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Ewa

Pour Bruxelles, attaquer le droit de la concurrence c’est se tirer une balle dans le pied

La décision de la Commission européenne d’interdire la fusion Alstom-Siemens s’est attiré une levée de boucliers. On a accusé Bruxelles d’avoir une vue court-termiste et une compréhension étroite de la concurrence. Les critiques sont quasi unanimes en Allemagne, largement majoritaires en France. Dans les autres pays de l’Union européenne (UE), on comprend beaucoup mieux la décision de Margrethe Vestager, la commissaire à la Concurrence.

La Commission ne manque d’ailleurs pas d’arguments. Le plus fort ? Elle applique le droit. Elle a pour mission de s’assurer qu’une entité ne peut acquérir de position dominante sur le marché intérieur par une acquisition. On peut devenir dominant par ses propres mérites. Mais, si on le devient par acquisition ou fusion, il faut concéder des contreparties.

À l’issue de son enquête, la Commission a estimé qu’environ 80 % de l’activité cumulée d’Alstom et Siemens ne posait aucun problème. Comme on le sait, c’est dans deux domaines que le bât blessait : les trains à très grande vitesse (au-delà de 300 km/h) et la signalisation. Seuls Siemens et Alstom vendent des trains à très grande vitesse dans l’UE. Il en va de même en dehors de l’Union, du moins sur les marchés accessibles. Exception faite donc des réseaux chinois, japonais et coréens, qui ne le sont pas. La position dominante du nouvel ensemble était encore plus flagrante dans la signalisation.

Dans ces deux domaines les candidats à la fusion étaient donc conduits à vendre des parties significatives de leur activité, pour laisser place à des concurrents.

Or, rappelle-t-on à la Commission, les sacrifices dans les projets de fusion se montent en moyenne entre 10 et 20 % du chiffre d’affaires. Ce n’est pas une règle, mais on s’est étonné qu’Alstom et Siemens n’aient proposé que 4 %. La nature des cessions proposées a aussi posé problème. Pour la très grande vitesse, la cession envisagée (accorder des licences) n’était pas suffisante. Alstom-Siemens aurait continué à maîtriser l’essentiel. C’est du moins ce qu’a jugé Bruxelles, même si, d’après le Financial Times, l’espagnol CAF, intéressé, était prêt à payer 900 millions d’euros pour cette partie cédée de la très grande vitesse.

Ça ne peut pas marcher

Sur la signalisation, les solutions des deux partenaires étaient aux yeux de Bruxelles beaucoup trop compliquées, faites de cessions de petits bouts un peu partout qui ne pouvaient que très difficilement constituer un véritable concurrent.

Les remèdes proposés le 12 décembre 2018 par les deux partenaires aux griefs de la Commission ont été testés auprès des concurrents, des clients, des autorités régulatrices. Dans des délais serrés, ils ont conclu : ça ne peut pas marcher. Et ce n’est pas la deuxième mouture de remèdes qui pouvait satisfaire. Présentée hors délais, moins d’un mois avant la date limite de décision, un peu différente mais de même ordre de grandeur, elle a été plutôt reçue comme un moyen de faire pression in extremis.

La Commission estime donc avoir appliqué le droit existant de la concurrence, qui fonctionne et auquel elle s’est tenue. Il ne l’a conduite que très rarement à une telle décision : au cours des 10 dernières années, elle a seulement interdit neuf projets de fusion et en a accepté 2 991. On veut y voir la preuve que le droit de la concurrence empêche les monopoles mais ne s’oppose pas à la création de champions.

Et puis, si les Européens se réjouissent que Margrethe Vestager applique ce droit aux Gafa, on ne peut lui demander de ne pas l’appliquer aux entreprises européennes. La base juridique qui conduit à refuser la fusion Siemens-Alstom est celle qui a permis d’infliger une amende record de 4,3 milliards à Google. En attaquant cette base, on se tirerait une balle dans le pied. Ou en l’appliquant mal. En dehors de l’Union, des grands groupes ou de grands États n’attendent qu’une chose : qu’une telle faute soit commise par Bruxelles.

Si on ne peut pas demander à la Commission de ne pas appliquer le droit, on peut changer les règles. Certains thèmes apparus dans le débat y invitent… sans toujours convaincre la Commission.

Is big beautiful  ?

Premier thème, créer un très grand groupe apparaît une évidence. Mais il n’a pas été démontré que l’entité nouvelle serait un meilleur concurrent face aux Chinois que les deux actuelles. Ni en ce qui concerne les prix plus bas, ni en ce qui concerne l’innovation. Big is beautiful ? Peut-être, mais peut-être pas.

Deuxième thème. Il faut prendre en compte le marché mondial et particulièrement la concurrence chinoise. Mais c’est une dimension que la Commission estime n’avoir pas ignorée. Or, s’agissant de la très grande vitesse, les Chinois n’ont pas vendu un seul train en dehors de leurs frontières (malgré un projet en Indonésie). En Europe, lorsqu’ils ont voulu se présenter pour le projet britannique HS2, ils n’ont pas été pré-qualifiés. On estime qu’il n’y a aucun danger d’ici cinq ans, vraisemblablement pas avant 10 ans. Pour la signalisation, la Chine est jugée encore moins avancée. La barrière à l’entrée est encore plus grande et l’Europe a trois géants mondiaux : Siemens, Alstom et Thales.

Autre reproche, Bruxelles limiterait son horizon au droit de la concurrence. Elle défend le consommateur plutôt que le producteur. Mais on estime à Bruxelles que c’est plutôt une bonne chose. Car protéger le producteur cela peut vite revenir à protéger des bases d’emploi dans certains pays membres au détriment des autres. En revanche, protéger le consommateur, c’est protéger tous les citoyens de l’Union. En limitant le nombre de candidats potentiels aux appels d’offres, il y aurait baisse de la concurrence et une moindre incitation à l’innovation… Avec le risque, au bout du compte, d’être plus mauvais face aux Chinois. Credo de Bruxelles : grâce à la concurrence, on exporte de la compétitivité. Taper sur le droit de la concurrence, c’est taper à côté de la plaque. Et oublier qu’on dispose d’autres outils.

