Car Postal atteint l?âge de raison
Arrivé en France plein d?optimisme en 2004, l?opérateur suisse a dû s?adapter aux spécificités françaises avant d?asseoir pleinement sa stratégie. Il a fini par oser s?éloigner de la frontière suisse pour se développer partout en France C’était en 2004, un opérateur suisse débarquait de ses alpages et fondait sur les réseaux de l’Est-français. Dole était conquise, puis Bourg-en-Bresse. Suivaient Obernai et Haguenau en 2006. Depuis la ville suisse de Delémont, la filiale transport de la poste suisse, Car Postal, sélectionnait des réseaux français proches de ses bases, répondait aux appels d’offres et, souvent, gagnait. Depuis lors, Car Postal a fait évoluer sa stratégie de déploiement en France, sous la houlette de son nouveau directeur de l’international, Andreas Wenger. Il ne s’agit plus de s’établir à proximité de la frontière suisse, mais sur des territoires cohérents par rapport aux savoir-faire du groupe. Il s’agit ensuite de mieux sélectionner les villes dans lesquelles le groupe suisse s’établit. Arrivé en France de manière quelque peu candide, l’opérateur suisse a découvert un pays très proche géographiquement mais aux règles bien différentes : des rapports complexes avec les collectivités et les personnels des sociétés de transport et leurs représentants, et un cloisonnement avec les autres exploitants présents sur le même territoire. Les premiers contrats n’ont pas forcément constitué une grande réussite sur le plan de la rentabilité. Car s’implanter dans un pays a un coût. A Dole, Car Postal qui, selon Keolis, « avait plongé de 20 % sur le prix tout en proposant des bus neufs » avait sans doute quelque peu sous-estimé ses coûts d’exploitation, et il en a payé le prix. A Obernai, Car Postal a sans doute mal identifié ce que seraient la réalité de sa future exploitation et ses rapports avec l’AOT. Il n’a pas été renouvelé. Progressivement, le groupe suisse a appris à lire entre les lignes des appels d’offres pour ne pas être utilisé comme un lièvre et mobiliser inutilement des ressources, comme ce fut parfois le cas au début. Ces difficultés ont fait grandir le groupe suisse qui a compris qu’il ne pouvait gérer « de loin » le marché français. Fin 2008, le groupe a installé son siège social français à Bourg-en-Bresse. Une nouvelle période d’expansion est survenue en 2009-2010 avec la conquête des réseaux urbains de Mâcon, de Villefranche-sur-Saône, de la communauté de communes du Grésivaudan et de la communauté d’agglomération Hérault-Méditerranée ; de trois lots de lignes régulières et de transport scolaire desservant les bassins d’Agde, Béziers et Montpellier ; de contrats de transport occasionnel à Narbonne et à Baixas (Perpignan) et enfin des lignes interurbaines Crolles – Grenoble – Voiron. L’an passé, Car postal a remporté 50 % des appels d’offres auxquels il a participé et, chose importante, il a été renouvelé à Dole, son réseau historique en France. « On a changé notre stratégie de relations publiques. On prend beaucoup plus de temps pour rencontrer les AO et à évaluer si cela va coller entre nous. Cela explique ce taux de succès », témoigne Andreas Wenger. Le groupe suisse a triplé son chiffre d’affaires en France entre 2008 et 2010. Pour autant, Car Postal s’en tient à une approche discrète. Il ne se positionne pas dans les débats très français sur le devenir de Transdev, le bien-fondé des ambitions de la RATP, les liens SNCF-Keolis ou sur la question de réciprocité de la concurrence. Même dirigé par des équipes locales, Car Postal reste un Suisse en France. « Et alors ? assume un salarié de Car Postal, la Suisse a une bonne image chez vous, n’est-ce pas ? »
Guillaume LEBORGNE
Publié le 10/12/2024
Publié le 10/12/2024