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Ewa

Elections en Allemagne. Les grandes ambitions ferroviaires des écologistes

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L’Allemagne s’apprête à sortir de l’ère Merkel, après 16 ans de règne, et tous les sondages prédisent un changement de politique après les élections du 26 septembre. Une chose paraît quasiment acquise : les écologistes feront partie du prochain gouvernement quel que soit le prochain chancelier ou chancelière. Ils annoncent déjà une « grande offensive du rail » afin que l’Allemagne puisse tenir les objectifs climatiques des accords de Paris.

Ils tiennent surtout à remplacer l’actuel ministre conservateur des Transports, Andreas Scheuer, qui n’a engagé aucune des réformes promises. « Le ministre n’a rien fait », déplore Matthias Gastel, porte-parole des écologistes à l’assemblée fédérale (Bundestag) sur les questions de transport. « Nous voulons donner une nouvelle orientation à la Deutsche Bahn (DB) », ajoute-t-il.

Pour cela, les « Grünen » sont déterminés à retirer la gestion du réseau à la DB. « L’infrastructure doit servir l’intérêt général. Le réseau doit être géré par un établissement de droit public sans objectif de rentabilité », dit Matthias Gastel. « Imaginez que Mercedes-Benz soit propriétaire des autoroutes où que Lufthansa détienne plusieurs aéroports ? Cela ne peut pas marcher. » Les écologistes veulent créer un « fonds d’infrastructures » qui permettrait de financer les investissements. Ce fonds sera alimenté par le péage poids lourds, le budget fédéral et les redevances d’utilisation du réseau ferré.

Sur ce point, les écologistes sont paradoxalement plus proches des conservateurs (CDU) et du parti libéral (FDP) que de la gauche sociale-démocrate (SPD), défavorable à une séparation du réseau, mais qui constitue leur allié de prédilection.

En revanche, l’option d’une privatisation de la DB, prévue lors de la réforme de 1994, n’est plus à l’ordre du jour. La DB doit rester une société de droit privé avec l’Etat comme actionnaire unique. Les bénéfices devront servir à l’investissement dans le matériel roulant.

L’enjeu est d’intensifier la concurrence sur les grandes lignes comme c’est déjà le cas sur les lignes régionales. « Nous voulons que le degré de libéralisation sur le régional soit le même sur les grandes lignes sans quoi les autres opérateurs continueront d’être désavantagés », dit Matthias Gastel. La DB détient actuellement plus de 90 % de part de marché sur les grandes lignes. Les rares concurrents de la DB, comme Flixtrain, se plaignent d’obstacles bureaucratiques insurmontables. Pour simplifier les procédures, les Verts comptent réformer la loi de régulation des transports ferroviaires (Eisenbahnregulierungsgesetz). « Notre objectif n’est pas de démanteler le rail comme l’a fait la Grande-Bretagne », précise Matthias Gastel.

« Nous voulons au contraire réactiver 3 000 kilomètres de lignes fermées et moderniser le réseau dont 60 % n’est toujours pas électrifié », dit-il. La DB a supprimé 5 400 kilomètres de lignes ferroviaires depuis 1994, ce qui représente 16 % de l’ensemble de son réseau (33 000 km). Enfin, la relance des trains de nuit est également au programme des écologistes allemands.

L’objectif est de faire progresser la part du rail dans le transport de personne de 10 % à 20 % d’ici 2030 et de 18 à 30 % pour les marchandises.

Christophe Bourdoiseau

Ewa

La Cour des comptes épingle la faiblesse de l’Etat stratège vis-à-vis de la SNCF

Gare de Saint-Malo lors du premier confinement

Une fois n’est pas coutume, la SNCF reçoit des louanges de la part de la Cour des comptes, qui s’est penchée sur sa gestion de la crise sanitaire. Dans son rapport publié le 18 mars, les « Sages » de la rue Cambon saluent la réactivité et l’organisation mises en place par la SNCF, qui « a réussi sa mobilisation », « avec un suivi efficace et attentif des personnels ». La reprise a également été « délicate mais bien gérée ».

Mais la SNCF, qui a enregistré 3 milliards d’euros de pertes en 2020, en sort singulièrement fragilisée. Et les perspectives à moyen terme sont peu favorables, estime la Cour. D’une part parce que la SNCF cumule les faiblesses structurelles, (productivité insuffisante, modernisation à accélérer, qualité de service à améliorer…), d’autre part, parce qu’il existe un risque structurel de déficit pour la grande vitesse et le fret, deux activités librement organisées (au contraire des activités conventionnées comme les TER).

Il pèse aussi un risque sur les activités conventionnées avec la question du partage de l’effort entre l’Etat et les autorités organisatrices régionales pour compenser la chute d’activité liée aux confinements. « Faute d’accord avec l’Etat, les autorités organisatrices pourraient être tentées de faire prendre en charge une partie de ces pertes par l’opérateur », note la Cour.

En toile de fond, la Cour pointe surtout la faiblesse de l’Etat stratège. « L’Etat a choisi de ne pas prendre en charge les pertes de l’activité transport pour concentrer l’effort financier du plan de relance sur le gestionnaire d’infrastructure contrairement à l’Allemagne qui a recapitalisé le groupe Deutsche Bahn pour l’ensemble de ses activités », notent les rapporteurs. L’Etat demande aussi à la SNCF de réaliser d’importantes cessions d’actifs immobiliers et d’activités considérées comme n’étant pas dans son cœur de métier.