Car le véritable outil contre la pénétration du marché européen, c’est la réciprocité dans l’ouverture des marchés publics, politique qui a deux volets.

Dans le cadre de la réforme de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), pour lutter contre les entreprises d’État et les subventions, et mieux maîtriser les marchés publics, Bruxelles met au point l’International Procurement Initiative (IPI). Présenté en 2013 par la Commission, le texte est, cela dit, toujours en discussion…

L’autre volet, ce sont les accords bilatéraux. L’accord Jefta entre l’UE et le Japon, entré en vigueur le 1er février, a notamment permis d’ouvrir les marchés publics. Dans le ferroviaire, la clause dite de « sûreté opérationnelle », qui bloquait les concurrents étrangers, a été éliminée. Non sans de sévères discussions.

Avec le Canada, l’accord Ceta, en application provisoire depuis le 21 septembre 2017, a lui aussi permis d’ouvrir ce marché, aux niveaux fédéral comme subfédéral.

Ce ne sont pas les seuls outils. Pour juger les appels d’offres des marchés publics dans l’UE, on peut s’appuyer sur d’autres critères que le prix : par exemple les critères sociaux et environnementaux qui ne sont pas assez utilisés. Dommage : ils favorisent de fait les Européens.

Autre arme, le contrôle des investissements étrangers. Sur les 28 États membres, 12 ont un tel dispositif, dont la France (décret de 2005, renforcé par le décret Montebourg, et maintenant par loi Pacte). Mais certains pays de l’Union sont très peu regardants. La Grèce a vendu au Chinois Cosco le port du Pirée. On avait des trous dans la raquette, reconnaît-on. Or, la Commission a proposé en septembre 2013 un cadre qui a très vite fait l’objet d’un accord entre la Commission, le Conseil, et le Parlement, permettant le filtrage des investissements directs étrangers. Le texte devait être discuté en plénière au Parlement le 11 février.

De plus, il n’a pas échappé à la Commission qu’environ 50 000 entreprises chinoises sont des entreprises d’État qui bénéficient de subventions déloyales. L’Europe n’est pas tout à fait démunie. 143 mesures antidumping ont été prises par la Commission dont une centaine concernaient des entreprises chinoises. On les juge efficaces, puisque les importations concernées par ces mesures ont baissé de 70 %. Premiers visés, les produits sidérurgiques, dont le volume importé a baissé de 97 %.

Le plaidoyer de la Commission résistera-t-il à la campagne électorale, en pleine période de replis nationalistes ou de désaveu de l’Europe ? Pas sûr. Il vaut tout de même la peine d’être entendu.

F. D

Ewa

Fusion Alstom-Siemens : la Commission européenne donne les raisons de son refus

Pas l’ombre d’un doute. Pour la Commission européenne, la concentration qui « aurait permis à Siemens et à Alstom de mettre en commun leurs activités en matière de matériel et de services de transport dans une nouvelle société exclusivement contrôlée par Siemens, […], aurait porté atteinte à la concurrence sur les marchés des systèmes de signalisation ferroviaire et des trains à très grande vitesse ». Et, déclare Margrethe Vestager, commissaire chargée de la Politique de concurrence, « la Commission a interdit la concentration parce que les parties n’étaient pas disposées à remédier aux importants problèmes de concurrence que nous avons relevés ».

Les griefs

Les griefs portaient sur deux domaines. La signalisation et les trains à très grande vitesse (plus de 300 km/h). La concentration aurait, selon un communiqué publié le 6 décembre par la Commission, créé le « leader incontesté du marché sur certains marchés de la signalisation et un acteur dominant dans le secteur des trains à très grande vitesse. Elle aurait réduit de manière significative la concurrence dans ces deux domaines, restreignant ainsi le choix des clients, notamment les opérateurs ferroviaires et les gestionnaires d’infrastructure ferroviaire, en matière de fournisseurs et de produits ».

Au cours de son enquête, la Commission indique « avoir reçu plusieurs plaintes émanant de clients, de concurrents, d’associations professionnelles et de syndicats. Elle a aussi reçu des observations négatives de plusieurs autorités nationales de la concurrence dans l’Espace économique européen (EEE). »

Pour les systèmes de signalisation, l’opération envisagée « aurait éliminé un concurrent très puissant de plusieurs marchés de la signalisation pour grandes lignes et lignes urbaines ». Alstom-Siemens serait devenu « le leader incontesté sur plusieurs marchés de la signalisation grandes lignes, en particulier en ce qui concerne les systèmes de protection automatique des trains ETCS dans l’EEE et les systèmes d’enclenchement autonomes dans plusieurs Etats membres ». Et, pour les métros, « l’entité issue de la concentration serait également devenue le leader du marché pour les systèmes de signalisation les plus récents de type CBTC ».

Pour les trains à très grande vitesse, l’opération « aurait réduit le nombre de fournisseurs en supprimant l’un des deux principaux fabricants de ce type de trains dans l’EEE ». L’entité issue de la concentration aurait détenu des parts de marché très importantes « tant au sein de l’EEE que sur un marché plus vaste comprenant aussi le reste du monde à l’exception de la Corée du Sud, du Japon et de la Chine (où le secteur n’est pas ouvert à la concurrence). » Cette réduction « aurait porté préjudice aux clients européens. Les parties n’ont avancé aucun argument étayé expliquant en quoi l’opération aurait généré des gains d’efficacité propres à la concentration ».

