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Ewa

La Fnaut et l’Ademe disent halte à l’étalement urbain

Quand un habitant de la périphérie déménage pour le centre, son trajet moyen quotidien passe de 9 à 6 km. Sa consommation de carburant baisse de 38 % et ses émissions de gaz à effet de serre de 40 %. Voilà les principaux enseignements d’une étude réalisée pour l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et de la Fédération nationale des usagers des transports (Fnaut). Quand un habitant de la périphérie déménage pour le centre, son trajet moyen quotidien passe de 9 à 6 km. Sa consommation de carburant baisse de 38 % et ses émissions de gaz à effet de serre de 40 %. Voilà les principaux enseignements d’une étude réalisée pour l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et de la Fédération nationale des usagers des transports (Fnaut). Les deux structures se sont associées afin de lutter contre « l’étalement urbain diffus », c’est-à-dire les zones résidentielles accessibles uniquement en voiture. Pour cela, cette étude a été menée sur deux ans dans la ville de Tours, en se basant sur le comportement de dix-neuf ménages ayant migré vers le centre. Elle montre également que si le nombre de déplacements ne baisse pas, ces derniers sont plus courts et moins subis. « Les personnes passent moins de temps à accompagner leurs enfants, et n’ont plus la sensation de faire le taxi », synthétise Jean-Marie Beauvais, auteur de l’étude.
« Il y a urgence ! Le prix du pétrole peut doubler en trois ans, et les villes ne cessent de s’étendre en tache d’huile », s’alarme Jean Sivardière, président de la Fnaut. L’association d’usagers et l’Ademe ont donc émis une série de propositions visant à éviter que toujours plus de monde prennent sa voiture pour aller chercher le pain ou le journal. Il s’agit autant de faire revenir les habitants dans des zones densément peuplées que d’inciter à utiliser les transports en commun.
La Fnaut recommande notamment de taxer les logements inoccupés en centre-ville. « Il y a 100 000 logements libres à Paris, 6 000 à Grenoble, et ce ne sont que des exemples parmi d’autres, détaille Jean Sivardière. Il faut taxer fortement les bailleurs pour les forcer à rendre les cœurs de villes accessibles. » L’Ademe soutient aussi l’autopartage, « une excellente façon de rendre les villes vivables et de convaincre les personnes habitant en périphérie de se déplacer autrement qu’avec leur véhicule individuel polluant ». A cela, on peut ajouter l’encouragement du commerce de proximité et le péage à l’entrée des centres urbains. Autant de mesures qui risquent de se heurter frontalement au grand mouvement qui pousse les ménages à habiter dans des maisons plus grandes et moins chères à l’écart des centres-villes.
    

Julien Sartre

Ewa

Eiffage retenu pour la LGV Bretagne – Pays de la Loire

Pour la construction des 214?km de la LGV Bretagne – Pays de la Loire qui mettra Rennes à 1h26 de Paris, RFF a retenu Eiffage, qui a présenté le projet le moins coûteux : 3,4 milliards d’euros.?RFF financera ce chantier, qui doit créer 10?000 emplois par an, à hauteur de 40 %. C’est une première : la ligne à grande vitesse Bretagne – Pays de la Loire est la première LGV attribuée dans le cadre d’un contrat de partenariat. Le contrat n’est pas encore signé – il devrait l’être dans les prochains mois – mais on connaît le titulaire pressenti pour construire, exploiter et maintenir cette infrastructure : le groupe de BTP Eiffage a été retenu le 18 janvier par Réseau Ferré de France (RFF) lors de son conseil d’administration, face à Bouygues et à Vinci.

« Eiffage nous a paru le meilleur candidat compte tenu de nos critères, qui reposent sur la qualité de l’offre, sur des critères économiques, financiers et environnementaux », souligne Hubert du Mesnil. Le coût a évidemment pesé lourd, reconnaît le président de RFF. « L’enveloppe, d’environ 3,4 milliards d’euros, et leur projet sont conformes à nos objectifs financiers », affirme-t-il. « Nous avons pu avoir quelques craintes concernant des dépassements financiers, mais il n’en est rien », se félicite de son côté Jean-Yves Le Drian, président du conseil régional de la Bretagne. « C’est une grande satisfaction pour nous tous de constater que nous restons dans l’enveloppe que s’étaient fixée les collectivités bretonnes. »

Selon une source proche du dossier, Eiffage était le moins disant financier, proposant une offre de 400 millions d’euros moins chère. Les autres candidats en lice n’auraient pas voulu suivre, cet effort financier paraissant, sinon impossible, du moins très difficile à tenir.

Le titulaire pressenti devra vraisemblablement s’en expliquer auprès de RFF. L’heure est maintenant à la poursuite des discussions pour finaliser ce contrat qui doit durer vingt-cinq ans. Eiffage devra aussi boucler son financement en obtenant auprès de ses banques les crédits qui lui incombent. Le groupe de BTP travaillera avec d’autres entreprises dont il ne souhaitait pas dévoiler le nom à l’heure où nous mettions sous presse. « Nous ferons bien sûr travailler des entreprises de notre groupe et des entreprises locales », s’est bornée à indiquer une porte-parole d’Eiffage.

Le chantier – l’un des plus importants d’Europe pour les cinq années à venir selon RFF – devrait se traduire par la création de 10 000 emplois annuels durant toute sa durée, prévue pour s’achever en automne 2016. Ce sont 214 km de ligne nouvelle qui vont être construits, dont 182 de ligne à grande vitesse et 32 de raccordement. La LGV mettra Rennes à 1 heure 26 de Paris, contre 2 heures 03 actuellement. « Six raccordements sont prévus. Ce projet contribue au désenclavement de l’ensemble des territoires des régions Bretagne et Pays de la Loire. Il améliore les dessertes des grandes métropoles mais aussi de villes intermédiaires », souligne Sandrine Chinzi, sa directrice pour RFF. Pour Hubert du Mesnil, « ce grand projet ferroviaire va créer une des plus longues lignes à grande vitesse d’Europe, reliant d’un trait de 360 km Paris et l’Ouest de la France ».
 

 

Un trait d’union entre Paris et l’Ouest de la France

Ce projet s’inscrit dans le cadre du Grenelle de l’Environnement qui prévoit la réalisation de 2 000 km de lignes nouvelles d’ici à 2020. Il consiste à prolonger la ligne à grande vitesse existante entre Paris et Connerré (à 20 km à l’est du Mans). La ligne est conçue pour une vitesse commerciale de 320 km/h. Elle permettra de gagner 37 minutes entre Paris et Rennes et 8 minutes entre Paris et Nantes. À terme, pour compléter la LGV, RFF souhaite relier Paris au Finistère avec des temps de parcours réduits à 3h entre Paris et Brest et Paris et Quimper. Cela passe par la modernisation des liaisons Rennes – Brest et Rennes – Quimper. Une première phase, en cours, consiste à adapter l’infrastructure pour permettre le relèvement de la vitesse sur certaines sections, jusqu’à 180, 200 ou 220 km/h.
 