Les pouvoirs publics ont fait le choix de concentrer le plan de relance sur le gestionnaire d’infrastructure avec 4,05 Md€ au profit de SNCF Réseau. Cette somme permettra de compenser les pertes liées à la crise sanitaire (2,3 Md€) et de réaliser des objectifs antérieurement fixés par l’Etat à SNCF Réseau mais jusqu’alors non financés (glyphosate, ouvrages d’art, sécurité, pour 1,5 Md€) ou des investissements sur les lignes de dessertes fines du territoire (pour 250 M€). A cette recapitalisation s’ajouteront 650 M€ de cessions destinées à l’amélioration de la circulation du fret ferroviaire, à l’amélioration de l’accessibilité des gares, à la lutte contre les nuisances sonores et à la sécurisation des passages à niveau. « Cet effort, parce qu’il ne fait que financer des besoins du gestionnaire d’infrastructure jusqu’alors non couverts par l’Etat, risque de ne pas suffire pour accompagner les investissements de renouvellement et de modernisation nécessaires à l’amélioration du réseau ferré national », note clairement la Cour.

Et l’Etat laisse entière la question posée par l’aggravation de l’endettement du groupe qui reste à un niveau « préoccupant ». Quand il s’agit de ferroviaire, la décision politique en France reste finalement toujours guidée par la crainte d’aggraver les comptes de la nation. La Cour rappelle ainsi que le dernier contrat de performance signé avec Réseau avait été conçu de façon à « baisser » le niveau de subventions, de l’Etat contrairement à ce qu’ont fait d’autres pays européens.

La Cour des comptes demande en conséquence à l’Etat et à la direction de la SNCF de définir « une stratégie de relance du transport ferroviaire permettant de surmonter ces fragilités ». Mais sans s’étendre sur son contenu.

Une politique tarifaire à revoir

« SNCF Voyages pourrait voir son activité durablement affectée par l’évolution des comportements sociaux et professionnels », indique le rapport qui pointe un risque de forte diminution du chiffre d’affaires pour une activité caractérisée par l’importance de ses charges fixes. Le seuil de rentabilité pourrait ne plus être atteint pendant plusieurs mois, ajoutent les auteurs du rapport. Le panier moyen du TGV (prix du billet et options) a chuté d’environ 20 % par rapport à l’été 2019. Cette évolution s’explique par un report des voyageurs depuis l’offre InOui vers l’offre Ouigo, par une politique commerciale de petits prix et par l’effondrement de la clientèle affaires. « La SNCF envisage un retour au nombre de passagers de 2019 à la fin de l’année 2022, se traduisant par un chiffre d’affaires permettant de dégager une marge opérationnelle positive ». De ce fait, la Cour estime que la SNCF devrait mener « une réflexion sur sa politique tarifaire ainsi que sur l’offre qu’elle propose aux voyageurs (s’agissant notamment du poids relatif des offres InOui et Ouigo) ».

M.-H. P.

Ewa

Les leçons des franchises pour l’exploitation du réseau ferroviaire britannique

Grand Bretagen Arriva

La France fait le choix d’ouvrir le transport ferroviaire de voyageurs à la concurrence… et les Britanniques, pionniers de la libéralisation, renationalisent provisoirement leurs franchises… La crise due au Covid-19 en est la cause, mais elle n’explique pas toutes les difficultés du système. Quelles leçons peut-on tirer d’une expérience de plus de 20 ans pour réussir ici l’ouverture du réseau ?

Par Timothée Lachenal

Timothée LACHENAL
Timothée Lachenal, fondateur du cabinet de conseil en stratégie ferroviaire Raillissime Consulting.

Depuis le 3 décembre 2019, l’Etat et les régions françaises ont la possibilité d’ouvrir à la concurrence l’exploitation de leurs services ferroviaires conventionnés. L’Etat (avec l’ouverture des lignes TET Nantes-Lyon et Nantes-bordeaux) et plusieurs régions françaises (dont Hauts-de-France, Sud et Grand Est) se sont engagés résolument dans cette voie. La concurrence dans le transport ferroviaire de voyageurs conventionné arrive pour de bon en France.

Parallèlement, le Financial Times du 31 juillet 2020 nous informait que, pour assurer la continuité des opérations ferroviaires dans un contexte de crise sanitaire, le gouvernement britannique avait de facto procédé à la renationalisation complète des franchises britanniques. Ironie de l’histoire donc, où l’on voit la France ouvrir l’exploitation de ses trains de voyageurs à la concurrence alors même que la très libérale Albion les renationalise. Mais qu’en est-il dans les faits ?

A l’heure où l’Etat et les Régions se mettent en ordre de marche pour définir les allotissements et les règles du jeu commercial des futurs contrats, considérer les forces et limites de l’exemple britannique qui offre près de 25 ans de retour d’expérience est essentiel.

Le modèle historique des franchises britanniques

En 1997, le chemin de fer britannique a été privatisé avec pour objectif l’amélioration des services et la réduction des coûts d’exploitation, et donc des subventions, en attirant de nouveaux entrants sur le marché. L’attribution par appel d’offres de contrats de franchises pour l’exploitation du réseau a dès le début été un élément clé du système privatisé. Au Royaume‑Uni, les contrats de franchises ferroviaires sont pour la plupart attribués par le ministère des transports. En tant qu’autorité organisatrice, le ministère conduit le processus d’appel d’offres de bout en bout, depuis la définition du cahier des charges jusqu’au suivi opérationnel du contrat. Pour assurer un service public de qualité, le ministère développe des cahiers des charges incluant de nombreuses exigences, notamment sur la desserte minimale et les niveaux de service attendus. Pour remporter une franchise, les opérateurs ferroviaires doivent offrir une offre technique de haute qualité et, selon le cas, le paiement d’un premium au gouvernement sur les franchises rentables, ou la demande d’une subvention aussi faible que possible pour les franchises pour lesquelles les coûts d’exploitation sont supérieurs aux recettes commerciales.

