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Ewa

La tribune de 6t – La mobilité touristique, un levier de mobilité durable

© Image générée par I.A.
Nicolas Louvet, directeur de 6t

Le temps des voyages polluants à l’autre bout du monde est-il révolu ? Une vision plus durable du tourisme se développe autour du thème de la mobilité : prendre le train plutôt que l’avion, partir moins loin, et même renoncer à la voiture individuelle en vacances, pourtant garante d’autonomie. Les acteurs du tourisme s’emparent largement de cette prise de conscience en développant des offres plus vertes et moins polluantes. Quelle est l’opportunité de ce mouvement dans le champ des mobilités ? Par Nicolas Louvet (Directeur de 6t), Léa Wester (Cheffe de projet chez 6t) et Roseline de Leyris (Chargée d’études chez 6t)

Le trajet aller-retour : un enjeu majeur mais indissociable des autres dimensions de la mobilité touristique

La mobilité représente 77 % des émissions de CO2 du secteur du tourisme. Cette part se compose de 68 % pour le trajet aller-retour, 6  % pour les déplacements sur place et 3 % pour les infrastructures. Ainsi, il semble que l’enjeu majeur est celui du trajet aller-retour. Celui-ci est réparti en 41 % pour le transport aérien et 27 % pour les autres secteurs du transport, principalement l’automobile.  6t a réalisé une étude sur les trajets longue distance en 2022. Celle-ci a notamment montré que seulement 25 % des usagers de l’avion préfèrent l’avion pour lui-même. Pour l’ensemble des autres usagers ce mode constitue un choix par défaut. Par exemple, 35 % préfèrent le train. Outre les distances trop longues, le principal obstacle à l’utilisation du train reste l’absence de lignes correspondant aux besoins de mobilité longue distance comme le montre le faible développement de l’offre de train de nuit en Europe actuellement. 

Dans le cas de l’utilisation de l’automobile, les déplacements sur place constituent un frein réel au report modal pour le trajet aller/retour : si l’ensemble des déplacements n’est pas réalisable en mode alternatif, cela peut conforter le choix d’utiliser sa propre voiture tout au long du séjour et également pour le trajet aller-retour. En France, plusieurs territoires se sont emparés du problème à ces différentes échelles. « Le Bassin d’Arcachon sans ma voiture » ou « La Bretagne sans ma voiture » … adressent les déplacements sur place tout autant que le trajet aller-retour. Des campagnes publicitaires aperçues dans le métro parisien vantent « l’art de vivre à Reims » en précisant que la ville se trouve à seulement 45 minutes de TGV de Paris ou encore « Tours l’inattendue » toujours en s’appuyant sur son accessibilité en train depuis la capitale. 

Dans ce contexte, les combinaisons de modes alternatifs proposées doivent relever le défi de concurrencer la voiture personnelle. Tous les modes ont un rôle à jouer et les solutions portées par les acteurs du train, de la location de voitures ou de vélos doivent répondre aux mêmes standards d’intermodalité que les offres destinées aux déplacements quotidiens. Les questions de flexibilité, de fiabilité, de continuité de la chaîne de déplacement, du dernier kilomètre, de coût perçu… sont autant de sujets que les territoires touristiques doivent aborder dans la conception de leurs solutions de mobilité touristiques durables. Les acteurs du tourisme orientent leurs stratégies selon les tendances et les préoccupations actuelles. L’idée d’un tourisme durable et de proximité séduit un public conscient de la nécessité de changer son mode de vie en général, et sa pratique du voyage en particulier. Ce mouvement est soutenu par l’État à travers les marques Accueil vélo et le site France Vélo Tourisme ou les plans de relance à la suite du Covid19 qui comportent un Fond Tourisme Durable. La mobilité – durable – devient dès lors une façon de promouvoir un autre tourisme, plus respectueux de l’environnement. 

Fidéliser les touristes à des pratiques de mobilité plus vertueuses

Les usages quotidiens se distinguent de moins en moins des comportements en vacances, en mobilité comme pour d’autres types d’activités. Par exemple, on n’utilise plus le plan de bus au quotidien et le guide touristique en voyage, aujourd’hui google maps sert à la fois en vacances et au quotidien, en France et à l’étranger. Dans le contexte de la diffusion des nouvelles technologies dans nos pratiques quotidiennes, les compétences utilisées en voyage sont les mêmes que celles mobilisées au quotidien : s’orienter avec une application d’itinéraires, utiliser des plateformes de référencement pour des restaurants ou des activités… Il en va de même pour la mobilité : un usager de vélo en libre-service ou d’autopartage au quotidien sera plus enclin à utiliser ce type de service pendant ses vacances.