Alors qu’on lui reproche d’avoir limité ses vues au marché européen la Commission indique avoir, en particulier, « analysé la concurrence qui pourrait être exercée à l’avenir au niveau mondial par les fournisseurs chinois ». Or, « en ce qui concerne les systèmes de signalisation, l’enquête de la Commission a confirmé que les fournisseurs chinois ne sont pas présents dans l’EEE aujourd’hui, qu’ils n’ont à ce jour même pas tenté de participer à des appels d’offres et que, par conséquent, ils ne deviendront pas des fournisseurs crédibles pour les gestionnaires d’infrastructure européens avant très longtemps ». En ce qui concerne les trains à très grande vitesse, la Commission estime qu’il est « hautement improbable que l’entrée de la Chine sur le marché ne constitue une contrainte concurrentielle pour les parties à la concentration dans un avenir prévisible ».

Or, les « mesures correctives proposées par les parties ne permettaient pas de répondre de manière satisfaisante aux préoccupations concurrentielles de la Commission ».

En particulier, en ce qui concerne les systèmes de signalisation grandes lignes, « le remède proposé consistait en une combinaison complexe d’actifs de Siemens et d’Alstom, certains d’entre eux étant transférés en tout ou en partie, et d’autres cédés sous licence ou copiés ». En conséquence, « la mesure corrective proposée ne consistait pas en une activité autonome et pérenne qu’un acheteur aurait pu utiliser pour concurrencer de manière effective et indépendante l’entreprise issue de la concentration ».

Et, en ce qui concerne le matériel roulant à très grande vitesse, « les parties ont proposé de céder soit un train actuellement incapable de rouler à très grande vitesse (le Pendolino d’Alstom), soit une licence portant sur la technologie à très grande vitesse Velaro de Siemens. La licence était soumise à de multiples conditions restrictives et exceptions, qui auraient, pour l’essentiel, fait obstacle au développement, par l’acheteur, d’un train à très grande vitesse concurrent ».

Mesures correctives insuffisantes

La Commission « a sollicité l’avis des participants au marché sur les mesures correctives proposées. Les retours ont été négatifs dans les deux domaines. Cela a confirmé l’analyse de la Commission selon lequel les mesures correctives proposées par Siemens ne suffisaient pas à remédier aux graves problèmes de concurrence ». Aussi la Commission « a-t-elle interdit l’opération envisagée ».

Ewa

Aujourd’hui la restructuration des constructeurs de train, demain la bataille pour les voies ?

Si l’alliance entre Siemens et Alstom représente un bon deal pour les actionnaires, elle permet aussi de constituer un groupe puissant, présent sur tous les segments du marché, du tram au TGV, très fort dans les métros automatiques (il est de loin leader mondial de ce marché) et également leader mondial dans la signalisation. « Dans ce domaine, l’avance sur les Chinois est très importante », estime un industriel français. S’ajoute une belle capacité d’innovation des deux côtés (par exemple les trains à hydrogène qu’est en train de tester Siemens en Allemagne).
A eux deux, leur présence est planétaire : Siemens est fort en Extrême-Orient, en Russie et en Amérique du Nord (où son carnet totalise 400 commandes de tramways, il livre ou va livrer des locomotives diesel et électrique aux Etats-Unis, et fournit des équipements électriques et de sécurité comme le CBTC). Un positionnement plutôt complémentaire avec Alstom, très présent en France bien sûr et en Europe, mais aussi au Proche et au Moyen-Orient et au Maghreb. En Amérique du Nord, le groupe français a récemment gagné des contrats pour fournir des trains à grande vitesse et des trains de banlieue.
Le groupe, qui réalise plus de 15 milliards d’euros de chiffre d’affaires et dispose de trésorerie, affiche aussi une bonne rentabilité financière tournant autour de 6,5 %-7 % (Siemens présente une rentabilité de 8,7 % et Alstom de plus de 5 %).
Reste un vrai problème culturel qui pourrait mettre des années à être résolu, estiment des observateurs : « Il va falloir que les deux groupes apprennent à travailler ensemble, et passer outre leur rivalité qui dure depuis des années. »
Cette alliance poussée par l’apparition du groupe chinois CRRC même si elle était évoquée depuis des années, comme d’autres alliances possibles, n’est sans doute que le début d’un mouvement de restructuration encore plus vaste qui va encore toucher l’ensemble du secteur ferroviaire. Les fournisseurs d’équipement pour les voies et les entreprises de travaux sur les infrastructures pourraient être les prochains touchés. Le mouvement a déjà commencé. Ainsi Vossloh a déjà repris plusieurs entreprises européennes dont Cogifer en France. « En Chine, de vastes regroupements d’entreprises sont à prévoir », estime un industriel. Ce qui pousserait alors encore la concentration dans le secteur. Demain la bataille pour les voies ?

M.-H. P.

Ewa

« Airbus du rail » : la zone d’ombre politique d’une bonne nouvelle, selon Gilles Savary

Ville, Rail & Transports a demandé à Gilles Savary de réagir après l’annonce de la fusion entre Siemens et Alstom. Voici ce que nous a répondu l’ancien député socialiste de la Gironde, rapporteur de la loi
de réforme ferroviaire et de celle sur la sécurité et la fraude dans les transports :

 

« Lancée par une tribune publique de quatre parlementaires français reprise par Alain Juppé, l’idée de création d’un Airbus du rail se profile au moment où l’on ne l’attendait pas.

Comme souvent en matière européenne, à l’instar du traité constitutionnel européen en 2005, cette idée française fait l’objet de vives oppositions et controverses françaises.

En cédant de fait ses « parts optionnelles » dans Alstom Transport à Siemens, l’Etat français est accusé de privilégier une aventure étrangère aux dépens d’un champion français.

