Vietnam : le salut dans les PPP ?
13 Jan 2010
Mis à jour le 23 mai 2017
Le Vietnam a besoin d?infrastructures et de services ferroviaires performants pour pérenniser sa croissance. L?aide internationale étant amenée à décroître, il mise sur les PPP pour concrétiser son ambitieux programme Des montagnes couvrant les trois quarts du territoire, un ruban étroit de plus de 2 000 km de long reliant, au nord et au sud, deux deltas, poumons économiques du pays, où l’industrie, l’agriculture et l’habitat se disputent âprement l’espace, une exposition aux risques naturels – les inondations sont parmi les plus fortes d’Asie… Le développement des transports terrestres tient, au Vietnam, du casse-tête. Un casse-tête indispensable à résoudre, s’accordaient à penser les participants de la dernière conférence Viet-Transport, organisée à Hanoï du 9 au 11 décembre derniers : le PIB croît de 7 % par an depuis dix ans et la population devrait passer de 86 millions aujourd’hui à 100 millions en 2020. La hausse régulière des flux humains et de marchandises se heurte à l’insuffisance des moyens logistiques, provoquant d’ores et déjà de sérieux goulots d’étranglement. Route, rail, intermodalité, transports urbains… dans un pays d’économie dirigée, les plans de développement ne manquent pas. Ainsi, concernant le rail, « le pays dispose, explique Nguyen Bui Nam, directeur de la planification et des investissements des chemins de fer vietnamiens, d’un schéma directeur à l’horizon 2020, dont l’ensemble des actions est évalué à 3,2 milliards de dollars, et d’une vision stratégique pour la période 2030-2050 ». Le schéma directeur consiste avant tout à mettre à niveau un réseau de 3 106 km, dont l’essentiel date de l’ère coloniale. Mal entretenu, lent, irrégulier, les usagers s’en détournent : en 2007, il ne représentait plus que 0,4 % de l’ensemble des mouvements passagers du pays, et 7 % du fret. Il s’agit, en 2020, de passer à 13 et 14 %. Modernisation des infrastructures et du matériel roulant, amélioration de la sécurité, mais aussi meilleure formation du personnel figurent au menu. La construction de nouvelles lignes est également envisagée, visant soit l’intermodalité rail/ports (Hanoï – Halong, Hochiminh – Vung Tau), soit la création de connexions internationales, dans le cadre du projet de chemin de fer panasiatique : Hochiminh – Loc Binh vers le Cambodge, Ha Tinh – Vientiane ou Savannakhet vers le Laos. La grande vitesse constitue un objectif de plus long terme. Un projet de liaison Hanoï – Hochiminh d’une longueur de 1 570 km entend mettre les deux villes à dix heures l’une de l’autre contre, actuellement, près de 40. A en croire Nguyen Dat Tuong, directeur général adjoint des chemins de fer vietnamiens, un certain nombre d’options de base ont déjà été tranchées : « La ligne traditionnelle existante (dite de la Réunification, ndlr), modernisée et affectée à un usage mixte fret/passagers, coexistera avec la nouvelle voie rapide construite parallèlement, qui, exclusivement dédiée au transport des passagers à une vitesse commerciale de 300 km/h, comportera 27 gares. » Quant à la technologie privilégiée, ce serait celle du Shinkansen, les Japonais étant depuis le début partie prenante, financièrement et intellectuellement, des études préliminaires. Un autre projet de ligne express, Hochiminh – Cantho, 191 km dans le delta du Mékong, est porté par les Sud-Coréens. Même si des dates et des échéances sont avancées, en particulier pour l’axe Hanoï – Hochiminh : début des travaux en 2015, ouverture d’une première tranche en 2020 et mise en service de la ligne complète en 2035, la prudence reste de mise tant les budgets estimés sont énormes : 55 milliards de dollars pour Hochiminh – Hanoï et 9,6 milliards pour Hochiminh – Cantho ! Où trouver de telles sommes ? Bailleurs de fonds internationaux et bilatéraux, Japon et France en tête, ont jusqu’à présent été les principaux contributeurs des programmes d’infrastructures vietnamiens. Mais le pays est en passe d’atteindre le revenu fatidique des 1 000 dollars par habitant, fermant ou restreignant le robinet de l’aide. Les solutions doivent donc être recherchées ailleurs, en particulier du côté des PPP. Problème : le cadre juridique qui permettrait d’y recourir n’est pas encore clairement établi. « Nous disposons d’une législation sur les BOT, mais un texte plus large, couvrant toutes les formes de partenariat, s’avère nécessaire », explique Ha Khac Hao, directeur général adjoint de la planification et des investissements au ministère des Transports. Une loi générale dont la rédaction est en cours, avec l’expertise de la Banque mondiale, pourrait être adoptée courant 2010. Ces PPP seront à coup sûr indispensables pour la réalisation des programmes de transports urbains de Hanoï et Hochiminh, dont le coût est estimé à 10 milliards de dollars pour chaque ville. Dépassant toutes les deux les 6 millions d’habitants et subissant un trafic routier à l’intensité croissante – deux-roues mais aussi, de plus en plus, automobiles –, elles sont menacées de congestion. Tramway, BRT et surtout métro sont appelés à la rescousse : à Hochiminh, un réseau de six lignes représentant 107 km est programmé, tandis qu’à Hanoï cinq axes devraient voir le jour, courant sur 193 km. L’aide internationale a certes permis d’enclencher la réalisation des premières lignes dont la mise en service devrait avoir lieu en 2014-2015. On retrouve parmi les financeurs la Jica japonaise, la Banque allemande pour la reconstruction, la Banque asiatique de développement, la BEI, l’AFD ou encore le gouvernement espagnol. Mais on évoque désormais ouvertement, pour parachever les réseaux, des PPP, notamment à Hanoï sur la ligne 2 avec des partenaires chinois et la 5 avec un consortium vietnamo-coréen. « Nous avons récemment réuni l’ensemble des sociétés françaises intéressées pour réfléchir ensemble à une offre PPP globale », explique-t-on à la Mission économique française de Hanoï. Les opérateurs français, déjà très actifs au Vietnam, ont assurément intérêt à bien se préparer à cette nouvelle donne concurrentielle.
François BOUCHER