 

Un financement tripartite

Le chantier va coûter 3,4 milliards au total. À la différence d’un contrat de concession, dans lequel le concessionnaire finance le projet et supporte le risque commercial, c’est RFF, l’État et les collectivités qui vont payer les travaux. RFF va apporter 40 % de la somme, une proportion élevée (sa contribution n’était par exemple que de 25 % pour le TGV Est) qui s’explique par la rentabilité espérée du projet.

Le reste est apporté pour moitié par l’État et pour l’autre moitié par les collectivités locales. S’agissant de la somme versée par les collectivités locales : 90 % viendront du côté breton (Région Bretagne, départements du Finistère, du Morbihan, des Côtes d’Armor, de l’Ille-et-Vilaine, Rennes Métropole, le Pays de Saint-Malo) et les 10 % restants des Pays de la Loire. Quant à la part de l’État (1,1 milliard), elle sera en fait avancée par Eiffage. L’État remboursera par la suite le groupe de BTP sous forme de loyers mensuels.

De son côté RFF touchera les péages versés par les trains qui emprunteront les infrastructures. Et l’établissement public rémunérera Eiffage pour ses prestations de maintenance des voies.

RFF estime que la nouvelle infrastructure fera venir 1,5 million de voyageurs supplémentaires à l’horizon 2016, à ajouter aux 19 millions de personnes attendues sur ces axes à cette date.
 

Ewa

Le métro de Chennai en chantier

L’ancienne Madras, quatrième ville indienne, est en train de se doter d’un nouveau réseau de métro, comportant deux lignes et totalisant 45 km. Un premier tronçon sera mis en service en 2013, l’ensemble du réseau en 2015. Un consortium emmené par Egis, très présent en Inde, est maître d’œuvre du réseau. Et les rames seront construites par Alstom. Chennai, avec environ 8 millions d’habitants, est la quatrième ville d’Inde. C’est en 2015 que l’ancienne Madras, capitale du Tamil Nadu, aura ses deux nouvelles lignes de métro. Le métro, réalisé sous maîtrise d’ouvrage public, a fait tout d’abord l’objet d’une étude de faisabilité réalisée par DMRL (Delhi Metro Rail Limited), société publique qui donne le ton en Inde pour les métros. C’est d’ailleurs à son image qu’a été créée, par l’état du Tamil Nadu et l’Etat fédéral, la CMRL (Chennai Metro Rail Limited), chargée de la maîtrise d’ouvrage. Après les études préliminaires, et à la suite d’un appel d’offres, le consortium Embye a été désigné general consultant, en d’autres termes chargé de la maîtrise d’œuvre générale du projet. Ce consortium regroupe les sociétés Egis, Aecom, l’indien Barsyl, l’agence japonaise d’architectes YEC, sous la direction d’Egis Rail.

L’ensemble des missions, confié au consortium pour un montant de 75 millions d’euros, va des études d’avant-projet (preliminary design) à la rédaction des dossiers d’appel d’offres, à la supervision des travaux, au testing & commissioning, jusqu’à la mise en exploitation. Type de rôle qu’Egis Rail connaît bien avec les tramways français. C’est un enjeu majeur pour le groupe en Inde, qui tient à rappeler que le savoir-faire français dans le transport public et ferroviaire n’est pas uniquement celui de Systra. Un concurrent lui-même actif en Inde, par exemple avec le métro de Bombay, réalisé, lui, en PPP.

Le contrat de Chennai a été attribué au deuxième trimestre 2009, et les travaux sont aujourd’hui en cours, pour une ouverture qui aura lieu en deux phases. Une première en 2013, une deuxième en mars 2015. « Le calendrier est tenu, on est très, très bien », assure Philippe Amat, directeur des projets rail et transports urbains chez Egis.

Les viaducs ont été contractualisés et sont en cours d’édification, la partie souterraine est en examen, le matériel roulant sera fourni par Alstom, et les appels d’offres système et énergie sont en cours de jugement. En mars 2011, tous les marchés seront attribués.

L’investissement est évalué à environ 3,3 milliards de dollars US. Le projet est financé à hauteur de 60 % par un prêt de la Japan International Cooperation Agency (prêt non lié, comme en témoigne notamment la commande de matériel passée à Alstom). Le reste de l’investissement est assuré à parts égales par le Tamil Nadu et par l’Etat fédéral.

Le métro de Chennai est aux standards indiens, qui le font plus ressembler à un RER qu’à un métro français. Les voitures sont à grand gabarit, environ 22 m de long pour 3 m de large. Les trains circuleront sous caténaire électrifiée en 25 kV, le roulement sera de type fer-fer. Type de métro qu’on retrouve à Bombay, à Calcutta ou à Hyderabad. Pas question pour l’instant de systèmes de contrôle commande type CBTC, on en reste à l’ATP. La première mise en service (2013) se fera avec des intervalles de 6 minutes. Avec la deuxième (mars 2015), on passera à des intervalles de 4 minutes et demie, puis, à mesure de l’augmentation des besoins en capacité, à 3 minutes et demie. De plus, les rames, au départ composées de 4 voitures, le seront ensuite de 6. On envisage un trafic pour l’ensemble du système de l’ordre de 500 000 personnes, les deux sens confondus, pour atteindre rapidement 1 million de personnes. Soit une part significative des déplacements aujourd’hui évalués à 11 millions par jour et qui, d’ici 2015, n’auront fait que croître.
 

 

EGIS EN TERRE INDIENNE

Avec 45 villes millionnaires en habitants, l’Inde se lance dans un vaste programme de transports publics. Le ministre fédéral du Développement urbain l’a dit à des membres de la délégation française qui accompagnaient en Inde, début décembre, Nicolas Sarkozy : le programme de développement urbain (transports, aménagement) se montait jusqu’à présent à 22 milliards par an. Le plan actuel arrive à son terme et doit être triplé lors du prochain programme quinquennal, qui commence en avril. A plus long terme, l’objectif serait d’investir 60 milliards par an pendant vingt ans. Parmi ces programmes, le développement des métros.

