Focalisées sur les services de Ouigo España, les récentes critiques du ministre espagnol des Transports ont mis en évidence les performances de l’ensemble des opérateurs sur les réseaux ibériques à grande vitesse. Du moins sur les lignes où trois voire quatre offres coexistent : Renfe AVE, l’hispano-italien Iryo, Ouigo parrainé par le groupe Sncf et Avlo, la filiale low cost de Renfe. Les résultats ont été synthétisés sur la période allant du quatrième trimestre 2022 à la même période de 2023.
Madrid-Barcelone est le corridor au plus gros trafic. Renfe AVE y détient 45,3 % de part de marché, Iryo 24,9 %, Ouigo 19,5 % et Avlo 10,2 %. Sur la ligne Madrid-Valence ou le Levant, Renfe AVE n’accapare que 36,7 % du trafic, quand Iryo en a 27 %, Ouigo 22,4 % et Avlo 13,9 %.
Sur les liaisons entre la capitale et l’Andalousie ne sont présentes, pour le moment, que trois offres : Renfe Ave détient 64,6 % du marché sur Madrid-Séville, Iryo 30,2 % et Avlo 5,2 %.
Effet général de cette concurrence, les tarifs ont baissé (en moyenne de 20%) et le trafic a cru de 29 % de 2022 à 2023 sur les trajets considérés. Mais ce n’est qu’une étape, d’autres évolutions sont en cours. Ainsi, Renfe depuis le 21 mai met en service ses rames capacitaires Talgo S106 ; Ouigo vient d’ouvrir au nord-ouest Madrid-Valladolid qu’il prolonge ce mois de juin jusqu’à Cuenca et le Levant (Alicante). Ensuite Murcie puis l’Andalousie sont aussi sur son tableau de bord d’ici la fin 2024 ; les uns et les autres regardent également les destinations vers la Galice et les Asturies. A terme, car elles nécessiteraient des rames à écartement variable.
Michel Garicoix
La quantité semble impressionnante : l’investissement qu’Eurostar souhaite réaliser pour renouveler son matériel roulant pourrait porter sur un maximum de 50 trains à grande vitesse. En absolu, c’est beaucoup, presque la moitié du parc mis en service par la SNCF dans les années 1980 pour lancer le TGV Sud-est. Mais par rapport aux besoins du « nouvel » Eurostar, qui regroupe depuis l’automne dernier les relations transmanche et les trains à grande vitesse entre Paris, le Benelux et l’ouest de l’Allemagne, un tel parc n’est pas disproportionné.
En effet, à l’exception de 17 rames transmanche e320 construites par Siemens au cours de la décennie précédente, le parc actuel d’Eurostar remonte pour l’essentiel au début ou au milieu des années 1990. Il reste, d’une part, 8 rames transmanche e300 (ex-TMST, 750 sièges) et, d’autre part, 17 rames PBKA (Paris Bruxelles Cologne Amsterdam, offrant entre 371 et 399 sièges) et 9 PBA (Paris Bruxelles Amsterdam, 371 sièges) héritées de Thalys. A priori, ce sont 34 rames à un niveau qu’Eurostar doit remplacer d’ici quelques années par 50, mais à y regarder de plus près, du fait que les rames e300 « comptent double » avec leur 18 voitures, c’est plutôt l’équivalent de 42 trains à grande vitesse « standard » de 200 m qu’il faudra remplacer.
Qu’elle soit de 8 ou de 16 rames, la différence entre le parc actuel et le parc dont disposera Eurostar lorsque 50 nouvelles rames s’ajouteront aux 17 e320 sera très utile dans une perspective d’une développement de l’offre. Un développement « motivé par la demande croissante de voyages durables », selon Eurostar, qui veut être en capacité d’accueillir 30 millions de voyageurs annuels d’ici 2030. Soit une hausse de 61 % par rapport aux 18,6 millions de voyageurs transportés en 2023, année qui a vu un retour à une fréquentation comparable aux années précédant la pandémie. L’adaptation à une hausse de la demande sera sans doute plus facile avec les 50 nouvelles rames, qui devront relier les cinq pays desservis par Eurostar (en se contentant de la ligne nouvelle HS1 vers Londres pour ce qui est de la Grande-Bretagne). Ceci alors que le parc actuel est spécialisé dans les relations transmanche, d’une part, et dans les anciennes dessertes Thalys, d’autre part.
