuis 2012, il est président de la société Oc’Via en charge du projet de liaison ferroviaire à grande vitesse entre Nîmes et Montpellier, depuis 2013 de la Société de la Rocade L2 à Marseille, et depuis 2016 de Vélopolis, la société qui porte le Vélodrome National de Saint-Quentin-en-Yvelines, infrastructure des JO 2024. Il est également président de l’Union des ingénieurs du corps des ponts des eaux et des forêts depuis 2012.
Publié le 10/12/2024 - Marie-hélène Poingt