S’il est une chose qui n’est pas contestée, c’est la nécessité, et même l’urgence, d’une consolidation d’Alstom Transport face aux géants asiatiques qui pointent leur nez sur le marché européen. Le japonais Hitachi a déjà mis un pied en Europe en absorbant l’essentiel des activités ferroviaires de l’italien Ansaldo et en vendant des trains à grande vitesse à la Grande-Bretagne. Il contrôle désormais l’entreprise de signalisation italienne Ansaldo STS, leader du fameux système de signalisation ferroviaire ERTMS. C’est une entreprise de Hongkong, MTR Corporation, qui a délogé le français Veolia du métro de Stockholm. La fusion des deux opérateurs chinois CSR et CNR, le 30 décembre 2014, en un géant mondial redoutable, déjà très impliqué dans la création d’une prometteuse « Route de la soie ferroviaire » entre la Chine et Hambourg, et qui a mis la main sur les activités ferroviaires du tchèque Skoda, ne pouvait laisser les Européens indifférents. Une fusion entre Siemens et Alstom est infiniment préférable au «  picorage » asiatique d’une industrie européenne en ordre dispersée, et à l’éventualité d’un rapprochement opportuniste entre Siemens et les Chinois. Et s’il faut envisager ultérieurement de prendre pied en Asie, le nouveau groupe européen disposera des moyens d’une telle ambition, qui n’est pas aujourd’hui à la portée de nos « champions nationaux » européens.

Berceau du chemin de fer, l’Europe ne comptait pas moins d’une quinzaine de producteurs de matériels roulants ferroviaires, pour la plupart autocentrés sur leurs étroits marchés domestiques, avant que les industriels asiatiques ne s’y intéressent pour en faire leurs têtes de pont européennes.

Alstom Transport est dans une position intermédiaire un peu paradoxale. Particulièrement dynamique et offensive sur les marchés extérieurs avec un carnet de commandes de l’ordre de 24 milliards d’euros, ses usines françaises quasi exclusivement dédiées au marché intérieur avec une gamme limitée à deux trains, le Régiolis pour les TER et le TGV pour les grandes lignes, sont confrontées à l’épuisement du modèle économique du TGV, et par conséquent de son « droit de tirage » politique sur une SNCF surendettée par l’investissement en LGV, qui a dû de surcroît déprécier plus de 12 milliards d’actifs en 2016 du fait d’un « suréquipement » en TGV.

On ne peut s’empêcher de penser que la fusion Alstom-Siemens procède d’une convergence d’intérêts entre, d’une part, le gouvernement français en recherche de cash dans le cadre de son programme de redressement budgétaire, Alstom dont les pressions sur la commande publique nationale atteignent des limites mises en lumière par l’épisode du « chantage » à la fermeture du site de Belfort, et d’autre part la nécessité de créer un géant européen dimensionné pour affronter la concurrence asiatique qui se profile.

Pour autant, cette opération n’est pas de même nature que la création d’Airbus. D’abord, parce qu’il s’agit d’une opération gigogne d’échange – acquisition d’actions, somme toute classique, et non pas d’un programme intergouvernemental volontariste, sous contrôle stratégique initial des gouvernements. Ensuite parce que de nombreux autres opérateurs européens, et non des moindres comme le français Thales en matière de signalisation, ne sont pas de la partie ! Sans compter les industriels suisses, britanniques, espagnols, roumains, polonais et tchèques qui ne sont pas quantités négligeables. Enfin parce qu’elle intervient dans un secteur industriel à maturité qui ne présente ni les mêmes caractéristiques pionnières, ni les mêmes perspectives de marché que l’aéronautique civile à l’aube d’Airbus.

S’il n’est pas interdit d’espérer que le rapprochement Alstom-Siemens en agglomère d’autres, il est fatal que cette consolidation prometteuse entraîne ultérieurement des restructurations, qui, pour l’instant, demeurent l’angle mort du dossier.

Il n’est donc pas étonnant que cette annonce – qui revient à sortir Alstom de son illusoire cocon colbertiste et à préparer l’industrie ferroviaire européenne à l’agressivité de concurrents asiatiques désormais à demeure sur le marché européen, et à niveau pour lui tailler des croupières sur le marché mondial – fasse l’objet d’interrogations voire de craintes.

Il est en effet très difficile aujourd’hui d’imaginer comment vont se répartir à terme les sites de production, les charges et les emplois du futur groupe, à la différence du « modèle » Airbus qui a constamment veillé à distribuer les plans de charges industriels de façon équitable entre les usines des différents pays du consortium.

Certes l’alternative d’une nationalisation d’Alstom, qui reviendrait à la maintenir à une taille sous-dimensionnée par rapport aux conditions actuelles de la concurrence mondiale, et à enfermer un peu plus ses usines françaises dans un marché domestique saturé (sans compter les clauses de protection contre les entreprises publiques sur les marchés concurrentiels étrangers) procède de la plus pure illusion protectionniste en économie fermée.

Les Anglais comme les Italiens nous ont démontré depuis longtemps que ce n’est pas tant la nature de la propriété qui garantit le mieux le maintien d’entreprises et d’emplois industriels dans nos vieux pays européens, que la capacité des Etats à y créer un climat et un environnement public propices à leur adaptation aux défis de la mondialisation des marchés.

La fusion des activités transports des deux champions européens du ferroviaire est incontestablement une chance pour l’Europe de continuer à figurer au premier plan du vaste marché ferroviaire mondial. Pour être utile à la France, elle devra rompre avec le confinement national, devenu trop étroit, dans lequel Alstom a maintenu ses usines françaises et leurs emplois, et leur faire profiter enfin de ses remarquables performances à l’étranger.

Mais, avouons-le, pour établir un parallèle crédible avec Airbus, il manque cruellement la dimension politique d’un accord industriel européen à ce dossier. »

Gilles SAVARY

Ewa

Siemens et Bombardier pourraient faire trains communs

Bloomberg l’a publié le 11 avril. Selon l’agence d’information économique et financière, Siemens et Bombardier pourraient réunir leurs activités

ferroviaires (construction, signalisation) dans une entreprise commune estimée au bas mot à 10 milliards d’euros. Soit l’addition de Siemens Mobility, évalué par les analystes de la Société Générale à 7,2 milliards d’euros, et de 70 % des cinq milliards d’euros que vaut Bombardier Transport selon Veritas Investment Research Corp. 70 %, car le groupe familial Bombardier a cédé l’an dernier 30 % à la Caisse de dépôt et placement du Québec. Les chiffres d’affaires sont comparables. Pour 2016, Siemens Mobility a réalisé un CA de 7,825 milliards d’euros, et un bénéfice de 678 millions. Bombardier Transport un CA de 7,128 milliards d’euros, et un Ebit de 373 millions.

