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La SNCF déploie les grands moyens face aux situations perturbées

Publié le 21/04/2010 à 01h15

Pannes, intempéries, mouvement social… Les occasions ne manquent pas à la SNCF d?activer une cellule de crise. Au siège de l?entreprise, depuis un an, une nouvelle salle de crise dotée d?un studio a été créée. Visite des lieux Un véritable studio avec plusieurs caméras et une petite salle de maquillage… Une régie avec ses deux bancs de montage et son matériel de diffusion… « Waouh ! », serait-on tenté de dire. L’équipement, dont la SNCF dispose depuis six mois au cinquième étage de son siège de la rue du Commandant-Mouchotte, rendrait sans doute jalouses certaines télés locales… Le tout jouxte une salle de crise, elle aussi dotée de matériel high-tech, aménagée il y a un an pour remplacer la précédente qui datait de 1999.
« La gestion des situations perturbées existe depuis toujours à la SNCF, parce que la spécificité de l’entreprise, c’est de produire du service en temps réel, donc nos soucis sont vécus en direct par nos clients », assure Pascal Travers, directeur stratégie et communication de crise à la SNCF. Cependant, la première vraie réflexion date des années quatre-vingt. « Une mission a été confiée à un grand spécialiste, Patrick Lagadec, et les dispositifs datent des années quatre-vingt-dix, un peu avant la grève de 1995. » La catastrophe au passage à niveau de Port-Sainte-Foy (qui avait fait 13 morts et 43 blessés en septembre 1997) servira aussi de moteur. Mais le processus très codifié que la SNCF applique aujourd’hui est très récent : il résulte d’un travail lancé il y a un an et demi.

45 minutes chrono pour se présenter
Une organisation « calée sur le temps réel ». Tous les personnels sont en alerte permanente, de façon que le moindre incident remonte immédiatement. Cela part des 21 centres opérationnels de gestion des circulations en région jusqu’au Centre national des opérations ferroviaires à Saint-Lazare, chacun d’entre eux disposant de sa propre salle de crise, qui sera composée à la demande à partir du tableau d’astreinte valable 24 heures sur 24 du vendredi midi au vendredi midi suivant. « C’est en fonction du risque et de l’impact de la crise que le dirigeant national des opérations et la personne d’astreinte du Comex décident d’ouvrir la salle de crise du siège, poursuit-il. Cela se produit en moyenne moins d’une fois par semaine. »
Il suffit d’une grève, d’un incident quelconque sur un axe TGV important, une ligne de RER francilien ou d’un événement affectant plusieurs régions (exemple classique, les intempéries) pour ouvrir la salle de crise de Paris XIVe. « Il vaut mieux l’ouvrir, quitte à la fermer rapidement, plutôt que de rater la crise », précise le directeur.
Une fois l’alerte lancée, la dizaine de personnes concernées doivent se présenter en 45 minutes chrono. Le rôle du dirigeant en question ? « Définir les intérêts de l’entreprise, sa notoriété et le bouclage général de la gestion de crise », explique Pascal Travers, dans son jargon de pro. Quant à la composition de la salle de crise, elle comprend une salle Comex avec systématiquement un membre de la direction générale et production, qui sera responsable de l’ensemble de la gestion de crise, et un responsable de la prise en charge et de l’information des voyageurs.
Côté opérationnel, le personnel est adapté à l’événement et comprend un directeur de crise, un responsable presse et communication, un chargé du Web, et des experts des activités (Voyageurs, Proximité, Transilien, Fret, Infrastructures, Juridique, Sûreté et Logistique). Soit une centaine de personnes susceptibles d’être d’astreinte en salle de crise.
Tout ce petit monde connaît le « road book ». À peine arrivé, chacun s’installe devant un PC donnant accès à la messagerie, à l’outil d’info-voyageurs ou aux outils de suivi des circulations. Il est bien sûr prêt à intervenir puisque, en plus des deux jours de formation, il a eu l’occasion de s’entraîner à plusieurs reprises, lors d’exercices (quatre sessions nationales sont prévues en 2010). Des « trainings » durant lesquels l’entreprise rédige un scénario catastrophe, simule une pression médiatique, des associations de clients et des familles en colère… « Quand il y a des victimes, les crises sont toujours beaucoup plus dures », reconnaît Pascal Travers. L’une des pires expériences est récente : le décès des supporters lillois happés par le RER B près du Stade de France en mars dernier. « Il y a eu beaucoup de réactions hostiles envers la SNCF, nous obligeant à justifier beaucoup de choses… », se remémore-t-il.

Rigueur et réseauscope
Et, parce qu’on ne badine pas avec la codification et la rigueur, chaque vendredi, un briefing est organisé avec les personnes d’astreinte, au cas où. « On y fait le point sur les événements de la semaine écoulée et sur ce qu’on sait de la semaine à venir, production, météo, grève… », explique Pascal Travers. Quand la « salle » est en fonctionnement, le mot d’ordre est toujours : rigueur. « Quatre collectifs de travail ont été identifiés. Le premier s’occupe d’animer la salle sous l’impulsion du directeur de crise, qui définit la stratégie de communication pour la meilleure défense des intérêts de l’entreprise. » Le deuxième est chargé des relations avec les dirigeants nationaux et des points toutes les trente minutes, le troisième fait l’interface avec les régions, le dernier est lié à chaque ligne métier. S’il le faut, les agents y passeront le jour et la nuit. À leur disposition, le tableau numérique interactif, sur lequel on écrit avec le doigt et où s’affiche le « réseauscope » (la carte du réseau ferroviaire)… Et grâce auquel on partage les images avec les salles de crise régionales qui disposent du même « smart board ».
Entre les ruptures de caténaire, la fermeture impromptue de la gare Saint-Lazare en grève, les intempéries, la panne d’Eurostar… la salle flambant neuve a eu l’occasion de fonctionner en 2009. Record de longévité : du 18 décembre à Noël, alors qu’il fallait gérer en même temps la crise Eurostar, les trains bloqués par la neige, le déraillement du RER C à Choisy-le-Roi (36 blessés)… Pour quels résultats mesurables ? Le directeur est soudain moins loquace : « C’est difficile à apprécier… On progresse au fil des crises… On doit encore améliorer l’information temps réel aux voyageurs… » On ne saura pas non plus combien tout cela coûte, mais il est vrai que l’image de l’entreprise auprès des Français n’a pas de prix. Et puis, si le dispositif évite au président d’aller s’expliquer au journal de 20 heures…
 

Cécile NANGERONI

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