La libéralisation a dopé la croissance ferroviaire outre-Manche

La libéralisation du chemin de fer britannique a déclenché une véritable renaissance du transport ferroviaire de voyageurs outre-Manche. Quand le marché fut privatisé à la fin des années quatre-vingt-dix, les trafics voyageurs étaient en berne (diminution de 20 % entre 1950 et 1997). Depuis la privatisation, l’impulsion des opérateurs privés a créé un essor sans précédent, avec un doublement du nombre de voyageurs entre 1997 et 2017. Par ailleurs, la libéralisation a permis des investissements privés massifs dans le système ferroviaire. Par exemple entre 2007 et 2017, le secteur privé a investi 5,2 milliards de livres (environ 5,8 milliards d’euros) dans le matériel roulant. La concurrence a aussi été un véritable moteur de l’innovation qui a permis une amélioration nette des services offerts aux clients. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on peut s’attendre à ce que l’ouverture à la concurrence en France soit une bonne nouvelle pour le ferroviaire français.

On ne saurait néanmoins ignorer le fait que le modèle des franchises n’a pas été qu’un succès. Examinons les faiblesses majeures de ce modèle et tirons-en quelques enseignements pour le marché français.

Des franchises qui flanchaient bien avant la crise de la Covid

Le problème majeur auquel l’industrie du rail britannique a fait face dans le modèle de franchises était l’incitation très forte à offrir le paiement d’un premium très élevé (ou à demander une subvention très faible) au ministère des Transports pour remporter les contrats, ce qui passait par exemple par des prévisions de croissance de recettes ou de performance opérationnelle irréalistes. Ainsi, depuis 2012, de nombreux contrats ont été attribués sur la base d’hypothèses beaucoup trop optimistes, avec des conséquences sérieuses pour les acteurs. En juin 2018, le gouvernement reprenait en main pour la troisième fois en douze ans l’exploitation du réseau Intercités East Coast après la déroute de son exploitant Virgin Trains East Coast, un groupement entre Stagecoach et Virgin. Bien que les recettes de Virgin Trains East Coast couvraient largement ses coûts d’exploitation, les prévisions de trafic réalisées lors de la préparation de l’offre étaient bien trop optimistes et peinaient à se matérialiser, si bien que la marge opérationnelle ne permettait plus de couvrir le paiement du premium que l’exploitant s’était engagé à payer au ministère. Pour honorer ses engagements, la compagnie ferroviaire a dû utiliser les 165 millions de livres (environ 185 millions d’euros) de garantie fournie par ses maisons mères. Le ministère a repris l’exploitation de la ligne à épuisement de la garantie. Autre exemple : en janvier 2020, le ministère des Transports reprenait le contrôle de la franchise Northern au groupe de transport Arriva, suite à ses difficultés répétées à fournir un service de qualité dans la région.

La baisse des recettes voyageurs consécutive à la crise de la Covid a obligé le gouvernement britannique à mettre en place des mesures d’urgence pour assurer la continuité des opérations. Pour sauver l’ensemble des opérateurs de la faillite, le ministère des Transports a suspendu les contrats de franchises et les a remplacées par des mesures temporaires qui prévoient que les opérateurs soient compensés pour leurs coûts, plus une faible marge (mesures qui, selon l’office national anglais de statistiques, équivalent à une nationalisation). Les contours de la réforme structurelle dont la préparation est engagée depuis 2018 et qui est attendue pour 2021 ne sont pas encore connus, mais l’on peut s’attendre à ce que, à l’avenir, le ministère britannique des Transports se concentre dans son rôle de stratège et abandonne les franchises au profit de contrats de concessions dont l’exploitation sera confiée à des opérateurs privés. Ceux qui espéraient la renaissance de British Rail seront donc déçus : la renationalisation – temporaire – liée à la crise sanitaire et la réforme structurelle attendue laisseront les opérateurs privés au centre du système.

Revenons en France. Pour garantir la stabilité financière de l’exploitant sur toute la durée du contrat – ce qui est dans l’intérêt commun de l’Autorité Organisatrice de la Mobilité (AOM) et de l’exploitant -, nous proposons que les conditions suivantes soient réunies.


LES DÉFAILLANCES DES NOMBREUSES INTERFACES REQUISES PAR LA FRAGMENTATION DU RÉSEAU NE PERMETTENT PAS LE BON FONCTIONNEMENT D’UNE INDUSTRIE QUI DOIT, PAR NATURE, RESTÉE INTÉGRÉE

 

D’abord, les contrats liant l’AOM et l’exploitant doivent être attribués sur des critères réalistes. Les AOM devront avoir à cœur d’évaluer de manière critique la viabilité financière des offres. Des offres financières agressives adossées à des taux de croissance de trafic ou des hypothèses de réduction de coûts héroïques devront être écartées. En outre, les critères d’attribution des contrats devront donner un poids important à l’élément qualitatif des offres en comparant leur crédibilité et non pas seulement leur compétitivité financière.

Ensuite, le partage des risques entre l’exploitant et l’AOM devra être défini avec soin, avec un équilibre entre le volume de gains attendus et l’amplitude des risques pris par l’opérateur, où chaque risque est alloué à la partie la plus à même de le gérer. L’expérience montre que ce principe théoriquement évident est souvent difficile à mettre en application de manière robuste. Les Britanniques, qui se confrontent depuis plus de vingt ans à ces difficultés, ont essayé avec plus ou moins de succès plusieurs formules. Un exemple qui a beaucoup fait débat concerne le risque sur les recettes. La prise de risque sur les recettes par l’opérateur est une bonne chose a priori car elle incite les opérateurs à faire croître le marché et à agir de manière très commerciale, mais elle a causé la faillite de plusieurs exploitants. En réponse, le ministère britannique des Transports a alors développé un mécanisme qui compense l’opérateur en cas de retournement macroéconomique totalement hors de son contrôle mais impactant toutefois sévèrement son chiffre d’affaires. Une bonne idée, encore faut-il que le mécanisme soit bien calibré, ce qui n’est pas chose facile. Un mécanisme de transfert de risques mal calibré conduit soit à une surexposition au risque de l’opérateur, soit à une surcompensation de l’opérateur par l’AOM, deux situations non souhaitables et qui détruisent de la valeur.