Les discussions entre les deux groupes seraient bien avancées. Elles auraient commencé au début de 2017 et pourraient conduire à un deal vers le milieu de l’année. Comme il se doit, à Munich (Siemens) et à Montréal (Bombardier), les groupes se sont abstenus de commenter. Les Bourses y ont cru, les actions des deux groupes s’appréciant, tandis que celles d’Alstom fléchissaient.

Cela fait vingt ans qu’on parle de la fusion prochaine de deux des trois grands européens du ferroviaire. En pointant des surcapacités, eu égard au marché. Mais depuis le temps qu’on parle d’Airbus du ferroviaire, les trois « gros » sont toujours là. Et, même, des constructeurs de moyenne importance sont venus les taquiner. Mais, depuis deux ans, on a l’impression que l’heure d’un regroupement a sonné.

C’est la création de CRRC, le 1er juin 2015, du méga chinois né de la fusion de CSR et de CNR, qui force les groupes à l’envisager.

La cession d’Alstom Power à General Electric a donné lieu à des contre-propositions. Siemens tend alors la main à Alstom : créons un Power commun plutôt allemand, et un Transportation plutôt français (mais avec une signalisation nettement allemande…). Ce fut nein à la proposition de Joe Kaser, le patron de Siemens, qui veut créer un groupe capable d’affronter la menace chinoise. Puis Emmanuel Macron, succédant à Arnaud Montebourg au ministère de l’Economie et de l’Industrie, envisage une alliance Alstom-Bombardier. Sans succès. Manquait la troisième combinaison possible. La solution Siemens-Bombardier. La voici avancée.

La situation actuelle des deux groupes est contrastée. Bombardier va mal. Et Siemens va bien. Bombardier, pris à la gorge par les déboires de son aéronautique, a cherché à vendre sa branche transport ou à en ouvrir le capital. Le groupe, sauvé par l’entrée au capital de la Caisse de dépôt et placement du Quebec, a pu repousser une offre de CRRC. Mais, d’un avis général, l’entrée au capital de la Caisse ne faisait que retarder l’heure des échéances. Pour les Canadiens, c’est l’aéronautique qui est centrale. C’est d’ailleurs la branche Transport du groupe, essentiellement européenne, qui doit être la principale victime d’un nouveau plan de suppression de 7 500 emplois dans les effectifs de tout le groupe, d’ici  fin 2018…

En revanche, la rentabilité du Transport de Siemens s’est améliorée ces trois dernières années. Et cette activité fait partie d’un groupe extrêmement puissant, qui approche les 80 milliards d’euros. En toute logique, l’accord, s’il se conclut, devrait accorder une place déterminante au conglomérat allemand. D’autant qu’il est constant dans sa politique de proposition d’alliance européenne.

Si jamais les groupes s’entendent, il faudra convaincre les syndicats qui savent bien que la fusion veut dire casse sociale, dans un contexte difficile pour Bombardier. Et convaincre la Commission européenne qui, jusqu’à présent, a soigneusement évité la création de champion européen, au nom de la concurrence libre et non faussée.

Les temps ont changé. On entend parler de-ci de-là de « protectionnisme européen ». Henri Poupart-Lafarge, le patron d’Alstom, reconnaît que les industriels européens doivent cesser d’être face à leurs concurrents asiatiques « les idiots de la bande ». Le Parlement européen a adopté la résolution de la députée SPD allemande Martina Werner, invitant la Commission à soutenir l’industrie ferroviaire européenne.

Reste qu’il faudra sans doute, si l’opération a lieu, que le nouveau groupe cède des activités en Allemagne, où Bombardier et Siemens sont puissamment implantés. Comme l’est d’ailleurs Alstom. C’est à la faveur de tels regroupements que Stadler a pris son essor. Et c’est un dossier que devrait suivre de près le groupe chinois CRRC, à la recherche d’acquisitions, et qui a du mal à conclure avec Skoda.

Au Canada, la presse est extrêmement attentive à l’affaire Bombardier. Mais ces derniers temps, ce n’est pas la perpective de la fusion avec Siemens qui l’a intéressée. C’est l'augmentation -jugée scandaleuse – que voulaient s’accorder les six principaux dirigeants de Bombardier. 50 % pour 2016 par rapport à l’exercice précédent. Une enveloppe passant de 21,9 millions à 32,6 millions de dollars US. Ils ont foiré la mise en service de leur avion régional, l’argent public les a sauvés. Ils ont considéré qu’ils devaient en être récompensés. Tollé au Canada. Ils ont dû y renoncer, mais provisoirement. L'augmentation interviendrait en 2020.

