Les 30 ans d’Orlyval ont été célébrés avec discrétion en fin d’année dernière. La faute au Covid, bien sûr, mais aussi à un avenir incertain: avec l’arrivée de lignes nouvelles prévues dans le cadre du Grand Paris Express qui desserviront l’aéroport d’Orly, le métro automatique qui dessert ce même aéroport et achemine trois millions de voyageurs par an hors Covid (soit environ 10% du trafic de l’aéroport) risque de perdre de son intérêt.
Dès l’été 2024, la ligne 14 sera prolongée au sud sur 14 km, de la station Olympiades à l’aéroport d’Orly. Elle offrira des conditions de transport bien plus pratiques que les ruptures de charge imposées par Orlyval. De Paris, il faut d’abord aller en RER jusqu’à Antony dans les Hauts‐de‐Seine, pour pouvoir monter à bord du VAL qui relie ensuite en quelques minutes les différents terminaux aéroportuaires. Et cela à un coût élevé : 9,30 € les six minutes depuis Antony, 12,10 € depuis Paris.
Avec la ligne automatique 14, les temps de parcours à partir du centre de la capitale vont devenir très attractifs : 23 minutes pour aller de la gare de Lyon à Orly, moins d’une demi‐heure depuis Châtelet. Contre une cinquantaine de minutes aujourd’hui avec Orlyval, en partant de la station Châtelet‐les‐Halles.
On peut donc facilement imaginer qu’une grande part du trafic du VAL se reportera sur cette nouvelle ligne, où on attend, à terme, un million de voyageurs par jour. Reste toutefois encore à connaître la tarification qui s’appliquera sur cette ligne.
En 2027, une concurrence de plus s’annonce avec l’arrivée du tronçon de la nouvelle ligne 18 qui ira de l’aéroport à la gare de Massy‐Palaiseau RER B et qui suivra un axe parallèle à Orlyval.
D’où les interrogations d’Ile‐de‐France Mobilités (IDFM), l’autorité organisatrice des transports franciliens : que faire d’Orlyval ? Question d’autant plus facile à poser que l’infrastructure est désormais amortie.
Dès 2018, des études ont été commandées à Systra et à la RATP (dont la filiale RATP Infra est propriétaire de l’infrastructure, mais IDFM reste décisionnaire) pour envisager les solutions qui pourraient être mises en œuvre. Plusieurs options sont sur la table, du maintien au démantèlement pur et simple. Pour l’heure, Elodie Hanen, la directrice générale adjointe chargée du Développement à IDFM, confirme la poursuite de l’exploitation d’Orlyval au‐delà de 2024, sans doute jusqu’en 2027. Ce qui per‐ mettra de mesurer l’effet de l’arrivée de la ligne 14 sur la fréquentation d’Orlyval. En attendant, une ligne budgétaire pourrait être ajoutée au futur CPER 2023 – 2027 pour financer de nouvelles études. Une décision définitive sur le sort d’Orlyval devrait être prise autour de 2026‐2027.
Philippe-Enrico ATTAL
Trois options à l’étude
Après l’abandon de deux options (l’aménagement d’une piste cyclable et la réalisation d’une voie pour bus), trois scénarios sont envisagés: la poursuite du VAL en le modernisant, la mise en service d’un véhicule autonome guidé de type navette, l’arrêt de la liaison.
Poursuivre l’exploitation avec un VAL nécessiterait de coûteux investissements de modernisation. Même si la technologie actuelle est fiable et si le matériel roulant d’origine a bénéficié d’une rénovation à mi‐vie achevée en 2020 qui doit lui permettre de circuler sans encombre durant encore 15 à 20 ans, le système date tout de même de 30 ans. Il faudrait donc remettre à niveau les automatismes et le matériel roulant.
Il faudrait aussi réaménager le PCC qui fonctionne encore avec un tableau lumineux. Enfin, de nouveaux arrêts sont envisagés à Antony, Wissous et Rungis‐La Fraternelle pour assurer une desserte locale. Le tracé ne serait pas modifié mais des gares devraient être aménagées. L’évaluation des coûts a conduit à une bataille de chiffres. La RATP estime la modernisation de la ligne dans une fourchette de 80 à 110 M€, tandis que pour IDFM un système de VAL modernisé coûterait le double: entre 220 et 250 M€. Il faudrait y ajouter l’acquisition du maté‐ riel roulant de l’ordre de 40 M€.
Deuxième option imaginée, sans doute plus simple à mettre en œuvre, l’utilisation de navettes autonomes de type Navya (voire des navettes un peu plus grandes), nécessitant de simples quais et non des gares coûteuses à réaliser. Autre avantage de cette option, les navettes pourraient quitter l’infrastructure pour assurer une desserte fine des communes, en particulier celle du parc Icade à Rungis, un important pôle tertiaire susceptible d’apporter un trafic voyageurs complémentaire. Ce scénario reste à affiner dans la mesure où l’on ne sait pas encore quels seront les véhicules autonomes disponibles dans cinq à dix ans. L’adaptation de l’infrastructure nécessiterait un investissement de l’ordre de 60 à 80 M€. Là encore, il faut ajouter 15 à 30 M€ de matériel roulant, sachant que les modèles actuellement sur le marché ne sont pas assez capacitaires. Il faudrait donc en développer de nouveaux…
La dernière possibilité, plus radicale, qui consiste à démanteler les installations est évaluée aux alentours de 100 millions d’euros si on ne laisse pas l’infrastructure à l’abandon. S’ajouterait un coût social puisque les 90 salariés d’Orlyval seraient licenciés.
Pour en savoir plus : retrouvez l’intégralité de notre dossier sur Orlyval dans le numéro de février de Ville, Rail & Transports ou sur notre site.