De quoi intéresser Egis, qui réalise déjà un chiffre d’affaires de 25 millions d’euros en Inde, et dont le directeur général, Nicolas Jachiet, était du voyage présidentiel. Le groupe dispose en Inde, avec Egis India, fort de 850 collaborateurs, de sa principale implantation internationale. Le groupe est aujourd’hui présent en maîtrise d’œuvre dans les métros de Chennai (anciennement Madras), Kolkata (Calcutta), ainsi que, pour des missions plus spécifiques, dans ceux de Delhi et de Mumbai (Bombay). Dans le ferroviaire lourd, il est aussi présent, avec Arep, dans la rénovation de l’ancienne Victoria Station de Mumbai.

Le métier initial d’Egis reste cependant son premier métier en Inde, où l’ingénierie de la route représente 60 % du CA. Mais un autre métier classique du groupe est appelé à se développer : l’exploitation d’infrastructures, routières ou aéroportuaires. Egis Road Operation a créé avec un partenaire indien, DSC Ltd, Egis Infra Management India. Cette société vient de se voir confier pour cinq ans l’exploitation de Delhi – Gurgaon, autoroute de 28 km, ouverte en janvier 2008, reliant la capitale à une ville satellite. Le groupe gère de ce fait l’un des plus importants péages autoroutiers au monde, avec 200 000 véhicules/jour. Et le contrat se traduit par le transfert de 1 100 agents au sein du groupe Egis.

Autre axe de développement pour Egis, lié à la reprise récente de Iosis : le génie civil nucléaire, du fait des contrats signés le 10 décembre avec l’Inde concernant deux EPR. L’ensemble du groupe, selon Nicolas Jachiet, DG d’Egis, est aujourd’hui sur une croissance de 50 % en Inde.

Ewa

RATP et SNCF devront élever Systra ensemble

L’État a tranché et les deux entreprises publiques, qui se disputaient leur filiale d’ingénierie, la renforcent par l’apport d’Inexia et de Xelis et vont s’efforcer de la faire grandir ensemble sur les marchés mondiaux. Bon gré mal gré, la RATP et la SNCF sont tombées d’accord sur Systra et ont tenu un discours d’une seule voix : « C’est une sortie par le haut » (Guillaume Pepy, président de la SNCF). « On bâtit une stratégie pour la France » (Pierre Mongin, PDG de la RATP). C’est donc, a dit Pierre Mongin, « l’intérêt général » qui l’a emporté, représentant « un intérêt supérieur à celui de chacune des deux maisons ». Deux maisons qui se disputaient depuis des années le contrôle de leur filiale commune d’ingénierie.

L’accord a été conclu sous l’égide de l’État, et plus précisément de l’Agence des participations de l’État, dirigée depuis le 15 septembre par Jean-Dominique Comolli. Les deux entreprises publiques vont rester à parité (36 %) dans leur filiale commune d’ingénierie. Les apports d’Inexia (SNCF, 80 millions de CA estimé en 2010) et de Xelis (RATP, 15 millions) vont donner à Systra (280 millions) une taille plus conséquente. Techniquement, c’est Systra qui rachètera Inexia et Xelis, en prenant 49 % de chacune des deux filiales, la fusion étant envisagée dans les deux ans à venir.

Le groupe sera doté d’un conseil de surveillance et d’un directoire. Le président du conseil de surveillance sera pour les deux premières années Pierre Mongin et le vice-président Guillaume Pepy, les rôles étant inversés au bout de deux ans. L’actuel président, Michel Cornil, cède la place. La direction sera assurée par un président du directoire, que des chasseurs de tête vont aller recruter à l’extérieur des deux entreprises et qui devrait se voir adjoints Gilles Cartier, PDG d’Inexia, et Philippe Naudi, PDG de Xelis. Philippe Citroën, actuel directeur général de Systra, assurera la transition pour une période d’environ trois mois.

La solution retenue a satisfait la CGT. On peut se demander si, après des années d’atermoiement, le dénouement précipité (conférence de presse convoquée en fin de matinée pour le début de l’après-midi) n’avait pas quelque chose à voir avec la journée particulière du 28 octobre : journée de grève contre la réforme des retraites au cours de laquelle il n’était pas mauvais d’annoncer des mesures appréciées par les syndicats. De fait, ce 28 octobre, la fédération CGT des cheminots et l’union syndicale CGT-RATP publiaient un communiqué commun intitulé « Le bon sens et l’intérêt général l’emportent enfin », rappelant que « la solution retenue rejoint la position et les propositions que nous avions exprimées dans un précédent communiqué commun en date du 9 septembre ».
Cette belle unanimité laisse ouvertes de sérieuses questions. L’apport de Xelis et d’Inexia revient peu ou prou à redonner à Systra ce dont les deux maisons mères l’avaient privée en créant leurs filiales. Au moins fera-t-on taire ainsi une cacophonie sensible au sein du groupe SNCF, qui avait mis, avec Inexia et Systra, deux fers au feu dans les projets de LGV français, et avait lancé Inexia sur les marchés internationaux, comme au Maroc, a priori réservés à Systra.

Ce retour au bercail tempère la belle affirmation selon laquelle on est en train de construire un champion national capable de peser sur les marchés mondiaux. Certes, Systra passe grosso modo de 280 à 380 millions de CA escomptés en 2010. Mais on est très loin des grandes ingénieries anglo-saxonnes ou nordiques qui sont les adversaires clairement désignés.

La précédente proposition de la SNCF ouvrait un peu plus la voie à ce changement de périmètre, en intégrant SNCF International et Arep au nouvel ensemble. Naturellement, cela rendait la SNCF hyperdominante, et on comprend qu’on ait buté sur ce déséquilibre. Mais le rapport Bénard envisageait aussi cet élargissement par l’intégration d’ADP International ou un accord avec Setec. Pour l’instant, on reste dans le strict périmètre de l’ingénierie de transport des deux maisons mères. Le changement de dimension est remis à plus tard. Changement qui aurait pu venir — piste qui fut un temps évoquée — à l’occasion de l’entrée au capital du Fonds stratégique d’investissement (FSI) jouant le rôle d’arbitre entre les deux opérateurs industriels. A moins qu’on ne finisse par faire appel à une grande ingénierie européenne.

Pour l’instant, entre les deux entreprises publiques cousines, laissées à leur face à face, c’est l’heure du baiser Lamourette. Mais on ne voit pas trop par quel miracle ce qui les avait conduites à ne plus s’entendre va se dissiper. Naturellement, les deux entreprises minimisent leur concurrence. La concurrence, quelle concurrence ? Où ça ? Eh bien, demain, le TER, pour lequel la RATP a toujours été présentée par la SNCF comme son futur grand rival. Les marchés internationaux des tramways et des métros automatiques où il ne sera pas toujours simple d’empêcher Keolis et la RATP de s’affronter, comme ce fut déjà le cas pour le métro d’Alger. Les questions majeures n’étant pas franchement résolues, le futur patron de Systra aura fort à faire. L’actuel DG Philippe Citroën en sait quelque chose, lui qui a défendu, fait grandir Systra, et versé des dividendes à des actionnaires qui ne s’entendaient pas.

