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Ewa

Présidentielle 2022. « La sortie des énergies fossiles doit être socialement juste »

voiture Paris pollution

Pour le think tank dirigé par Jean-Marc Jancovici — qui vient de publier son Plan de transformation de l’économie française — on ne peut, pour réduire les gaz à effet de serre dûs au transport, miser sur la seule électrification des véhicules. Laurent Perron, pour le Shift Project, demande qu’on joue d’abord sur la demande de transport, qu’on privilégie les véhicules légers, qu’on soutienne les filières moins voraces en énergie que la voiture individuelle. Et appelle à la planification d’une politique de sobriété.

Interview de Laurent Perron, chef de projet Industrie automobile, The Shift Project.

VRT. La lutte contre le dérèglement climatique est une priorité absolue. Que faut-il attendre, dans le domaine de la mobilité, du prochain mandat présidentiel ? Quelles sont les trois (ou quatre, ou cinq) principales mesures à prendre ?

Laurent Perron. Le secteur des transports, qui représente environ 1/3 des émissions nationales, est le seul à ne pas avoir baissé depuis 1990. Il a même augmenté de 12% entre 1990 et 2015.

A elle seule, la voiture particulière représente 16% des émissions nationales.

Et pourtant, l’objectif reste la décarbonation complète du transport routier d’ici 2050. La transition vers l’électrification de la mobilité est présentée comme la (seule ?) voie permettant de respecter cet engagement.

Mais ne s’intéresser qu’à la réduction des émissions à l’échappement (ou à l’usage) occulte une grande partie de la problématique de la mobilité, notamment automobile. La demande de mobilité (le nombre de kilomètres.passager parcourus), le taux d’occupation des véhicules, le choix des modes de transport et l’empreinte carbone complète (donc y compris les émissions de fabrication et de fin de vie des véhicules et celles de production des vecteurs d’énergie) doivent être considérés pour décarboner sérieusement les transports.

La nécessaire prise en compte de ce périmètre complet conduit à formuler plusieurs propositions pour la prochaine mandature :

  • Orienter l’offre et la demande vers des véhicules légers par la mise en place d’un système de bonus sur la masse pour l’achat de véhicules neufs, et par la sévérisation du malus.
  • Orienter la réglementation vers la prise en compte du cycle de vie complet des véhicules et pas seulement des émissions à l’usage, en rendant obligatoire l’affichage de l’empreinte carbone des véhicules neufs. Cet affichage sera un 1er pas vers une réglementation européenne basée sur l’Analyse du Cycle de Vie, permettant l’émergence de véhicules sobres et bas carbone
  • Soutenir massivement les filières et les solutions de mobilité moins voraces en énergie et matière que la voiture individuelle (train assez rempli, vélo y compris à assistance électrique, multimodalité…

VRT. De ce point de vue, comment évaluez-vous la politique menée lors du quinquennat qui s’achève ?

L. P. Le quinquennat qui s’achève aura été marqué par des crises majeures en lien avec la mobilité et l’automobile. La crise des gilets jaunes a montré la dépendance d’une partie importante de la population à la voiture, à travers le coût des carburants. Si la sortie des énergies fossiles, en particulier le pétrole, dont les transports dépendent à plus de 90%, est indispensable, elle doit être socialement juste.

Force est de constater que l’accès au plus grand nombre à des véhicules sobres n’est pas assuré aujourd’hui, compte tenu des prix des véhicules électriques et hybrides. En complément, les objectifs de déploiement des infrastructures de recharge pour véhicules électriques ne seront pas atteints, alors qu’elles constituent une condition indispensable du développement massif de l’électromobilité. La crise sanitaire a quant à elle pointé la dépendance de l’industrie des transports non seulement au marché et aux approvisionnements extérieurs, mais aussi au soutien des politiques publiques. La nécessité de la réindustrialisation sur le territoire et d’une maîtrise plus importante de la chaine de valeur est maintenant prise en compte, même si elle peut paraître tardive.

On peut également noter les évolutions récentes, qui restent cependant à pérenniser et à renforcer, sur le développement des alternatives à la voiture, comme le train ou le vélo.

VRT. Indépendamment du climat, y a-t-il, dans ce domaine, une mesure à inscrire à l’agenda présidentiel ?

