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Ewa

La DB ébranlée par la crise, mais dans le vert

La récession a vu s?écrouler ses activités fret, mais la DB?parvient à dégager un bénéfice de 830 millions d?euros. Alors que le pire est désormais derrière, les ambitions internationales de la compagnie restent intactes La crise a laissé des traces, mais la Bahn garde la tête hors de l’eau. Après une année difficile, marquée par l’effondrement de ses activités de fret et de logistique, la compagnie allemande parvient à se maintenir dans le vert, bouclant son exercice sur un bénéfice de 830 millions d’euros. Un résultat en recul d’un tiers par rapport à 2008 mais toutefois meilleur qu’attendu, alors que le retournement de conjoncture a sapé l’un des principaux piliers du groupe : le transport de marchandises par voie de chemin de fer ou par la route dévisse de presque 20 %.
Plombé par cette dégringolade, le chiffre d’affaires cède 12,3 % à 29,3 milliards d’euros. Pour ne rien arranger, la compagnie a bataillé pendant toute l’année avec une disponibilité réduite de son parc d’ICE, dont les essieux montrent des signes d’usure prématurée et des pannes à répétition sur le réseau de S-Bahn berlinois. Résultat : les capacités de transports de voyageurs se sont elles aussi contractées : -1,6 %.
De fait, la Bahn a évité de sombrer complètement grâce au plan d’austérité activé il y a un an : 450 millions d’euros d’économie, réalisées entre autre dans les services administratifs. Mais la compagnie sauve aussi les meubles grâce à plusieurs « recettes exceptionnelles », notamment une juteuse opération foncière autour de la nouvelle gare de Stuttgart, qui lui rapporte 600 millions d’euros. Autre source de revenu : la gestion du réseau, le résultat d’exploitation de DB Netz progressant de 39,2 %, alors même que les demandes de sillons reculent.
Il n’en fallait pas plus pour que certains voient dans ces bénéfices 2009 un tour de « passe-passe » comptable. La DB, elle, se félicite d’avoir « pu défendre ses positions compétitives même dans la pire des crises ». La compagnie, qui estime que le plus dur est désormais derrière, pense à l’avenir et affirme qu’elle va poursuivre son expansion à l’étranger, en particulier dans le segment passagers, comme l’illustre sa récente offre d’achat du britannique Arriva.
Pour 2010, la compagnie allemande table sur une progression de son chiffre d’affaires de 5 %, mais se montre prudente quant à l’évolution du fret : « il faudra attendre 2014 avant de retrouver les volumes d’avant crise », calcule Rüdiger Grube, le patron de la DB.
 

Antoine HEULARD

Ewa

La DB opte pour l?électricité verte? mais ne convainc pas les écolos

La compagnie veut soutenir les producteurs d?énergie propre et permettre aux voyageurs de compenser leurs émissions de CO2. Greenpeace dénonce des « mesurettes » Avec 16 000 GWh consommées chaque année, la Deutsche Bahn est de loin le plus gros consommateur d’électricité d’Allemagne. Et indirectement un très gros pollueur : plus de la moitié de ses besoins sont couverts par des centrales à charbon, qui émettent des millions de tonnes de gaz à effet de serre.
D’ici 2020, la DB entend se montrer plus vertueuse. Objectif : atteindre 30 % d’énergies renouvelables. Il s’agirait alors de quasiment doubler son recours à l’électricité verte. Pour cela, elle vient de signer un contrat d’approvisionnement avec un opérateur d’énergie « propre » du nord de l’Allemagne : SWB est à la tête d’un gigantesque parc éolien, capable de fournir suffisamment de courant à six ICE pendant un an. Autre initiative : la DB propose des « billets écolos » à sa clientèle d’affaires. Le système est inspiré par les compagnies aériennes. Moyennant un supplément de 1 %, ces usagers peuvent réduire leur emprunte écologique : le complément servira à financer des projets d’électricité propre. Le système pourrait être étendu à l’ensemble des voyageurs dès l’an prochain.
Mais les associations de défense de l’environnement sont sceptiques. Elles évoquent des « mesurettes symboliques » et doutent surtout de la sincérité de cet engagement. En cause : un projet de centrale à charbon, ultrapolluante, actuellement en chantier dans la Ruhr et dont le principal bénéficiaire sera… la Deutsche Bahn. « La DB montre ainsi son vrai visage », critique Andree Böhling, responsable des questions énergétiques chez Greenpeace.
 