Pour avoir les moyens de ses ambitions, Eurostar peut maintenant compter sur de bons résultats financiers, avec un chiffre d’affaires qui dépasse la barre des 2 milliards d’euros et un EBITDA de 423 millions d’euros. Des résultats qui découlent de l’importante augmentation de l’offre entre 2022 et 2023, qui a permis une croissance globale de la fréquentation des trains. Par ailleurs le Groupe Eurostar a refinancé sa dette existante de 963,7 millions d’euros en avril 2024 : la dette totale s’élève désormais à 650 millions d’euros. « Ce résultat a été obtenu grâce à une forte génération de trésorerie à la suite de son redressement post-Covid », indique Eurostar, ainsi que par « un nouveau prêt à terme vert de 650 millions d’euros sur cinq ans avec une facilité de crédit renouvelable verte de 100 millions d’euros ».
À quoi ressembleront les nouveaux trains d’Eurostar ? Difficile à dire pour l’heure, car « les éléments détaillés de conception restent à confirmer », selon l’opérateur, dont l’objectif est de mettre en service les premiers nouveaux trains « au début des années 2030 ». Eurostar ajoute que ses clients et son personnel « seront sollicités pour la conception, qui vise à être la plus éco-responsable ». En particulier, le nouveau parc devra avoir « une meilleure performance énergétique » que le parc actuel, objectif assez réaliste lorsque l’on constate les progrès spectaculaires réalisés en la matière depuis la mise en service des rames à remplacer, il y a quelque trois décennies.
P. L.
C’est avec son nouveau train à grande vitesse S106, produit par Talgo, que la Renfe compte étendre son service AVE sur les corridors Paris – Lyon – Marseille et Paris – Barcelone, avec à la clé un quadruplement de son offre en France. Mais la totalité des 30 rames S106 commandées par la Renfe ne sont pas destinées au marché français : c’est en Espagne que les 10 premières unités doivent être mises en service le 21 mai, sur la desserte des Asturies et vers la Galice.
Composées de 12 voitures, ces rames proposeront plus de 500 places assises au total, selon la configuration choisie. L’aménagement AVE proposera le plus de prestations, avec des écrans tactiles à tous les sièges et des espaces confort (avec des sièges 2+2 de front), standard ou touristes (3+2 de front), ainsi qu’un service de cafétéria.
Chiffrées à 1,281 milliard d’euros, les 30 rames S106 commandées à Talgo font partie du paquet d’investissements de la Renfe, qui consacre plus de 5 milliards d’euros au renouvellement et à l’accroissement du parc actuel. Il s’agit des premiers trains que l’entreprise ferroviaire a reçus dans le cadre de ce plan d’investissements.
Il y a le projet de train à grande vitesse californien, celui dont on parle depuis un quart de siècle, géré par la California High-Speed Rail Authority (CHSRA) et qui doit choisir d’ici la fin de l’année qui d’Alstom ou de Siemens construira les six premières rames pour sa ligne nouvelle dans la vallée centrale, première étape vers une liaison de San Francisco à Los Angeles. Et il y a un autre projet en Californie, celui de l’entreprise privée Brightline West : une ligne à grande vitesse de 350 km établie sur la berme centrale de l’autoroute I-15 entre la région de Los Angeles et Las Vegas, dans l’État voison du Nevada. Le tout pour quelque 12 milliards de dollars (11,1 milliards d’euros).
Après avoir lancé le chantier de sa ligne nouvelle le 22 avril, Brightline West a annoncé le 1er mai avoir désigné Siemens comme « preferred bidder » pour fournir dix rames à grande vitesse en traction électrique, dites « American Pioneer 220 » (AP 220) en référence à leur vitesse : 220 mph, soit de l’ordre de 350 km/h. Ces rames de sept voitures devront être livrées dans le Nevada et testées en vue de tenir le calendrier de lancement du service Brightline West, pour les Jeux olympiques de 2028… soit avant le projet CHSRA ! Le marché sera enfin assorti d’un contrat de maintenance de matériel roulant pendant 30 ans, à réaliser à Sloan (Nevada), dans un site prévu à cet effet par Brightline West.
Cette annonce a fait suite à un appel d’offres international auquel participait également Alstom. Les critères qui ont guidé le choix de Siemens comprenaient entre autres le prix, le calendrier de production, les performances du train (vitesse, temps de trajet inférieur à deux heures…), la conformité aux lois sur l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite (ADA), les équipements pour les voyageurs et la capacité d’accueil (434 à 450 places assises selon aménagement). Avec un point supplémentaire qui vaut la peine d’être souligné : les critères ont pris en compte l’interopérabilité avec le projet CHSRA. De quoi influencer cette dernière, qui a également pré-sélectionné… Alstom et Siemens ?
