Un métro pour le grand pèlerinage de La Mecque
17 Nov 2010
Mis à jour le 23 mai 2017
Le 2 novembre, quelques jours avant le début du pèlerinage de La Mecque, les Saoudiens ont pu inaugurer la première ligne de métro du pays. La ligne Sud, qui fonctionne pour ce premier Hajj à 35 % de ses capacités, tournera à plein régime l’an prochain. La Mecque devrait disposer par la suite de quatre autres lignes. C’est le dimanche 14 novembre qu’a commencé cette année le Hajj, le pèlerinage annuel de La Mecque, qui dure une semaine. Entre deux et trois millions de pèlerins se rendent à La Mecque chaque année pour accomplir le pèlerinage qu’un musulman doit faire une fois au moins dans sa vie. Chaque année, l’afflux de pèlerins se traduit par d’importants embouteillages de bus, et a récemment provoqué d’énormes bousculades, causant la mort de milliers de personnes…
Le deuxième métro de la région du Golfe après celui de Dubaï, qui a un peu plus d’un an d’existence, obéit donc à des contraintes singulières : dimensionnement lié à une semaine d’affluence dans l’année, séparation radicale des flux pour des raisons de sécurité. Capables d’accueillir 3 000 passagers toutes les 5 minutes, les stations sont disposées sur des plateformes ouvertes, pour éliminer les risques d’incendie. Elles sont accessibles par des rampes d’accès. Les flux de passagers sont organisés dans une seule direction : une plateforme est réservée à l’accès et l’autre à la descente.
Pour la première fois cette année, le pèlerinage pourra donc se faire en partie par le métro. Le chantier a été mené en seulement 21 mois. Et, le 2 novembre, une inauguration privée, réservée aux VIP, a permis d’emprunter la ligne Sud. Il s’agit de la première ligne d’un futur réseau, les études lancées par le gouvernement saoudien prévoyant la construction de 5 lignes reliant Arafat à Jamarat, en passant par Muzdalifah et Mina, lieux du pèlerinage situés dans la zone d’Al Mashaaer, bande de 18 km de long sur 3 de large, à l’est de La Mecque.
Le Momra (Ministry of Municipality and Rural Affairs), maître d’ouvrage, avait confié en 2008 à un groupement composé de Systra, mandataire, Khatib & Alami et Egis Rail la réalisation des études préliminaires et la préparation des documents d’appels d’offres pour la construction de la ligne Sud. La construction a été attribuée en 2009 à China Railway Construction Corp, CRCC, qui a confié à Thales le système de contrôle-commande des trains automatisés pour un montant de 103 millions d’euros.
5 000 personnes ont été mobilisées sur le chantier. Non sans difficultés : 16 Chinois ont été expulsés par les autorités saoudiennes pour voir fait grève contre leurs conditions de travail et leurs salaires trop bas.?Et, pour faire face aux urgences, le consortium a eu notamment recours à la préfabrication, Systra adaptant son concept de viaduc en U, fait de voussoirs préfabriqués, de 25 m de portée. Chaque voussoir comporte une voie, et pèse 160 t.
L’entreprise CRCC a livré la ligne à l’exploitant, comme prévu, avec 8 trains de 300 mètres sur un total de 20. « Tout s’est passé dans les temps et suivant le planning » se félicite-t-on sur place, chez Systra. Les 35 % de capacité mis en service cette année vont représenter 3 000 bus en moins. Et l’an prochain, la ligne Sud devrait être exploitée à 100 % de ses capacités.
Si CRCC a bel et bien conduit le chantier en un temps record, le groupe ne devrait pas bien s’en tirer financièrement. La compagnie chinoise évalue ses pertes dans la construction à environ 623 millions de dollars, sur un contrat estimé initialement à 1,8 milliard de dollars, le coût du projet ayant augmenté en cours de route, du fait d’exigences supplémentaires du client, selon CRCC. Une mésaventure qui fait penser à celle du consortium japonais qui a remporté le métro de Dubaï en cassant les prix. Et a eu ensuite à faire à un client dont les exigences ont changé en cours de réalisation.
Systra pour sa part compte sur la carte de visite de la ligne Sud de La Mecque (faisant suite au métro de Dubaï) pour renforcer son implantation dans la zone. Le groupe d’ingénierie a obtenu depuis, en groupement avec Aecom, la réalisation des études de faisabilité du réseau de transport en commun de La Mecque. Et il a remporté le contrat des études préliminaires pour la connexion de Mashaaer à la gare terminus de HHR (Haramain High speed Railway) à La Mecque. Terminus d’une LGV déjà en travaux et dont on attend dans les prochains jours le nom du vainqueur pour le matériel roulant, le système ferroviaire et l’exploitation.