« Pour la première fois depuis 2012, les voyageurs sont de retour dans les TER. Notamment les clients occasionnels, c’est-à-dire ceux qui nous avaient le plus tourné le dos », se réjouit Frank Lacroix. Le directeur général TER à SNCF Mobilités annonce une hausse de trafic de 1,8 % sur les 5 premiers mois de l’année par rapport à la même période de 2016. Et des recettes en augmentation encore plus rapide : +3,8 %. Enfin, les charges ont été maintenues au même niveau qu’en 2015.
Selon Frank Lacroix, les premiers résultats du plan de relance annoncé il y a neuf mois, CAP TER 2020, commencent à se faire sentir. « C’est la conséquence de tout ce qui a été lancé dans nos 11 régions TER. Nous avançons vite », ajoute-t-il.
L’enjeu est important. Souvent mise en cause pour ses coûts élevés et son manque de transparence, la direction TER renégocie en effet cette année 60 % de son activité, dans le cadre des renouvellements des conventions avec les régions (l’Occitanie, les Pays de la Loire, l’Auvergne-Rhône-Alpes, la Bourgogne-Franche-Comté ou encore la Normandie).
« Dans les conventions, nous nous engageons à augmenter le nombre de voyageurs et nous nous engageons aussi sur la productivité du service. En cas de non-respect, les sanctions seront plus lourdes qu’avant. Et nous nous engageons à diminuer le coût supporté par les régions, alors qu’historiquement ce coût augmentait », énumère Frank Lacroix. Selon lui, 90 % des leviers permettant d’atteindre en 2020 les objectifs ont été identifiés.
Ainsi, depuis avril 2016, les effectifs ont été réduits de 7 %. La décroissance des effectifs va se poursuivre (27 000 personnes aujourd’hui employées aux TER). « En 2018, on comptera moins d’établissements et tous nos établissements seront multimétiers. Pour moi, l’interface entre nos différents métiers est majeure », précise Frank Lacroix. L’objectif est de réduire de 20 % les frais de structures d’ici à 2020.
Le patron des TER a aussi fixé l’objectif d’abaisser d’un tiers le coût de la fraude qui représente un manque à gagner de 100 millions d’euros chaque année pour cette activité. Des équipes mobiles de contrôle ou des brigades mixtes d’intervention avec la Suge ont été mises en place. Elles peuvent intervenir à l’embarquement, au débarquement ou à bord des trains de façon aléatoire. « Partout où elles passent, la fraude recule de 25 % », affirme Frank Lacroix. Le contrôle automatique des billets va aussi être déployé comme la SNCF le fait pour ses TGV. Ce sera le cas à la fin de l’année à Marseille-Saint-Charles. D’autres régions suivront en 2018, en commençant par les Hauts-de-France et le Centre-Val de Loire.
Côté exploitation, les offres ont été standardisées et trois solutions de transport sont désormais systématiquement aux régions : soit des TER Chrono pour les liaisons rapides, soit les TER Proxi (pour proximité), soit les TER Citi pour les lignes les plus chargées.
Pour mieux gérer le matériel roulant à l’origine de 15 % des retards. Un classement par niveau d’incidents a été établi pour trouver des solutions. Un exemple : une équipe technique dédiée a été mise sur pied en Provence-Alpes-Côte d’Azur, ce qui a déjà permis de diviser par deux les impacts des incidents.
Globalement, les trains qui étaient en irrégularité chronique au nombre de 209, sont passés à 141. Soit une baisse de 20 %. « Le taux de réalisation de l’offre a progressé et la ponctualité s’améliore : l’irrégularité a baissé de 10 % par rapport à l’année précédente. C’est extrêmement encourageant », commente le directeur général. Pour fiabiliser l’exploitation et éviter à l’avenir la mauvaise surprise de manquer de conducteurs comme c’est arrivé l’année dernière, les capacités de formation ont été doublées. « Alors que la SNCF disposait de quatre centres de formation, elle a créé 25 écoles décentralisées. Et au début 2017, nous avons lancé un Mooc. Nous sommes ainsi passés de 600 conducteurs formés à 1 200 », résume Frank Lacroix.
A partir de l’année prochaine, les Intercités repris par les régions seront intégrés au réseau des TER. « Les régions attendent de la productivité. Cela exige un travail de reconstruction de l’offre qui s’appuiera sur notre nouvelle segmentation ».
Autre perspective, l’ouverture à la concurrence est théoriquement prévue en 2023, peut-être plus tôt si une loi décidait de l’anticiper. Certaines régions veulent pouvoir la tester dès que possible, comme le Grand Est qui a prévu un avenant sur ce thème dans le contrat signé à la fin de l’année dernière. Tout cela nécessite d’avancer vite.
M.-H. P
Multimodalité et digitalisation
Dans le domaine de la multimodalité, la SNCF a lancé plusieurs expérimentations avec Gares & Connexions, proposant par exemple la location de vélo en libre service, à la demi-journée ou plus, avec retour sur la borne d’origine et à un prix compétitif comprenant le voyage en TER. Ou encore l’auto-stop « participatif » en milieu rural avec des arrêts prédéfinis.
Pour simplifier les déplacements des voyageurs, il est désormais possible d’acheter la quasi-totalité de l’offre TER en billets électroniques. Les voyageurs peuvent aussi gérer leurs abonnements annuels sur le site de la SNCF, ce sera le cas pour les abonnements mensuels avant la rentrée scolaire.
Des portails régionaux ont été développés sur voyages-sncf.com (appelé à devenir ouisncf.com fin novembre) pour présenter les attraits touristiques des régions et animer ainsi le marché des TER. L’objectif est de vendre à l’avenir la moitié des titres de transport via Internet.
« Le digital n’est pas l’ennemi de l’humain », assure Frank Lacroix qui propose de nouvelles initiatives : déploiement d’outils de vente mobile (les agents se déplacent pour vendre des titres en dehors des guichets) ou future expérimentation du guichet mobile pour promouvoir le TER (les agents partent à la rencontre des clients sur les marchés, campus…). Enfin, le distributeur de billets avec webcam intégré, permettant l’intervention et l’aide d’un agent en cas de besoin, sera développé dans les gares où le trafic voyageurs est trop faible pour nécessiter un guichet en permanence.
Le car mis au standard du train
La SNCF n’oublie pas son offre de transport par car, jusqu’alors « parent pauvre du TER », qui représente 15 % de l’offre. D’autant que les liaisons par car devraient se développer puisque les régions excluent de moins en moins de transférer sur route certaines liaisons ferrées peu fréquentées. « Le car va être mis au niveau du train », annonce Frank Lacroix. Parmi les améliorations prévues, le e.billet, déjà disponible pour emprunter les TER, sera proposé pour les trajets en car à partir de juillet. De même que la vente de billets à bord, actuellement possible que si on dispose de pièces, pourra à se faire avec une carte bleue à partir d’octobre. Enfin, les cars seront géolocalisables grâce à l’appli LocaliTER.