Un système fragmenté et une performance en baisse

Autre écueil à éviter : la privatisation à l’anglaise a conduit à une fragmentation poussive du réseau qui en rend la gestion inefficace. Les nombreux exploitants privés et le gestionnaire d’infrastructure ont trop souvent des intérêts divergents, et les incitations prévues dans les contrats commerciaux qui les lient les uns aux autres ne permettent pas toujours de produire un service optimal pour le client final. Les défaillances des nombreuses interfaces requises par cette fragmentation ne créent pas les conditions pour le bon fonctionnement d’une industrie qui doit, par nature, fonctionner de manière très intégrée. C’est ainsi que le changement d’horaires britannique de mai 2018 a viré au fiasco, avec des milliers de trains annulés ou retardés au niveau national. Certains accuseront le gestionnaire d’infrastructure, d’autres les exploitants, mais c’est bien l’échec du système qui s’est révélé lors de ce désastre industriel. En France, si la séparation entre les opérateurs et le gestionnaire d’infrastructure est essentielle afin d’assurer un traitement équitable des transporteurs par ce dernier, il sera primordial que SNCF Réseau prenne un rôle fort d’intégrateur du système ferroviaire pour garantir son intégrité au-delà des interfaces commerciales.

Des contrats trop risqués et à faibles marges qui rebutent les opérateurs

Toujours enclin à apprendre de l’expérience et de ses erreurs et afin de mieux s’assurer de la crédibilité des offres et de leur compétitivité, le ministère britannique des Transports a augmenté au cours des années le nombre de spécifications à respecter dans les cahiers des charges. La conséquence en est que répondre à un appel d’offres pour une franchise britannique est devenu un exercice très onéreux, ce qui, dans un contexte où la performance du réseau est médiocre, la prise de risque élevée et les marges plutôt faibles, a progressivement rendu le marché britannique de moins en moins attractif. C’est ainsi que National Express, le plus gros acteur du marché à la fin des années 2000, a vendu en 2017 ses activités ferroviaires d’outre-Manche pour concentrer ses ressources sur d’autres régions du monde jugées plus attractives, nous rappelant au passage que, dans un contexte où le marché est en forte croissance mais les ressources limitées, les AOM d’Europe et du monde sont en concurrence les unes avec les autres pour attirer les meilleurs opérateurs. Les groupes de transport raisonnent de manière globale et déploient donc leurs moyens financiers et humains sur les contrats les plus attractifs. Le ferroviaire est en pleine croissance et les opportunités ne manquent pas sur un marché désormais mondial dans lequel les exigences liées à la transition écologique sont un sérieux argument politique en faveur de ce mode de transport.

En conclusion, les leçons apprises de l’expérience britannique sont précieuses pour éviter de reproduire les mêmes erreurs en France. Pour que le trafic se développe et que le marché prospère, les AOM devront attribuer les contrats sur des critères réalistes et pragmatiques, en évaluant avec prudence des offres financières trop agressives, tout en incitant les opérateurs à prendre des risques considérés. Le processus de réponse à appel d’offres devra rester simple et facile d’accès. SNCF Réseau devra prendre un leadership fort pour assurer la cohésion et l’intégration du système ferroviaire dans son ensemble. Ce sont les conditions qui permettront d’attirer des exploitants durables, innovants et responsables, au service des passagers.

Ewa

La nouvelle stratégie de l’Europe pour les transports, un catalogue de bonnes intentions

Commission européenne

La grande vitesse ferroviaire doublée en Europe en 2030 par rapport à 2015 et triplée à l’horizon 2050 ; 50% de fret ferroviaire en plus en 2030 et deux fois plus en 2050. Ce sont là les objectifs que l’on peut lire dans la nouvelle stratégie de l’UE pour « une mobilité durable et intelligente » présentée le 9 décembre, qui prend le relais du Livre blanc de 2011 sur les transports. Avec un objectif général de réduire de 90% les émissions de CO2 des transports en 2050, le rail y occupe forcément une place de choix, ce dont se sont félicitées illico les principales organisations du secteur.

Dès l’année prochaine, la Commission promet un « plan d’action pour stimuler les services de transport ferroviaire à longue distance et transfrontières de voyageurs ». De quoi donner du contenu à cette « année du rail » proclamée par les institutions européennes pour 2021. Objectif : rendre plus rapides les connexions clés entre les villes « grâce à une meilleure gestion des capacités, à une coordination des horaires, à la mise en commun de matériel roulant et à des améliorations ciblées des infrastructures ». Bruxelles vise les trains de jour comme les trains de nuit – ces derniers sont en retour de grâce après avoir été ignorés par le Livre blanc de 2011 – et évoque le soutien à des projets pilotes sur certains liaisons.

Cap sur la multimodalité

La multimodalité est un des mots clés de cette stratégie. Maintes fois annoncées, des mesures règlementaires « pour des billets innovants et flexibles qui combinent différents modes de transport » sont programmées pour l’année prochaine. Ambition multimodale pour le fret également, avec par exemple la volonté affichée de donner une priorité au développement des infrastructures de transbordement.

A l’appui de la multimodalité, des « efforts supplémentaires » sont annoncés sur la disponibilité et la réutilisation des données, avec notamment de nouvelles règles sur les droits et obligations des intermédiaires en ligne. De même, le cadre réglementaire sur les OPS (obligations de service public) pourrait être modifié pour intégrer cette logique multimodale – la Commission évoque « un système d’OSP multimodal ».

Au passage, Bruxelles veut aussi pouvoir appliquer des critères de durabilité aux OSP, qui impliqueraient par exemple de ne pouvoir imposer des OSP aux vols court-courriers « lorsqu’il existe une liaison ferroviaire alternative appropriée, plus durable et compétitive ».