Enfin, ces trains devront être conformes aux exigences du « Buy America Act », vu qu’ils bénéficient d’un coup de pouce financier de 3 milliards de dollars donné fin 2023 par la Federal Railroad Administration (FRA). Sur la carte alors publiée par cette dernière, on voit figurer cette ligne, ainsi que sa voisine de la CHSRA, également bénéficiaire d’une partie de l’enveloppe destinée aux lignes à grande vitesse.
Construit spécifiquement pour le marché américain, l’AP 220 est dérivé de la plate-forme Velaro de Siemens (dont font partie les ICE 3 de la DB et les e320 d’Eurostar). Sa construction nécessitera la création d’une chaîne d’approvisionnement en composants de fabrication américaine pour trains à grande vitesse. De son côté, Siemens « établira un nouveau site pour la production de l’AP 220 et annoncera la localisation du premier véritable centre de production de trains à grande vitesse d’Amérique lorsque le contrat sera finalisé ». Une déclaration discutable, dans la mesure où le site Alstom de Hornell (État de New York) produit déjà les rames Acela de deuxième génération pour Amtrak…
Brightline et Siemens n’en sont pas à leur premier projet en commun, puisque c’est ce constructeur, dont le principal site américain se situe à Sacramento, en Californie, qui a fourni les rames diesel Venture exploitées depuis 2018 par l’entreprise ferroviaire privée de trains de voyageurs en Floride, sur ligne classique et sur ligne nouvelle à une vitesse maximale de 200 km/h. Un projet retardé par le Covid, mais qui a été mené à bien dans des délais raisonnables et qui a fait entrer aux XXIe siècle le transport de voyageurs aux États-Unis, par ses gares entièrement repensées plus que par la vitesse de ses trains, inférieure à celle des Acela du corridor nord-est. Avec son deuxième projet, Brightline compte largement dépasser la vitesse de ce dernier…
P. L.
« D’ici la fin de cette année, nous saurons qui construira les premiers trains à grande vitesse de Californie ». C’est en ces termes que Tom Richards, président du conseil d’administration de la California High-Speed Rail Authority (CHSRA), annonce qu’un appel d’offres (Request for Proposals) a été lancé en avril aux filiales américaines d’Alstom et de Siemens pour fournir les premiers trains à grande vitesse sur ligne construite à cet effet aux États-Unis, dans la vallée centrale de Californie.
Seuls constructeurs à s’être déclarés dans le délai imparti (14 novembre) par l’appel à candidatures lancé en août dernier par la CHSRA, ce sont donc Alstom Transportation, Inc. et Siemens Mobility, Inc. qui ont été « short-listés » (préqualifiés) en janvier. Désormais, les offres respectives des deux candidats sont attendues pour cet automne, afin que la CHSRA puisse attribuer le contrat d’ici à la fin de l’année.
Dans le cadre de ce marché, rappelons que six rames aptes à 220 mph (de l’ordre de 350 km/h) en service et à 242 mph (390 km/h) en essais devront être livrées. Deux des rames sont réservées pour les essais statiques et dynamiques, alors que les quatre autres sont destinées à la mise en service du premier tronçon de LGV (275 km de ligne nouvelle entre Merced et Bakersfield) vers 2030-2033. Le marché porte également sur la fourniture d’un simulateur de conduite et de pièces de rechange, ainsi que sur la maintenance pendant 30 ans et une révision à mi-vie. Les offres remises seront évaluées à 60 % sur leur montant et à 40 % sur des critères techniques.
