Le navigateur Raphaël Dinelli avait couru le dernier Vendée Globe sur un bateau à énergie solaire. Sur le même modèle, il vient de présenter aux Sables-d?Olonne un train équipé de cellules photovoltaïques particulièrement puissantes. Et si le soleil pouvait suffire, dans les transports, à couvrir tous les besoins en énergie en dehors de la locomotion ? C’est sur ce principe que Raphaël Dinelli, homme des mers, à la tête de la fondation Océan vital vouée au développement des énergies renouvelables, a présenté trois concepts de véhicules à assistance électrique générée uniquement par le soleil. Une automobile, un autocar mais surtout un TER au toit recouvert de 48 m2 de cellules photovoltaïques susceptibles d’assurer son éclairage intérieur et d’abaisser quelques autres sources de consommation d’énergie. La rame est un TER électrique à deux niveaux. Elle est préparée par le Centre d’ingénierie du matériel (CIM) du Mans et devrait être mise en circulation commerciale à la fin de l’année dans la région des Pays de la Loire qui finance le programme de recherche du laboratoire de Raphaël Dinelli à 85 %. « Aujourd’hui, nous pouvons garantir l’éclairage d’une rame Duplex toute la journée grâce à cette nouvelle technologie qui en combine trois : les panneaux de cellules photovoltaïques mis au point par Raphaël Dinelli, les batteries classiques lithium-ion et les ampoules LED à faible consommation. Une rame nécessitait une puissance de 15 kW/h par voiture. Le recours aux ampoules de basse consommation permet de réduire les besoins à 8 kW/h. C’est ce que nous apporte le solaire », résume Philippe Girou, du CIM, chef de ce projet de « train solaire ».
L’amélioration, par Raphaël Dinelli, de l’efficacité des panneaux voltaïques est à l’origine de ce programme d’application au monde du transport. L’électricité générée par une cellule photovoltaïque représente dans le bâtiment entre 5 et 10 % de l’énergie reçue par le soleil. Là, elle atteint 21 % et monte parfois jusqu’à 40 %. Autre avancée, brevetée par Raphaël Dinelli, le panneau de cellules photovoltaïque est devenu léger et d’une extrême souplesse. La trouvaille vient des matériaux composites. La cellule, à l’origine très fragile, est « encapsulée », elle ne se casse plus. Le panneau solaire se plie sans dommage. Dix fois moins de verre, dix fois moins d’aluminium, il perd aussi 90 % de son poids. Il ressemble à un film plastique. Son épaisseur varie de 0,6 et 1 mm. Il se pose comme un film adhésif sur des surfaces qui n’ont plus besoin d’être planes. Le toit du TER est bombé, il y est donc collé. « Nous vérifierons, prochain défi, qu’il résiste aux très grandes vitesses du train », indique Raphaël Dinelli. Pour lui, auparavant, la plus grande difficulté technique, commune à tous les moyens de transport, consiste à générer une alimentation électrique continue malgré une source d’énergie potentiellement illimitée mais d’accès réduit. D’abord en raison de la surface de panneau disponible. Sur un train, elle est beaucoup plus petite que sur une maison, encore plus petite sur une voiture. Ensuite, le véhicule traverse des zones d’ombre. « Les systèmes dédiés au transport se révèlent donc, par nature, très complexes. Nous avons une grande avance acquise en mer. Le pont d’un bateau n’est pas toujours exposé au soleil lui non plus. Nous savons bien que dans ce domaine le nerf de la guerre réside dans la capacité en batteries que l’on peut embarquer. Mais on ne peut les multiplier à l’infini. L’autre voie possible, c’est d’avoir à alimenter des systèmes à consommation d’énergie de plus en plus basse. Dans certains secteurs du transport, ils existent encore peu. Pas du tout même dans l’autocar », explique Raphaël Dinelli.
Le nouveau train « écolo » dévoilé sur plans aux Sables-d’Olonne ira un peu plus loin dans ce sens. « En plus de son nouveau système d’éclairage, il comportera tout un tas d’innovations qui réduiront encore son empreinte carbone : entre autres, du tissu bio pour les fauteuils et des commandes pour passagers sous forme de tables digitales tactiles », assure Philippe Girou. En attendant, un jour, de diminuer encore l’énergie non renouvelable consacrée au gros poste du chauffage, principale consommation d’un train hors locomotion. Celui imaginé par Raphaël Dinelli et le CIM sera présenté au salon Innotrans, en septembre prochain, à Berlin. Au passage, il bénéficiera d’une nouvelle livrée, affirmant son caractère écolo et innovant.
Hubert HEULOT