Antoine HEULARD

Ewa

La Bahn tend la main à ses adversaires

Alors que ses challengers ne cessent de gagner du terrain, la DB leur propose de mettre fin à une guerre jugée « contre-productive » sur le segment du transport régional. Un geste d?apaisement Seize ans après l’ouverture du trafic régional à la concurrence, la Deutsche Bahn sort le drapeau blanc. Alors que ses challengers ne cessent de grignoter des parts de marché, l’opérateur historique leur propose une trêve aussi surprenante qu’inattendue. « Il faut mettre fin à la guerre des tranchées, affirme Frank Sennhenn, le directeur de DB Regio. Nous avons un objectif commun : transporter toujours plus de passagers par le rail. »
L’heure serait donc au calumet de la paix, et, pour le prouver, la Bahn fait plusieurs pas en avant. Elle se dit notamment prête à dévoiler tous ses secrets d’exploitation lorsque l’une de ses franchises sera mise en jeu : nombre de passagers par ligne, recettes, structures des coûts, etc. Elle livrerait ces données ultraconfidentielles aux autorités ferroviaires, organisatrices des appels d’offres. Objectif affiché : permettre à ses rivaux de mieux calculer leurs coûts. « Pendant longtemps, nous étions accusés de partir avec un avantage du fait de notre position d’ancien monopole, détaille une porte-parole. Cet argument ne tient plus si nous jouons la transparence. »
Autre concession : les concurrents pourraient être autorisés à utiliser les marques « S-Bahn » ou « Regional Express », actuellement propriétés exclusives de la Bahn. L’opérateur historique se propose aussi d’assurer la billetterie des compagnies rivales et de les associer aux négociations portant sur la grille tarifaire. L’opérateur historique donnerait ainsi satisfaction à des revendications de  longue date.
En lâchant du lest, la DB espère en échange convaincre les donneurs d’ordres d’opter plus systématiquement pour des contrats d’exploitation dits “nets”, c’est-à-dire ceux dont le volume d’affaires dépend du nombre de passagers transportés. Plus il y a d’usagers et plus l’opérateur gagne de l’argent. « Ces contrats sont une incitation à proposer le meilleur service possible, à l’inverse des contrats “bruts”, où le risque opérationnel est couvert par les subventions quel que soit le volume de billets vendus », poursuit la DB.
Dans cette configuration, les compagnies à bas salaires partent favorites, à l’inverse de la DB dont les coûts salariaux sont de 30 à 40 % supérieurs à ceux de ses adversaires.
La main tendue n’est donc pas sans arrière-pensée. En seize ans, la DB a perdu 18 % du marché régional. Désormais, elle préfère prendre l’initiative, alors que pour la première fois elle se retrouve épinglée par l’Agence des réseaux, l’organisme chargé de garantir une juste compétition dans les anciens secteurs monopolistiques.
En ligne de mire : les taxes de gare et les prix de l’électricité, jugés trop opaques. Conséquence, la compagnie de Rüdiger Grube doit revoir sa copie. D’ici cinq mois, elle devra présenter une nouvelle grille tarifaire, « transparente et équitable ». Faute de quoi des sanctions seront prises.
En attendant, cette condamnation donne de nouveaux arguments à ses rivaux. Certains commencent déjà à porter plainte contre la Bahn : ils exigent le remboursement d’une partie des taxes versées au cours des dernières années et qui auraient été volontairement gonflées. En cas de succès de leur démarche, de nombreux opérateurs pourraient leur emboîter le pas.
 

