Une convention collective pour les nouveaux opérateurs
21 Sep 2010
Mis à jour le 23 mai 2017
L?Union des transports publics a soumis le 8 septembre à 7 syndicats de cheminots un accord visant à donner un cadre social aux salariés du secteur privé du fret ferroviaire Le 8 septembre, seules la CFTC et la CFE-CGC ont approuvé l’accord pour donner un cadre social aux salariés des nouveaux opérateurs ferroviaires de fret qui sont sur le marché français depuis la libéralisation du secteur en 2006. Les autres organisations syndicales n’ont pas signé, mais FO et la CFDT ont déjà décidé qu’elles ne s’y opposeraient pas. « L’Unsa et la Fgaac nous ont fait savoir dans un courrier qu’elles attendaient pour se prononcer que l’ensemble de la convention collective pour le fret soit négocié », explique l’Union des transports publics (UTP), qui a mené les discussions avec les syndicats. Quant à la CGT, elle n’avait pas pris position à l’heure où nous mettions sous presse. Certains observateurs doutaient qu’elle s’y oppose. Ils expliquent l’attitude des syndicats de cheminots par la perspective des futures élections prévues en mars 2011 à la SNCF. « Les élections professionnelles les incitent à afficher une posture revendicative », commentent-ils.
Jusqu’à présent, les 1 832 salariés du secteur privé de fret ferroviaire (y compris les 389 contractuels de la SNCF) sont régis par le droit commun et certains relèvent de la convention collective des VFLI (voies ferrées secondaires d’intérêt local). S’il ne rencontre pas d’opposition syndicale majoritaire, le nouveau cadre social sera « étendu » par le ministère du Travail à l’ensemble des nouveaux opérateurs de fret ferroviaire et régira de ce fait les conditions de travail de leurs salariés. Mis au point après plus de 18 mois de négociations entre représentants syndicaux et patronaux, le texte prévoit les classifications professionnelles, définit les contrats de travail et les rémunérations dans le secteur. « Les classifications permettent aux salariés de connaître leurs missions et de savoir à quoi ils ont droit en termes de rémunérations », explique Sylvette Mougey, la directrice des Affaires sociales de l’UTP.
Le texte prévoit une grille salariale attractive pour les postes sans qualification dont la rémunération doit démarrer à 2 % au-dessus du Smic. « 90 % des conventions collectives en France sont en dessous de ce niveau », souligne Jean-Philippe Catanzaro, le vice-président chargé des négociations de branche relevant de la FGT-CFTC. Quant au statut cadre, il a été placé au plafond de la Sécurité sociale.
Mais c’est la question de la polyvalence qui a suscité le plus de controverses. Le principe est fortement rejeté par les syndicats de cheminots. « La sécurité de l’exploitation ferroviaire repose sur un métier de base, avec une formation de base et une rémunération attachée à ce métier », explique Dominique Aubry, qui a participé aux négociations pour la Fédération de Transports CFDT. « Dans le privé, on parle emploi. À la SNCF, on parle métier. »
La convention collective prévoit de limiter la polyvalence à deux postes différents. Un progrès par rapport au code du travail qui ne prévoit pas d’encadrement et qui s’appliquerait faute de convention collective. « D’une manière générale, la polyvalence fait aujourd’hui partie intégrante de l’organisation du travail et de la production dans les entreprises », rappelle la CFTC qui se félicite des limites fixées par la convention collective. En plus de la limitation du nombre de postes, la convention prévoit d’autres garde-fous. Par exemple, « les fonctions de sécurité attachées au poste d’opérateur ferroviaire circulation ne peuvent être cumulées avec l’emploi type conducteur de ligne sur une même journée », cite la CFTC. « Sur la polyvalence, nous sommes vraiment entrés dans le vif du sujet en allant dans les détails et en prévoyant des contreparties, qui ne sont pas seulement financières. Nous avons notamment fixé aussi des limites en termes de sécurité, afin d’éviter les dérives », souligne de son côté Sylvette Mougey.
Cette convention collective est en train de se constituer morceau par morceau. Après les négociations sur le temps de travail menées en 2008, et désormais les dispositions générales sur le contrat de travail et les classifications, l’UTP considère que le secteur dispose aujourd’hui « d’un cadre qui s’approche vraiment d’une convention collective ». Les négociations entre syndicats et patronat ne devraient pas s’arrêter là. Elles devraient se poursuivre dans les prochains mois sur le thème de la formation professionnelle et de la prévoyance. Ce qui constituera un nouveau morceau de la con-vention collective. À l’avenir, cette même convention s’élargira et servira aussi de cadre pour le transport de voyageurs. Les négociations commenceront le jour où le gouvernement décidera de mettre en place un dispositif d’ouverture du marché à la concurrence. De nouvelles discussions passionnées en perspective…
Marie-Hélène POINGT