Ewa

Grand Prix National de l’Ingénierie 2010 : réalisations d’aujourd’hui et projets de demain

Tous les ans depuis 2006, le ministère du Développement durable et Syntec-Ingénierie remettent les prix national de l’ingénierie pour une réalisation récente, ainsi que les prix de l’ingénierie du futur pour des projets présentés par des élèves-ingénieurs. Les transports – en particulier ferroviaires – sont souvent à l’honneur Lorsque l’on évoque les grandes réalisations, on cite rarement les équipes qui, au sein des entreprises d’ingénierie, ont œuvré pour rendre possible ces réalisations. C’est donc pour mettre en valeur les métiers de l’ingénierie que le ministère du Développement durable, en partenariat avec Syntec-Ingénierie (fédération professionnelle de l’ingénierie) et en association avec le Groupe Moniteur a eu l’initiative du Grand Prix National de l’Ingénierie en 2006. Depuis la première édition, les réalisations pour le transport ferroviaire ont souvent été à l’honneur (2e prix 2007 à la SNCF pour la rame TGV Iris 320, grand prix 2008 à Systra pour le métro de Dubaï) et ce fut encore le cas le 28 juin dernier, lorsque sous la présidence de Claude Martinand, vice-président du CGEDD (Conseil général de l’environnement et du développement durable), le jury s’est réuni et a sélectionné les lauréats pour 2010.

 

 

Deuxième prix à la réparation du tunnel sous la Manche

Et cette fois, c’est le deuxième prix (ex æquo) qui a été décerné pour la réparation du tunnel sous la Manche suite à l’incendie de septembre 2008 à Véronique Mauvisseau, directeur de projet à Setec TPI et Bertrand Petit, directeur d’exploitation à Freyssinet France. Plus que par le traitement de la voûte en béton de l’ouvrage, ce qui a impressionné le jury est le temps record mis pour réaliser les travaux, en moins de 4 mois de la mi-octobre 2008 à la mi-février 2009. Une tâche qui n’était pas gagnée d’avance : la voûte était endommagée sur une longueur de 760 m (très sérieusement sur une centaine de mètres) et le remplacement des équipements a été nécessaire sur environ 2 km. Dans les semaines qui ont suivi le sinistre, alors que la liaison entre le continent et la Grande-Bretagne était rétablie dans les cinq intervalles du Tunnel non touchés par l’incendie, Eurotunnel a fait place nette dans la zone endommagée tout en s’adjoignant, en tant que maître d’ouvrage, les services de Setec pour la maîtrise d’œuvre et de Freyssinet à la tête d’un groupement de sociétés du groupe Vinci pour les travaux de réparation. Et de fait, Setec et Freyssinet disposaient de l’expérience de ce type de réparation suite à l’incendie de 1996, suite auquel 500 m avaient été remis en état en 5 mois. Mais cette fois, à compter du 15 octobre 2008, moins de 4 mois allaient suffire, en travaillant 24 h sur 24, pour :

• Mettre en sécurité la voûte par 1 072 boulons de 3 m de long,
• Mettre en place une piste (3 200 tonnes de ballast recouvert de traverses en bois ignifugé) permettant un accès facile et une large coactivité,
• Hydrodécaper le béton résiduel dégradé et mettre en place un échafaudage de 520 m,
• Reconstituer la voûte (40 t de ferraillage et 4 000 t de béton projeté par voie sèche),
• Remplacer les équipements électriques, mécaniques, caténaires, rails et signalisation,
• Les essais et la réception.

A cette fin, il a fallu « mobiliser des moyens exceptionnels et industrialiser les process tout en conservant une forte adaptabilité du chantier ». Des dispositions innovantes ont ainsi été mises en œuvre :

• scanner pour la géométrie,
• logiciels de calcul performants (Express’air développé par Setec pour la simulation numérique avec un modèle aérothermique monodimensionnel du tunnel, César du LCPC pour les calculs structurels),
• industrialisation de l’hydrodécapage des revêtements endommagés (limitation des volumes éliminés et du travail manuel éprouvant),
• piste et échafaudage modulable de 500 m pour optimiser les conditions de travail,
• atelier de béton projeté par voie sèche in situ, permettant la coactivité dans des conditions atmosphériques satisfaisantes (limitation des poussières et donc non nécessité de travailler avec un masque en dehors des projeteurs),
• pose des conduites de refroidissement en 2 tronçons d’une centaine de mètres ayant nécessité la mise au point de matériel spécifique, permettant de limiter les soudures sur site et leur contrôle par radiographie.
 
Le travail de Véronique Mauvisseau, à la direction de la maîtrise d’œuvre de chantier, et Bertrand Petit, directeur du chantier, a été de manager des équipes de spécialistes et d’initier des innovations techniques, avec pour objectif de minimiser l’impact environnemental des travaux et d’optimiser le volet social (conditions de travail). « Le pilotage serré de l’opération, tant dans l’espace que dans le temps, au travers notamment d’une forte collaboration entre les acteurs, l’anticipation des achats des fournitures critiques et l’information régulière du comité de sécurité de la Commission Intergouvernementale ont été des éléments déterminants de la réussite de ce projet ». Au total, 800 hommes ont œuvré à cette opération, dont 300 ouvriers en pointe en génie civil et 85 personnes à la maîtrise d’œuvre.

 

 

Prix de l’Ingénierie du Futur pour la relance d’une ligne malgache à l’honneur

Le Grand Prix National de l’Ingénierie a également un « petit frère », destiné aux élèves des écoles d’ingénieurs publiques et privées : le Prix de l’Ingénierie du Futur, qui invite les étudiants à « s’interroger sur l’utilisation possible des développements des sciences et des technologies pour faire face aux grands défis de l’horizon 2020 » : le changement climatique, l’épuisement des ressources pétrolières, la culture du « risque zéro », la crise du périurbain et le problème des pollutions.

Depuis le lancement de ce prix en 2006, les projets proposés par les élèves-ingénieurs – et les lauréats – ont sensiblement évolué, passant d’idées purement technologiques (tels les « réseaux dynamiques » primés la première année, voir encadré) à de véritables services utiles à la société, comme la relance d’une ligne ferroviaire à Madagascar, primée cette année dans la catégorie « Inge?nierie d’ame?nagement ». Remis à Olivier Goret (ENPC de Paris), ce prix récompense une étude réalisée sans le cadre du Mastère systèmes de transports ferroviaires et guidés (plus connu sous l’appellation de « mastère ferroviaire »).