L’inverse s’observe aussi, une expérience en voyage peut avoir un impact sur le quotidien. Le covoiturage est largement associé au tourisme puisqu’il constitue un moyen de voyager. Néanmoins, cette pratique est également répandue pour des déplacements domicile-travail via des applications ou des ententes spontanées entre collègues. Un individu ayant utilisé le covoiturage durant ses vacances, défait des préjugés et satisfait de l’expérience, sera plus ouvert à généraliser cette pratique à son quotidien. Il y a derrière cette idée la notion de fidélisation des usagers : un vacancier utilisateur de covoiturage pourrait être encouragé et incité à y avoir recours chez lui, par des offres promotionnelles par exemple. Le développement de la mobilité expérientielle à travers les modes actifs est également une porte d’entrée pour ce transfert de pratique vers le quotidien. L’utilisation du vélo, pour des trajets en itinérance mais aussi pour la découverte du lieu de vacances à vélo (grâce à l’usage de systèmes de vélos en libre-service, à la location de vélo à la journée, ou encore lors de balades touristiques organisées), peut ainsi porter l’augmentation de la pratique de ce mode au quotidien pour des motifs de loisir ou pour des trajets utilitaires à plus long terme. Le « transfert » de nouvelles habitudes vertueuses de déplacement de la région de vacances vers le lieu de résidence pourrait donc devenir un levier de décarbonation des mobilités quotidiennes. Cette action pourrait à terme être encouragée par des politiques publiques (financement de services de vélos en libre-service, d’infrastructures cyclables sécurisées…) à l’échelle nationale, voire européennes. 

Finalement, l’enjeu est double. Pour qu’une politique de mobilité touristique soit réellement durable, elle doit être complète, c’est-à-dire intégrer pleinement les besoins non seulement des touristes, mais aussi des habitants du territoire. De plus, l’offre doit être exigeante et s’inscrire dans un cadre plus global que l’expérience touristique : elle doit être suffisamment satisfaisante pour donner envie aux usagers de pérenniser telle ou telle pratique vertueuse de mobilité. Sous ces conditions, les répercussions positives seront alors démultipliées. La mobilité touristique devient dès lors un réel levier de changement de comportement et un appui à une mobilité plus durable. 

Ewa

Le e-commerce alimentaire, une pratique moins disruptive qu’il n’y paraît

Le e-commerce alimentaire, c’est-à-dire la livraison à domicile de courses commandées en ligne, a connu un bouleversement à partir de 2020. De nouveaux acteurs offrant des délais ultra rapides sont apparus : le quick-commerce. Il est désormais possible de recevoir ses courses une dizaine de minutes après les avoir commandées. Ces opérateurs garantissent aux urbains pressés de supprimer le fardeau des courses alimentaires et de satisfaire leurs besoins de façon presque immédiate. Une enquête inédite réalisée par 6t bureau de recherche sur le e-commerce alimentaire (décembre 2022) permet de décrypter ce phénomène.

Par Nicolas Louvet, Julie Chrétien et Roseline de Leyris

Nicolas Louvet, directeur de 6t.

Les Parisiens et les Parisiennes ont difficilement pu passer à côté des campagnes publicitaires des acteurs du quick-commerce : « les courses en mieux » (Gorillas), « vos courses livrées chez vous en trois clics » (Cajoo) ou encore « vos courses en quelques minutes » (Getir). Grâce à cette communication, les opérateurs ont obtenu l’attention de potentiels clients, séduits par la facilité. Ils ont aussi capté celle des réfractaires, et notamment des pouvoirs publics, inquiets de ce nouveau modèle de livraison. Une opposition au modèle du quick-commerce s’est ainsi consolidée, alimentée par la sensation d’une accélération du phénomène. Dans une lettre adressée au gouvernement en août 2022, plusieurs élus locaux réclamaient une régulation des « dark stores », maillons essentiels de la chaîne logistique de la livraison ultra rapide. Ceux-ci craignent qu’une multiplication de ces entrepôts urbains nouvelle génération ne menace les petits commerces traditionnels et plus globalement la vie de quartier.
Mais le quick-commerce n’est qu’une option 3.0 du e-commerce alimentaire. Depuis longtemps, les grandes enseignes proposent d’acheminer les courses de leurs clients à domicile ; plus récemment les plateformes de livraison de repas offrent aussi la livraison de courses, dans des délais moins express, avoisinant plutôt les 30-40 minutes. Si l’on replace la livraison express au sein des pratiques plus larges de commande en ligne de courses, que nous disent les usages sur la place du quick-commerce dans nos villes ?

