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Ewa

Transdev lance un groupe de réflexion sur la mobilité et la transformation urbaine

Transdev a annoncé le 6 juillet le lancement de « The Mobility Sphere », un groupe de réflexion sur la mobilité et la transformation urbaine. Il sera dirigé par Thierry Mallet, le PDG du groupe, et par Antoine Grange, le directeur général Europe, avec François Gemenne, expert en géopolitique de l’environnement et auteur pour le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) en tant que conseiller scientifique.

Une plateforme en ligne va être ouverte et un premier forum organisé le 4 octobre à Amsterdam avec plus de 150 experts sur le thème « Mobilité décarbonée, mobilité pour tous : quel avenir voulons-nous pour nos déplacements ? »

Ewa

Les promesses intenables du véhicule autonome

C’est à un travail de critique radicale que vient de se livrer la Fabrique Ecologique, à la demande du Forum Vies Mobiles. Critique du véhicule autonome, mais surtout du discours accompagnant sa naissance, à vrai dire sans cesse retardée. Mais si l’objet n’est pas encore parmi nous, les fées sont autour du berceau. Et l’on nous promet une mobilité enfin décarbonée, de territoires isolés accessibles à tous, les tout petits et les très vieux, ou la métamorphose d’un temps contraint en un temps de liberté sans frontières. D’où le travail salutaire, d’entretiens et d’étude de la littérature grise et savante sur le sujet, pour tenter d’évaluer ce qui tient le coup… ou pas.

De toutes ces promesses, la plus lourde, c’est la décarbonation. Or, ne serait-ce que pour une bête raison de calendrier, comme le véhicule autonome de niveau 5 (électrique évidemment) ne pourra être déployé avant 2040 ou 2050, alors que la mobilité aura dû être décarbonée, la part qu’il y jouera sera quasi nulle. Mais ce n’est peut-être pas l’essentiel. Il n’est pas sûr que l’autonomisation, à quelque moment qu’elle arrive, soit un outil de la transition écologique. « Alors que le discours des pouvoirs publics et des industriels sur le véhicule autonome met en avant les vertus écologiques qui lui sont associées, de nombreuses études insistent au contraire sur l’incertitude concernant les performances écologiques de la mobilité autonome, et sur le fait que cette dernière pourrait au contraire dégrader fortement le bilan carbone des transports.  » On en connaît les possibles raisons : avec la mobilité plus facile, on risque un effet rebond, d’autant plus gênant que l’étalement urbain pourrait s’en trouver accentué. Le rapport de 2018 de Anne-Marie Idrac (pas vraiment une Amish) le pointait : « cette amélioration pourrait générer une augmentation de la congestion pour les trajets pendulaires domicile-travail et/ou un renforcement de l’étalement urbain ». Autre motif d’inquiétude : la consommation d’énergie nécessitée par les radars, lasers, lidars ou logiciels. Tout en nécessitant, autre question, des coûts énormes d’adaptation de l’infrastructure pour que de tels véhicules puissent fonctionner, à  commencer par le marquage au sol.

Pourquoi y aller alors avec enthousiasme ? Il n’y a pas à chercher bien loin. « La  France a un rôle à jouer en matière de construction automobile à échelle mondiale. Ainsi, l’un des objectifs premiers semble être de vouloir maintenir l’industrie automobile française à flots ». Il en va de même pour toute l’Europe : « En considérant la place occupée par l’industrie automobile à l’échelle européenne, on comprend l’importance pour l’Union de se positionner comme leader du véhicule autonome. D’après l’Association des Constructeurs Européens Automobiles (ACEA), le secteur de l’automobile emploie 14,6 millions de personnes en Europe, soit 6,7 % de l’emploi total et a généré un excédent commercial de 74 milliards d’euros en 2019 ».

Les Etats ou les entreprises qui n’auront pas développé de technologies numériques vont devoir payer des rentes. Les entreprises classiques de l’automobile risquent gros, face à l’offensive des Gafam ou assimilées qui investissent actuellement des milliards de dollars sur la nouvelle technologie. Elles viennent avec leurs logiciels, leur cartographie à haute définition, elles préparent les futurs services. « La place du numérique dans les mobilités actuelles a permis à de nouveaux acteurs de rentrer sur le terrain, en modifiant les rapports de force. En effet, à l’heure actuelle, l’équipement représente 80 à 90 % de la valeur d’un véhicule, tandis que le logiciel pour le véhicule de niveau 1 ou 2, ne représente que 10 à 20 % de la valeur.  Or,  certaines études estiment que la valeur de l’équipement pourrait chuter à 40 % de la valeur, celle du logiciel représenterait 40 % du véhicule, et le contenu pourrait représenter 20 %. »

N’y aurait-il aucune utilité ? Si,  mais ce qu’on observe en France tient d’une promotion pas trop convaincante. « En effet, le discours officiel sur la mobilité autonome met en avant la mobilité partagée au service des territoires ruraux. En pratique, sur les seize expérimentations étudiées, une seule concerne véritablement un territoire rural et présente un potentiel d’inclusivité. »

Cela dit, si l’on a de bonnes raisons de se méfier des effets redoutables de futurs robots taxis (ou de véhicules de fret qui ne relèvent pas de cette étude, mais on sait qu’Amazon est très intéressé), ne peut-on pas espérer quelques bienfaits de futures navettes avançant en peloton sur autoroute ? Comme celles proposées, par exemple, dans la récente consultation internationale sur les Routes du Grand Paris ? Là encore, oui  et, même : « les hypothétiques vertus du véhicule autonome semblent se limiter au seul usage collectif de navettes ». Mais les Gafam qui investissent énormément pour le développement du véhicule autonome attendent un retour. Ce ne sont pas quelques centaines ou milliers de navettes qui vont l’assurer. Elles auront l’avantage de verdir un peu l’opération et d’en faire l’aimable publicité. Mais le retour sur investissement ne viendra que du marché automobile dans sa globalité.

On regrettera dans l’analyse qui nous est proposée quelques facilités. Une fois qu’on a avancé la somme de 80 milliards de dollars d’investissements dans le développement pour le véhicule autonome (publics et privés, tous pays confondus), et souligné que le montant très élevé n’est pratiquement que de la R&D, dire que « par comparaison, le fonds national visant à soutenir le développement de pistes cyclables dans les collectivités est doté d’un budget de 350 millions d’euros sur 5 ans  »  est quand même un peu saugrenu.

Mais dans l’ensemble, l’opération est salutaire. L’analyse que les deux Think tank présentent aide à ne pas prendre des vessies pour des lanternes. Christophe Gay (Forum Vies mobiles) invite à parier sur les vertus de la low tech et au développement de véhicules simples, peu couteux à l’achat comme à l’usage, évidemment peu polluants et peu émetteurs de gaz à effet de serre. L’appel à un débat, dans lequel on partirait des besoins avant de se précipiter sur les solutions gentiment proposées est on ne peut plus fondé. Cela ne veut pas dire qu’il sera entendu.

F. D.

Forum Vies Mobiles, La Fabrique Ecologique. Le véhicule autonome : quel rôle dans la transition écologique

Le Forum Vies Mobiles est un Think Tank soutenu par la SNCF

La Fabrique Ecologique se présente comme un « Think et Do-Tank » pluraliste, qui a pour objet de promouvoir l’écologie et le développement durable sur la base de propositions pragmatiques et concrètes.