Il s’agit ici d’éviter la fermeture d’une voie ferrée de 160 km héritée de la période coloniale française et en déclin depuis 20 ans, alors qu’elle joue un rôle sanitaire, social, économique et écologique indispensable dans une région enclavée de l’est de la Grande île. Un projet de relance est né, fruit d’une collaboration entre des élèves de l’ENPC et le Tourism Initiative Fund (TIF), qui consiste à créer une dynamique pour relancer cette ligne. Ce projet innove par son approche globale des enjeux et contraintes, le modèle envisagé et la technologie mise en œuvre. La méthode consiste à entreprendre en parallèle les travaux de rénovation de la ligne et le développement d’activités économiques générant du trafic ferroviaire, en s’intégrant dans le contexte politique et socio-économique de Madagascar, avec un objectif immédiat de retour à une exploitation stable en 5 ans. L’objectif suivant est une situation pérenne de cette ligne à 30 ans.

De tels projets « demandent une approche nouvelle, intégrant un large ensemble de composantes, techniques mais aussi économiques, sociales et politiques » conclut Olivier Goret. « Cette approche peut constituer une véritable discipline innovante : “l’ingénierie du développement” ; peut-être est-ce là l’ingénierie du futur. »

Ewa

Iosis se fond dans Egis

Un an après la prise de participation d’Egis dans Iosis, les deux sociétés passent à la vitesse supérieure et fusionnent en un seul groupe. Premier groupe d’ingénierie de la construction en France, seul français présent parmi les dix premiers en Europe, et les vingt premiers au monde, le groupe prend le nom d’Egis et s’ouvre à l’actionnariat des cadres et dirigeants. Egis et Iosis forment désormais un seul groupe pesant 815 millions d’euros. Un an après la prise de participation de 34 % d’Egis dans Iosis, la deuxième étape a été vite franchie. Le groupe est en mesure de répondre à tous les projets de villes nouvelles, de quartiers nouveaux ou à rénover, en alignant des compétences pluridisciplinaires en infrastructures, en transports, en bâtiments, en hydraulique, en architecture ou métiers du paysage. Pour Bernard Boyer, président d’Iosis, qui va se retirer, on apporte ainsi « la réponse aux défis de la densité durable, et cela rapproche enfin les infrastructures des bâtiments ».
Nicolas Jachiet, directeur général d’Egis, confirme : « On avait mis en avant, en nous rapprochant, le développement durable et les territoires. On a découvert de beaucoup plus nombreux points de rapprochement. On avait imaginé de créer une filiale commune. On avait sous-estimé la volonté des équipes de travailler ensemble. » Volonté d’autant plus simple à mettre en œuvre que, rappelle Bernard Boyer, « Iosis avait zéro infra et Egis zéro bâtiment. Il y a parfaite complémentarité, ce qui veut dire que la fusion ne cause aucun problème social ».

Pour Nicolas Jachiet, « Egis et Iosis créent un groupe unique selon un mode capitalistique inédit ». En effet, alors que la Caisse des dépôts était actionnaire à 100 % d’Egis, tandis qu’Iosis était détenu par ses cadres référents, la fusion des deux groupes se fait sous une forme mixte. La Caisse devrait détenir 77 % du nouvel ensemble, les 23 % restant étant détenus par une entité appelée Iosis Participations dans laquelle on retrouvera, début 2011, la centaine de cadres et dirigeants d’Iosis, ainsi que quelque 300 cadres et dirigeants d’Egis qui jusqu’à présent n’avaient pas pris part au capital. Or, comme le rappelle Nicolas Jachiet, « il y avait déjà la volonté chez notre actionnaire d’ouvrir le capital aux cadres et salariés ». En un deuxième temps, un fonds commun de placement devrait permettre aux salariés de rentrer dans Iosis Participations.

Nicolas Jachiet devient directeur général du nouvel ensemble. Le groupe emploie 10 000 personnes en tout (compte tenu d’autres métiers comme l’exploitation ou le montage de projet), 6 500 dans la seule ingénierie.

En 2009, 57 % du chiffre d’affaires d’Egis ont été réalisés à l’international, et 20 % de celui d’Iosis. Le nouveau groupe se retrouve aujourd’hui avec une part de 50 % à l’international et vise dans cinq ans une part de 60 % d’un chiffre d’affaires qui devrait alors atteindre 1,2 milliard d’euros.

Egis est aujourd’hui présent dans une centaine de pays, présence qui va de la gestion d’un projet à des filiales comme Egis India (800 personnes). Leader français de l’ingénierie de la construction, atteignant une taille respectable sur le marché mondial, le groupe entend jouer un rôle aux avant-postes de l’exportation : « Si les Français ne sont pas là dès le stade des spécifications, ils ne seront pas ailleurs », jugent les deux dirigeants. Enfin, si l’internationalisation des compétences par une présence sur le marché mondial permet au groupe d’ingénierie des « retours France », dans l’autre sens, la participation aux grands projets hexagonaux est une carte de visite quasi indispensable pour exister sur les marchés mondiaux. D’où la vigilance d’Egis sur le sujet du Grand Paris, référence qui sera « très demandée à l’international ».   

Ewa

L’explosion du marché des villes

L’urbanisation à marche forcée de la planète, le renouveau des villes autour du développement durable, autant d’occasions de se développer pour l’ingénierie, au-delà du seul transport. L’ingénierie française peut en profiter pour se consolider…?ou pour rejoindre des groupes internationaux.En témoignent la création d’Artelia, la fusion d’Egis et d’Iosis, l’acquisition de Ginger par Grontmij…?Sans oublier l’inusable feuilleton Systra, au dénouement sans cesse repoussé. C’est un feuilleton pas toujours bon, à coup sûr bien long, qui ne passionne pas les foules mais qui a ses fans. Quel avenir pour Systra ? Deux propositions occupent le devant de la scène. L’une de la SNCF. L’autre de la RATP. Jean-François Bénard a remis son rapport le 14 juillet, recommandant au gouvernement la solution RATP. Il a reçu au moins l’aval de Dominique Bussereau et de Jean-Louis Borloo, tandis que la SNCF comptait notamment sur l’instruction du dossier par l’APE (Agence des participations de l’Etat) pour rattraper son handicap. Ce qui est sûr, c’est que la décision imminente parfois annoncée dans la presse se fait attendre. A la RATP, on reconnaît que « les pouvoirs publics continuent de réfléchir et n’excluent pas d’autres scénarios ».
 