Cette commande de trains à grande vitesse a été en partie rendue possible par le financement fédéral de décembre dernier, dont la CHSRA est un des bénéficiaires. Ce coup de pouce de la Federal Railroad Administration (FRA) a une évidente contrepartie : la production de ces trains devra être conforme au Buy America Act. Ce dernier exige que l’assemblage final des trains se fasse aux États-Unis à partir de composants nationaux à 100 % (à moins que des dérogations « justifiées » ne soient accordées par le secrétaire américain aux Transports) et que plus de 90 % de la valeur en dollars des composants des trains à grande vitesse soient produits aux États-Unis. La CHSRA, qui est bien consciente que ce n’est pas le cas pour tous les composants, rappelle à l’occasion que des dérogations ont été demandées par d’autres, dont Amtrak et Brightline West, pour son projet de LGV entre la sud de la Californie et Las Vegas. Enfin, la conception des futurs trains à grande vitesse californiens devra tenir compte des avis officiels émanant de quelque 300 parties prenantes (autorités, représentants, associations d’usagers…)
Le fait que le train présenté sur les illustrations officielles fournies par la CHSRA ressemble beaucoup à ceux de Siemens ne présage de rien. Ni le fait que Siemens possède une usine à Sacramento, capitale de la Californie, alors que les nouveaux Acela d’Alstom sont produits à l’autre bout des États-Unis, dans l’usine de Hornell (État de New York). Car dans la présentation qu’elle a donné des deux candidats lors de l’appel d’offres, la CHSRA les a mis à égalité parfaite. Pour l’autorité californienne, Alstom et Siemens « possèdent une expérience et un ancrage aux États-Unis », sont « des experts du matériel roulant destiné aux voyageurs, des tramways aux rames à grande vitesse », sont « internationalement reconnus » et ont « une grande expérience dans la conception, la production, la fourniture et la maintenance des rames à grande vitesse » et ont été « des participants-clés aux efforts du secteur » pour normaliser la circulation à plus de 125 mph (200 km/h) des trains de voyageurs, en conformité avec les exigences Tier III (niveau 3) de la FRA.
P. L.
La modernisation du réseau ferré indien privilégie une électrification massive au développement de lignes nouvelles à grande vitesse. Ceci n’exclut toutefois pas l’établissement à terme d’un réseau de huit lignes nouvelles pour trains à « semi-grande vitesse » assurant la desserte de la région capitale indienne et désigné RRTS (Regional Rapid Transit System, soit « réseau de transport rapide régional »).
C’est dans ce cadre que, le 20 octobre, une première section de 17 km de la ligne RapidX Delhi – Meerut a été inaugurée par le Premier ministre indien Shri Narendra Modi, aux côtés du ministre en chef de l’Uttar Pradesh, Shri Yogi Adityanath, et d’autres représentants du gouvernement. L’ouverture au public a quant à elle eu lieu le lendemain.
La vitesse de pointe de 160 km/h sur la ligne nouvelle n’est pas vertigineuse, mais cette première section entre Sahibabad et Duhai met en œuvre une première mondiale : une version hybride du niveau 3 du système européen de contrôle des trains ETCS (en fait, une combinaison du niveau 2 avec des cantons virtuels). Ce système, qui s’appuie ici sur un réseau de communications LTE (Long-Term Evolution) établi en partenariat avec Nokia, devrait permettre la mise en œuvre d’une exploitation automatique des trains (ATO) avec des intervalles de 180 secondes (3 minutes). En attendant, la fréquence des trains sera d’un passage toutes les 5 ou 10 minutes et les quais des gares sont déjà équipés de portes palières.
L’ETCS de la ligne a été fourni par Alstom, tout comme les systèmes de télécommunication et le matériel roulant NaMo Bharat « Make in India ». Commandé en 2020 à Bombardier (à l’époque), ce parc comprend 30 rames de banlieue (comprenant six caisses) et 10 rames de mass transit interrégional (composition à trois caisses). Ce matériel roulant a été conçu par le centre d’ingénierie d’Alstom à Hyderabad et assemblé à Savli (Gujarat), avec un système de traction et des équipements électriques produits dans l’usine de Maneja (également dans l’Etat du Gujarat). Ce nouveau matériel roulant fait partie de la famille de trains périurbain Adessia d’Alstom, précise le constructeur.
L’exploitation et la maintenance ont été attribués à DB International Operations (DBIO) pour une période de 12 ans, qui devrait voir en 2025 l’achèvement, par la National Capital Region Transport Corporation (NCRTC), de cette première ligne de 82 km desservant 25 gares et dotée de deux dépôts. L’exploitation sera assurée par DB RRTS Operations India Private Limited et les services de maintenance par Alstom. Quand cette première ligne sera pleinement opérationnelle, elle devrait transporter quelque 800 000 voyageurs par jour (soit entre les fréquentations des lignes D et B du RER francilien).
P. L.
Fin connaisseur du transport ferroviaire, Gilles Savary, ancien député socialiste de Gironde, salue le modèle de la Société du Grand Paris pour externaliser la maîtrise d’ouvrage de grandes infrastructures, et les financer. Mais il met en garde contre la pression fiscale, « fabrique à gilets jaunes », comme s’intitule son essai paru en début d’année (1).
