Pour le groupe SNCF, l’année 2022 avait été notamment marquée par la bonne performance de deux de ses filiales, Geodis et Keolis. Cette dernière a présenté ses résultats le 10 mars, depuis son nouveau siège de La Défense. « Nous sortons des turbulences 2020-2021, deux années difficiles [liées à la crise sanitaire, nldr] et qui sont maintenant surmontées », veut croire Marie-Ange Debon, dirigeante de l’entreprise de transport urbain et interurbain.
La fréquentation de passagers sur les réseaux de transport public a quasiment retrouvé son niveau d’avant-Covid (95 % en France, 80% à l’étranger) et le chiffre d’affaires de Keolis est par conséquent reparti à la hausse en 2022, à 6,7 milliards d’euros (+6,4 % par rapport à 2021, +2,1 % par rapport à 2019, avant le Covid). Partagé à peu près équitablement entre les activités françaises (3,3 Mds€) et internationales. L’effet change sur la croissance du chiffre d’affaires est de 100 M€.
En France, Keolis a notamment réussi à sauver le marché de Bordeaux (son troisième plus gros contrat), et de Dijon, et gagné en offensif les réseaux urbains de Perpignan et de Valenciennes. En Ile-de-France, l’opérateur s’est aussi placé sur plusieurs marchés de bus Optile, en moyenne et grande couronne. Quant à Effia, la filiale stationnement de Keolis, elle a connu une reprise d’activité (+26% en 2022) dans ses parkings de gare et notamment dans le Sud de la France. Et voit son chiffre d’affaires dépasser d’un quart son niveau d’avant-Covid.
Au total, sur l’Hexagone, les gains de chiffre d’affaires représentent 680 M€ en France en 2022, avec un solde positif de 110 M€ entre les marchés gagnés et cédés à la concurrence.
L’Angleterre ferroviaire reste « un marché clé «
A l’étranger où Keolis réalise l’autre moitié de son chiffre d’affaires et a achevé sa revue de portefeuille en cédant ses activités en Allemagne et en Norvège, la filiale de la SNCF se maintient sur les franchises ferroviaires britanniques : « un marché chahuté mais clé », selon Marie-Ange Debon. Le contrat Thameslink (1300 km de lignes, 350 millions de passagers) a été renouvelé l’an dernier mais la franchise ferroviaire du Pays-de Galles (Wales & Borders) exploitée par Keolis a été renationalisée par le gouvernement.
Au final, ce sont principalement les contrats d’exploitation des bus de Sidney, des Pays-Bas, de Suède et du métro de Dubaï, et la reprise des lignes touristiques au Canada qui tirent le chiffre d’affaires 2022, indique la directrice financière du groupe, Christelle Villadary. Quant au laborieux contrat des RER de Boston qui avait valu de sérieuses déconvenues à Keolis jusqu’en 2019, il est enfin en ordre de marche, selon Bernard Tabary, le directeur international du groupe. « Ça roule… », assure-t-il.
Si 2022 renoue avec la reprise de l’activité, Keolis a dû, comme ses concurrents, faire face à la flambée du prix de l’électricité et aux tensions sur le marché du travail. Comme pour la RATP (et sans doute Transdev qui présentera ses résultats le 21 mars) la pénurie de conducteurs et de personnel de maintenance a entravé l’offre de transport et entrainé des pénalités financières (dont le montant n’est pas publié) pour services non assurés. Ces facteurs conjoncturels ont eu un impact sur le résultat net qui est néanmoins positif à 48 millions d’euros, en progression de 28 M€ par rapport à 2021.
Le groupe maintient une petite marge et améliore ses ratios financiers avec un cash flow libre à 94 M€ contre 73M€ en 2021, et une dette nette sur Ebitda (qui mesure la profitabilité) à 2,7 x, en amélioration de 0,2x par rapport à 2021.
En 2023, les grands rendez-vous en ligne de mire sont bien sûr les lignes du futur métro automatique Grand Paris Express. Keolis a répondu aux trois appels d’offres d’Ile-de-France Mobilités pour les lignes 15, 16-17,et 18, même « si tout a été fait pour entraver la concurrence » [en accordant le rôle de gestionnaire d’infrastructure à la RATP, ndlr], critique Frédéric Baverez, directeur exécutif France de Keolis.
Quant à l’ouverture à la concurrence des lignes de bus RATP à Paris et en proche couronne, prévue au 1er janvier 2025, « Nous, on est prêts, IDFM aussi…, a-t-il poursuivi. Mais si les nouveaux entrants devront assumer les frais de licenciement des agents de la RATP, nous n’irons pas ! Pas un seul pays de l’OCDE a pensé un truc pareil ! », reprend Frédéric Baverez.
Nathalie Arensonas