L’observatoire mis en place par l’Arafer, l’autorité de régulation du secteur, dresse un premier bilan de la libéralisation du transport longue distance par autocar. L’offre, qui s’étend sur tout le territoire, s’est mise en place très rapidement mais la demande reste concentrée sur quelques liaisons… « Il est important que chacun connaisse l’état du marché et que les responsables politiques puissent disposer d’éléments d’information fiables pour ensuite pouvoir prendre les bonnes décisions », a expliqué Pierre Cardo, le président de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), qui présentait le 21 mars le premier bilan de la libéralisation du transport longue distance par autocar permise par la loi Macron.
Ce bilan, établi par l’observatoire des transports et de la mobilité sur les six premiers mois de la libéralisation, montre que, à la fin décembre, 148 lignes d’autocar étaient proposées et 136 villes desservies, de toutes tailles. « Le maillage s’est rapidement constitué », commente Nicolas Quinones-Gil, responsable de l’observatoire, même si, reconnaît-il, « Paris et Lyon sont les deux villes où les voyageurs se voient proposer le plus de destinations possibles ». En effet, même si le réseau s’étend sur 76 000 kilomètres, la demande reste concentrée sur quelques liaisons, notamment celles baptisées Top 10 par l’observatoire et qui concentrent 51 % du nombre total de passagers transportés, la plupart au départ ou à l’arrivée de Paris (voir la carte).
Les 6 opérateurs qui se sont pour le moment positionnés sur le marché (Ouibus, Isilines, Eurolines, Flixbus, Megabus, Starshipper) se font concurrence sur 197 liaisons, soit sur près de 30 % de l’offre. Curieusement, la seule liaison qu’ils proposent tous Paris-Angers. Et ils sont encore 5 à se concurrencer sur Paris-Lille, Paris-Lyon et Paris-Rennes.
Sur le créneau des liaisons de moins de 100 kilomètres, qui doivent faire l’objet d’une déclaration auprès du régulateur, 121 liaisons avaient été notifiées à l’ ARAFER au 21 mars 2016. Si les régions estiment que ces lignes peuvent entrer en concurrence avec les services TER qu’elles subventionnent, elles peuvent saisir l’ARAFER pour demander soit une interdiction, soit une limitation. A condition qu’elles puissent démontrer que le service d’autocar porte une atteinte substantielle aux liaisons TER.
28 liaisons ont déjà fait l’objet de saisines de la part des AOT et l’Arafer a pour le moment rendu deux avis favorables et 4 défavorables. Quatre liaisons de moins de 100 km étaient commercialisées à l’heure où nous mettions sous presse, mais une cinquantaine pourrait l’être suite à l’expiration du délai de saisine.
« A quoi répondent ces liaisons ? A une offre qui n’existe pas ? Ou bien à des heures où ne circulent pas de TER ? » , s’interroge Anne Yvran-Billon, la vice-présidente de l’Arafer qui indique qu’il faudra attendre de connaître les informations collectées sur le ferroviaire, en juin 2016, pour commencer à avoir des réponses.
Pierre Cardo assure d’ores et déjà que le public visé n’est pas le même. « Les prix proposés par les autocaristes sont très bas. Ils ne visent pas les mêmes voyageurs que les TER mais cherchent à attirer une clientèle nouvelle, d’occasionnels ou de voyageurs disposant d’un faible budget mais de plus temps comme les étudiants par exemple». Selon lui, « la concurrence directe avec les TER n’est pas évidente. Elle l’est sans doute plus avec les trains d’équilibre du territoire ». Les cars sont aussi en concurrence avec les TGV si l’on se base sur le top 10 des destinations par autocar.
L’observatoire de la mobilité publiera chaque trimestre un bilan détaillé du marché du transport par autocar. Complété par des analyses similaires dans le secteur du ferroviaire, il permettra, précise le gendarme des activités terrestres, « de pouvoir présenter une analyse de la concurrence intermodale (train, autocar, covoiturage) ».
Marie-Hélène Poingt