RER A : trois experts chargés d’enquêter sur ce qui s’est passé
06 Nov 2017
Ile-de-France , Paris , France , Bouygues , Eiffage , RATP , SNCF Réseau , Infrastructures
© RATP - Bruno Marguerite
Au matin du 2 novembre, la RATP a pu remettre en service dans son intégralité la ligne A du RER, après trois jours d’interruption du trafic entre La Défense et Auber. Lors de la nuit qui a précédé cette reprise attendue par le million d’usagers quotidiens de « la ligne la plus fréquentée d’Europe », la RATP a procédé aux vérifications indispensables pour que l’exploitation se fasse « en sécurité et dans de bonnes conditions ». Une fois la zone de chantier nettoyée et le matériel des entreprises intervenantes évacué, il a fallu vérifier les installations de signalisation et de communication et faire passer plusieurs trains d’essai afin de s’assurer de la sécurité de la voie. Et de fait, le service a pu reprendre dans des conditions nominales, sans limite temporaire de vitesse, alors que cette précaution est souvent prise sur des voies récemment inondées.
Rappelons que le 30 octobre vers 13h, un écoulement important et soutenu d’eau boueuse et de sable avait commencé à noyer les voies sur une cinquantaine de mètres dans le tunnel du RER A, à proximité des travaux liés au chantier de la future gare Porte-Maillot du prolongement du RER E (Eole) vers l’ouest. Dans le cadre d’un forage préliminaire des travaux conduits par les équipes du Groupement Eole (Bouygues Travaux Publics, Eiffage et Razel-Bec) en charge de ce chantier pour SNCF Réseau, la paroi du RER A avait alors été percée quelques mètres sous la nappe phréatique. Cette dernière s’est alors abondamment déversée, « à raison de 70 m3 d’eau par heure », selon Didier Bense, directeur général SNCF Réseau Ile-de-France, interviewé par Le Parisien. « Au fur et à mesure du temps, l’eau était de plus en plus claire », a précisé un représentant de la RATP.
Priorité a donc été donnée aux travaux de colmatage de la brèche afin d’arrêter l’écoulement d’eau, effectués par les équipes du groupement Eole et ayant nécessité l’injection d’au moins 300 kg de résine pour permettre la consolidation du colmatage. « L’arrêt de l’écoulement a pu être constaté dans la matinée du 1er novembre », a annoncé la RATP, qui n’avait pas attendu le colmatage complet pour entamer l’évacuation par train des 25 tonnes de boue récupérées sur les voies, dès la nuit du 31 octobre au 1er novembre. Le pompage de l’eau avait permis de désengorger les voies avec succès, sans doute aidé par les récents travaux estivaux de renouvellement de la voie et du ballast réalisés sur ce secteur, au cours desquels les grilles installées entre les voies avaient été nettoyées.
Le retour d’expérience de trois coupures estivales d’affilée a également permis à la RATP de rapidement mettre en œuvre un plan de substitution entre le 30 octobre et le 1er novembre. On avait beau être en période de vacances scolaires, les besoins de transport restaient importants sur l’axe est – ouest du réseau francilien. Les différents canaux d’information ont transmis les informations en amont ou in situ, où 160 agents supplémentaires ont été déployés, guidant les voyageurs vers les lignes de métro renforcées (dont la ligne 1 automatisée, mais aussi les lignes 2, 6, 9 et 14, qui doublent localement le RER A) ou la navette assurée par 15 bus. Mais la RATP le reconnaît elle-même dans son mot de remerciement aux voyageurs et à l’ensemble des équipes mobilisées : il s’agit bien là de « conditions de transport dégradées ». Et les réactions d’Elisabeth Borne, ministre des Transports, ou de Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France et d’Ile-de-France Mobilités n’ont pas attendu le rétablissement du trafic.
Et tous espèrent que ce type d’incident heureusement peu fréquent ne se reproduise pas. Or, une fois les dégâts réparés, une question reste posée : pourquoi là, justement ? Comment se fait-il que le forage exploratoire en cause dans l’inondation du tunnel du RER A se situait en dehors du volume prévu pour la future gare du RER E ? La direction d’Eole nous indique qu’elle n’est pas en mesure de répondre à notre question. « En effet, une enquête a été diligentée, elle devra bien entendu déterminer les circonstances de cet incident ». D’autre part, comme le fait remarquer un spécialiste des travaux publics, les engins permettant d’effectuer de tels sondages étant « instrumentés » pour déceler les particularités du sous-sol, vide ou résistance inattendue. Afin justement, de pouvoir s’interrompre en cas d’imprévu. Toujours est-il que trois experts viennent d’être nommés ; leur rapport préliminaire doit être remis d’ici au 11 novembre à Elisabeth Borne et un rapport définitif est attendu d’ici la fin du mois.
Patrick Laval