Le contrat de concession que vient de démarrer en janvier Transdev dans le Sud-Est Brabant, autour des villes d’Eindhoven et d’Helmond aux Pays-Bas, est emblématique pour le groupe de transport public français qui veut devenir « le premier exploitant européen de bus électrique zéro émission » : dans le cadre de ce nouveau contrat, il a intégré 43 bus électriques aussitôt mis en service et prévoit une flotte 100 % électrique avec plus de 200 bus d’ici à huit ans.
« En 2012, nous avons élaboré une nouvelle stratégie pour nos transports publics incluant trois objectifs : répondre à la demande des voyageurs avec une offre fréquente, s’intéresser à la mobilité globale, et rendre nos transports durables, raconte Arwina de Boer, chargée des transports publics à la province du Brabant. La transition énergétique devait être réalisée sans apports financiers supplémentaires. Le contrat représente 55 millions d’euros, dont 23 millions de subventions. Nous estimons que l’opérateur doit nous montrer ce qu’il peut faire, et que nous devons donner un maximum de latitude aux forces du marché », précise-t-elle encore.
Pour gagner le marché, Connexxion (groupe Transdev), qui exploitait déjà les transports publics de la région depuis plus de 15 ans, devait donc acheter de nouveaux bus « propres ». L’exploitant a noué un partenariat avec le Néerlandais VDL, un constructeur installé dans la région et qu’il connaît bien puisqu’il exploite un bon nombre de bus de cette marque. « Après de nombreuses discussions, nous avons choisi un bus électrique articulé de 18 mètres, à plancher bas, accessible aux chaises roulantes et aux poussettes, avec un look un peu métro », rappelle Juul van Hout, directeur régional Connexxion. « Ces bus, d’une capacité de 125 passagers et d’un poids de 19 tonnes, ont un design BRT. L’intérieur est également moderne et innovant », souligne de son côté Ard Romers, le directeur général VDL.
Parmi les grands choix, il a été décidé d’équiper les bus avec 9 batteries d’une capacité de 180 kWh. Lorsque les bus ont commencé à être exploités, il est apparu que les batteries des bus se déchargeaient en trois heures, après avoir roulé en moyenne 75 km. Comme on ne peut pas recharger tous les bus en même temps, il a donc fallu mieux répartir les points et les moments de charge des batteries, pour éviter de recourir à trop de bus supplémentaires.
« Les horaires ont été revus et avec VDL, nous avons développé un nouveau logiciel et une boîte à outils pour mieux répartir les bus et les temps de recharge. L’organisation est très complexe : les chauffeurs doivent être au bon endroit au bon moment avec le bon bus. Un manager au dépôt veille aux recharges. Mais à terme, nous espérons nous en passer », raconte Juul Van Hout, en précisant avoir comptabilisé 8 % d’heures supplémentaires de travail, ce qui a nécessité l’embauche de conducteurs supplémentaires. « Un défi pour la direction des Ressources humaines qui a dû mettre en place les formations adéquates ! », souligne encore le directeur régional Connexxion, qui reconnaît que l’investissement a été très élevé : une centaine de millions d’euros. En plus des bus, qui coûtent en moyenne deux fois plus cher qu’un bus diesel, il a fallu aussi équiper les stations en portiques de recharge sur lesquels les bus branchent leur pantographe. Dix chargeurs rapides mis en place (trois en extérieur, les autres au dépôt) permettent de recharger les batteries des bus en 45 minutes (mais en général plutôt 35 minutes puisque les batteries n’arrivent pas complètement à plat), auxquelles s’ajoutent 22 charges lentes utilisées la nuit (pour une recharge en 4 heures 30).
Et le responsable régional de s’interroger : « Comment rendre l’exploitation rentable ? » Premières réponses : en baissant les coûts de l’énergie et en augmentant la qualité de service. Selon Connexxion, après trois mois de service, les recettes ont déjà augmenté de 5 % de plus que ce que prévoyait le groupe.
Pour la suite, Connexxion ne s’interdit pas de faire évoluer le matériel, notamment en achetant des bus fonctionnant à l’hydrogène. Déjà, deux bus à hydrogène vont être mis en service ce mois-ci.
Pour Transdev, les Pays-Bas représentent donc un véritable terrain d’expérimentation puisque le groupe français s’apprête aussi à exploiter d’ici à la fin de l’année 100 bus électriques autour de l’aéroport d’Amsterdam Schiphol. Et pour partager les enseignements acquis ici mais aussi dans d’autres pays (tout particulièrement en Californie ou en France), un « living lab » a été mis en place sur les questions de matériel, de batterie, d’exploitation, ou de coûts, permettant de modéliser les données et d’identifier les solutions les plus pertinentes en fonction du contexte.
M.-H. P.