Antoine HEULARD

Ewa

ICE : la Bahn et l?industrie enterrent la hache de guerre

Depuis de très longs mois, une fragilité détectée sur les essieux des ICE cristallise les tensions. Après avoir traîné les pieds, les constructeurs ont accepté de financer en partie le renouvellement des pièces L’affaire empoisonnait leurs relations depuis plus d’un an. Après d’âpres négociations, Alstom et la Deutsche Bahn ont fini par se mettre d’accord : le constructeur français va fournir 1 872 essieux de « nouvelle génération » à la compagnie. Des pièces à la solidité renforcée qui, à partir de 2011, équiperont les 67 ICE de type T de la Bahn. Conçus par Alstom, associé à la fabrication des trains à grande vitesse allemands en tant que sous-traitant, les essieux d’origine montrent des signes d’usure prématurée. Résultat pour l’opérateur : des contrôles dix fois plus fréquents de son matériel, imposés par l’autorité ferroviaire fédérale. Les trains à grande vitesse doivent être inspectés tous les 30 000 km, contre un passage par l’atelier tous les 300 000 prévu par le constructeur. Ulcérée par ces nouvelles contrain-tes et lassée de devoir jongler avec une disponibilité de son parc, la DB a choisi de changer les pièces défaillantes. L’opération va coûter entre 50 et 100 millions d’euros. Mais Alstom réglera « une partie importante » de la note, explique Volker Kefer, le directeur des affaires techniques de la DB, sans donner plus de précisions. En octobre, la DB avait signé un accord similaire avec Bombardier et Siemens : il s’agit dans ce cas de changer 1 200 essieux sur les ICE 3. Les constructeurs vont donc mettre la main à la poche, non sans avoir traîné les pieds. Car ils ont longtemps plaidé non coupables. Entre les lignes, ils reprochent à l’opérateur une maintenance insuffisante, responsable selon eux de la fragilité des essieux. Aujourd’hui, le bras de fer semble donc avoir tourné à l’avantage de la DB, même si la cause de la défaillance reste inexpliquée. La compagnie a bénéficié du soutien du ministre allemand des Transports : Peter Ramsauer a récemment haussé le ton face aux industriels. A l’origine : de nombreux ICE étaient restés à quai à cause de la neige en début d’année. « Il n’est pas concevable que de la neige ait pu s’infiltrer dans les trains et ait mis l’électronique hors service », déplore le ministre conservateur. « La Bahn n’y est pour rien mais elle doit en supporter les conséquences financières et en termes d’image. C’est pourquoi il faut remettre l’industrie face à ses responsabilités. » Un projet de loi se préparerait pour garantir plus de droits à l’opérateur, au-delà de la période de garantie du matériel. En attendant, la DB n’en a pas fini avec ses problèmes car le renouvellement des essieux va prendre du temps : Alstom doit concevoir ces nouvelles pièces qui ne seront pas livrées avant le début de l’année prochaine. Du coup, la flotte d’ICE ne sera opérationnelle qu’en 2012 seulement. D’ici là, la compagnie va devoir louer du matériel roulant à ses voisins suisses et français pour continuer à assurer un service régulier.
 

