Comme partout ailleurs dans l’industrie, l’actuelle crise sanitaire liée au coronavirus a de sérieuses répercussions sur la production du constructeur Scania. En Europe, à la date du 30 mars, les chaînes d’assemblage sont presque toutes à l’arrêt. L’usine suédoise de Sodertälje, qui fabrique en particulier les châssis, est fermée depuis plusieurs jours. Le site finlandais de Lahti, qui assemble certaines carrosseries, dont celles des autocars interurbains de la gamme Interlink, a pu sortir quelques ultimes véhicules dans la semaine qui précédait, avant d’arrêter toute fabrication. L’usine polonaise de Slupsk, qui tournait encore à effectif réduit, devait à son tour cesser son activité début avril, rencontrant toujours davantage de difficultés d’approvisionnement.
Quant aux sites de Angers, ils avaient déjà été fermés dans la troisième semaine de mars. Cette fermeture concerne d’ailleurs non seulement l’usine de camions, mais aussi le Centre de préparation et d’adaptation Scania (CAPS) des véhicules neufs, qui prend en charge les préparations des autocars et autobus, puisque notamment les autobus assemblés en Pologne ne peuvent plus être convoyés vers la capitale angevine, tandis que les équipements informatiques embarqués, tels les SAE (Systèmes d’Aide à l’Exploitation), se trouvent maintenant en rupture d’approvisionnement.
La seule bonne nouvelle à l’horizon semblait alors venir de la Chine, qui avait pu rouvrir, après la mi-mars, son usine de Suzhou, située à 200 km à l’ouest de Shanghai. Malgré cette situation totalement inédite, l’organisation de l’après-vente sur le territoire français demeure entièrement opérationnelle, dans le strict respect, naturellement, des mesures barrière qui ont été édictées, et à l’exécution desquelles veille tout particulièrement le constructeur.
La reprise ne pourra être que progressive
Chez Scania, on ignore, bien sûr, à quelle échéance la reprise interviendra, mais on imagine déjà qu’elle ne pourra s’effectuer que très progressivement. D’autant que ce ne sont pas les seules chaînes de fabrication qu’il faudra alors relancer, mais aussi toutes celles qui régissent la logistique en amont…
« Certains de mes clients autocaristes ont arrêté à 100 % leur activité, explique Damien Thomine, directeur Cars et bus de Scania France. Il faut les rassurer. Se sentir soutenu, dans ces circonstances, par Scania Finance, notamment dans la renégociation de leurs contrats, c’est d’ailleurs d’une grande aide ». Chez le constructeur, on redoute qu’il faille du temps avant que les touristes étrangers ne reviennent sur le sol français, et que les autocaristes aient de nouveau suffisamment confiance en l’avenir pour consentir à investir de nouveau. « Ce qui me rassure néanmoins, c’est le positionnement particulier de Scania, tant sur les marchés publics que sur la transition énergétique », tempère Damien Thomine.
Concernant 2019, Scania France se déclare satisfait de son activité dans le domaine du transport collectif de voyageurs. Le constructeur a dépassé son objectif initial de cent autocars livrés dans l’Hexagone, même s’il s’avoue avoir été surpris par la non-émergence de la forte demande à laquelle il pouvait légitimement s’attendre dans le cadre du renouvellement des premiers cars Macron. Nul besoin toutefois de longtemps chercher pour trouver l’explication : le secteur a récemment connu une forte restructuration, tandis que nombre d’entreprises françaises ont perdu l’exploitation de lignes régulières au profit d’opérateurs étrangers.
La part des énergies alternatives ne cesse de progresser
En revanche, la part des énergies alternatives dans les autocars vendus par Scania -qui constituent au demeurant sa spécificité- n’a cessé de progresser, atteignant 80 % des véhicules commandés en 2019. Non seulement cette part devrait continuer de croître cette année, mais le volume global des commandes lui-même pourrait aussi augmenter avec la sortie de nouveaux appels d’offres en 2020. De quoi donner toute confiance à la marque au célèbre griffon.