La livraison de courses s’adresse principalement aux familles

Début 2021, les campagnes de communication du quick-commerce visaient principalement les jeunes, sans enfants, peut-être un peu flemmards, et certainement en quête de facilité. L’accent était mis sur la possibilité d’organiser un apéro de dernière minute, de se remettre d’un lendemain de soirée difficile et de commander depuis son lit. Les codes promotionnels permettant de commander pour des montants dérisoires permettaient même aux étudiants aux budgets restreints d’accéder à ces nouveaux services. Si les résultats de l’enquête confirment une sensibilité des plus jeunes au e-commerce, d’autant plus lorsqu’il est « quick », ils montrent que la livraison alimentaire est d’abord portée par les personnes en couple avec enfant. Ainsi, 87 % d’entre eux sont utilisateurs même occasionnels de la livraison de courses, contre 63 % des personnes vivant seules.
De même, 31 % des actifs à temps plein se font livrer des courses alimentaires au moins une fois par semaine, tandis que seuls 14 % des étudiants le font à la même fréquence. Ainsi, le e-commerce alimentaire ne profite pas tant aux étudiants voulant faire des économies ou éviter un aller-retour au supermarché. Il sert plutôt d’appui aux ménages dont le temps est contraint par les activités professionnelles et domestiques : l’enquête montre que 79 % des Parisiens qui commandent leurs courses le font pour gagner du temps. Ce constat a certainement été fait par les acteurs du quick-commerce. Aujourd’hui, les publicités ciblent davantage le profil identifié : on y voit des couches, des enfants et des parents. Getir affiche par exemple la promesse de livrer « sa confiture préférée en quelques minutes » à une petite fille et son père.

Roseline de Leyris,
Chargée d’études chez 6t.

La prédominance des grandes enseignes

Or, ces e-consommateurs sont avant tout clients de la grande distribution. L’enquête réalisée par 6t met en lumière la prédominance des services de livraison des grandes enseignes, acteurs historiques positionnés sur le marché de la livraison depuis le début des années 2000. Ainsi, parmi les utilisateurs du e-commerce alimentaire en général, 79 % des Parisiens mentionnent passer par les services des grandes enseignes, tandis que moins de la moitié mentionnent les applications de quick-commerce. Le « boom » des services de livraison ultra rapide et les campagnes publicitaires intensives masquent le fait que les acteurs traditionnels dominent toujours le marché.
Ainsi, si le débat se focalise aujourd’hui sur les quick-commerçants, la réalité de l’usage du e-commerce alimentaire est différente. Les opérateurs de quick-commerce connaissent des difficultés et plusieurs ont aujourd’hui disparu. A Paris, nous sommes passés d’une dizaine de services à trois : Getir, qui a racheté Gorillas début décembre 2022, Flink et Gopuff sont opérationnels à ce jour.

Julie Chrétien, Cheffe de projet chez 6t.

Encadrer la logistique urbaine dans son ensemble

La prédominance des grandes enseignes dans l’écosystème du e-commerce alimentaire nous invite ainsi à décentrer le regard de la livraison ultra rapide et de ses externalités négatives. D’autant plus que les frontières entre les différentes solutions sont poreuses. Actuellement, les acteurs traditionnels de la grande distribution affinent leurs stratégies logistiques. Les drives piétons des grandes enseignes, qui se matérialisent par des entrepôts urbains dédiés à la collecte de courses par les clients, offrent de nombreux points communs avec les « dark stores ». Très récemment, en novembre 2022, Carrefour a ouvert un entrepôt à Rungis, dédié à la livraison de courses dans Paris. L’objectif de l’entreprise, annoncé dans un communiqué de presse, est clair : augmenter le nombre de livraisons et accélérer les délais en développant « la livraison le même jour ». L’enquête montre également que le recours aux grandes enseignes n’est pas toujours synonyme de long délais : lors de leur dernière commande de course, 71 % des Parisiens ayant utilisé un service de grande enseigne ont été livrés le jour même.
Ainsi, tracer une ligne claire entre grandes enseignes et nouvelles plateformes de e-commerce ne permet pas d’avoir une vision exacte des usages et des enjeux. Tous les acteurs du e-commerce, alimentaire ou non, cherchent à proposer des délais toujours plus rapides. Leurs méthodes logistiques façonnent la ville : pour répondre aux besoins de consommateurs exigeants, les flux s’intensifient et les entrepôts se multiplient. Il s’agit alors d’encadrer la logistique urbaine dans son ensemble, et non de se focaliser sur une catégorie de service.