Ville, Rail & Transports : Le gouvernement veut placer la Société du Grand Paris en orbite pour la réalisation des RER métropolitains et de leurs gares. Qu’en pensez-vous ?
Gilles Savary : C’est plutôt une bonne idée. Avec le Grand Paris Express, le plus grand chantier d’infrastructure européen, la SGP a fait ses preuves dans deux registres : un financement innovant et une maîtrise d’ouvrage complexe. Dotée d’une fiscalité propre (notamment la taxe sur les bureaux, ndlr), elle peut se refinancer sur les marchés financiers au rythme de la construction des projets. En France, l’offre ferroviaire est insuffisante par rapport à la demande, il y a des goulets d’étranglement sur le réseau, et c’est d’ailleurs pour les désengorger que l’on fait des RER métropolitains. Le chantier est énorme, les recettes de péage et les subventions sont à peine suffisantes pour maintenir le réseau ferré en état. La SGP peut amener des fonds plus rapidement mobilisables que des financements budgétaires.
Ce ne serait pas dévoyer le modèle SGP ?
G. S : Je connais les réticences extrêmes de SNCF Réseau et de Gares & Connexions devant la possible arrivée d’un nouvel acteur, immédiatement compétent. D’autant que SNCF Réseau sait qu’il n’a pas les capacités de production industrielle pour accomplir les RER métropolitains. Nous allons affronter une crise d’insuffisance de l’offre ferroviaire : la SGP, qui s’appellera autrement, est donc la bienvenue pour atteindre nos objectifs environnementaux et de report modal. Toutefois, la loi lui interdit d’intervenir là où le réseau ferré existant est exploité : ce qui l’exclut de la plupart des projets de RER métropolitains. Elle pourrait intervenir sur les lignes du Grand Est que la région veut remettre en exploitation. Ailleurs, elle aura des queues de cerises. Sauf à ce que SNCF Réseau en fasse un maître d’ouvrage délégué, ou un maître d’œuvre.
Mais la grande difficulté pour la SGP sera de mobiliser des ressources propres en levant de nouvelles taxes, car dans de nombreuses régions, c’est déjà fait pour les nouvelles lignes à grande vitesse ! Sud, Occitanie et Nouvelle-Aquitaine se sont fait piéger dans des sociétés de projets qui lèvent des impôts locaux, des taxes spéciales d’équipements et des taxes additionnelles aux taxes de séjour pour financer les LGV Bordeaux-Dax-Toulouse, Montpellier-Perpignan, Provence Côte d’Azur.
Dans les Hauts-de-France, Xavier Bertrand est très intéressé pour un RER métropolitain entre Lille et Hénin Beaumont. La SGP est partante, SNCF Réseau n’y voit pas d’inconvénient puisque ce sont des ouvrages ferroviaires nouveaux, mais pas question de créer de nouvelles taxes locales, avertit le patron de la région qui lève déjà des impôts pour la Société de projet du canal Seine-Escaut. Après ce siphonnage fiscal des territoires pour financer des infrastructures ferroviaires nationales, il n’y a plus d’argent !
On ferait mieux d’avoir des recettes fiscales claires et précises et de ne pas se servir de la SGP comme d’un cheval de Troie. Financer des LGV, dont la plupart des gens n’ont pas besoin dans des territoires qui sont en déficit de transports collectifs, par de la fiscalité locale impalpable mais qui a vocation a augmenter, c’est une bombe à retardement. Une fabrique de gilets jaunes ou de bonnets rouges, au choix… Exactement comme pour l’écotaxe ou la taxe carbone. Il aurait donc été bien plus judicieux de garder ces ressources pour les RER métropolitains.
Dans ces conditions, la SGP ne pourrait mettre qu’un pied dans la porte…
G. S : Elle construira peut-être des RER métropolitains si les élus mettent carte sur table et instaurent une taxe juste, pas en catimini, pour combler le déficit de transports collectifs. La SGP construira aussi peut-être des pôles d’échanges multimodaux, des gares. Mais par corporatisme, Gares & Connexions n’a pas très envie de voir débouler un nouveau maître d’ouvrage sur ce marché.