Rappelons en attendant les propositions formulées. Le 3 décembre 2009, selon le rapport Bénard, Guillaume Pepy proposait dans une lettre à Pierre Mongin que la SNCF apporte à Systra Inexia (80 millions d’euros de CA estimés en 2010), Arep (49 millions), SNCF-International (20 millions), la RATP apportant pour sa part Xelis (15 millions). Les apports de la SNCF étant nettement supérieurs à ceux de la RATP, la SNCF devenait ipso facto majoritaire dans le champion national ainsi créé, dont elle devenait l’actionnaire industriel de référence. La proposition a ensuite été amendée, mais, pour la RATP, cela revenait à toujours à se voir offrir, nous dit-on, « un strapontin ». La SNCF se dotait ainsi d’une ingénierie sur le marché de la ville et des transports urbains, correspondant grosso modo au volet Keolis de son activité.

La RATP a fait en mars 2010 une contre-proposition : elle achète les parts de la SNCF, apporte Xelis à Systra et s’allie à d’autres ingénieries françaises, à commencer par Setec, proposant, selon Jean-François Bénard, « une ingénierie pluridisciplinaire avec un accent mis sur la ville ». Proposition que l’on préfère résumer ainsi à la RATP : « La colonne vertébrale, c’est le transport urbain au service de la ville. »

La proposition de la SNCF a une force évidente. Elle permet de maintenir l’ensemble des activités de Systra (urbain et ferroviaire), tout en renforçant suffisamment le groupe pour atteindre rapidement une taille plus respectable sur le marché mondial. Une faiblesse : elle fait comme s’il n’y avait pas de problème majeur de gouvernance, et que la concurrence entre RATP et SNCF/Keolis pour l’exploitation de services de transport était indifférente à la question de l’ingénierie, bref, que les deux Epic pouvaient continuer à cohabiter…
La proposition de la RATP, beaucoup plus carrée sur la question du capital, règle franchement la question de gouvernance. Sa faiblesse : en faisant sortir la SNCF, on se prive de la majeure partie des compétences en ferroviaire et en grande vitesse. Certes, nous dit-on à la RATP, « nous n’avons jamais nié la double compétence (ferroviaire et urbain) de Systra ». D’où l’intérêt de Setec. Cependant, l’apport de Setec Ferroviaire ne peut évidemment pas compenser la défection de la SNCF. D’autant qu’on se prive aussi du savoir-faire de la SNCF comme exploitant, de l’interface exploitation/conception qui dans ses deux métiers, urbain et ferroviaire, fait la force de Systra par rapport à des groupes plus puissants.

La bataille de Systra est majeure et va bien au-delà du chiffre d’affaires du groupe d’ingénierie. Car avec 280 millions d’euros de CA en 2010, même portés à 320 selon la proposition RATP ou à plus de 400 selon celle de la SNCF, on n’atteint pas le seuil parfois avancé de 500 millions pour peser sur le marché mondial. L’affaire Systra est importante parce qu’il s’agit de la nouvelle empoignade entre ses deux groupes publics, RATP et SNCF, chacun comptant bien sur la force de prescription d’une ingénierie prestigieuse pour faire progresser l’ensemble de ses activités.

Ce lien exploitation/ingénierie est un modèle national, éminemment respectable, que pratiquent aussi, remarque-t-on à la RATP, MTR (Hong Kong) et le groupe Deutsche Bahn. Mais il peut être aussi un handicap sur certains marchés où l’on apprécie au contraire une ingénierie indépendante qui puisse prescrire des solutions ouvertes.

On ne peut de toute façon pas résumer la situation de l’ingénierie de transports ou de la ville à la bataille pour Systra. Egis, jusqu’à présent filiale à 100 % de la Caisse des dépôts, vient de franchir une étape décisive en fusionnant avec le privé Iosis, selon une formule combinant participation des cadres référents et actionnariat public. Leader de l’ingénierie de la construction, le groupe se place résolument sur le marché de la ville, en associant les infrastructures. On a vu aussi cette année Coteba et Sogreah fusionner dans Artelia, en centrant leur stratégie sur les métiers de la ville. On a vu cette année encore Ginger être repris par le néerlandais Grontmij et venir grossir aussi un groupe d’ingénierie centré lui aussi sur les métiers de la ville et de la construction.

En regardant l’ensemble de ces mouvements, un des acteurs regrette que les auditions de Jean-François Bénard se soient limitées à la « technostructure hexagonale », se dit surpris par l’approche franco-française de Systra, et juge qu’il est temps de penser européen plutôt que de délirer sur le champion franco-français…

Quoi qu’il en soit, les métiers de la ville sont en pleine explosion. C’était déjà un des sujets de prédilection de Jean-Paul Bailly quand il était président de la RATP. Et c’est la RATP qui, en mars 2010, a synthétisé ce mouvement dans une note que résume ainsi Jean-François Bénard : « En 2010, la proportion de personnes qui habitent dans des villes a dépassé 50 %. Selon l’ONU, elle devrait atteindre 60 % en 2030 et 70 % en 2050. Dans ces conditions, les besoins en infrastructures sont considérables. (…) Or, nombre de villes de plus de 500 000 habitants ne disposent d’aucun système lourd de transport. Ce serait le cas, selon la note, de 30 % des agglomérations aux Etats-Unis, de 75 % en Amérique latine, de 85 % en Asie (hors Japon) et de 95 % en Afrique. » C’est sur cet énorme marché que les groupes d’ingénierie privés, publics, franco-français, franco-européens sont en train de se concentrer, et de se consolider.

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Rhin-Rhône : la maîtrise d’oeuvre sans l’opérateur historique

Voie, caténaire, sous-stations électriques… les composantes de l'infrastructure de la LGV Rhin-Rhône échappe au couple SNCF-RFF. Pour la première fois, la fourniture des équipements ferroviaires est mise en concurrence. Un premier mouvement d'ouverture du marché s'était bien produit avec le TGV Est, mais il ne concernait alors que le génie civil et l'ingénierie sur quelques portions. Aujourd'hui, Setec et Egis Rail sont devenus maîtres d'oeuvre. Dans l'histoire de la construction des lignes à grande vitesse, c'est une première. La première fois que la SNCF n'est pas l'unique maître des opérations. Non seulement pour le génie civil, mais aussi et surtout pour les équipements ferroviaires. Autant de marchés qui ont en effet été mis en concurrence par RFE Et si, pour les terrassements, le béton et autres ouvrages d'art, ce fut déjà le cas pour la LGV Est la SNCF avait alors, en partenariat avec Arcadis, remporté 3 des 5 tronçons ainsi qu'un tronçon de la 2tranche à venir -, concernant la voie, la caténaire, les sous-stations électriques… c'est une nouveauté. « Après la déclaration d'utilité publique, en 2002, pour envisager la réalisation, il y a eu des discussions au siège de RFF sur l'ouverture à la concurrence. Pour l'ingénierie, bien sûr, puisqu'il y avait eu un premier mouvement sur la LGV Est, mais on a souhaité aller au-delà en ouvrant également les équipements ferroviaires à la concurrence» , rappelle Xavier Gruz, adjoint au directeur des opérations de la LGV Rhin-Rhône chez RFF.