Antoine HEULARD

Ewa

Berlin va mettre fin au monopole de la DB sur le S-Bahn

Pannes à répétition, service réduit : depuis six mois, rien ne va plus sur le réseau de trains urbains de la capitale allemande. Jugée responsable de cette pagaille, la DB s?expose aujourd?hui à de sévères sanctions L’année change mais les problèmes demeurent sur le réseau du S-Bahn berlinois. En ce début d’année, ils se sont même aggravés : trains raccourcis, rames bondées… Le service, passablement perturbé depuis six mois, est encore revu à la baisse. En cause, cette fois-ci : le froid polaire qui s’est abattu sur la capitale allemande et qui oblige les trains à des retours plus fréquents vers les ateliers. Résultat : 300 voitures hors service. Moins de la moitié des matériels normalement prévus circule. Autant dire que la nouvelle décennie commence de la pire des manières pour la Deutsche Bahn. D’autant que les usagers ne sont plus les seuls à perdre patience. L’indulgence du Sénat, qui en 1994 avait confié la gestion des trains urbains à la compagnie publique, a également fait long feu. L’an dernier, la ville-Etat a déjà infligé une amende de 37 millions d’euros à l’opérateur, sous forme de retenues sur les subventions qu’elle lui verse. Mais aujourd’hui des sanctions plus lourdes sont annoncées : « Nous envisageons d’attribuer un quart des lignes à un concurrent », affirme Ingeborg Junge-Reyer, la responsable des questions de transports. La Bahn va donc perdre son monopole. Un coup dur : avec 1,3 million de passagers transportés par jour et 32,2 millions de trains-km annuels, cette franchise est l’une des plus juteuses du genre. Seule consolation pour la DB, la punition n’interviendrait pas avant la fin du contrat d’exploitation, début 2017. Mais la compagnie, qui espère coûte que coûte prolonger son bail, refuse de céder sa place. « Il n’est pas question que nous nous retirions », tonne Ulrich Homburg, le directeur des activités voyageurs de la DB. « Notre offre est pour l’instant inacceptable », reconnaît-il. « Mais nous faisons tout notre possible pour proposer aux usagers un service décent. » Pourtant, ces excuses et la promesse de nouvelles indemnisations des usagers n’y font rien. Le divorce semble consommé. « Je ne crois plus en la Bahn », affirme Ingeborg Junge-Reyer. Il faut dire que l’opérateur avait, dans un premier temps, fait miroiter un retour à la normale dès fin 2009… avant de faire marche arrière et de repousser la date butoir d’un an. Selon certains journaux berlinois, il ne faut pas espérer un service complet avant 2013, au plus tôt. Au siège du groupe, la situation est commentée avec amertume. « Si nous sommes incapables de conserver ce contrat dans notre fief, nous ne serons plus crédibles pour répondre à des appels d’offres à l’étranger », glisse un cadre au quotidien Die Welt. Le spectre de la concurrence a en tout cas eu l’effet d’un électrochoc. La DB met les bouchées doubles pour améliorer la disponibilité de son matériel roulant. Un nouvel atelier a été ouvert et 300 techniciens supplémentaires s’occupent des trains. Durant ces cinq dernières années, la compagnie avait rogné sur ses opérations de maintenance pour améliorer son bilan comptable. Conséquence : depuis l’été dernier, le trafic est chaotique car de nombreuses voitures ne sont plus en état de circuler. Une politique à courte vue qui lui coûte aujourd’hui très cher : selon ses propres calculs, la pagaille du S-Bahn berlinois lui fait déjà perdre 250 000 euros par jour.
 

Antoine HEULARD

Ewa

Concurrence : La DB ne va pas tarder?