Propos recueillis par Nathalie Arensonas
Le 2 mars dernier, nous avons lancé un référendum auprès de nos lecteurs pour savoir ce qu’ils pensent de l’idée de repeindre en orange la rame TGV 16 du premier record, qui a fini sa carrière en carmillon. C’est ce que réclame un collectif d’une quarantaine d’agents de tous corps de métiers. Selon ce collectif, il faudrait être prêt en septembre lorsque seront célébrés les 40 ans de la mise en service du TGV.
En une dizaine de jours, vous avez été plus de 600 à nous répondre, essentiellement par mail, mais aussi par courrier. Vous êtes, à une écrasante majorité (plus de 91 %), en faveur du oui. Nous publions ci-dessous un best-of des commentaires que vous nous avez adressés vos justifier vos positions.
Et maintenant qu’en pense la SNCF?
LordRégio : Elle mérite amplement d’être revêtue de la superbe livrée orange comme à l’ancienne, livrée qui, personnellement, m’a fait aimer le TGV !
CC72186 : Excellent projet qui ravira tout le monde, avec une bonne communication sur l’événement il y a moyen d’intéresser une grande partie des Français notamment en organisant des tournées dans toute la France en s’arrêtant une journée dans les villes. Pourquoi ne pas transformer la rame à bord en train exposition sur l’histoire de la grande vitesse et du TGV en France comme cela avait été réalisé avec Patrick mais cette fois-ci totalement de fond en comble.
Gauthier : Réaliser une cagnotte avec pourquoi pas des petites contreparties sympas à certains paliers.
Yvan : A l’instar de plusieurs pays, repeindre la rame en livrée d’origine permettrait de valoriser ce patrimoine ayant pu faire la fierté de la France dans les secteurs du transport et de la technologie. Cette opération toucherait un public allant plus loin que celui des passionnés puisqu’elle permettrait d’afficher un véritable bout de l’histoire française.
Rochereau Gilles : Ce n’est pas qu’une dépense de communication. N’y a-t-il pas un budget alloué au Patrimoine comme au sein des CFF suisses ou FS italien ?
Corentin Morin : L’opération « Au revoir Patrick » a été un succès, stoppé trop tôt par la crise. Reprendre avec la rame 16 serait un signe fort, et permettrait de réunir de nouveau les amoureux du ferroviaire, et les curieux, et créer des vocations.
Patrick Bernardi : Sur les coms du sujet, ne pas hésiter à ajouter les hastag #40ansTGV, #PatrimoineSNCF, #la16enorange. Cela donnera des arguments à la Direction du Patrimoine et à la Communication pour trouver un financement.
Hervé : Il serait possible de la repeindre sans désaccoupler les motrices (tant pis si la peinture ne sera pas parfaite).
Manolo : C’est une évidence qu’il faut la remettre en orange. Quant au coût, le désaccouplement – accouplement doit être fait je suppose dans un technicentre SNCF. Pourquoi une opération réalisée quasi quotidiennement coûterait aussi cher ? Et pourquoi déjà faut-il qu’il y ait une facture ? Encore un magnifique résultat de la séparation en activités ?
Cede : La SNCF n’a jamais réussi à généraliser une livrée sur tous ses matériels, et dépense régulièrement de l’argent à repeindre ses voitures, locomotives, rames en fonction de nouvelles humeurs. Elle peut bien consacrer un peu d’argent à remettre cette rame 16 en état d’origine, c’est un beau geste pour le patrimoine (et de la peinture, de la vraie, pas un adhésif)
Joshua Teoz : Un reconditionnement en rame d’affrètement serait envisageable
TGVdu45 : Au-delà du symbole qu’il représente, savoir concilier image de marque et patrimoine fait aussi aujourd’hui la force d’une entreprise. On ne peut décemment pas prétendre au développement sans considérer et tenir compte d’un héritage technique, culturel et humain. L’histoire du TGV n’a été qu’un apprentissage permanent, et le TGV de demain n’est autre que le descendant direct des générations de TGV passées avant lui. Cet ancêtre commun se retrouve aussi techniquement dans bon nombre de trains « du quotidien », qu’il a permis de développer et concevoir. Tantôt banc d’essais, laboratoire, c’est aussi un témoin social et sociétal. C’est tout cela qu’il y a derrière le « Patrimoine » que représente ce train, orange. Cette rame serait ainsi non seulement un témoin historique, mais aussi une marque de la capacité, et de l’intelligence, à continuer à aller de l’avant, tout en gardant en tête d’où on vient. Ce train est un vecteur de l’apprentissage et des révolutions qu’il a permis depuis 40 ans. SNCF pourrait ainsi l’utiliser comme rame spéciale, pour des voyages occasionnels ou commémoratifs, permettre sa location pour des tournages d’époque, qui financeraient en partie son entretien, ainsi que sa mise à disposition pour des événements, ou opérations de communication. Pas ringard, ce train permettrait au contraire de mettre encore plus en valeur les avancées réalisées depuis, et de garder cette descendance non seulement esthétique, mais aussi technique, tel un véritable marqueur sociétal.