La Commission se penchera également sur les « obstacles techniques » qui nuisent encore à la performance du fret ferroviaire. Elle entend par exemple réviser le règlement sur les corridors de fret en mettant l’accent sur des mesures « à effet rapide » comme la longueur des trains ou le gabarit de chargement. Elle promet aussi d’améliorer les règles d’attribution des capacités « afin de fournir des sillons supplémentaires flexibles ».

Enfin, comme tous les autres modes, le rail devra être plus durable. « Le transport ferroviaire devra être davantage électrifié ; lorsque cela n’est pas viable, il faudrait recourir davantage à l’hydrogène », insiste le document. Une sorte de cadre harmonisé pour pouvoir mesurer les émissions de gaz à effet de serre dans tous les modes de transport est annoncé. Et avec lui, « les informations relatives à l’empreinte carbone d’un voyage spécifique pourraient devenir un nouveau droit des passagers. »

Isabelle Smets,

à Bruxelles

Ewa

Recherches, Débats, positions

Metro NY

A bord des cars Macron ­– Télétravail en Suisse romande – Le périphérique ou comment s’en passer – Le Grand Paris à marche forcée – RER kaléidoscopique – Le transport public mis à mal par le déconfinement – Effet dévastateur sur l’Apta aux Etats-Unis – Quels impacts du Covid-19 sur les mobilités ?

A bord des cars Macron

Les cars Macron, on en a beaucoup parlé, dans les colonnes de VRT, où l’on a suivi la naissance d’une nouvelle offre de transport (ce n’est pas si fréquent), et vu comment elle arrivait tant bien que mal à se stabiliser d’un point de vue économique. Mais qu’en est-il de l’expérience du voyage ? Le Forum Vies Mobiles a confié à un jeune photographe, Benjamin Cayzac, la mission de sillonner les routes de France à bord des cars Macron. On y croise des étudiants, des retraités, des travailleurs souvent désargentés, des passagers dont c’est le premier voyage, des habitués. On y ressent la lassitude du voyage, et, dix heures après le départ, dans le cas d’un Paris – Avignon, la satisfaction du trajet accompli. A voir sur le site du Forum Vies Mobiles.

Télétravail en Suisse romande

A côté de l’enquête menée en France sur le télétravail avec l’Ademe (voir pages 92), le bureau de recherche 6t a enquêté sur le phénomène en Suisse romande. La collecte des données a eu lieu du 7 au 20 mai, en période de semi-confinement, et les conclusions ont été publiées en septembre. 1971 réponses ont permis d’obtenir un échantillon global représentatif de la population des sept cantons et régions francophones de Suisse. L’enquête montre une pratique bien ancrée avant même la crise sanitaire, avec 21 % de Romands télétravaillant au moins une fois par mois, dont 6 % au moins une fois par semaine. On télétravaille le plus dans les cantons les plus urbains, Genève en tête.

L’impact sur la mobilité est à la fois positif… et contrasté, du fait de l’effet rebond. Dans l’ensemble cependant, les télétravailleurs se déplacent un peu moins et rejettent moins de CO2 que non-télétravailleurs. Surtout, plus on télétravaille, plus les comportements sont vertueux… alors que les télétravailleurs occasionnels (une à trois fois par mois) polluent plus que les non-télétravailleurs.

Plus d’un quart des actifs romands ont expérimenté le télétravail durant la période de semi-confinement. L’expérience est jugée positive, et 77 % des personnes interrogées souhaitent maintenant le pratiquer au moins une fois par mois. Mieux vaudrait qu’ils le fassent au moins une fois par semaine !

Voir : https://6-t.co/teletravail-et-mobilite-en-suisse-romande/

Le périphérique ou comment s’en passer

Le boulevard périphérique a été l’un des thèmes de la dernière campagne municipale à Paris, Anne Hidalgo voulant en faire un boulevard urbain, la droite préférant le couvrir partiellement pour effacer la coupure urbaine, et l’un des candidats, Gaspard Gantzer, avant de se rallier La république en marche qui envisageait de recourir à la modulation horaire ; se proposant de le supprimer. Le supprimer ? Le Forum Vies Mobiles a tenté cependant de l’envisager, avec un groupe d’étudiants de Paris 1 Panthéon Sorbonne. Pas si simple d’y renoncer comme l’ont montré les entretiens conduits par le groupe de travail avec une vingtaine d’usagers, pas trop d’accord pour y renoncer. Le Forum Vies Mobiles préconise « une mise en place progressive sur le temps long ».

Le Grand Paris à marche forcée

Le 30 août, au bout de 12 jours et de 200 km de marche. Enlarge your Paris et la Société du Grand Paris ont bouclé leur nouveau cycle de randonnées urbaines le long des futures lignes du Grand Paris Express. Pierre-Emmanuel Bécherand responsable de l’architecture, du design et de la culture du GPE, souligne dans le blog Enlarge your Paris la place centrale de la marche dans Paris. Et se demande : « Si Paris appartient au flâneur, qu’en sera-t-il du Grand Paris ? ». Les urbanistes, rappelle-t-il, « organisent la ville autour des transports en s’appuyant sur un réseau de 800 m, correspondant communément à la zone « marchable » pour rejoindre une gare ». Mais le Grand Paris Express invite à changer d’échelle, et à « penser aussi l’accès à pied vers les gares pour des distances de 2 voire 3 km ». La randonnée urbaine a au moins le mérite de montrer tout le travail à accomplir pour établir ou rétablir des continuités, là où l’on fait aujourd’hui « l’expérience des fractures urbaines ». Belle idée sans doute, mais il restera à inventer encore une expérience nouvelle de la marche, entre la promenade plutôt campagnarde et la flânerie si parisienne. C’est ce qu’invite à penser, dans le même blog, Frédéric Gros, auteur de Marcher, une philosophie (Carnet Nord, 2009, réédition Flammarion, 2011), soulignant l’émergence d’une nouvelle figure, celle de « l’arpenteur des métropoles ». Figure paradoxale puisque les métropoles sont « toutes entières bâties par référence à ce qui excède les possibilités du corps marchant ».