Après avoir annoncé une bataille sanglante avec la SNCF, la Deutsche Bahn a changé de ton. Mais, sur le fond, les Français fourbissent leurs armes, et les Allemands aussi La scène se passe mi-octobre, dans une salle de conférence de l’aéroport de Francfort. Autour de la table, Guillaume Pepy, son homologue allemand Rüdiger Grube et leurs gardes rapprochées respectives. Côté allemand, on s’attend à une réunion de routine « partenaires ». Mais, à en croire la presse allemande, la rencontre prend rapidement une tout autre tournure : le patron de la SNCF annonce qu’il entend faire circuler ses TGV outre-Rhin dès 2010. L’opérateur tricolore veut obtenir des sillons entre Strasbourg et Francfort d’une part et sur le tronçon Francfort – Berlin – Hambourg d’autre part. C’est du moins la version de la rencontre qui est donnée d’abord outre-Rhin. « Nous étions abasourdis », lâche à Die Welt Ulrich Homburg, le directeur transport de voyageurs de la DB. Un observateur affirme alors : « Les Allemands ont péché par excès de sincérité. La coopération donne de bons résultats, ils n’imaginaient pas du tout que les Français voulussent faire cavalier seul. » Cependant, très vite, Rüdiger Grube, le patron de la Deutsche Bahn, intervient dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung sur un ton beaucoup plus serein. De leur côté, les Français précisent que les règles d’attribution des sillons en Allemagne imposant de faire dès maintenant une demande pour la période 2011-2015, ils ont souhaité « sécuriser » des sillons qu’ils pourraient utiliser au cours de ces années dans un cadre soit coopératif, soit concurrentiel, selon la tournure que prendront les événements entre les deux opérateurs historiques. Depuis plusieurs années, la DB et la SNCF exploitent de concert les liaisons transfrontalières entre Paris et Francfort ou vers le sud de l’Allemagne. « Notre vrai concurrent, c’est la voiture, affirme-t-on à Berlin. C’est pourquoi il est important d’unir nos forces plutôt que de nous diviser. » Du coup, la Deutsche Bahn avait choisi de passer son tour sur le marché français. Alors que le trafic transfrontalier s’ouvre à la concurrence, elle n’a formulé aucune demande de sillon auprès de RFF. « La Bahn avait, à raison, concentré son attention sur l’Italie, la Grande-Bretagne ou les États-Unis, car sur ces marchés il y a un vide à combler », analyse Maria Leenen, du cabinet d’expertise ferroviaire SCI Verkehr. De plus, la Deutsche Bahn a d’autres chats à fouetter. Depuis l’été 2008, elle se débat avec d’importants problèmes de matériel : les essieux de ses ICE 3, les plus modernes de la gamme, montrent des signes anormaux d’usure et vont devoir être changés. Une opération coûteuse et surtout très longue : la DB va devoir attendre trois ans avant de disposer à nouveau de l’intégralité de sa flotte. D’ici là, elle doit jongler avec la disponibilité de ses trains à grande vitesse. Le moment est donc on ne peut plus mal choisi pour s’aventurer hors de ses frontières. Pour ne rien arranger, la compagnie est actuellement très occupée à consolider ses activités de fret, durement frappées par la crise. La DB pense finir l’année sur un bénéfice grâce à son programme de réduction de coûts. Mais son chiffre d’affaires dans le fret a fondu quasiment de moitié au premier trimestre. Autre élément jouant en sa défaveur : le changement de gouvernement survenu en Allemagne fin septembre. Sortis vainqueurs des urnes, les libéraux et les conservateurs ont fait de la concurrence leur leitmotiv. La nouvelle coalition au pouvoir entend notamment renforcer l’indépendance de DB Netz. Aux yeux de Berlin, la Bahn exercerait une trop grande influence sur le gestionnaire d’infrastructure, privant ainsi ses concurrents d’un juste accès au réseau. « La prochaine législature s’annonce plutôt désagréable pour nous », glisse un cadre la Bahn. Autant d’éléments qui n’ont pas échappé à la SNCF. « La DB a roupillé, remarque un observateur. À l’époque de Mehdorn, cela ne se serait jamais passé ainsi. » Dur en affaires et redoutable stratège, l’ancien chef de la DB n’aurait pas attendu que la SNCF tire la première. « Il aurait demandé des sillons à RFF, même s’il n’avait pas eu l’intention de s’établir en France, poursuit ce commentateur. Il n’aurait pas hésité à bluffer et il aurait soumis un dossier car cela l’aurait placé en position de force à la table des négociations. » Rüdiger Grube, en comparaison, aurait-il fait preuve d’une étonnante naïveté ? Pas sûr. Il ne fait aucun doute que le pacte de non-agression qui prévalait jusqu’ici finira par voler en éclats. « Nous sommes en présence des deux premières compagnies européennes : elles ne peuvent pas indéfiniment coopérer, note l’experte Maria Leenen. Dans le secteur aérien, Air France et Lufthansa ont construit des alliances concurrentes. Avec la libéralisation, le rail va sûrement suivre le même chemin. » Si, dans cette perspective, les Français commencent à réserver des sillons, de leur côté les Allemands pourraient toujours, en représailles, remettre en cause le partenariat prévu sur la LGV Rhin-Rhône, reliant Francfort au sud de la France, dont la mise en service n’est pas prévue avant 2011-2012. Le sud de la France qui fait rêver la Bahn. Laquelle, selon nos informations, se renseigne sur un axe Cologne – Marseille. Pour lequel elle pourrait demander des sillons dès l’an prochain. Pour une circulation en 2011.
 