F. D.

Ewa

« Nexteo, une première en France »

Entretien avec Eric Cazeaux, directeur de la division Mobility de Siemens France

Après avoir remporté les automatismes des lignes de métro 14, 1 et 4 de la RATP, Siemens s’est vu attribuer par la SNCF le système d’exploitation des futurs trains du RER E. Depuis les débuts de Méteor, l’industriel joue un rôle de premier plan dans la modernisation du système de transport en Ile-de-France. Entretien avec Eric Cazeaux, sur les perspectives en France et dans le monde des solutions modernes de mass transit. Ville Rail & Transports. Vous avez créé à Toulouse le centre mondial du Val, tout en gardant les automatismes à Châtillon (voir VR&T n° 582 de décembre 2015 ou ici). N'est-ce pas étrange de séparer automatismes de métro et métros automatiques ?
Eric Cazeaux. Ce sont deux métiers assez différents, qui se complètent. D’un côté, nous fournissons les automatismes aux exploitants, comme la RATP ou la SNCF en France, sans matériel roulant. Et ces automatismes ne sont pas destinés à fonctionner sur un seul type de trains. A titre d’exemples, nos automatismes équipent les trains Siemens à Riyad, mais aussi les trains d’autres constructeurs à Barcelone, à New York, ou encore à São Paulo. Ce que nous cherchons en ce cas, c'est à intégrer harmonieusement nos systèmes à de nombreux trains, à de nombreux enclenchements, à de nombreuses portes palières ou autres systèmes de protection des quais. Cette capacité d'intégration est essentielle ; elle constitue une véritable compétence de nos équipes.
L'approche pour le Val et le Neoval est différente. Il n'y a qu'un seul matériel roulant, un seul enclenchement, un seul poste de conduite ou de supervision, auxquels il faut être intimement intégré. Il ne s'agit pas ici de rechercher de l'ouverture et de la variabilité, mais plutôt de la fermeture, garante de performance et de réduction des coûts.

 

VR&T. Vous espériez que la ligne 18 du Grand Paris Express soit équipée d'un Val. Mais la SGP a fait le choix d'un métro à roulement fer et au gabarit du métro parisien. Qu'en pensez-vous ?
E. C. Je le regrette, mais il y a heureusement d'autres opportunités en France et dans le monde pour le Val ou le Neoval. Voyez notamment l’appel à candidature pour un people mover de cinq stations destiné à l'aéroport de Los Angeles. Il s'inscrit dans une vaste opération de modernisation de cet aéroport, qui est l'un des tout premiers au monde. Il y a d’autres projets à Hongkong, à Londres, en Chine, à Dubaï, dont les appels d'offres ne sont pas encore publiés.

VR&T. Y a-t-il d'autres perspectives que celles des dessertes d'aéroports ?
E. C. Oui, dans les grandes métropoles, et notamment en Chine. Certes, la Chine ralentit, mais elle allait tellement vite qu'elle continue à avancer. Et elle connaît des besoins importants. Il existe une volonté très forte de construire, dans les villes, des feeder lines, qui peuvent être des tramways, des métros légers ou des monorails. Les grandes métropoles qui disposent déjà de réseaux de métro lourd importants avec de longues interstations ont besoin de ces lignes pour rabattre plus facilement les populations des zones denses vers leurs réseaux. Les besoins existent également pour les métropoles de moindre importance qui n'ont pas encore de réseau de métro. Les tramways peuvent répondre à leurs besoins, de même que les monorails ou les métros légers.
Sur le sujet des tramways, la Chine a une approche différente de la France. Le tramway a partout une fonction première qui est de transporter des passagers, mais il a en France deux objectifs secondaires : la rénovation urbaine et l'exclusion de l'automobile par l'occupation de l'espace. La Chine, elle, a besoin de transporter des gens massivement. Les Chinois s'intéressent donc à la performance du système et à sa capacité à ne pas trop occuper la voirie. Car le phénomène de congestion auquel leurs villes sont aujourd'hui confrontées devient létal.

VR&T. Où en est le marché des automatismes de métro ?
E. C. Il s'agit toujours d'une activité assez forte grâce, notamment, à de grands marchés clé en main au Moyen-Orient. Malgré la baisse du cours du brut, les pays de cette région continuent à investir, essentiellement dans des métros sans conducteur de grande et moyenne capacité ainsi que dans des projets d’APM. Spécialistes du métro sans conducteur, nous nous positionnons sur le marché des automatismes.

VR&T. Et en France ?
E. C. L’actualité en France, c’est l'appel d'offres en cours pour la rénovation des lignes B et D du métro de Lyon. En Ile-de-France, nous sommes engagés dans la rénovation du RER E et l’automatisation intégrale de la ligne 4 du métro parisien. Quant au métro automatique du Grand Paris Express, l’appel d’offres vient de sortir pour la ligne 15 Sud.

VR&T. Vous avez remporté Nexteo, le nouveau système d'exploitation des trains conçu pour Eole, qui va équiper le RER 2N NG. Que représente Nexteo ?
E. C. C'est un système qui préfigure ce que seront les systèmes d'exploitation des RER franciliens. Cela concerne donc des longueurs de ligne très importantes et un grand nombre de trains. Nexteo, qui est un CBTC, va apporter aux RER les fonctionnalités des systèmes d'automatismes les plus modernes. Il va les doter des réserves de capacité et d’une possibilité d'absorption des perturbations qu'ils n'ont pas aujourd'hui. Dans les systèmes qui ne sont pas des CBTC, aussi performants soient-ils, en cas de perturbation, la reprise de la marche est assez longue. Le principe du CBTC, avec son canton mobile et déformable, offre une grande souplesse alors qu'un système de cantonnement fixe est beaucoup plus contraignant. Nexteo permettra ainsi de faire passer dans le nouveau tunnel est – ouest 28 trains à l'heure.

VR&T. C'est le système tout entier que vous fournissez et maintenez ?
E. C. Oui, et c'est une véritable nouveauté. Il s’agit d’un marché de conception-réalisation accompagné de deux tranches de maintenance de 15 ans. A ma connaissance, c’est une première dans ce domaine en France.

VR&T. Nexteo, c'est pour toute l'Ile-de-France ?
E. C. Il revient à la SNCF – ou au Stif – de répondre à cette question. Ce que je peux dire, c'est qu'il y a une stratégie Next, et une instance, Nexteo, qui est l'application de Next à l'axe est – ouest. Nexteo est le germe de Next. Ce n'en est pas la fin. Il faudra sans doute des adaptations pour appliquer le système à un axe RER nord – sud car chaque ligne à ses spécificités, mais qui ne nécessiteront pas de recommencer à partir de zéro.