Simon : Ce serait une véritable vitrine, une ambassadrice de groupe SNCF, de son histoire, de son savoir-faire, de ses métiers.
Yohann : Évidemment qu’il le faut, et évidemment qu’il faut que la SNCF paye ! Je rappelle si c’est nécessaire que depuis des décennies, la SNCF et la France font le minimum pour la préservation de leur patrimoine ferroviaire et industriel, au point d’en être ridicules par rapport aux pays voisins où faire rouler un train historique est possible, bien plus facile, voire même régulier : en Allemagne on a vu un train régulier ayant sa locomotive en panne dépannée au pied levé par une machine historique disponible sur place. En Suisse des trains réguliers sont tractés régulièrement par des machines historiques maintenues en état de marche. Bien sûr qu’en termes de capital image, repeindre la rame en orange serait une opération de communication à l’impact considérable tant la couleur est « vintage » et que les années 80 sont à la mode chez les jeunes, et tant les générations actuelles n’ont même pas idée de l’ancienneté du système TGV et de son avant-gardisme à l’époque. Ce serait également bénéfique et capitalisable pour des locations de tournages cinéma ou pour des opérations de communication. Enfin, est-ce utile aussi de rappeler que la SNCF confie ses vieux matériels, pour ne pas dire ses épaves, à des associations qui se chargent de les restaurer et de les valoriser bénévolement et au prix d’un énorme travail, mais que ces machines et matériels roulants restent la propriété de la SNCF qui peut les récupérer à tout moment et peut donc récupérer au moindre coût et au moindre effort ce matériel ? Il ne serait donc que justice que la SNCF mette la main à la poche de temps en temps pour son patrimoine, surtout pour le TGV, qui fut un choix fort de l’entreprise et du gouvernement (et fort discutable puisqu’en parallèle tout à été mis dans ce nouveau train, pour l’image et l’innovation technologique, tandis que les petites lignes ont été progressivement abandonnées) : si la SNCF a défendu le train à grande vitesse par une politique d’investissement, de communication et de records, autant qu’elle soit cohérente en défendant l’histoire et le patrimoine du TGV, bref, en défendant ses choix stratégiques passés et actuels.
Paul Heilbrunn : Vous pourriez faire un défilé de tous les types de TGV aux environ de Paris…
Octopusrail : Avec financement public car cette rame a représenté la France.
Jean : Orange est la couleur flashie qui a marqué l’entrée de la grande vitesse en France. On ne change pas une équipe qui gagne. La rame 16 a battu le record en étant orange, elle doit rester tel quel pour perpétuer l’atmosphère de ce record.
STV : Le faire circuler sur une ligne touristique. En faire un restaurant 5 étoiles sur rails.
Benoît : Regroupez toutes vos machines par exemplaire unique dans un lieu qui pourrait se visiter. Merci.
Vivi le Cheminot : Il faut que cette rame tourne, comme une rame classique ! Il faut qu’elle aille à la rencontre de son public. Il faudrait faire de même avec Patrick comme ça, elles pourraient circuler en UM (unité multiple) ce qui aurait plus de logique que d’avoir deux livrées différentes.
Perceval : Oui oui oui. Le souvenir pour avancer.
Lauritz : Je suis un cheminot allemand et j’adore le TGV, un symbole de la France et de l’histoire des trains. Il FAUT conserver la rame 16 en livrée originale, et non seulement un pelliculage, mais une peinture exacte et détaillée. Voir les Italiens (Fondazione FS), ils ont beaucoup de succès avec les projets de restauration ! Rétro c’est hip et il y a beaucoup de raisons pour la peinture orange. Chaque personne en France va être surprise quand un TGV orange passe !!! Alors n’hésitez pas svp !!! Amitiés, Lauritz (Düsseldorf)
Bertrand Martin : La peinture, c’est bien. Mais une remise en l’état d’origine des intérieurs, c’est encore mieux !
Coulon Olivier 21 : Effectuer un Tour de France ferroviaire.