Antoine HEULARD

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Ewa

La Bahn place ses pions au Qatar

La compagnie allemande vient de signer un important contrat de planification du futur réseau ferré de l?émirat. Une occasion unique de se positionner dans ce pays, à l?aube de sa révolution ferroviaire Des ICE rouge et blanc filant à 350 km/h entre les dunes de la péninsule arabique : le rêve de la Deutsche Bahn est en passe de devenir réalité. Fin novembre, la compagnie allemande a en tout cas pris une sérieuse option, en signant un contrat prometteur avec le Qatar. A la clef, la création d’une société commune, la Qatar Railways Development Company, dans laquelle la DB détiendra 49 % et l’émirat 51 %. La QRDC sera en charge de la planification du réseau ferré qatari qui doit sortir du sable d’ici 2026, soit un volume d’affaires de 700 millions d’euros. Assez peu, au regard du budget global du projet : le Qatar va investir 17 milliards d’euros dont 14 pour la construction des infrastructures et deux pour l’achat de matériel roulant. Mais pour la Bahn, cette alliance est surtout une occasion unique de se positionner auprès du cheikh Hamad Ben Jassem Al-Thani, le Premier ministre qatari, alors que le pays est à l’aube de sa révolution ferroviaire. Jusqu’ici, la presqu’île, qui vit de ses rentes pétrolières, a comme ses voisins misé sur le « tout-voiture ». Mais face à la forte croissance de sa population et l’engorgement de sa capitale Doha, le petit émirat veut se doter d’un système ferroviaire parmi « les plus modernes au monde », selon Rüdiger Grube, le patron de la DB. Le projet prévoit ainsi une ligne à grande vitesse reliant l’aéroport à Doha et se poursuivant jusqu’au Bahreïn voisin. Un axe de 180 km où les trains circuleront à 350 km/h. Autre liaison au programme : un tronçon de 100 km vers l’Arabie saoudite doté de trains roulant à 200 km/h. Côté fret, 325 km de voies sont envisagées, qui pourront aussi servir au transport de voyageurs. Enfin, quatre lignes de métro seront bâties à Doha, soit 300 km de rail et 98 stations. « Nous sommes heureux et fiers d’avoir été sélectionnés, poursuit Rüdiger Grube. Cela montre une nouvelle fois à quel point le savoir-faire de la Deutsche Bahn est apprécié à travers le monde. » Mais la compagnie n’entend pas se contenter de vendre son expertise. De fait, les Allemands visent un accès prioritaire au réseau. En s’associant aujourd’hui à la planification, la DB devrait avoir une longueur d’avance sur ses concurrents quand il s’agira de sélectionner les opérateurs. Une stratégie des petits pas qui pourrait rapporter gros : le marché est évalué à un milliard d’euros annuel par le ministère allemand des Transports. Le projet ferroviaire revêt aussi une dimension de prestige : le Qatar, qui rêve d’organiser la Coupe de monde de football, y voit un argument de poids pour convaincre la Fifa. Du coup, les lignes urbaines et à grande vitesse pourraient être mi-ses en service dès 2022. Toute l’industrie allemande pourrait bénéficier des retombées du contrat : le géant du BTP Hochtief pour la constrcution des infrastructures, ou Siemens pour les trains.?Mais la réalisation des projets ne se  fera que sur des appels d’offres qui s’annoncent disputés. La Bahn, elle, voit déjà plus loin : alors que les projets ferroviaires se multiplient dans la région, « ce contrat est une excellente carte de visite », se félicite-t-on à Berlin.
 