L. P. Un des enjeux majeurs de la mobilité pour les prochaines années sera de rendre la transition actuelle socialement juste. Un soutien différencié selon les contraintes de revenus et de mobilité doit être mis en place de manière à rendre cette transition rapide et massive. Cela peut par exemple passer par des systèmes d’ajustement des incitations en place.

L’emploi sur le territoire est évidemment un enjeu social fort. L’accompagnement des compétences et des nouvelles filières de mobilité est à mettre au cœur des prochaines politiques industrielles

VRT. Question subsidiaire : De quelle fausse bonne idée faut-il se méfier ?

L. P. La décarbonation des transports ne peut être envisagée que de façon systémique, en prenant en compte l’ensemble des déterminants des émissions et des externalités. Miser tout sur le seul levier ou progrès technologique ne nous permettra probablement pas d’atteindre les objectifs climatiques, sociaux ou de résilience, qui plus est si on ne retient qu’une technologie comme l’électromobilité. L’électrification des 40 millions de voitures roulant en France paraît difficilement soutenable. La mise en œuvre de politique de sobriété doit désormais être planifiée.

Ewa

Le coup de tonnerre du rapport du GIEC

Nous ne l’apprendrons pas à nos lecteurs, mais il nous semble utile de le rappeler : le 9 août, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié le premier volet de son sixième rapport. Ce volet — The Physical Science Basis — présente la synthèse des données scientifiques les plus récentes sur l’évolution du climat. Selon le GIEC, « à moins de réductions immédiates, rapides et massives des émissions de gaz à effet de serre, la limitation du réchauffement aux alentours de 1,5 °C, ou même à 2 °C, sera hors de portée ».

Sa publication a été précédée, accompagnée ou suivie de gigantesques feux de forêts en Sibérie, en Grèce, en Algérie, en Turquie, et en France, dans le Var, de canicules records au Canada ou aux Etats-Unis, d’inondations catastrophiques en Allemagne, en Chine ou dernièrement dans le Tennessee. Le 13 août, on apprenait que, selon l’Agence nationale océanique et atmosphérique américaine (NOAA), le mois de juillet 2021 a été le plus chaud jamais enregistré. Records de l’été : 38,0 °C enregistrés à Verkhoyansk, au nord de la Sibérie, au-delà du cercle polaire, le 20 juin ; 49,6 °C atteints à Lytton, au Canada (Colombie-Britannique), le 29 juin ; 48,8 °C enregistrés par une station météorologique de Syracuse le 11 août.

Le deuxième volet du rapport du GIEC, Impacts, Adaptation, and Vulnerability, doit être publié en février 2022, le troisième, Mitigation of Climate Change, en mars, et la synthèse en septembre. Le 26e sommet sur le climat (COP 26) se sera auparavant tenu à Glasgow, du 1er au 12 novembre prochain. Rappelons en deux mots les enjeux, selon le dernier document du GIEC : « certains phénomènes déjà en cours — comme l’élévation continue du niveau de la mer — sont irréversibles sur des centaines ou des milliers d’années. Toutefois des réductions fortes et soutenues des émissions de dioxyde de carbone (CO2) et d’autres gaz à effet de serre limiteraient le changement climatique. Alors que la qualité de l’air en bénéficierait rapidement, la stabilisation des températures mondiales pourrait prendre 20 à 30 ans. » Pas de temps à perdre.

Lire : « AR6 Climate Change 2021: The Physical Science Basis »

Ewa

A Paris, la marche sort de l’ombre

Avec une part de 40 %, la marche est en tête des déplacements des Franciliens. Ce n’est pas une nouvelle. C’est sans doute vrai depuis la nuit des temps. ça l’’est en tout cas depuis 1976, date d’une première Enquête ménages déplacements. Ce qui compte, c’est qu’après une baisse à la fin du XXe siècle, la part de la marche se renforce. Et, plus on est en zone dense, plus on marche. Les Parisiens sont donc champions. C’est un des points que souligne l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), qui vient de revenir sur 45 ans d’évolution des mobilités dans Paris et la Métropole du Grand Paris – et plus généralement dans toute la région –, en s’appuyant sur les résultats des sept Enquêtes ménages déplacements réalisées depuis 1976 (la dernière, en 2018, dont les premiers résultats ont été publiés par l’Observatoire des mobilités en Ile-de-France).

