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Ewa

Procès de l’accident du TGV Est : un « aveuglement collectif », selon le procureur

Au procès de l’accident du TGV survenu lors d’une session d’essais le 14 novembre 2015 à Eckwersheim (Bas-Rhin), le procureur a répondu, le 14 mai 2024, par des réquisitions de culpabilité quasi générale. L’accident, a-t-il assené, est le résultat d’un « aveuglement collectif (…) Alors que ces essais étaient destinés à assurer la sécurité des futurs voyages commerciaux sur la nouvelle voie [entre Paris et Strasbourg], tout semble avoir été fait pour mettre en danger la conduite de la rame », a-t-il lancé avant de dresser la liste des « décisions absurdes » ayant mené au drame qui a fait 11 morts et 42 blessés.

Le procès se déroule au tribunal correctionnel de Paris. Le procureur a requis un an d’emprisonnement avec sursis à l’encontre du conducteur de la rame, deux ans avec sursis contre son supérieur hiérarchique (le Cadre Transport Traction, CTT), présent dans la cabine au moment de l’accident. « La cause directe de l’accident, c’est le freinage tardif [à l’approche d’un virage serré]. Les personnes physiques présentent dans la cabine sont donc les auteurs directs de l’infraction », estime t-il. Le CTT « avait la responsabilité de déterminer le point kilométrique de freinage et les modalités du freinage ».  Le procureur a souligné « un manque total de rigueur » pour déterminer ce point de freinage, « aucun calcul, aucun schéma », dit-il, pointant aussi l’absence de débriefing avant la marche d’essai qui aurait pu aboutir à une modification de ce point de freinage.

Le magistrat a aussi voulu savoir « si les consignes de freinage étaient claires et comprises », ce qui relève de la responsabilité du CTT. « Peut-être a-t-il pensé l’avoir dit, il avait peut-être en tête, mais il ne s’est pas assuré de la compréhension de cette consigne par l’équipe ».

Quant au conducteur, pouvait-il s’opposer aux décisions prises par le CTT ou le pilote de Systra, responsable de l’organisation des essais ? « Certains ont présenté le conducteur comme un simple exécutant des consignes qu’on lui donne, mais cette vision présente deux failles : une juridique, notre droit étant fondé sur la responsabilité individuelle, une pratique, puisqu’en essais, le conducteur a forcément la possibilité de prendre des initiatives », selon le procureur.

En revanche, il n’a pas retenu que le pilote traction de Systra avait « participé à la décision de fixation du point kilométrique de freinage ».  Estimant en revanche que Systra, en tant que personne morale mise en examen dans le procès, a mal évalué des risques, il a par ailleurs reproché un manque de formation des équipes : « La cheffe de projet n’a aucune formation en matière ferroviaire (…) et ce manque de connaissances a fait qu’elle ne s’est pas rendu compte de ces mauvaises décisions », a t-il taclé. Même constat pour le chef d’essai : « Il a eu un simple tutorat de trois jours avant sa prise de fonction. S’il avait été formé au logiciel de vitesse, il aurait pu l’utiliser ».

Le procureur a aussi reproché à SNCF (alors SNCF Mobilités), le manque de formation de l’équipe de conduite: « Le personnel SNCF a reconnu qu’ils n’avaient pas de formation spécifique, et n’était pas capable de calculer la distance de freinage ».

Enfin, il a pointé le « manque de coordination » entre Systra et la SNCF , sur la « transmission tardive de documentation », et le « caractère lacunaire des consignes ». Il a donc requis  225 000 euros d’amende pour Systra, le maximum légal encouru. Contre SNCF et SNCF Réseau, 200 000 et 150 000 euros, multipliés par deux en raison de l’état de récidive, soit 400 000 euros. Et 300 000 euros contre SNCF Réseau (150 000 euros multipliée par deux en raison également de l’état de récidive légale).

Yann Goubin

Ewa

Le procès de l’accident ferroviaire d’Eckwersheim s’ouvre le 4 mars

Le procès de l’accident d’un TGV, survenu le 14 novembre 2015 à Eckwersheim au nord de Strasbourg, lors des essais sur la LGV Est, s’ouvre lundi le 4 mars devant le tribunal de Paris. L’accident avait fait 11 morts et 42 blessés, dont 21 grièvement.

Au cours du procès qui doit durer plus de deux mois, les magistrats auditionneront les six prévenus, trois personnes morales (SNCF Mobilités, SNCF Réseau et Systra, filiale codétenue par la RATP et la SNCF) et trois personnes physiques (le conducteur, son chef de conduite, et le pilote de Systra en chargé du suivi des essais).