Côté autobus, l’année 2019 se solde par 55 véhicules, auxquels il convient cependant d’ajouter les 44 supplémentaires au compte des mois de janvier et février de cette année. L’un dans l’autre, Scania France a donc battu son propre record avec, au total, plus de 200 commandes de véhicules de transport collectif de voyageurs pour 2019, en diversifiant, de surcroît, son portefeuille de clients. Et cette année, malgré les circonstances très défavorables, le constructeur devrait encore, très certainement, dépasser les 200 commandes de véhicules.
En fin d’année dernière, Scania a livré à la RATP, au Centre Bus de Créteil, 20 autobus articulés de 18 m fonctionnant au gaz. La Régie les a mis en service sur de nouvelles lignes temporaires desservant les hôpitaux parisiens, et qui sont exclusivement réservées aux personnels hospitaliers. Des techniciens appartenant au service après-vente du constructeur peuvent, à tout instant, être mobilisés pour intervenir sur le terrain, s’il en était besoin, et assister l’opérateur, car ces véhicules n’ont encore que très peu de kilomètres à leur actif.
Les transports en commun sont devenus prioritaires
En cette période de crise sanitaire, les transports en commun sont devenus prioritaires pour le réseau Scania, tout comme les camions de grumes qui alimentent les usines de pâte à papier fournissant la matière première dans la fabrication des masques de protection. Le transport régulier des personnels hospitaliers à Paris revêt, dans ce cadre, la plus haute importance. « Tout se passe très bien avec la RATP, qui se montre satisfaite de nos Citywide », confirme Damien Thomine.
Des véhicules similaires avaient d’ailleurs déjà été fournis à Grenoble, également en fin d’année dernière. Dans la catégorie des standards de 12 m, le constructeur a tout récemment livré trois véhicules « gaz » pour Saumur, 17 autres pour Nantes, et un véhicule « éthanol » pour La Rochelle. En ce moment, 15 véhicules « éthanol » sont en cours de livraison à Montpellier, et 15 autres, en version « biodiesel », à Rouen.
Désormais, le constructeur commence à entrer en discussion avec les autorités organisatrices et opérateurs sur son tout nouvel autobus 100 % électrique, se considérant fin prêt, cette fois, pour répondre à des appels d’offres. « Nous avons pour objectif de devenir un acteur majeur de l’électromobilité, assure le directeur Cars et bus de Scania. Notre réussite sur le gaz s’explique d’abord par le temps que nous avions consacré au développement d’un véhicule d’une très grande fiabilité, et par l’énergie que nous avions déployée pour former au mieux les équipes de notre réseau. Ce fut la même chose pour le bus électrique : il ne fallait pas être présent trop tôt… ».
La commercialisation du Citywide 100 % électrique attendue en juillet
Le début de la commercialisation du Citywide 100 % électrique est prévu pour juillet prochain. Il viendra compléter la palette des énergies alternatives proposées par Scania, déjà, sans conteste, la plus large du marché.
L’électromobilité suppose, comme l’on sait, une compréhension extrêmement pointue, de la part des constructeurs, des caractéristiques et contraintes d’exploitation (parfois ligne par ligne !) qui peuvent être spécifiques à l’opérateur avec lequel il va œuvrer. Le type et le nombre de batteries embarquées, le mode de rechargement adopté, ou encore l’allure des cycles de charge-décharge envisagée, sont autant de paramètres qui vont déterminer le dimensionnement des installations fixes, l’autonomie des véhicules, la durée de vie des batteries et, in fine, l’équilibre technico-économique du projet.
Tout cela, Scania semble l’avoir bien compris, lui qui s’est accordé le temps nécessaire notamment pour former au mieux ses équipes, et qui compte bien aujourd’hui jouer de pédagogie auprès de ses clients pour leur expliquer le raisonnement préludant aux solutions qu’il va leur proposer.
Philippe Hérissé