Antoine HEULARD

Ewa

La DB pourrait abandonner le projet de grande gare de Stuttgart

La compagnie a enfin reçu le feu vert pour cet édifice ultramoderne. Mais l?autorisation intervient alors que le marché de l?immobilier s?effondre : l?opérateur espérait vendre des terrains autour de la gare pour financer les travaux Depuis la construction de la très remarquée « Hauptbahnhof » de Berlin, c’est le projet immobilier le plus ambitieux mené par la DB. A Stuttgart, une nouvelle gare ultramoderne doit sortir de terre d’ici 2019 et transformer le visage de la capitale du Bade-Wurtemberg. En plus du nouvel édifice, un tunnel de 33 km est en projet afin que les trains accèdent aux quais par voie souterraine. Du coup, les rails vont disparaître du centre-ville, dégageant ainsi d’importants espaces idéalement situés pour de nouveaux quartiers d’habitation. Ce mégaprojet, chiffré à 4,5 milliards d’euros, fait l’objet d’interminables débats depuis son élaboration, il y a quinze ans. Après plusieurs faux départs, le coup d’envoi a enfin été donné au printemps dernier et les derniers obstacles juridiques ont été levés. Problème : l’autorisation tant attendue par la DB tombe au plus mauvais moment. Avec la crise financière et l’effondrement du marché de l’immobilier, la compagnie n’arrive pas à vendre la totalité des espaces libérés par le démontage des voies ferrées. Un coup dur pour l’opérateur qui comptait sur cette manne pour financer les travaux. Conséquence : le projet Stuttgart 21 est en passe de se transformer en gouffre financier. Pour ne rien arranger, le coût du chantier aurait été sous-estimé. La facture finale des travaux pourrait atteindre 5,3 milliards d’euros, selon la Cour des comptes, voire 8,7 milliards d’après les calculs du cabinet d’études Vieregg & Rößler. Résultat : le chantier ne pourra probablement jamais voir le jour sans un coup de pouce supplémentaire des collectivités locales. Pas étonnant, dans ces conditions, que Stuttgart 21 compte un nombre croissant d’opposants : seuls 30 % des habitants-contribuables soutiennent encore le chantier. Face aux difficultés qui s’accumulent, la compagnie a déjà commencé à se ménager une porte de sortie. « Le projet n’est pas représentable s’il faut débourser plus de 4,5 milliards d’euros pour la gare et les coûts liés au risque », affirme le chef de la DB Rüdiger Grube à l’hebdomadaire Der Spiegel. « Les contrats ont été conclus de sorte qu’ils peuvent être annulés avant la fin de l’année. » Un scénario qui semble de plus en plus probable au vu de la tournure prise par le chantier.
 

Antoine HEULARD

Ewa

La Bahn prend discrètement pied au Moyen-Orient

La compagnie allemande a décroché de nombreux contrats de consulting dans la région. Une façon habile de se positionner sur ce marché très prometteur Sans faire de bruit, la DB place ses pions au Moyen-Orient. Métro de La Mecque, ligne de fret en Arabie saoudite, réseau ferré au Qatar… Les trains de la compagnie ne roulent pas encore sous le soleil de la péninsule arabique. Mais le nom de la Bahn est intimement lié à ces projets. Alors que se multiplient les projets d’infrastructures ferroviaires, les ingénieurs allemands sont en effet très actifs en coulisse. Car pour se faire une place sur ce marché très convoité, l’opérateur a subtilement choisi d’entrer par la porte de service. Sa stratégie ? Vendre son expertise aux émirs et asseoir ainsi sa réputation auprès des autorités ferroviaires locales. Comme dans d’autres régions du monde, c’est DB International qui est chargée de jouer les têtes de pont. Cette filiale, créée dès 1966, est le cabinet d’études de la compagnie. La structure travaille de façon « autonome » et en toute « indépendance », précise-t-on à Berlin. Mais cette agence d’experts représente aussi une « bonne carte de visite », souffle un porte-parole. « Cela contribue à nous faire connaître. » Dernière illustration en date, en Arabie saoudite, la Bahn est associée à la construction du métro de La Mecque, qui doit permettre de désengorger la ville dont la population est multipliée par deux et demi au moment du grand pèlerinage annuel. Le chantier revient aux Chinois, mais la DB est parvenue à s’attribuer une part du gâteau : le royaume lui a confié plusieurs missions de contrôle de qualité. Autre exemple, au Qatar cette fois-ci : la Bahn vient d’élaborer les contours du système ferroviaire dont le pays souhaite se doter, en particulier pour faire face à la forte croissance de sa population, qui progresse de 5 à 10 % par an. Le projet comprend notamment une ligne à grande vitesse entre Doha et le nord-ouest de la presqu’île, une liaison de fret devant relier la capitale à l’Arabie saoudite, ou encore plusieurs voies régionales dédiées au trafic passagers. Le montant du contrat est plutôt modeste : la DB a reçu une dizaine de millions d’euros pour son expertise. Mais pour la compagnie, l’essentiel est ailleurs : « Ce qui est décisif, c’est de pouvoir mettre un pied sur cette partie du globe », commente-t-elle. Car la Bahn a déjà les yeux rivés sur les appels d’offres que les Etats du Golfe vont lancer dans les prochaines années. Il s’agira alors de sélectionner les opérateurs qui exploiteront les réseaux actuellement à l’étude ou en cours de construction. En se positionnant dès aujourd’hui, la DB espère avoir une longueur d’avance. C’est le cas dans les Emirats arabes unis où la DB a été retenue pour planifier la construction d’une ligne urbaine entre Abu Dhabi et la station balnéaire Al Raha Beach, qui doit sortir du sable d’ici 2020. « Avoir décroché ce premier contrat nous place favorablement en tant qu’opérateur », glisse un manager allemand à Die Welt. Reste que cette stratégie ne garantit pas la victoire à tous les coups : la DB espérait ainsi participer à la construction et à l’exploitation d’une imposante ligne de fret de 730 km en Arabie saoudite. Arrivée en finale de l’appel d’offres, elle s’est finalement fait recaler. Du moins pour l’instant : avec la crise, les cartes pourraient être redistribuées. La DB continue d’aller de l’avant :  elle prépare discrètement la reconstruction ferroviaire… en Irak. Au début de l’été, Rüdiger Grube, le patron de la DB, aurait ainsi rencontré le ministre irakien des Transports. L’objectif : bâtir un réseau dédié aux marchandises, que la DB exploiterait avec un partenaire local. La Bahn rappelle que son engagement sur les rives de l’Euphrate s’inscrirait dans le prolongement d’une longue tradition : au début du siècle dernier, la construction de la Bagdad Bahn, une voie reliant la mer Noire à la capitale irakienne, avait été confiée aux Allemands.
 