 

VR&T. Avec Nexteo, la SNCF va donc mettre les RER au niveau des métros ?
E. C. Encore faut-il pour cela que le système soit complété. Avec Nexteo nous fournissons un système de supervision de la zone dense. Mais si l'on s'en tenait là, les extrémités, est ou ouest, resteraient encore sous le contrôle de supervisions de zone, à la différence de ce qui se fait à la RATP, où un centre de contrôle unique est chargé de la performance de toute la ligne. Dans la culture ferroviaire nationale qui est celle de la SNCF, l'exploitation se fait par zones, ce qui ne permet pas la gestion dynamique de l'ensemble de la ligne d'un RER. C'est pourquoi SNCF Réseau a prévu d'équiper les extrémités est et ouest, où il n'y a pas Nexteo, d'un ATS, c'est-à-dire d'un système de supervision qui va permettre à la ligne E d'être exploitée comme une seule ligne, et non pas comme des segments traversant des régions. L'appel à candidature pour ce système a été lancé.

VR&T. Le vendredi 22 janvier, la ligne 1 du métro parisien, que vous avez entièrement automatisée avec la RATP, s'est arrêtée pendant plusieurs heures. Que s'est-il passé ?
E. C. J'ai sur ce sujet un devoir de réserve vis-à-vis de notre client, la RATP. Je relèverai simplement qu'il n'y a eu aucun impact sur la sécurité. Toutes les décisions prises par les systèmes ont garanti la sécurité des personnes. Ce qui est fondamental.

 

VR&T. Après avoir automatisé en service la ligne 1, vous avez remporté le contrat pour la ligne 4. Est-ce le même système ? Le même défi ? Quelles différences entre les lignes ?
E. C. Le système CBTC est globalement le même sur les deux lignes. Il a fait ses preuves d’adéquation aux besoins d’exploitation du métro parisien et bénéficie du retour d’expérience de l’automatisation de la ligne 1. Le contrat Paris ligne 4 confirme notre compétitivité et la confiance de la RATP en Siemens pour le passage en sans conducteur d'une ligne existante. Les défis principaux sont les mêmes, notamment la transition douce vers l’automatisation intégrale sans perturbation de l’exploitation pour les voyageurs et l’atteinte immédiate d’excellence en matière de disponibilité et de qualité de service en général. Les différences entre les deux projets portent plutôt sur les conditions de son déploiement : phasage du déploiement du système sur la ligne 4 prenant en compte l’extension de la ligne vers le sud, cohabitation de trois types de trains là où un seul était nécessaire sur la ligne 1, évolution de la réglementation, notamment en matière de cybersécurité.

VR&T. Les automatisations de lignes anciennes constituent-elles un marché important pour vous dans le monde ?
E. C. La rénovation des lignes anciennes vers des technologies modernes à base de CBTC est déjà depuis plusieurs années un véritable marché pour nous en France comme à l'export, suivant la dynamique lancée par Paris et New York à la fin des années 90. L'objectif pour nos clients est avant tout d'augmenter la capacité de transport et la disponibilité de leurs lignes, tout en réduisant leurs coûts de possession. Ainsi la plupart des grandes villes en développement disposant de métros « historiques » engagent ce type de programme de modernisation sur la durée, le plus souvent à l'occasion d'une rénovation complète des flottes de trains.

Propos recueillis par
François DUMONT

 

Ewa

Siemens dévoile le métro de Riyad

C’est en Autriche, dans son usine viennoise de Simmering, que Siemens a présenté pour la première fois le matériel roulant destiné à deux des six lignes du métro automatique de Riyad. En tant que membre du consortium Bacs, qui a remporté les lignes 1 et 2 (soit 64 km des 175 km du futur réseau de la capitale saoudienne), Siemens livrera, outre leurs 74 rames, l’électrification ainsi que la signalisation et les systèmes de communication nécessaires à l’exploitation sans conducteur. Composées de deux caisses (29 rames pour la ligne 2) ou quatre caisses (45 rames pour la ligne 1), en aluminium, ces rames du type Inspiro auront une vitesse maximale de 90 km/h. Elles ont été adaptées aux conditions climatiques de Riyad, avec une climatisation renforcée et une protection des bogies, de la chaîne de traction, des freins et des portes contre l’intrusion du sable.
Le matériel commencera ses essais sur rail à Wildenrath (Allemagne) en mars, alors qu’une rame séjourne dans la chambre climatique du centre d’essais de Vienne-Arsenal (Autriche).

Ewa

« Le centre que nous créons à Toulouse est destiné à servir le marché mondial »

Entretien avec Eric Cazeaux, directeur de la Division Mobility de Siemens France et CEO de l’activité Val.

Eric Cazeaux explique la réorganisation des sites des activités métros de Siemens, le choix
de Toulouse comme siège mondial du Val et les perspectives de développement
de la filiale du groupe international. Ville, Rail & Transports. Comment s'explique la réorganisation des sites de vos activités métros ?
Eric Cazeaux. Nous regroupons toute notre activité concernant les métros automatiques légers de la gamme Val, Cityval et Airval sur un seul site à Toulouse alors qu’aujourd’hui, celle-ci est répartie entre Roubaix, Colomiers et Châtillon. Toutes les équipes matériel roulant, maintenance et services, la recherche & développement, l’ingénierie et la direction de projets seront rassemblées au sein de ce siège à vocation mondiale.
L’activité sur les automatismes de métro, qui occupe la grande majorité des équipes actuelles de Châtillon, va rester à Châtillon, proche de nos clients clés que sont la SNCF et la RATP, et très tournée vers l’international. C’est le centre de compétences mondial de Siemens pour les automatismes de métro.

