L’Autorité de la concurrence française, mandatée par Bruxelles, a finalement autorisé le 30 décembre 2010 le rapprochement entre Veolia Transport et Transdev. Un an après le projet d’accord annoncé le 21 décembre 2009. L’opération implique un rééquilibrage des forces en France. Assez pour garantir une véritable concurrence ? Plus d’un an d’attente. Un an à se battre comme des chiffonniers sur les appels d’offres partout dans le monde, comme si de rien n’était. Un an de démarches commerciales menées avec ce handicap de ne pouvoir dire de quoi demain sera fait à des collectivités qui, elles, s’engagent pour cinq à dix ans. Un an à préparer une réorganisation mais, surtout, sans la mettre en œuvre. Un an, aussi, de frustrations internes à gérer. On ne saurait chiffrer le coût de cette année transitoire pour Veolia Transport et Transdev, mais il est évident que les filiales de Veolia Environnement et de la Caisse des dépôts, autorisées le 30 décembre à se marier, ont vécu la décision de l’Autorité de la concurrence française comme un véritable soulagement.
Le groupe unifié n’a pas pour l’heure communiqué, il présentera dans les semaines qui viennent son organigramme après avoir consulté les partenaires sociaux des deux actuelles entités. Avec un chiffre d’affaires 2009 évalué à 8,1 milliards d’euros (sans compter les actifs qui reviendront à la RATP), le nouvel ensemble sera un des acteurs majeurs du secteur au plan mondial avec une présence dans 28 pays et près de 117 000 collaborateurs.
C’est sur le marché français que le rapprochement comportait le plus de risques pouvant porter atteinte à la concurrence dans le secteur du transport urbain et interurbain. Selon l’Autorité de la concurrence, un risque de « moindre émulation concurrentielle » dans 20 à 25 % des appels d’offres urbains et des risques de positions dominantes dans cinq départements. Veolia et Transdev ont donc été contraints de proposer toute une série de mesures de rééquilibrage, dont VR&T avait déjà donné le détail dans son numéro 508 du 1er décembre.
Outre une série de cessions d’actifs et de réseaux dans les transports interurbains et urbains, principalement dans la région Paca, il est demandé au nouvel ensemble de ne pas se grouper pendant une durée de cinq ans pour répondre aux appels d’offres dans le domaine de l’interurbain avec les principaux acteurs « de dimension nationale ou internationale ».
La mesure la plus novatrice proposée par Veolia et Transdev est le financement par la nouvelle entité d’un fonds d’animation de la concurrence de 6,54 millions d’euros. Ce fonds, qui sera administré par un gestionnaire indépendant, servira, à partir de 2012, à générer de la concurrence sur une période de cinq ans dans les appels d’offres de réseaux détenus par Veolia et Transdev. Dans ces quarante-deux « appels d’offres défensifs » pour le nouvel ensemble, les collectivités, et notamment les plus petites, pourront se voir rembourser tout ou partie d’une assistance à maîtrise d’ouvrage pour préparer le cahier des charges et la mise en concurrence.
Par ailleurs, le fonds servira à indemniser les candidats malheureux, y compris Keolis (et à l’exclusion du nouvel ensemble), de leurs frais de réponse aux appels d’offres. Certains acteurs se sont étonné que l’Ile-de-France ne fasse pas partie des régions ou des cessions seront exigées. Veolia y avait une place majeure avant la fusion, qui s’en trouve confortée. D’après nos informations, le contexte très particulier de l’Ile-de-France et l’existence du monopole légal de la RATP auraient joué en faveur d’un non-rééquilibrage. Le Gart s’est à ce stade abstenu de commentaires. La seule voie discordante est venue d’Agir, l’association des réseaux indépendants, qui trouve les compensations dérisoires et dénonce un « marché de dupes ». Pour Gilles Bourdouleix, son président, « sous couvert de créer un groupe compétitif à l’international, on condamne le marché français ».
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