 

Au début des années 2000, RFF se retrouve à essuyer les plâtres. L'établissement dispose en effet d'un document prescriptif pour le génie civil: le référentiel technique qui avait été élaboré pour la LGV Est. Mais rien pour les équipements ferroviaires. « Pour pallier l'absence de cadre technique à donner aux bureaux d'études, on a donné une phase amont à la SNCF, qui a réalisé l'avant-projet détaillé de la conception d'ensemble des systèmes d'équipements ferroviaires , expose Xavier Gruz. Ces documents ont été remis à Setec et Egis Rail pour qu'ils puissent faire les dossiers de consultation des entreprises puis suivre la réalisation .» Rapidement, RFF et Setec se rendent à l'évidence: il y aura des marchés uniques pour les équipements ferroviaires et non pas découpés en trois tronçons. Les contraintes de relief, d'urbanisme et d'infrastructures (on est loin des réseaux ferrés) imposent la réalisation d'une seule base-travaux. Difficile d'y faire travailler trois entreprises. « Finalement, on a recréé une unicité de maîtrise d'oeuvre sur les équipements ferroviaires, ce qui correspond aussi à une logique de système. Cette adaptation respecte le principe de l'ouverture à la concurrence» , poursuit-il. Dans la foulée, les deux bureaux d'études «novices» sur des opérations de cette taille créent une structure commune de réalisation, le groupement EFRR (Equipements ferroviaires Rhin-Rhône), leur permettant de mutualiser leurs compétences. Ils se répartissent les aspects techniques en fonction de leurs domaines de prédilection: Setec, plutôt les télécoms et les sousstations, Egis Rail, plutôt la signalisation et la caténaire, par exemple. « Ca tombe bien, c'est un peu le découpage tel qu'on l'envisageait.»  
Passer par un PPP avait été envisagé, mais la durée du processus ne permettait pas de tenir les délais.

 

La possibilité de passer par un PPP pour les équipements ferroviaires avait même été envisagée, mais la durée du processus était trop importante pour tenir les délais. « De plus, la question de l'entretien et de la sécurité n'était pas réglée: qu'est-ce qui restait dans le périmètre de la SNCF et qu'est-ce qui allait dans le PPP? On n'était pas mûrs» , estime le responsable RFE En ce moment, six appels d'offres sont d'ailleurs en cours. Trop tôt pour dévoiler le nom des compétiteurs, mais Inexia serait présent dans un groupement. Pour la voie, le ballast et la base-travaux, plusieurs groupements d'entreprises ont été admis à candidates Retour des offres prévu le 3 décembre pour une notification de marché en mai prochain. Le 17 septembre, ont été reçus les dossiers de candidatures pour la signalisation et les télécoms, ils sont en cours d'analyse. Enfin, pour la partie alimentation et traction, c'est la phase de consultation. « On devrait envoyer les dossiers de consultation des entreprises début novembre au plus tard.»

 

Les trois tronçons de la branche Est
Pour les travaux de génie civil, les quelque 140 km de la première phase comprennent trois portions:
– le tronçon A va de Vïllers-les-Pots (Côte-d'Or) à Chevroz (Doubsl, soit 57 km, et est divisé en 5 lots dont l'achèvement du dernier est prévu en juillet 2009. Il comprend la création de la nouvelle gare TGV à Auxon pour la desserte de Besançon, le viaduc de la Saône et ses estacades, le raccordement au réseau existant à Villers-les-Pots, ainsi que la suppression d'un passage à niveau. C'est Setec qui en est le maître d'oeuvre;
– le tronçon B, dont la maîtrise d'oeuvre a été attribuée à Egis Rail, s'étend sur 57 km, de Voray-sur-l'Ognon à Saulnot, en Haute-Saône. Il est scindé en 4 lots dont l'achèvement est prévu en octobre 2008 et mars 2009, car c'est sur cette portion que sera installée la base-travaux de Villersexel. Plus de 50 ouvrages d'art: 6 viaducs, 23 ponts-route et 22 ponts-rail;
– le tronçon C, confié à Setec, se développe sur 30 km de ligne entre Villers-sur-Saulnot (Haute-Saône) et Petit-Croix, sur le Territoire-de-Belfort. Il est subdivisé en 6 lots (prévus pour s'achever, pour le dernier, en juillet 2009) et inclut la gare nouvelle à Meroux, qui assurera la desserte des agglomérations de Belfort et de Montbéliard, le tunnel de Chavanne, la tranchée couverte du bois de la Faye, 101 ponts-route et autant de ponts-rail. Autres travaux: la déviation et le rétablissement de la voie ferrée Belfort – Délie et le raccordement au réseau à Petit-Croix.

 

Concernant les fournitures de rails, traverses et ballast, il est prévu d'utiliser vraisemblablement les contrats-cadres que la SNCF passe pour le compte de RFE, « pour des questions à la fois de prix et d'organisation, parce que le système global de centrale d'achats évite les points de blocages géographiques et que, à terme, ces fournitures représenteront 10% des achats annuels de RFF», clarifie l'adjoint au directeur des opérations. Il reste enfin des ouvrages sous convention de mandat à la SNCF, notamment des raccordements au réseau existant, le poste de commande de Dijon et le central sous-station qui télécommande les installations électriques, qui se trouvera… dans les locaux de la direction régionale SNCF à Dijon. Alors, usine à gaz ou vrai «plus», cette organisation? Côté inconvénients, des interfaces, plus délicates à gérer. Côté avantages, l'externalisation des compétences. Là où la SNCF avait à la fois les chapeaux de maître d'oeuvre, d'assistant à maîtrise d'ouvrage, voire de maître d'ouvrage délégué, « on a des périmètres de compétences plus délimités, les choses sont plus claires. Il y a également le coût, avec un bilan plus détaillé à la fin, et, bien sûr, un champ de compétences plus étendu» . Un vrai rodage, en tout cas, pour les futurs PPP Le marché voie, caténaire, base-travaux, par exemple, est une prestation test pour un PPP, puisque l'entreprise ira plus loin qu'habituellement. C'est à elle que sera confiée l'exploitation durant la phase travaux et non pas au maître d'oeuvre. Une distribution des rôles perçue chez RFF comme une « évolution» dont l'impact est mesuré, pas comme une « rupture» .

