Social, JO, TGV M… Les défis de Jean-Pierre Farandou
Le PDG de la SNCF avait accepté en avril dernier pour VRT, de passer en revue tous les sujets chauds du moment. Difficultés du dialogue social interne, risques de grève, préparation des JO, polémique Ouigo en Espagne, prix des billets, attente aux guichets, méga-camions : une interview-vérité en forme de bilan mais pleine de projets.
Ville, Rail & Transports. L’amélioration du dialogue social au sein de la SNCF était une de vos priorités lorsque vous en avez été nommé PDG en novembre 2019. Mais récemment il y a eu les grèves ou menaces de grève des contrôleurs, il y a des alertes pour les JO… Peut-on dire que vous avez réussi ?
Jean-Pierre Farandou. Je voudrais d’abord rappeler le contexte assez exceptionnel et les enjeux du moment. Depuis quatre ans, il y a eu une combinaison de crises externes que l’on n’avait jamais connue auparavant. Il y a eu la Covid, avec un enjeu important de baisse d’activité, de chômage partiel et de protection des salariés. Puis la guerre en Ukraine a entraîné une crise de l’énergie et une inflation qui pose des problèmes aigus de pouvoir d’achat. Il y a eu également deux réformes des retraites, avec une forte résistance syndicale au sein et en dehors de la SNCF, la fin du recrutement au statut, et l’arrivée de la concurrence, suite à un règlement européen qui nous a obligé à des transformations importantes pour l’entreprise, en créant une société mère et des SA filles de plein exercice. Si on rajoute les JO cet été, qui portent eux aussi des enjeux lourds en termes d’organisation et de contreparties financières pour les salariés concernés, on voit que le contexte n’est pas banal. J’ai abordé ces sujets par un dialogue social nourri. Oui, je pense que j’ai retissé les liens du dialogue. Il est très riche et très dense à la SNCF, y compris à mon niveau. J’ai vu les représentants syndicaux et les délégués du personnel près de 70 fois l’année dernière, au niveau central et en région à chaque fois que je faisais une tournée sur le terrain.
VRT. Comment se passe le dialogue social ?
J-P.F. Nous essayons de combiner trois principes. Le premier est un credo personnel : nous devons trouver l’équilibre entre l’économique et le social. Quand on a de bons résultats, comme en 2023, il est normal qu’il y ait un retour pour les salariés. Nous venons ainsi de verser 400 euros de gratification exceptionnelle à tous les cheminots en plus d’une prime de 400 euros déjà accordée fin 2023. Nous avons augmenté les rémunérations de façon importante : + 17 % de hausse en moyenne sur trois ans, et jusqu’à 21 % pour les salaires les plus bas, alors que l’inflation était de 13 %. Ce qui a fait croître la masse salariale de la SNCF de 1,5 milliard d’euros sur cette période. Mais le social doit tenir compte des contraintes économiques, et c’est ce que nous disons dans le cadre du dialogue avec les syndicats. Second principe, nous cherchons à protéger et à développer. La promotion interne est une réalité : je rappelle que 70 % de nos cadres sont issus du collège exécution. Enfin, je suis le président de tous les cheminots et quand il y a des revendications catégorielles, je veille à ce qu’elles s’inscrivent dans des ensembles plus larges. Je fais très attention à la cohésion sociale. Quand il y a des progrès sociaux, ils doivent concerner tous les cheminots. Et après on regarde s’il y a, pour telle catégorie, telle ou telle spécificité qu’il faudrait prendre en compte.
VRT. Vous venez de lancer une « plateforme de progrès social ». La formule est assez techno. Qu’est-ce que ça va vraiment changer ?
J-P.F. Les mots ont été choisis : c’est une plateforme, un espace dans lequel des thématiques de progrès social très concrètes vont être discutées avec les organisations syndicales. Nous nous mettrons d’accord sur les sujets qu’il faudra regarder en priorité et il y aura un agenda social. A chaque fois, l’entreprise s’engagera à faire mieux que la situation existante. Faire mieux, ce n’est pas forcément satisfaire 100 % des revendications, parce qu’on peut être rattrapé par des contraintes économiques ou de cohésion sociale. Mais il y a une logique de progrès continu. Je veux qu’on apporte du plus par la négociation, par une culture du compromis, par le mouvement. Et j’espère que les syndicats reconnaîtront les progrès effectués. Un climat social apaisé et constructif permettra d’éviter les mouvements sociaux. Ce qui change, c’est le fond et la méthode.
VRT. Faut-il pourtant craindre une grève en mai ? Sud Rail a déposé un préavis pour les chefs de bord…
J-P.F. C’est aux synd
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Publié le 10/01/2025 - Philippe-Enrico Attal