Philippe G : Un record de vitesse ce n’est quand même pas rien, et il serait tout à fait justifié que cette rame reprenne ses couleurs d’origine. J’irais même plus loin : pourquoi ne pas repeindre un TGV en service en orange ? Certaines compagnies aériennes (British Airways et même Air France) ont repeint un de leurs avions modernes avec des livrées « vintage », aux anciennes couleurs historiques de la compagnie et cela a beaucoup de succès (cherchez par exemple sur Google Images « A320 retro livery »).
Florent : Excellent projet que je souhaite voir aboutir. En effet, le patrimoine ferroviaire est aussi important que le patrimoine et la sauvegarde des monuments etc. Espérons que la SNCF dise oui. Repeindre la rame 16 en orange aurait plus d’impact sur les gens à mon sens, et de plus, la couleur orange fait partie de l’histoire du TGV, de son identité. Je tiens quand même à remercier tout le collectif qui sans lui rien ne serait possible.
Oehmgen Jacqueline : Nous pouvons vous aider à réduire les coûts étant spécialiste en peinture. Je me suis spécialisé dans le rail OEM et MRO en France et Europe. N’hésitez pas de revenir vers nous 3M.
Chanat : Confié à une association pour organiser des évènements et des voyages pour des passionnés mais également promouvoir le train et la SNCF. (si elle existe encore aujourd’hui……)
Jac : Elle devrait être repeinte, sans qu’on se pose la question… C’était tellement important comme changement quand elle a circulé… le TGV a révolutionné les déplacements et l’aménagement du territoire.
Arthus : Une livrée historique pour une rame historique. De plus la livrée actuelle des TGV est triste, sombre et je ne n’aime pas du tout comme la majorité des Français.
Chtitsoeur : Pour moi sa couleur n’a pas d’importance pour le 40e anniversaire de sa mise en place mais son Histoire en a. A faire découvrir aux personnes qui ne l’ont pas vécu en leur rappelant qu’il était orange.
David : Après un plan d’économies sans précédent à la SNCF, des augmentations de salaires gelées et des primes non versées aux salariés de ses filiales pourtant les plus rentables, dépenser 500 000 euros au nom de la « nostalgie » semble complètement incongru.
Moi : Si c’est pour qu’elle pourrisse dans un coin parce qu’elle coûtera trop cher en entretien pour la faire circuler occasionnellement ce n’est pas la peine autant la ferrailler tout de suite.
Audrey : Vu le prix que cela coûterait, si SNCF est prête à dépenser une somme de 500 000 €, il serait préférable de la donner à des associations humanitaires et environnementales ou à l’investir dans des projets de recherche pour préserver notre planète. Utilisez les films d’archives existant.
Chris : Peinture non nécessaire = pollution non nécessaire
CyclAbel : Quitte à conforter une image passéiste des cheminots, autant la peindre en machine à vapeur !
Thomas Lézé : La rame historique n’existe plus ? Si elle existe encore pourquoi ne pas la remettre en service ? Inutile de repeindre la rame… SNCF a d’autres problèmes bien plus importants.
Julio : Je ne suis pas sûr qu’avec l’état des finances SNCF cela soit le bienvenu.
Et pour lire toutes les réponses, vous pouvez consulter ce pdf : Réponses questionnaire rame TGV 1er record
C’est la fin de l’isolement pour Grenade. Fin juin, était inaugurée la ligne à grande vitesse reliant Madrid-Atocha à Grenade. Depuis 2015, la ville, qui compte 240 000 habitants, n’était reliée par des trains directs qu’avec Almería pour permettre les travaux liés à l’arrivée du train à grande vitesse espagnol, l’AVE. Le chantier achevé, la ligne a été mise en service le 26 juin en pleine saison touristique.
Un investissement de 1,67 milliard d’euros pour mettre l’Alhambra à 3 heures 15 de Madrid-Atocha, soit un gain de 1 heures 20 pour un trajet de 568 km. Branché à Antequera sur la ligne Madrid – Cordoue – Málaga, le nouveau tronçon de 122 km est à écartement UIC, souvent à voie unique et parfois à trois files de rail, en incluant la liaison ibérique ancienne. Équipée en courant alternatif 25 kV avec une signalisation ERTMS niveau 2, la ligne permet aux trains de filer à 300 km/h.
Elle a vocation à être intégrée au « Corridor Méditerranée » en construction et reliant à l’écartement européen la frontière française à l’Andalousie.
Michel Garicoïx