Parry People Mover : un volant d?inertie pour les navettes
Un nouvel engin ferré a fait son apparition en Angleterre, qui ne ressemble à rien de ce que l?on connaît.?Tant dans son look que dans sa motorisation Est-ce un autorail ? est-ce un minibus ? est-ce un tram ? Les voyageurs qui prennent pour la première fois la navette ferroviaire entre la gare de Stourbridge Junction et le centre de cette ville anglaise au sud-ouest de Birmingham doivent ouvrir de grands yeux lorsqu’ils voient arriver ce petit véhicule de 9,6 m de long, officiellement désigné Class 139 dans la nomenclature des engins moteurs britanniques. Le véhicule en question est un Parry People Mover modèle PPM 60, c’est-à-dire pour 60 voyageurs dans un aménagement intérieur de type autobus, avec toutefois deux pupitres de conduite, vu qu’il est bidirectionnel. Une fois le départ donné, deuxième surprise : ni bruit ni vibrations ! Tout juste entend-on un léger bourdonnement et ressent-on que la voie ferrée n’est décidément pas faite pour la grande vitesse… De toute façon, la distance à parcourir (0,8 mile, soit 1,3 km) et la vitesse (une vingtaine de mph, soit une trentaine de km/h) sont telles que l’on est déjà arrivé. Quant à la capacité de 60 voyageurs, elle est presque tout le temps suffisante pour voyager confortablement. Il est vrai qu’un départ est proposé toutes les 10 minutes aux deux terminus, contre quatre fois par heure du temps des polluants et bruyants autorails diesel. Le secret du PPM ? Son volant d’inertie : à son bord, un disque lourd tourne jusqu’à 20 000 tr/min pour stocker l’énergie. Celle-ci est fournie au démarrage par un petit moteur au GPL Ford de 2,3 l à 4 cylindres qui permet le lancement du volant et l’alimentation des auxiliaires. Mais ensuite, l’énergie utilisée pour mettre en mouvement le PPM, via une transmission hydrostatique permettant une accélération continue, provient essentiellement de la récupération lors du freinage. Avec cette « motorisation » inhabituelle, la consommation est de l’ordre « d’un gallon par heure » (environ 4,5 l/h), indique John Parry, concepteur du véhicule qui porte son nom. Soit « cinq fois moins de carburant » que l’autorail qu’il remplace. Ainsi, le PPM « revient moitié moins cher à exploiter qu’un autorail sur la navette, avec 50 % d’allers et retours en plus ». Des chiffres qui se basent sur l’exploitation de cette navette avec le prototype PPM 50 (Class 999) entre 2005 et 2009, avant l’arrivée des deux exemplaires du PPM 60 aujourd’hui en service. Cette expérimentation « grandeur nature » sur l’antenne de Stourbridge, où la rampe maximale atteint 1/56 (comme on dit outre-Manche, c’est-à-dire 17,8 ‰), avait été précédée par une autre sur un itinéraire plus plat. En effet, de 1998 à 2000, une version du PPM à 35 places, dont le volant d’inertie était mis en rotation par un moteur électrique lors des arrêts, avait circulé sur les voies des quais de Bristol, transportant quelque 50 000 touristes. Les connaisseurs auront reconnu là le principe du Gyrobus d’Oerlikon, qui a circulé en Suisse et en Belgique dans les années 50 et qui a effectivement été la source d’inspiration initiale du PPM. Pour assurer un service régulier avec 200 départs par jour, John Parry a fondé une troisième entreprise, après JPM Parry & Associates Ltd (techniques de construction pour les pays en voie de développement) et Parry People Movers Ltd (véhicules ferroviaires) : PMOL (Pre Metro Operations Ltd). Cette dernière est un sous-traitant de London Midland, filiale de GoVia (Go-Ahead et Keolis). La carte du réseau ferré britannique présentant de nombreuses antennes généralement maintenues pour des dessertes fret ou des trains touristiques, John Parry a déjà identifié une cinquantaine de navettes qui pourraient être exploitées par PPM rien qu’en Angleterre et au Pays de Galles. « Aux Etats-Unis, il y a des centaines de Shortlines », ajoute-t-il, sans oublier les agglomérations des pays en voie de développement, où des véhicules à volant d’inertie pourraient permettre le déploiement de tramways sans caténaire et de maintenance facile.
Patrick?LAVAL
Publié le 10/12/2024 - Marie-hélène Poingt