RER kaléidoscopique

Trente ans après Les passagers du Roissy express, de François Maspero, et de la photographe Anaïk Franz, la sociologue Marie-Hélène Bacqué et le photographe André Mérian mettaient leur pas dans ceux de leur prédécesseur, il en est résulté un ouvrage joliment intitulé Retour à Roissy – Un voyage sur le RER B (Le Seuil, 2019). C’est un parcours plus vaste qu’a entrepris le géographe Laurent Chalard, en voyageant au fil des ans sur l’ensemble des lignes du RER : A, B, C, D et E. Les conclusions de ses années de pérégrination ont été publiées en août par Enlarge your Paris. Contrairement aux idées reçues sur la légende noire du RER, on y découvre une forte présence d’un RER « bourgeois » (six portions de ligne, comme le RER A entre St Germain-en Laye et La Défense ou le RER C entre Versailles-Chantiers et Massy-Palaiseau).

Et seulement quatre portions de ligne exclusivement populaires, comme les deux branches du RER B au-delà de Gare du Nord, la branche allant à Creil apparaissant comme « un des principaux axes de paupérisation de la métropole parisienne ». Cependant, « si la métropolisation a tendance à produire des effets de dualisation », la majorité des lignes apparaissent mixtes, comme le montre, par exemple la branche du RER A allant de Vincennes à Marne-la-Vallée, qui se caractérise par un « véritable kaléidoscope de passagers ». La différenciation entre les diverses populations ne se fait pas seulement par la géographie : de grandes différences sociales se font en fonction de l’heure de la journée, et cela quasiment sur l’ensemble du réseau, entre employés peu qualifiés très tôt lie matin, employés de bureau vers 7 heures, cadres ou lycéens plus tard. D’autres critères permettent d’affiner encore la perception du RER qui ne se laisse en tout cas pas résumer à une simple opposition avec le Paris intramuros et le métro.

Le transport public mis à mal par le déconfinement

Intéressant billet de la Fabrique de la Cité, posté le 18 septembre. « La reprise de la mobilité en ville n’est plus un sujet », constate pour commencer Camille Combe, chargé de mission. Mais, si les activités ont repris, « dans de nombreux pays, on assiste à une individualisation de la mobilité », difficilement compatible avec les objectifs de décarbonation. On enregistre, par exemple à Paris, une augmentation du nombre de kilomètres parcourus en voiture, par rapport à une période « normale ». Marche et vélo vont bien, merci, en revanche les transports collectifs sont à la peine. Comme le relève le think tank de Vinci, alors que « dans de nombreuses villes, l’offre de transport en commun a retrouvé son niveau normal, la fréquentation, elle, peine à atteindre les niveaux préconfinement, sans dans les cas notables de Lyon et Saint-Pétersbourg, selon un indice calculé par City-Mapper. » Aux Etats-Unis, selon l’Apta (American Public Transportation Association), « 60 % des autorités organisatrices de mobilités envisagent de réduire l’offre de transport, tandis qu’un tiers des opérateurs devront potentiellement mettre la clé sous la porte. » Pour la Fabrique de la Cité il faut de toute urgence « créer les conditions qui permettront aux transports collectifs ou au covoiturage de devenir plus compétitifs que des modes individuels et motorisés. » Ajoutons : qu’ils soient plus rassurants aussi, face aux craintes de contamination. Car même si les transports publics ne sont pas aussi dangereux qu’ils le paraissent, selon un article du New York Times cité par ce billet, reste à conforter ce diagnostic, et à en convaincre des usagers désemparés et méfiants.

Effet dévastateur sur l’Apta aux Etats-Unis

Les données de l’Apta mentionnées par la Fabrique de la Cité méritent qu’on les regarde de près. Les chiffres font peur. Selon le panorama établi en septembre par l’Apta, il faut que le Congrès lui apporte une aide d’urgence de 32 milliards de dollars, faute de quoi l’offre de transport public sera drastiquement réduite. Le transport public a déjà reçu au titre une aide de 25 milliards de dollars au titre du Coronavirus AID Relief ans Security (CARES) Act. Le métro de New York a consommé l’aide reçue dès juillet et la Massachusetts Bay Transportation Authority (MBTA) estime que le CARES Act ne lui permettra pas de tenir au-delà de 2021. Selon l’Apta, 45 % des réseaux envisagent de reporter ou d’annuler des investissements, 33 % veulent faire de même avec les acquisitions de matériels, 38 % envisagent de supprimer des lignes, 31 % s’apprêtent à licencier du personnel, 17 % veulent recourir à une augmentation des tarifs.

Quels impacts du Covid-19 sur les mobilités ?

Jean Colard, Jincheng Ni et Nicolas Meilhan ont tenté d’évaluer les effets à court ou à long terme, de la pandémie sur les mobilités, dans un Point de vue publié le 10 septembre par France Stratégie.

On peut s’attendre à un accroissement du télétravail : « l’anecdotique pourrait devenir une réalité significative ». A l’intérêt des salariés pour une formule mixant distanciel et présentiel, s’ajoute l’intérêt des employeurs pour un mode d’organisation du travail offrant « une plus grande maîtrise des charges fixes immobilière des locaux professionnels ». La part globale des actifs « télétravaillables » serait de l’ordre de 20 % à 40 %. Au moins suffisant pour lisser les heures de pointe.

Les auteurs s’attendent à ce que les grandes villes soient repensées « autour des notions de proximité, d’une vie de quartier », et envisagent, à l’échelle nationale, un rééquilibrage en faveur de zones moins denses. Dans la capitale, « l’ampleur des densités et des volumes en jeu au sein du Grand Paris peut désormais poser question ».