VR&T. Pourquoi avoir choisi Toulouse pour installer votre centre mondial des métros automatiques légers ?
E. C. Il y a plusieurs raisons à ça. D’abord, comme nous concevons et réalisons des systèmes clés en main, nous avons besoin de compétences proches de celles qu’on trouve dans les systèmes aéronautiques et les systèmes embarqués en général. A Toulouse, il existe un terreau d’écoles d’ingénieur et d’universités qui produisent tous les ans des collaborateurs remarquables dans ce domaine. Ensuite, les PME associées à cet écosystème sont très bien adaptées à nos besoins. L’aéronautique et le spatial ont des problématiques qui ressemblent aux nôtres, avec des petites séries, des durées de vie très longues, des niveaux de disponibilité et de sécurité extrêmement élevés. Confronté à des problèmes similaires aux nôtres, le tissu de PME toulousain a développé des savoir-faire qui nous sont très utiles. D’ailleurs, nous travaillons déjà avec des PME toulousaines comme Nexter ou Actia et avons des consultations en cours avec d’autres.
La troisième raison est que la métropole toulousaine est en forte croissance depuis plus de 20 ans et confrontée à des défis en matière de transports publics qu’on souhaite relever avec eux, dans une démarche de partenariat. Nous y avons construit deux lignes de métro qu’il va falloir développer pour les adapter à l’augmentation de leur fréquentation. Au-delà du métro, Toulouse va avoir besoin d’électrifier ses bus, de gérer sa multimodalité, des domaines pour lesquels nous disposons de compétences significatives. La perspective de réaliser une troisième ligne de métro à Toulouse est attractive, mais ce n’est pas cela qui a motivé notre mouvement.

VR&T. Cette rationalisation des sites est-elle dictée par un faible niveau de commandes en France ?
E. C. Non, ce n’est pas la motivation. Nous connaissons des pics et des creux de charge. Mais aujourd’hui, nous avons passé le creux lié à la faiblesse des commandes des trois à quatre années précédentes. En dehors de Rennes (construction de la deuxième ligne) et de Toulouse (allongement des stations de la ligne A), nous espérons bien pouvoir concourir sur la ligne 18 du Grand Paris avec notre nouveau système Cityval.
Nos bureaux toulousains ont ouvert avec une cinquantaine de personnes. Nous monterons progressivement à une centaine puis à 150 d’ici un an, avec des recrutements. Le site est conçu pour accueillir jusqu’à 200 personnes.
Ce centre que nous créons à Toulouse est destiné à servir le marché mondial qui commence à repartir. Il existe des opportunités dans de grands aéroports comme Los Angeles, Hongkong, Dubaï ou Francfort (projet pour lequel la préqualification est en cours). Des opportunités très importantes de développement de lignes urbaines peuvent également voir le jour en Chine. Dans les dix à quinze prochaines années, les grandes métropoles chinoises vont construire plusieurs centaines de kilomètres de métros légers sur pneus pour densifier leur maillage de transports urbains.

Propos recueillis par
Catherine Sanson Stern

 

Ewa

Premiers voyageurs pour l’Eurostar e320 de Siemens

Ce vendredi 20 novembre, l’Eurostar qui a quitté Londres (Saint-Pancras) à 10h24 pour Paris-Nord était assuré, pour la première fois, par une des 17 rames e320 style= »margin-top: 15px; margin-bottom: 15px; padding: 0px; font-family: arial; font-size: 15px; line-height: 20px; background-color: rgb(255, 255, 255); »>
commandées par l’opérateur transmanche à Siemens. Ce premier voyage, qui devait être suivi par un retour vers Londres dans l’après-midi, ne marque toutefois pas l’entrée en service régulier du nouveau matériel, autorisé le 16 octobre par l’EPSF (Etablissement public de sécurité ferroviaire) sur le réseau ferré national français, puis le 19 novembre par la CIG (commission intergouvernementale) dans le tunnel sous la Manche. Soit la veille seulement de ce premier voyage, dont l’objet était de recueillir les premières impressions des voyageurs en vue d’apporter d’éventuelles améliorations en vue de la mise en service régulier des premières rames e320 en décembre. En mai prochain, les 10 premières rames, qui offrent 20 % de sièges en plus que les rames actuelles et auront le Wi-Fi à bord, devraient être en service sur les relations entre Londres et Paris ou Bruxelles, en attendant de nouvelles dessertes vers les Pays-Bas début 2017.

Ewa

Siemens implante le siège de son activité VAL à Toulouse

Le siège mondial de l’activité de métros automatiques VAL s’installera à Toulouse, regroupant une centaine de salariés éclatés aujourd’hui entre les sites de Châtillon (Hauts-de-Seine), Roubaix (Nord) et Colomiers (Haute-Garonne), a indiqué la direction de Siemens le 9 novembre. « A Toulouse seront progressivement réunies les activités de recherche & développement, d’ingénierie, de direction de projets et de maintenance liées aux projets clés en main de métros automatiques de la gamme Val, Cityval et Airval », a précisé Eric Cazeaux, directeur de la division Mobility de Siemens France. Le centre de compétences pour les automatismes de métros sans conducteur, qui emploie 400 personnes environ, restera basé à Châtillon.
Une cinquantaine de salariés a déjà pris possession d’une partie des 10 000 m² de locaux réaménagés dans le quartier de Basso-Cambo, au sud-ouest de Toulouse, non loin du siège de Tisséo, qui gère les transports urbains de la Métropole toulousaine, et de Nexter Electronics, à qui Siemens a confié en avril dernier la réalisation d'équipements électriques pour la future ligne B du métro de Rennes.
En faisant le choix de Toulouse, dont les élus ont décidé la construction d’une troisième ligne de métro, Siemens « s’appuie sur une filière industrielle toulousaine à la pointe sur les systèmes embarqués, comprenant de nombreuses PME avec qui nous sommes déjà en partenariat, comme Nexter Electronics ou Actia (qui travaille sur les automatismes du métro de New York) et sur un important vivier universitaire », explique Hervé de Lacotte, directeur de la Communication de Siemens Mobility.    

Catherine Sanson-Stern