 

Plusieurs chantiers connexes
En dehors des 140 km de la LGV à proprement parler, plusieurs chantiers connexes sont nécessaires. Voici les principaux:
– le raccordement de Perrigny et la modernisation du noeud ferroviaire dijonnais (installation d'un poste d'aiguillage informatisé, notamment], permettant au niveau de l'agglomération dijonnaise de rejoindre la ligne Sud-Est sans avoir à passer par la gare de Dijon et à rebrousser chemin. Il nécessite une douzaine d'ouvrages d'art, trois ans de travaux de génie civil pour un coût de 100 millions d'euros. Les voyageurs, eux, gagneront 15 minutes sur leur trajet Besançon – Lyon;
– le réaménagement de la ligne de Devecey Cette ligne qui sera réhabilitée sous maîtrise d'oeuvre Inexia s'étend sur une douzaine de km en voie unique avec un pont pour le croisement des trains. Les travaux – remise à neuf de la voie et de la signalisation , pour près de 50 millions d'euros – démarreront en 2008. Son importance est capitale pour assurer un flux de voyageurs suffisant à tous les TGV au départ de la gare nouvelle. Elle permettra en effet de rejoindre celle-ci en 10 minutes depuis la gare actuelle de Besançon-Viotte. Les dessertes sont en cours de négociations avec les collectivités locales, mais les études initiales préconisaient une quarantaine de navettes. De plus, 8 TGV par jour, qui partiraient de la gare de centre-ville, l'emprunteront;
– la réouverture temporaire de la ligne Lure – Villersexel, désaffectée depuis 1987. Elle est destinée à approvisionner le chantier en équipements ferroviaires depuis la future base-travaux de Villersexel. Les travaux ont débuté en vue de son exploitation à compter du 1janvier 2009 et durant près de trois ans. Elle verra circuler environ 8 trains de chantier par jour, supprimant ainsi la circulation quotidienne de 1 000 camions.

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La maîtrise des opérations du TGV Rhin-Rhône confiée à Setec et à Egis Rail

En 2003, quand RFF lance son appel d'offres pour la maîtrise d'oeuvre des trois tronçons, il réceptionne les candidatures de Systra, Tractebel, Ingérop, Setec et Egis Rail. Ces deux derniers cabinets d'ingénierie seront retenus. En 2003, quand RFF lance son appel d'offres pour la maîtrise d'oeuvre des trois tronçons, il réceptionne les candidatures de Systra, Tractebel, Ingérop, Setec et Egis Rail. Ce qui fera la différence pour sélectionner ces deux derniers cabinets d'ingénierie: « les études de définitions de pistes d'optimisation les plus intéressantes avec des variantes de tracé et des solutions techniques innovantes» , estime Xavier Gruz, adjoint au directeur des opérations LGV Rhin-Rhône branche Est chez RFE. L'absence de la SNCF – relative puisqu'elle détient 36% du capital de Systra – s'explique aisément. RFF avait au préalable lancé un appel d'offres pour l'assistance à maîtrise d'ouvrage technique (AMT) et assistance à maîtrise d'ouvrage gestion de projet. « L'idée: retenir un bureau d'études qui ferait le contrôle des études des maîtres à' oeuvre, le maître d'ouvrage dans le cadre de la loi étant réputé techniquement incompétent, et en suivrait ensuite la bonne exécution» , poursuit-il. Une fonction de coordination qui, sur le chantier de la LGV Est, était assurée par «COP SNCF» (cohérence, optimisation et programmation) et pour laquelle la SNCF n'avait pas été mise en concurrence. L'AMT de la LGV RhinRhône ayant été remportée par la SNCE elle ne pouvait de fait plus concourir ensuite. Il y a tout de même une certaine logique à ne pas cumuler toutes les casquettes. Faute d'interdiction de cumul, le prestataire aurait été amené à se contrôler lui-même !

 

Chiffres-clés
– 144 km de lignes nouvelles, dont 40% en forêt
– coût : 2,312 milliards d'euros, dont 751 millions apportés par l'Etat, mais 23 cofinanceurs (dont la Suisse)
– 85 communes concernées
– 5 années de travaux
– 160 ponts, 13 viaducs à construire
– 400 km de clôtures
– 24 millions de m3 de déblais
– 18 millions de m3 de remblais
– 500 000 traverses en béton monobloc
– 2 gares nouvelles à Auxon Dessus (Besançon TGV à 10 km de la ville) et à Meroux (Belfort Montbéliard TGV à 15 km)
– des gains de temps variant de 40 minutes (sur un Besançon – Marseille) à 2 heures 20 (Dijon – Francfort)
– trafic attendu : 12 millions de voyageurs au lancement fin 2011,

 

Dans les temps malgré la météo
A peine le chantier avait-il démarré que déjà le balai des pelleteuses, engins de terrassement et autres grues était gravement perturbé par les fortes pluies d'août 2006 (300 mm d'eau]. Eté 2007, rebelote. Heureusement qu'entre-temps l'hiver avait été doux et que l'arrière-saison 2007 a été clémente… Sinon, il aurait déjà fallu recaler les plannings… Le lot A4 (d'Ougney à Chevroz) a beaucoup souffert, les terrains gorgés d'eau se sont transformés en boue gigantesque! Mais, bien que fortement tributaires des conditions météo, les chantiers de génie civil ont tout de même bien avancé tout au long des 144 km. La charpente métallique des viaducs de la Linotte et de la Quenoche est quasiment achevée; le viaduc de l'Ognon, à proximité de la future base-travaux est également suffisamment avancé. «Nous avons bon espoir de maintenir nos plannings initiaux» , assure Xavier Gruz, adjoint au directeur des opérations de la LGV Rhin-Rhône chez RFF. Sur les 2 km du tunnel de Chavanne, 300 m sont forés et les terrassements seront normalement terminés cette année. Sur le lot C2 (Aibre – Trémoins], des cavités sont apparues qui ont nécessité des études sur la circulation – ou non – de l'eau, puis leur comblement par du béton dans un cas et l'excavation pour poser une buse dans l'autre cas. C'est là que le retard est notable. L'objectif de mise en service est toujours fin 2011 mais, prévient Xavier Gruz, «il ne faudrait pas un été 2008 pourri, parce que nous avons consommé toutes nos marges» .