A l?occasion du Salon des transports publics, le président du Groupement des autorités responsables de transport (Gart), sénateur du Bas-Rhin et maire de Strasbourg, Roland Ries, fait le point sur les principaux débats qui animent le secteur Ville, Rail et Transports. Quel regard portez-vous sur le Grenelle 2 ? Les ambitions ont-elles été remisées au placard ?
Roland Ries. Le moins que l’on puisse dire est que le Grenelle 2 ne répond pas complètement aux espoirs que l’on plaçait en lui, d’ailleurs on parle maintenant d’un Grenelle 3 ! Il y a cependant un certain nombre de choses qui vont dans le bon sens. Le fait que l’on ait des autorités organisatrices de la mobilité durable et plus seulement des transports ; le fait que les syndicats mixtes de transports puissent adhérer à un syndicat mixte SRU, ce qui permet un lien entre mobilité et urbanisme. La modification concernant les PDU avec une coordination des compétences voirie, stationnement et transports me semble également aller dans le bon sens. Faire de nouveaux parkings en cœur de ville et développer des TCSP est contradictoire ! On peut aussi saluer les avancées sur les procédures d’expropriation, sur la taxation des plus values foncières et sur l’autopartage !
VR&T. Un deuxième appel à projets de transports en commun en site propre vient d’être lancé, qu’en attendez-vous ?
R. R. On a eu plus d’une cinquantaine de projets subventionnés à 20 % de moyenne de l’assiette subventionnable dans le premier appel à projets. 810 millions ont déjà été attribués, pour le deuxième appel, il n’a pas encore été confirmé que la somme sera identique. Ce nouvel appel à projets, risque d’être moins dynamique que le premier. D’une part, beaucoup des projets de TCSP ont été intégrés dans le premier appel, d’autre part parce que dans notre contexte institutionnel et fiscal, les collectivités risquent d’être plus prudentes avant d’engager des investissements sur 15 ou 20 ans. Le Gart défend toujours l’idée qu’il faudrait inclure le matériel roulant dans ces sujets de financement. L’argument pour ne pas le faire était que l’on risquait de financer des industries étrangères… il s’agit surtout de payer moins.
VR&T. Entre le rapprochement de Veolia et Transdev et celui de la DB et Arriva, le secteur des opérateurs est en pleine recomposition, quelle est votre appréciation du contexte concurrentiel, tel qu’il est en train de se dessiner ?
R. R. L’annonce de la fusion entre Veolia et Transdev avait suscité des interrogations au Gart. On s’était exprimé en regrettant un rétrécissement de la concurrence et les conséquences que cela pourrait avoir sur les prix. Nous n’avons pas d’hostilité de principe, nous souhaitons simplement que la concurrence puisse continuer à jouer. Je comprends que les groupes aient besoin de se regrouper pour atteindre une taille critique au niveau mondial. Il reste 3 groupes français, mais les groupes étrangers ne vont pas rester les bras ballants devant nos frontières, ils vont arriver. Un chinois a d’ailleurs repris la gestion du métro de Stockholm. Les groupes ont des soucis à se faire avec cela. De notre point de vue, il faudra voir si la gestion de ces groupes étrangers est à la hauteur de la culture du transport public que nous avons ici en France.
VR&T. Faire en sorte que la concurrence ne soit pas faussée, ce sera aussi le rôle des AOT qui instruisent les appels d’offres…
R. R. On a une partie de la clé, c’est vrai. Le cahier des charges permettra aussi de ne pas prendre systématiquement le moins disant. Mais ce n’est pas si simple, on sait que les contrôles des chambres régionales des comptes s’attachent surtout à l’aspect arithmétique des choses, moins à la conformité de la réponse à un cahier des charges exigeant.
VR&T. Et si un nouvel opérateur européen, comme la DB-Arriva arrivait sur le marché en installant une véritable filiale française, de votre point de vue ce serait une bonne nouvelle ?
R. R. On a une concurrence intra-européenne ouverte et libre, qui peut permettre d’obtenir des prix raisonnables, mais préservons la spécificité et la qualité de nos transports. A ce sujet, je n’ai aucun doute sur les Allemands, venant de plus loin ce n’est peut-être pas si évident.
VR&T. Qu’attendez vous des groupes, que peuvent-ils améliorer dans le service qu’ils apportent aux collectivités ?
R. R. Il y a une différence de nature et de fonction entre les AOT et les opérateurs de transport qui doit être marquée sous peine de dérives. Mais une fois cette distinction des fonctions établie, il me semble que le dialogue doit être mieux organisé. On ne peut pas juste avoir une AOT souveraine qui définit son cahier des charges dans son coin, puis le fait appliquer. L’AOT a besoin de l’approche pragmatique des gestionnaires de réseau pour faire un cahier des charges qui soit adapté au contexte local et aux réalités financières. Je plaide donc pour plus de proximité, l’AOT doit être éclairée par la profession, qui, en retour, doit comprendre les contraintes politiques, au sens service public du terme, des AOT.
Propos recueillis par Guillaume LEBORGNE
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