Parallèlement, tous modes confondus, le nombre de déplacements de chacun a fortement augmenté. On est passé, pour l’ensemble de la région, entre 1976 et 2018, de 30,3 millions de déplacements quotidiens à 42,7 millions soit 41 % de déplacements quotidiens en plus. Dans le même temps, certes, la population de la région augmentait, passant de 9,9 à 12,2 millions d’habitants, soit 23 % en plus : c’est considérable mais ça n’explique pas tout. L’Apur souligne « une augmentation de la mobilité individuelle depuis les années 90, traduisant un changement plus profond de nos modes de vie et de notre manière de vivre la ville ». On a, dirait-on, atteint en 2010 un plafond, de près de 4 déplacements par personne et par jour dans la région.

C’est, selon l’Apur, à partir de 2001, qu’on observe un changement fondamental dans les pratiques de mobilité « avec une baisse de l’usage de la voiture et une augmentation de la mobilité à pied et en transports en commun et, plus récemment et dans une moindre mesure à vélo ». Cette vue sur le long terme est on ne peut mieux venue. Mode par mode, revenons sur les infléchissements.

Concernant la voiture, à Paris « le nombre moyen de véhicules par ménage est passé de 0,52 en 1990 à 0,39 en 2017, retrouvant ainsi son niveau historique de 1975 ». Même tendance à la baisse dans les trois départements de la Petite couronne, « où le taux de motorisation est passé de 0,73 voiture par ménage en 1999, son taux le plus élevé, à 0,66 en 2017 ».

La marche, on l’a signalé, est en pleine croissance, notamment pour les Parisiens pour qui elle a augmenté de plus de 45 % entre 2001 et 2018 ; sur la même période, les résidents de la Petite Couronne ont augmenté leur mobilité individuelle à pied de 18 %.

Pour les transports en commun, à l’échelle de l’Ile-de-France, les flux quotidiens n’ont cessé de croître depuis 1976 « passant d’environ six millions de déplacements quotidiens à plus de 9,4 millions de déplacements en 2018, représentant environ 22 % du nombre total de déplacements réalisés au quotidien ». Les habitants de la Petite Couronne sont ceux « pour lesquels la mobilité individuelle en transports collectifs a le plus augmenté entre 2001 et 2018 et continue de croître au même rythme depuis 2010, quand cela se ralentit pour les Parisiens et habitants de la Grande Couronne ». Ralentissement pour les Parisiens, plutôt parce qu’on a atteint un plateau, pour la Grande Couronne, au contraire, parce que l’habitat peu dense se prête mal aux modes lourds.

Grand succès aussi pour le vélo. On remarque en passant que le vélo a longtemps échappé au radar, les Enquêtes l’ayant classé jusqu’en 2001 dans l’ensemble des deux roues… En moins de 20 ans, les déplacements à vélo ont augmenté de 175 %. Et, en 25 ans, le réseau de vélo est passé de cinq kilomètres à 1 000 km. Spectaculaire, mais très limité : son usage ne représente actuellement que 2 % de part modale.

Tous ces changements confortent la vision qu’on pouvait avoir : l’ère de l’automobile se referme. C’est vraisemblable mais mieux vaut rester modeste. Après avoir atteint un pic en 1997 (1,68), le nombre de déplacements quotidiens par personne en voiture est certes en baisse… mais il est encore supérieur en 2018 (1,32) à ce qu’il était en 1976 (1,13). De plus, la place de l’automobile est toujours inscrite dans la ville et, comme le remarque l’Apur, la voiture occupe aujourd’hui à Paris entre 50 et 60 % de l’espace public alors qu’en 2018 seulement 3,9 % des déplacements internes à Paris et 20,6 % des déplacements radiaux banlieue – Paris sont réalisés en voiture.

Mais, à lire le document, Paris aurait quasiment tout bon, et ce satisfecit est parfois agaçant. Surtout, la partie prospective du travail de l’Apur laisse sceptique. L’avenir, dirait-on, sera rose, notamment grâce au renfort du métro du Grand Paris, de la route intelligente, d’engins volants, d’innovations de haute technologie mariant l’attractivité de la capitale aux bouquets de mobilité douce. Demain, tout ne sera qu’ordre et beauté, luxe, calme et mobilité ? Il est permis d’en douter.

Lire « Evolution des mobilités dans le Grand Paris Tendances historiques, évolutions en cours et émergentes », Apur.