Le recours au e-commerce devrait s’accentuer, confirmant une tendance de fond. Mais, attention, en matière environnementale « la diminution des déplacements individuels des clients est contrebalancée par le foisonnement des livraisons (et des emballages) qui accroît les déplacements de courte distance de « logistique urbaine » encore faiblement décarbonés ». Enfin, le modèle aérien sera certainement mis en question, du fait d’une réorientation possible vers du tourisme de proximité, et la diminution des voyages professionnels grâce au numérique.

Les pouvoirs publics sont invités à accompagner les nouvelles tendances, en soutenant les transports publics afin d’éviter une désaffection au profit de la voiture, en pérennisant les aménagements piétons et vélo en ville comme en milieu rural. Ce n’est pas cher : « la construction en Ile-de-France d’un grand réseau express régional vélo (…) avec 650 km de pistes cyclables, coûterait 500 millions d’euros, c’est-à-dire moins de 2 % du futur métro du Grand Paris express ». Il faudra encore limiter l’impact négatif du rebond de la voiture particulière en encourageant le covoiturage et en accélérant le basculement verts le véhicule électrique. Et repenser le modèle économique global d’un transport aérien complètement chamboulé…

F. D.

Ewa

Jean-Pierre Farandou plaide pour un « plan Marshall européen » pour le ferroviaire

Portraits du Comité de Direction de Keolis.
Pour l'agence Meanings.

Le secteur ferroviaire ne doit pas être le grand oublié des politiques de relance estime la SNCF. Auditionné devant l’Assemblée nationale le 20 mai, son patron, Jean-Pierre Farandou, n’a pas caché ses inquiétudes sur la situation économique du groupe qui tire habituellement de ses TGV la plus grande partie de son cash.

« Je suis inquiet pour les TGV qui n’ont transporté que 1 % du trafic habituel pendant le confinement, soit quasiment rien », a expliqué aux députés le PDG du groupe. Fin avril, l’entreprise affichait 2 milliards d’euros de manque à gagner auxquels il faut ajouter un milliard d’euros d’impact de la grève qui s’est poursuivie en janvier.

Trois types de difficultés émergent : d’abord, des soucis de trésorerie, même si pour le moment la SNCF dispose des ressources pour tenir, après avoir été cherché des liquidités sur les marchés financiers. « Mais ces emprunts peuvent alourdir l’endettement », prévient Jean-Pierre Farandou. Deuxième question cruciale : quels investissements lancer prioritairement pour éviter que le réseau ne vieillisse encore plus ? Enfin, quand le marché va-t-il vraiment repartir ?

Toute la filière est concernée

« A quelle vitesse va-t-on pouvoir reprendre ? », s’interroge ainsi Jean-Pierre Farandou en rappelant que pour le moment les ventes de sièges sont limitées à un sur deux pour des questions de respect des distances physiques entre les voyageurs. A cela s’ajoute la règle des 100 km à ne pas dépasser.

D’où la demande du patron de la SNCF d’un plan de relance du ferroviaire. « J’espère que l’Etat sera au rendez-vous », déclare-t-il en souhaitant que ce plan « sera mieux dessiné avant l’été ». Il permettrait entre autres « de nous aider à retrouver des capacités d’investissements ». Derrière la SNCF, c’est toute une filière qui est concernée, ajoute Jean-Pierre Farandou.

Il y a urgence car, en plus de la crise, la SNCF devrait prochainement être confrontée à une situation inédite avec d’une part, l’arrivée de la concurrence sur son réseau domestique, d’autre part, des règles d’endettement plus strictes liées à la réorganisation du groupe depuis janvier et la mise en place de nouvelles SA. « La concurrence va obliger à se questionner sur la péréquation existante. Or c’est le TGV qui porte les activités non rentables comme les trains d’équilibre du territoire », souligne encore Jean-Pierre Farandou.

La survie de Fret SNCF en jeu

De plus, la survie de Fret SNCF, qui détient plus de la moitié du marché, est menacée. « Veut-on conserver un minimum de fret ferroviaire ? », demande encore le PDG de la SNCF, pour qui il faut un système d’aide pérenne. « Il y a une énorme initiative à prendre au niveau européen dans le cadre du green deal », ajoute-t-il, en évoquant « un grand plan Marshall européen », qui permettrait de moderniser les infrastructures et de résorber les goulets d’étranglements.

Marie Hélène Poingt

Ewa

Les transports bientôt exclus des contrats de plan Etat-Région

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A l’occasion des vœux de Régions de France le 29 janvier, Jacqueline Gourault, laministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, a rappelé que le gouvernement avait décidé de changer de méthode pour mettre au point les futurs contrats de plan Etat-Région (CPER) qui doivent être bouclés à la fin de l’année pour couvrir la période 2021-2027. Ce calendrier va permettre aux CPER de bénéficier des fonds européens de cohésion en discussion à Bruxelles. Ils pourront s’ajouter aux financements venant de l’État et des collectivités locales.
Jacqueline Gourault a expliqué que chaque région devrait faire des choix et indiquer sur quels projets prioritaires elle souhaite contractualiser avec l’État. Ce qui devrait aboutir à des contrats de plan plus différenciés entre les régions que par le passé.

Nouveauté, les transports, qui concentraient jusqu’à présent la plus grande part des financements des CPER mais dont le taux d’exécution est très faible, seront traités à part. Ils feront l’objet d’un autre contrat qui sera signé parallèlement. Cette démarche doit permettre à l’Etat de se donner plus de temps pour tenir ses engagements et surtout pour régler l’épineuse question du financement.

M.-H. P.

Ewa

Les pertes des entreprises de fret ferroviaire se chiffrent en dizaines de millions d’euros

Train de fret dans le port de Dunkerque.

