Bravo pour Port 2000 au Havre, haro sur le développement intermodal du port : la Cour des comptes européenne dresse un bilan mitigé des aides européennes aux infrastructures portuaires en France et dans trois autres pays européens. «Inefficace », voire contreproductif : le développement intermodal du port du Havre est critiqué vertement par la Cour des comptes européenne. Dans un rapport sur les financements européens aux projets d’infrastructures portuaires, publié le 25 avril, elle constate que, en raison d’une « gestion inefficace des conteneurs dans les terminaux » et « des retards de construction ayant entraîné des pertes de contrats », la modernisation des liaisons ferroviaires avec Port 2000 « n’a pas eu l’impact escompté ». Pire, à cause de ces retards, « les transports routiers ont absorbé l’augmentation du trafic des conteneurs due à la construction du nouveau port ». Le contraire donc du report modal attendu de ce projet financé à hauteur de 8,4 millions d’euros par l’Union européenne.
Certes, l’analyse porte sur les travaux réalisés entre 2007 et 2008 et non sur le nouveau chantier multimodal lancé en 2010. Ce projet-là devrait porter la part des préacheminements fluviaux et ferroviaires de 16 à 25 % du trafic en 2020, espère le port du Havre.
Un peu tard pour la Cour des comptes qui estime que le chantier a souffert d’un manque de coordonnation entre la Datar, la SNCF et la région Haute-Normandie. Elle le regrette d’autant plus que le projet Port 2000 du Havre est cité, au contraire, comme un exemple réussi de consultation, de planification et de suivi des investissements. Comme les ports de Bari en Italie ou de Ferrol en Espagne, Port 2000 fait partie des projets réussis mais qui, faute de réflexion en amont sur les liaisons intermodales, « nécessiteront probablement d’importants investissements supplémentaires pour être reliés à leur arrière-pays », écrit la Cour.
Le rapport d’audit est globalement très sévère pour les projets d’infrastructures portuaires cofinancés par l’Union européenne. Depuis 2000, la Commission européenne a affecté environ 6,2 milliards d’euros à ces infrastructures à travers les fonds structurels et de cohésion. L’Espagne est le principal bénéficiaire de ces aides, raflant 52,1 % de la mise, suivie par l’Italie, la Grèce et la France. L’Hexagone absorbe 8,7 % des aides européennes dans ce domaine.
Or, sur les 27 projets analysés, 11 seulement sont jugés « efficaces ». Certaines installations étaient inachevées, comme le port de Punta de Langosteira en Galice, d’autres inutilisées comme une cale sèche à Campamento en Andalousie. D’autres enfin ne correspondaient pas aux objectifs européens en matière de transport, qu’il s’agisse de la construction d’un marché aux poissons à La Corogne en Espagne ou d’un port de plaisance à Mytilène en Grèce…
En pleine négociation sur le financement futur des réseaux transeuropéens de transports et de la politique régionale, ce rapport risque d’alimenter l’hostilité de certains Etats membres, dont la France, à l’augmentation des interventions européennes en matière de transports.
Nathalie Steiwer
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