Antoine HEULARD

Ewa

La Bahn bientôt pénalisée par une loi écolo

La réforme du système des droits à polluer inquiète la compagnie allemande, dont la facture énergétique pourrait bondir dans les prochaines années L’affaire est pour le moins paradoxale : en Allemagne, le train, moyen de transport écologique s’il en est, pourrait bientôt être pénalisé par une loi… destinée à protéger l’environnement. C’est en tout cas la crainte de la Deutsche Bahn, qui voit d’un très mauvais œil la révision du système européen d’échange de quotas de CO2. A partir de 2013, les « droits à polluer » seront vendus aux enchères à de nombreuses entreprises, alors qu’ils étaient jusque-là alloués gratuitement. Notamment visé : le secteur de l’électricité, responsable de la majorité des émissions de gaz carbonique et qui va devoir acheter 100 % de ses quotas. Seulement, voilà : la Bahn est le plus grand consommateur d’électricité d’Allemagne : 16 000 GWh sont nécessaires à la circulation de ses trains. Résultat : le nouveau système des droits à polluer risque d’alourdir considérablement sa facture énergétique. D’autant que 56 % de ses besoins sont couverts par des centrales à charbon, particulièrement nocives pour l’environnement. Aujourd’hui, seuls 17 % de ses besoins en électricité sont couverts par des sources d’énergie renouvelable. Selon les calculs du Centre européen d’études économiques de Mannheim (ZEW), auteur d’une enquête commandée par la DB, cette nouvelle charge va se répercuter sur les tarifs. Le prix des billets va grimper de 1 % et celui du fret de 1,3 %. Conséquence, l’attractivité du rail va souffrir : 2,5 millions de clients pourraient se détourner du train chaque année au profit de la voiture. Au final, l’environnement est le grand perdant de cette évolution : il va devoir encaisser 767 000 t de gaz d’échappement supplémentaires. Pour ne rien arranger, les compagnies aériennes ne sont pas soumises au même régime : la mise aux enchères des droits à polluer ne les concernera que de façon très progressive. Pour le ZEW, il conviendrait d’appliquer « le même traitement à l’ensemble des moyens de transports ». Seule façon d’éviter que la révision du système d’échange de quotas ne tourne à la mesure contre-productive. Malgré ces critiques, la réforme doit être validée d’ici la fin de l’année. Des dérogations sont prévues pour les secteurs qui risquent de délocaliser dans des pays moins regardants en matière de protection du climat. Autant dire que la DB ne figurera probablement pas sur la liste.
 

Antoine HEULARD