Les entreprises de fret ferroviaire et de transport combiné tirent le signal d’alarme sur la situation du secteur. Le 19 janvier, elles ont publié, dans le Journal du Dimanche, une lettre ouverte au Président de la République, pour demander des mesures de soutien. Claude Steinmetz, président de l’AFRA (association française du rail), qui regroupe les opérateurs alternatifs à la SNCF et qui a co-signé la lettre, explique à VRT les raisons de cet appel à l’aide.

 

Ville, Rail & Transports : Quel est le bilan des grèves pour le fret ferroviaire ?

Claude Steinmetz : Le bilan est catastrophique. Les grèves ont plombé les comptes 2019 : les pertes se chiffrent en plusieurs dizaines de millions d’euros. Toutes les entreprises de fret ferroviaires sont extrêmement fragilisées.

La grève a été particulièrement dure au début du mouvement avec seulement 5 % en moyenne des trains de fret qui ont pu circuler. Puis ce taux est monté à 25 %.

Nous avons essayé de sensibiliser SNCF Réseau mais quand il n’y a pas d’aiguilleurs, les trains de fret ne peuvent pas circuler.

 

VRT : L’Afra a co-signé une lettre ouverte au Président de la République. Que demandez-vous ?

C. S. : Nous cherchons à sauver le fret ferroviaire. Jusqu’à maintenant nous n’avons pas eu de réponse à notre demande d’un système de compensation qui prendraient en compte les pertes subies. Le président de la République représente le dernier recours.

Nous réclamons aussi des demandes fortes en faveur du fret ferroviaire comme le font d’ailleurs les autres pays européens, l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Autriche… L’Allemagne par exemple va dépenser plus de 62 milliards d’euros d’ici à 2030 pour rénover son réseau ferré.

Nous demandons aussi d’examiner précisément dans quelle mesure des travaux pourraient être réalisés le jour sur les voies, sans que les trains de voyageurs en subissent des nuisances. Actuellement, les chantiers sont réalisés de nuit, générant de fortes perturbations pour les circulations de fret. Il faut changer de paradigme et mettre au point des solutions nouvelles, plus efficaces.

Je rappelle que les trains de fret représentent un mode propre : 9 fois plus propre que le transport routier.

VRT : Quel est le montant de la réparation demandé au gouvernement ?

C. S. : Nous allons faire les comptes activité par activité, entreprise par entreprise. Nous ferons les comptes et en présenterons très vite le montant, au plus tard mi-février.

VRT : Comment éviter à l’avenir de tels blocages des trains de fret ?

C. S. : Nous demandons que certains nœuds ferroviaires stratégiques et aiguillages ne soient pas bloqués. Ce qui reviendrait à assurer un service minimum dans certains aiguillages.

VRT : L’avenir de Fret SNCF paraît également menacé. Quelles pourraient être les conséquences pour le secteur ?

C. S. : Aujourd’hui Fret SNCF représente 60 % de l’activité de fret ferroviaire en France. Notre intérêt à tous, c’est que le secteur ferroviaire s’améliore, y compris pour Fret SNCF (qui n’est pas représenté par l’AFRA, je le rappelle). Faute de quoi il y aura encore plus de camions sur les routes…

Propos recueillis par Marie-Hélène Poingt

Ewa

La nouvelle stratégie européenne pour des transports plus « verts »

La Commission européenne présentera en 2020 une nouvelle stratégie pour une mobilité « durable et intelligente ». C’est une des promesses du fameux «Green Deal» présenté par l’exécutif européen le 11décembre. Un « Pacte vert » qui érige en «priorité » le transfert vers le rail et les voies navigables «d’une part substantielles des 75 % de fret intérieur passant actuellement par la route ».

De quoi, forcément, réjouir le secteur, qui n’a pas manqué d’applaudir les annonces. «Des mesures devront être mises en place en vue d’une gestion plus efficace et d’une augmentation de la capacité des voies ferroviaires et fluviales », indique la Commission dans sa communication. Elles seront proposées d’ici à 2021.

L’actuelle proposition de directive sur les transports combinés– bloquée au niveau des Etats– sera retirée pour être remplacée par une nouvelle proposition législative censée favoriser les opérations de fret multimodal par voie ferroviaire et voie d’eau. Les concurrents au transport ferroviaire devraient aussi voir renchérir le coût de leurs opérations. Les exonérations fiscales au carburant d’aviation sont ainsi sur la sellette– une révision de la directive sur la taxation de l’énergie est dans les cartons– et le transport routier pourrait être inclus dans le marché européen du carbone, ce qui l’obligerait à participer au système européen d’échange des quotas d’émission. Alors que les ministres européens des Transports ne sont pas parvenus à s’entendre début décembre sur une révision de la directive Eurovignette pour y intégrer davantage le principe du pollueur/payeur, la Commission met en garde: un accord trop peu ambitieux à son goût signifierait un retrait de la proposition et son remplacement par d’autres mesures.

Isabelle Smets, à Bruxelles

Ewa

6,2 milliards d’euros seront investis dans le réseau en 2020

Lyon Perrache CCR

Cela n’aura pas été sans mal. Le 28 novembre, SNCF Réseau a enfin annoncé que son conseil d’administration avait approuvé le projet de budget pour 2020. Il a fallu en effet de multiples réunions et allers-retours pour parvenir à un accord avec l’État qui s’était engagé à augmenter sensiblement son effort en faveur de la rénovation du réseau ferré vieillissant. Mais c’était sans compter sur Bercy qui a cherché à rogner quelque 500 millions d’euros.

Finalement, ce projet de budget (le premier budget de la future société anonyme qui naîtra le 1er janvier prochain au sein du groupe SNCF unifié) prévoit que 6,2 milliards d’euros seront investis en 2020 (contre 5,7 milliards l’année précédente). Sur ce total, 2,8 milliards seront consacrés au renouvellement du réseau, auxquels s’ajoutent 90 millions d’euros pour le financement de l’ERTMS sur la LGV Paris – Lyon.