Ils entendront les parties civiles, les familles des victimes, à travers les plaidoiries de leurs avocats. Suivront les réquisitions du procureur et les plaidoiries des avocats de la défense. Quatre syndicats représentants les agents SNCF (UNSA Ferroviaire, CGT, UFCAC CFDT, et Sud Rail) seront entendus à l’audience du 2 mai. Le procès doit durer jusqu’au 17 mai.

255 km/h dans une courbe très serrée

Rappel des faits. Alors que se déroulaient les essais à grande vitesse pour homologuer la deuxième partie de la ligne à grande vitesse Est Européenne, « la rame d’essai, circulant sur la voie 2 en direction de Strasbourg, déraille peu avant le pont sur le canal de la Marne au Rhin, à l’entrée de la courbe de raccordement de la ligne nouvelle avec la ligne classique Paris-Strasbourg sur la commune d’Eckwersheim », décrit le rapport du Bureau d’enquêtes sur les accidents terrestres (BEA-TT) publié le 23 mai 2017.

L’accident du TGV est survenu le lendemain de l’attentat terroriste du Bataclan. Mais la piste criminelle a rapidement été écartée et l’enquête du BEA-TT a conclu que « la cause directe de l’accident est la vitesse de 255 km/h dans une courbe serrée de 945 mètres de rayon ». Les enquêteurs ont ajouté que « cet excès de vitesse est dû à un freinage inapproprié par rapport à la vitesse initiale du train pour aborder la zone où la vitesse maximale prescrite n’est plus que de 176 km/h, et qui commence juste avant la courbe en question ».

Déterminer les responsabilités

Les magistrats vont donc devoir déterminer les responsabilités de chacun, parmi les prévenus. Qui n’a pas respecté les freinages entre le pilote ?  Le chef de conduite ou le pilote de Systra (qui n’avait pas de rôle de conduite) ? Selon quelles marches d’essai ? Le conducteur et son chef de conduite (le cadre transport traction dans le jargon SNCF) n’ont-ils pas été perturbés par des échanges avec les responsables des essais via l’interphonie ? Le nombre de personnes en cabine n’était-il pas un autre facteur perturbant au moment où il fallait freiner ?

Systra, chargé de l’homologation de la voie, se défend d’avoir joué un rôle dans l’accident. L’entreprise a défini les vitesses maximales à ne pas dépasser au passage de différents points kilométriques. Mais n’ayant aucune compétence en manière de conduite, elle a confié ce rôle à la SNCF qui s’est chargée de définir une marche pour y parvenir.

L’ancien secrétaire général du syndicat FiRST, Bernard Aubin, ne voudrait pas que « la seule erreur humaine constitue la cause de l’accident ». Lui qui a occupé un poste lié à la sécurité des circulations – il est un ancien Ingénieur Transport Exploitation – se dit « choqué par les déclarations de la SNCF qui avait, cinq jours après ce drame, braqué les projecteurs sur une possible erreur humaine et l’équipe de conduite. Or, le conducteur d’une rame d’essai obéit à des ordres et ne peut être mis en cause que s’il a désobéi à ces ordres, pas si ces derniers étaient flous ou erronés », commente Bernard Aubin. La mise en examen, en tant que personnes morales, de SNCF Mobilités (ex-SNCF Voyageurs), SNCF Réseau et Systra, va dans le sens d’un possible partage des responsabilités.

Nouvelles procédures pour les essais SNCF

Depuis l’accident, la compagnie ferroviaire a revu ses procédures pour les essais, notamment pour la formation des agents conduites de l’Entité d’appui service traction (l’EAST) qui assure les missions de conduites des trains d’essai. Dans une réponse au BEA-TT qui avait fait des recommandations à l’issue de son rapport, la SNCF détaille les nouvelles mesures et leurs applications.

Les voici retranscrites : « Les stratégies des freinages ont été normées (freinage rhéostatique ou freinage maximal de service) […]. Des abaques [règles de calcul, ndlr] calculés par le Centre d’ingénierie du matériel fournissent des distances minimales de freinage pour les paliers de vitesse et déclivités rencontrées sur les marches pour chacun de ces deux types de freinage […] ; les feuilles de marches sont éditées par la maîtrise d’œuvre sous forme de graphiques, permettant la rédaction avant le jour de l’essai, de fiches train d’essai, et les échanges préalables entre l’EAST et le maitre d’œuvre sur la faisabilité du parcours envisagé ; le modèle des fiches train est normé, identique pour tous les intervenants. La fiche train est intégralement parcourue lors du briefing cabine (qui regroupe toutes les personnes devant être présentes en cabine lors de l’essai) afin d’assurer sa parfaite compréhension par tous […]. Enfin des fiches réflexes fixent la norme du comportement à adopter dans un certain nombre de situations inhabituelles ».

Yann Goubin